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Échocardiographie

Publié le 14 déc 2015Lecture 16 min

L’échographie des patients sous chimiothérapie

C. SZYMANSKI, Service de cardiologie, CHU Amiens Sud

Le cancer constitue un véritable fléau et représente un enjeu majeur de santé publique. Sa prise en charge repose sur un arsenal thérapeutique de plus en plus performant et administré selon des protocoles utilisant des chimiothérapies lourdes et complexes(1,2). Leur efficacité croissante a permis d’améliorer et de guérir des pathologies considérées auparavant comme incurables. Ainsi, le nombre de patients survivants a augmenté ces dernières années avec environ 12 millions de survivants de cancers aux États-Unis. Le prix à payer de ce progrès thérapeutique est celui d’une importante cardiotoxicité liée aux effets secondaires des traitements anticancéreux. L’allongement de la survie des patients les expose à la survenue parfois tardive de complications cardiovasculaires(3). Le dépistage et la prévention de cette cardiotoxicité sont basés sur l’échocardiographie.

La fraction d’éjection ventriculaire gauche est parfois le seul paramètre demandé en routine mais sa diminution est souvent tardive et peu sensible à un stade précoce. L’objectif de cette évaluation échocardiographique sera de détecter précocement cette cardiotoxicité afin d’éviter sa progression vers la dysfonction systolique ventriculaire gauche et l’insuffisance cardiaque, d’adapter les traitements anticancéreux et de mettre en oeuvre des traitements susceptibles de corriger ou d’atténuer les effets de cette cardiotoxicité.   Cardiotoxicité des chimiothérapies   Les drogues utilisées en chimiothérapie ont peu d’effets sur les cellules à division rapide avec une restitution complète et une faible toxicité au long cours. A contrario, pour les cellules myocardiques ayant une faible capacité à se restituer, les effets toxiques peuvent être transitoires ou permanents à l’origine de cardiomyopathies. Ces effets incluent les troubles du rythme supraventriculaires ou ventriculaires, l’ischémie et la nécrose myocardiques, la dysfonction cardiaque, avec, à long terme, le développement d’une cardiomyopathie. L’utilisation des anthracyclines(4) est à l’origine de la survenue d’une dysfonction cardiaque dosedépendante chez environ 4 % des patients pour une dose cumulative de 500-550 mg/m2, et chez plus de 36 % des patients en cas de dose ≥ 600 mg/m2(5,6). L’utilisation d’autres chimiothérapies (cyclophosphamide, taxanes, trastuzumab) et/ou de radiothérapie médiastinale, la présence d’autres facteurs de comorbidité (enfants, sujets âgés, coronaropathie, cardiopathie sous-jacente) potentialisent cette cardiotoxicité(5). L’incidence de l’insuffisance cardiaque symptomatique est fonction de la dose administrée au patient(6). Cette toxicité cardiaque se manifeste d’abord par une altération diastolique de la fonction ventriculaire gauche pour des doses cumulatives de doxorubicine de 200 mg/m2, puis par une atteinte de la fonction systolique à partir de 450-600 mg/m2. La dysfonction systolique, lorsqu’elle atteint le seuil classique d’une diminution de plus de 20 % de la fraction de raccourcissement expose au risque de progression d’insuffisance cardiaque et de survenue de signe clinique d’insuffisance cardiaque(5,6). Le cut-off de 450 mg/m2 à partir duquel l’incidence de l’insuffisance cardiaque devient symptomatique incite à l’arrêt de la chimiothérapie, à moins de disposer de solides arguments pour poursuivre une chimiothérapie. Les doses prescrites actuellement sont bien en deçà des 450 mg/m2. L’enjeu va donc être de dépister très précocement cette toxicité, chez des patients recevant environ 240 mg/m2, et ce d’autant, qu’à ces doses, la majorité de ces événements sont asymptomatiques. Par conséquent le rôle du cardiologue sera d’abaisser le seuil de détection parce que les doses utilisées sont inférieures aux doses réputées toxiques et l’objectif sera de dépister des événements essentiellement asymptomatiques.   Dépistage de la cardiotoxicité   Fonction systolique et diastolique ventriculaire gauche Dans les recommandations(7), l’échocardiographie est l’examen de première intention. Cet examen a pour objectif d’étudier la fonction systolique et diastolique du ventricule gauche (VG), la fonction systolique du ventricule droit, l’évaluation valvulaire et péricardique. L’altération des indices Doppler de fonction diastolique sont les premiers paramètres atteints et représentent un signe précoce de dysfonction ventriculaire gauche(8,9). Survenant dès la dose cumulative équivalente de 200 mg/m2 de doxorubicine, ils précèdent habituellement l’atteinte de la fonction systolique (> 450 mg/m2). Dans une étude incluant 26 patients traités par anthracyclines, les anomalies de la fonction diastolique sont apparues très précocement après le début du traitement, avec une altération de la relaxation, une diminution du rapport E/A, un ralentissement de la décroissance de l’onde E transmitrale, un allongement du temps de relaxation isovolumique avant la diminution de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG)(9). La diminution de la FEVG est le paramètre le plus répandu dans le dépistage de la dysfonction myocardique chez les patients sous ou ayant été traités par anthracyclines. La mesure de la FEVG s’effectue par la méthode de Simpson biplan en coupes apicales 4 et 2 cavités permettant d’accéder à la fois aux volumes télédiastolique et télésystolique du VG et d’obtenir la FEVG globale. Cette mesure peut être éventuellement associée au calcul du score segmentaire (Wall Motion Score Index). Il convient de conserver la même méthode avant l’instauration du traitement et durant tout le suivi, avec si possible, un enregistrement des boucles vidéos de façon à les comparer, en particulier si les opérateurs diffèrent d’un examen à l’autre. Cette technique est charge-dépendante ; paramètre à prendre en compte en raison des modifications de pré- et post-charge liées aux complications de la chimiothérapie (nausées, vomissements, diarrhées, solutés de réhydratation). Dans une étude(10) incluant 51 patients d’âge moyen 50 ans, suivis après chimiothérapie par anthracyclines, il a été mis en évidence 26 % de cardiotoxicité définie par une FEVG < 50 %, avec peu de patients développant une insuffisance cardiaque clinique. Avant traitement, la FEVG était de 63,9 % ; à la fin du traitement, la FEVG était de 59,1 %. La mesure de la FEVG « précoce » réalisée à 2 mois, était de 62 %, c’est-à-dire une variation globale de l’ordre de 2 %. Le cut-off proposé dans cette étude pour définir une cardiotoxicité tardive, était une variation de la FEVG de 4,8 % en méthode Simpson biplan. La reproductibilité d’une telle variation de la FEVG apparaît comme une des limites de cette mesure dans le suivi de ces patients. La variabilité intra- et interobservateur, même en imagerie d’harmonique avec des appareils de bonne qualité, varie entre 4 et 8 %, qui correspond au cut-off pour l’évolution de la FEVG. L’échocardiographie bidimensionnelle peut donc paraître insuffisamment performante pour détecter des différences de FEVG qui sont < 10 %. Même si ces études permettent de dépister de telles différences à l’échelle « populationnelle » pour définir un cut-off, à l’échelle individuelle chez un patient donné, la seule évaluation de la FEVG biplan peut paraître insuffisante. En prétraitement, la FEVG conditionne, en partie, le type et la dose de la chimiothérapie, la durée du traitement et la fréquence des surveillances. Au cours du traitement, l’atteinte myocardique s’accompagne d’une détérioration de la FEVG qui est associée à la survenue de symptômes d’insuffisance cardiaque(11). Un ajustement thérapeutique carcinologique et cardiologique permet une stabilisation voire une récupération de la FEVG. Le seuil de diminution permettant de prédire la survenue d’insuffisance cardiaque est variable suivant les études. Les recommandations(7) suggèrent un arrêt des anthracyclines en cas de diminution de plus de 10 % de la FEVG entre 2 examens ou si la FEVG est < 53 %. Lorsque la FEVG est normale, une échocardiographie est réalisée avant une dose cumulative de 300 mg/m2 d’anthracyclines, puis 450 mg/m2 puis systématiquement au-delà de ces doses. En cas de FEVG modérément altérée, l’échocardiographie est à réaliser avant chaque cure. Au décours du traitement, la vigilance doit être renforcée an raison de l’apparition invariablement dans l’année qui suit ou très tardive de la cardiomyopathie avec une diminution tardive de la FEVG associée à une réponse partielle au traitement cardiovasculaire(12). Même en présence d’une FEVG normale, l’incidence à 10 ans de la survenue de dysfonction systolique VG est multipliée par 4 après chimiothérapie par anthracyclines. La mesure de la FEVG en échocardiographie conventionnelle est un paramètre modérément sensible et peu discriminant à la détection de la dysfonction cardiaque et incite à recourir à des indices précoces et prédictifs d’une altération de la fonction systolique. Cependant son utilisation fait partie intégrante des recommandations(7).   Échocardiographie en mode Doppler tissulaire L’échocardiographie en mode Doppler tissulaire est un bon outil descriptif. Il existe une altération des paramètres de Doppler tissulaire : l’onde S, l’onde E, l’onde A, l’onde e’. Aucun de ces paramètres pris isolément ou en combinaison n’est prédictif de la dysfonction ventriculaire gauche qui survient dans 30 % des cas(10). Le Doppler tissulaire servirait davantage à décrire une altération sans être prédictif de la dysfonction VG. Dans l’ensemble des études qui ont évalué le Doppler tissulaire pour prédire la dysfonction VG, les doses sont nettement inférieures au 450 mg/m2 et pourtant aucun n’était prédictible de la dysfonction VG à terme.   Échocardiographie de stress L’échocardiographie de stress à la dobutamine peut être utilisée dans la détection des atteintes ventriculaires gauches infracliniques induites par la chimiothérapie. Quarante-neuf patientes traitées pour un cancer mammaire avaient bénéficié d’une échocardiographie à la dobutamine après les 3 premiers cycles, respectivement à 1, 4 et 7 mois après l’arrêt du traitement(13). L’évaluation de la FEVG au cours des premiers cycles ne mettait pas en évidence de différence entre ceux qui développent ou pas une cardiotoxicité. Néanmoins, il existait une différence précoce en termes de réserve contractile et de pic de FEVG : au 3e mois, le pic de FEVG était inférieur et la réserve contractile était moindre dans le groupe de patientes qui développent une cardiopathie. Ces données confirment une atteinte infraclinique du VG alors que la FEVG biplan est insuffisante pour la détecter. L’échocardiographie d’effort peut mettre en évidence une atteinte ventriculaire gauche précoce. Dans une étude portant sur 23 adultes ayant survécu de leucémie aiguë après traitement par anthracyclines administré avant la puberté, une diminution de la FEVG à l’effort était observée chez 10 patients(14).   Échocardiographie de contraste Les limites de reproductibilité de la FEVG peuvent inciter à l’utilisation de produits de contraste. Au cours du suivi de ces patients exigeant une mesure précise de la FEVG, si 15-20 % d’endocarde VG est mal visualisé, les recommandations(15) préconisent le recours à l’échocardiographie de contraste. Cela concerne environ 15-20 % des patients où l’imagerie bidimensionnelle n’est pas suffisamment performante pour une estimation fiable de la FEVG. L’utilisation de l’échocardiographie de contraste permet d’améliorer sensiblement la variabilité inter- et intra-observateur de même que la faisabilité de la mesure de la FEVG(16). L’avantage de cette modalité est que l’utilisation du contraste ne sous-estime pas les volumes télédiastoliques et télésystoliques du VG.   Échocardiographie tridimensionnelle Le consensus d’experts(7) recommande d’utiliser idéalement l’échocardiographie 3D même si cette technique n’est pas réalisée en routine, puisque l’utilisation de la modalité 2D limite la détection des faibles variations de la FEVG. Dans une étude(17) incluant des patients suivis en échocardiographie 3D couplée à l’IRM qui est le gold standard dans l’évaluation de la FEVG, la prévalence de la cardiotoxicité était de 32 % avec 11 % des patients qui avaient une FEVG < 50 %. Dans une étude(18) comparant l’échocardiographie à l’IRM, les auteurs montrent une faible corrélation (r = 0,31 à l’état de base, r = 0,42 à 12 mois) entre l’échocardiographie 2D et l’IRM pour la mesure de la FEVG. Quand on compare l’échocardiographie 3D à l’IRM, la scintigraphie myocardique à l’IRM ou la scintigraphie à l’échocardiographie 3D, cette corrélation est bien meilleure (r = 0,90 à l’état de base, r = 0,91 à 12 mois). Dans une étude(19) de reproductibilité, comparant l’échocardiographie 3D à l’échocardiographie 2D en mode Simpson biplan, en mode Simpson « triplan » (en apicale 4, 2 et 3 cavités), le contraste n’améliorait pas le calcul de la FEVG en raison d’une radiothérapie associée, d’une mastectomie de cancers du sein rendant les fenêtres difficilement accessibles. L’échocardiographie 3D était largement supérieure aux autres modalités. La variabilité de la FEVG était de 9,2 % en mode biplan ; elle diminuait de moitié, estimée à 5,6 % en mode 3D avec une diminution de la variabilité de la mesure. L’évaluation de la FEVG en mode 3D nécessite des mains expertes dans la mesure avec une bonne qualité d’images.   Les paramètres de déformation Bien que la FEVG soit le paramètre le plus utilisé, sa valeur pronostique est controversée. L’étude de la déformation a ici toute sa place. Les paramètres de déformation myocardiques (strain) et la vitesse de cette déformation (strain rate) reposant sur la physiopathologie des fibres myocardiques constituent des méthodes de dépistage plus rapides et plus sensibles que la FEVG, de l’altération de la fonction myocardique. Les fibres myocardiques ont une architecture et une contraction complexes : fibres longitudinales (sous-endocardiques et sous-épicardiques), radiales (médiopariétales) et circonférentielles. Les avantages du speckle tracking par rapport au Doppler tissulaire sont la bonne résolution spatiale, l’absence d’angle-dépendance, le bon rapport signal/bruit, la rapidité d’utilisation et une bonne reproductibilité. Cette technique dépend néanmoins de la qualité de l’image, de la nécessité d’une cadence importante de l’image. Elle permet de mettre en évidence une atteinte infraclinique et donne accès à un diagnostic précoce d’anomalies subtiles de fonction systolique régionale, avant modification de la FEVG, parfois même avant l’apparition d’une dysfonction diastolique. De nombreuses études ont utilisé les paramètres de déformation chez des patients traités par chimiothérapie. La plupart d’entre elles montrent que ces paramètres diminuent avant l’altération de la FEVG. Même si cette atteinte touche les 3 composantes de la déformation myocardique — radiale, circonférentielle et longitudinale — c’est la déformation longitudinale qui est la plus utilisée en raison de sa meilleure reproductibilité et de sa meilleure robustesse. Le strain longitudinal a la variabilité la moins importante comparé aux autres strains, ce qui le rend plus utilisable(20). Ce strain est influencé par l’âge, le sexe et la machine utilisée. Le strain est dépendant des conditions de charge. Le strain est vendeurdépendant, incitant les vendeurs à améliorer leurs standardisations(21) donc cette variabilité liée au logiciel de relecture s’améliore. Il convient de confirmer ce résultat sur un 2e examen réalisé 2 semaines plus tard. Une diminution de la torsion et de la détorsion a aussi été mise en évidence un mois après le début de la chimiothérapie alors que la FEVG était encore normale(22). La diminution des paramètres de déformation constitue un facteur de mauvais pronostic. Plusieurs études expérimentales chez le rat soumis à des cures d’anthracyclines retrouvent une altération de la vitesse de déformation radiale alors que la FEVG ne diminue pas de manière significative. Le contrôle anatomopathologique a retrouvé une fibrose extensive interstitielle et périvasculaire. Par ailleurs, cette diminution de la vitesse de déformation est un facteur prédictif de mortalité et de survenue d’insuffisance cardiaque(23). L’étude de Ganame en pédiatrie, portant sur une population d’enfants traités par anthracyclines, survivants en moyenne à 5 ans, a mis en évidence des anomalies de la fonction diastolique et des critères de Doppler tissulaire chez 15 % d’entre eux alors que le fonction systolique restait dans les limites de la normale(24). Dans cette étude(24) incluant des patients recevant un traitement par anthracyclines, la déformation était mesurée très précocement, avant les seuils réputés toxiques. Les auteurs montrent que les paramètres de strain s’altèrent dès la première administration d’anthracyclines alors que la diminution de la fraction de raccourcissement et de la FEVG n’était détectée qu’après le second cycle de chimiothérapie. Ces données ont été confirmées dans le suivi à long terme(25). Alors que les vélocités myocardiques sont encore conservées et comparables au groupe contrôle chez des patients qui ont reçu des anthracyclines à dose infratoxique (< 300 mg/m2), les paramètres de strain sont altérés comparativement au groupe contrôle. Une étude(26) incluant 81 patientes traitées par anthracyclines et trastuzumab, a montré que c’est l’altération des paramètres de strain mesurés au 6e mois (ce qui peut sembler un peu tard dans la prise en charge des patients) qui sont prédictifs de dysfonction ventriculaire gauche à terme. Le strain longitudinal est très nettement altéré chez les patientes qui ont reçu des anthracyclines et du trastuzumab. Les courbes ROC(26) montrent bien que c’est le strain longitudinal et plus précisément la variation de strain longitudinal entre l’état de base et le 6e mois qui est prédictif de la dysfonction ventriculaire gauche, ce qui représente le meilleur compromis en termes de sensibilité et spécificité. L’étude prospective de Sawaya portant sur 81 femmes atteintes de cancer du sein et traitées par anthracyclines et trastuzumab rapporte une diminution de la déformation. La diminution de la déformation longitudinale globale > 10 % après traitement par anthracyclines est un facteur prédictif de diminution ultérieure de FEVG et donc de cardiotoxicité à 6 mois(27,28). La FEVG et les paramètres diastoliques ne sont pas des facteurs prédictifs de diminution ultérieure de la FEVG. Cette étude(28) qui est probablement la plus robuste, a utilisé la combinaison des 2 paramètres — un biomarqueur et le strain longitudinal — chez des patientes atteintes d’un cancer du sein. La déformation longitudinale a été mesurée au 3e mois, à la fin de la cure d’anthracyclines juste avant de débuter la cure de trastuzumab. La troponine ultrasensible était dosée. Le strain longitudinal était mesuré en moyennant les segments moyens et basaux. La combinaison du strain longitudinal et de la troponine ultrasensible a permis d’identifier une population qui était à plus haut risque de développer une dysfonction systolique ventriculaire gauche, d’augmenter la sensibilité de cette approche ainsi que la valeur prédictive négative. En analyse multivariée, une altération du strain longitudinal mesurée au 3e mois < 19 % était prédictive de la dysfonction ventriculaire. Ces paramètres de strain sont aussi intéressants pour le suivi des patients. Le strain longitudinal dans une population ayant reçu des anthracyclines(29), non pas dans le suivi en aigu mais dans le suivi chronique, permet d’identifier une population à très haut risque. Le strain longitudinal, mesuré à un moment ou à un autre de la chimiothérapie, identifie, sur le long terme une population à risque majoré d’événements cardiovasculaires.   Recommandations Le groupe d’experts(7) a permis de définir une cardiotoxicité en cas de diminution de plus 10 points de la FEVG, jusqu’à un cut-off de FEVG de 53 % (figures 1 et 2). Ces données doivent être confirmées par une autre modalité d’imagerie 2 à 3 semaines plus tard. Au cours du suivi, il convient d’utiliser la même technique d’imagerie pour la mesure de la FEVG. L’utilisation des paramètres de déformation fait maintenant partie intégrante des recommandations(7). Lors du bilan, une valeur de déformation inférieure à la normale doit attirer l’attention. Le seuil de diminution de déformation longitunale au-delà duquel il est nécessaire de diminuer, voire d’interrompre la chimiothérapie est fixé dans les recommandations à 8 % (figure 3). Le suivi d’un patient traité par chimiothérapie est proposé de manière standardisée dans les recommandations. Il paraît prudent d’effectuer au moins une échocardiographie après un traitement par anthracyclines de 240-250 mg/m2 (et régulièrement si la dose préconisée est supérieure) et, de préférence, une autre échocardiographie dans l’année qui suit (figure1)(7). Il est recommandé, pour le trastuzumab, une surveillance échocardiographique tous les 3 mois (figure 2)(7). Il n’y a pas de recommandation précise en ce qui concerne les autres chimiothérapies cardiotoxiques. Si lors de ce suivi, la FEVG diminue de plus de 10 % et atteint des valeurs inférieures à la limite de la normale, la cardiotoxicité est certaine. Si, d’autre part, la déformation longitudinale globale diminue de moins de 8 % en valeur relative, la cardiotoxicité est peu probable. Au contraire, si la déformation diminue de plus de 15 % en valeur relative, la cardiotoxicité est très probable. Les patients doivent être suivis même tardivement car la cardiopathie peut apparaître 10 à 20 ans après chimiothérapie surtout en cas d’utilisation de fortes doses d’anthracyclines (> 250 mg/m2, en cas de facteurs de risque importants et/ou de radiothérapie associée).   Figure 1. Initiation d’une chimiothérapie associée à toxicité de type 1. L’évaluation à l’état de base doit comporter les mesures de fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG), le strain global longitudinal (SGL), le dosage de la troponine. Si un des paramètres est anormal, le recours au cardiologue est indispensable. Le suivi est recommandé à la fin de la cure et 6 mois plus tard pour des doses < 240 mg/m2. Si ces doses sont plus élevées, les mesures de FEVG, de SGL et le dosage de la troponine sont recommandés avant chaque dose de 50 mg/m2. D’après Plana JC. J Am Soc Echocardiogr 2014 ; 27 : 911-39. LIN = limite inférieure de la normale. Figure 2. Initiation d’un traitement par trastuzumab après chimiothérapie associée à une toxicité de type 1. L’évaluation à l’état de base doit comporter les mesures de fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG), le strain global longitudinal (SGL), le dosage de la troponine. Si un des paramètres est anormal, le recours au cardiologue est indispensable. Les mesures de FEVG, de SGL et le dosage de la troponine sont recommandés tous les 3 mois en cours de traitement et 6 mois plus tard. D’après Plana JC. J Am Soc Echocardiogr 2014 ; 27 : 911-39. LIN = limite inférieure de la normale. Figure 3. Détection précoce de dysfonction systolique infraclinique par la méthode du strain global longitudinal (SGL). L’utilisation du SGL est recommandée pour la détection infraclinique de la dysfonction ventriculaire gauche. Si les données de SGL sont disponibles à l’état de base, une diminution relative > 15 % par rapport au données de base est prédictive de dysfonction systolique ventriculaire gauche infraclinique. D’après Plana JC. J Am Soc Echocardiogr 2014 ; 27 : 911-39. En pratique   L’étude de la fonction ventriculaire gauche ne peut se limiter en routine désormais à une utilisation simple de la FEVG pour dépister précocement une dysfonction ventriculaire gauche. La diminution de la FEVG est donc un paramètre largement insuffisant. Il convient d’utiliser d’autres techniques échocardiographiques telles que l’analyse de la fonction diastolique, les vélocités en Doppler tissulaire, le strain. L’imagerie de déformation est devenue un outil accessible en routine, facile d’utilisation et reproductible. Elle permet une étude plus adaptée des différents mécanismes de dysfonction globale et régionale alors que les paramètres habituels restent normaux. Cette approche multiparamétrique du suivi des patients est à associer au dosage des biomarqueurs (troponine, BNP). Les recommandations précisent qu’il faut mesurer la FEVG, le strain longitudinal et la troponine au cours du suivi du patient qu’on introduise une molécule de type I ou de type II, de les suivre de manière régulière. On aboutit à une nouvelle définition de la cardiotoxicité qui est la combinaison de la troponine et du strain longitudinal. Le delta de strain > 15 % est retenu comme significatif.

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