Publié le 31 jan 2016Lecture 6 min
Fermeture percutanée d’une CIA - Quand ? Comment ? Reste-t-il une place pour la chirurgie ?
J. PETIT, hôpital Marie-Lannelongue, Le Plessis-Robinson
La fermeture percutanée des communications interauriculaires de type ostium secondum (CIA OS) s’inscrit dans le développement spectaculaire des méthodes de traitement non chirurgical des maladies ou malformations cardiaques et vasculaires. Elle est devenue la thérapeutique de premier choix en 2016 de telle sorte que les sujets d’intérêt actuels sont les progrès de la technique d’implantation, les éventuelles complications secondaires et les limites d’application.
Prothèses disponibles et évolution de la technique d’implantation
Après plusieurs errements, une prothèse domine largement le marché : c’est la prothèse d’Amplatz, en treillis de Nitinol. Elle a le petit inconvénient d’être assez massive, le grand avantage de ne pas comporter d’armature et d’être facile à manipuler. Elle a maintenant un diamètre interne allant jusqu’à 40 mm de telle sorte que le diamètre propre de la CIA n’est plus en lui-même une limite à l’emploi de la méthode. Elle est relativement facile à recapturer en cas de déploiement échoué. Une éventuelle embolisation de la prothèse est dans la grande majorité des cas très bien supportée… et fruit de la surveillance échographique le jour même ou le lendemain de la mise en place.
La technique d’implantation s’est avec l’expérience largement simplifiée. Une seule voie d’abord nécessaire, la veine fémorale, voire la veine jugulaire. La méthode initiale comportait, sous radioscopie, anesthésie générale, intubation et échographie transœsophagienne. Après 650 implantations consécutives par cette technique à Marie-Lannelongue, décision a été prise en 2003 de simplifier la procédure : abandon de l’ETO systématique, donc suppression de l’anesthésie générale et contrôle préférentiel par simple fluoroscopie et ETT. Depuis, plus de 1 000 CIA ont été fermées sous ETT seul et ceci sans aucune majoration des échecs de pose ou des éventuelles embolisations. L’ETT apparaît même supérieure dans de nombreux cas en visualisant mieux le rebord postérieur de la CIA. Cette évolution trouve bien sûr tout son intérêt chez l’enfant.
Quand ?
Il s’agit là d’un des problèmes résiduels de la technique.
L’adulte ne pose pas de contreindication hormis l’existence de rebords suffisant pour assurer la stabilité de la prothèse.
Le vieillard est même une indication particulièrement flatteuse car la chirurgie de la CIA à cet âge avait mauvaise réputation, conduisant bien souvent à l’abstention.
C’est à cet âge que l’amélioration fonctionnelle obtenue est la plus spectaculaire, même si le patient est en fibrillation atriale. Par contre, c’est chez l’adulte que les difficultés techniques de mise en place sont les plus grandes en raison de la dilatation de l’oreillette droite.
Chez le petit enfant, les indications doivent être mûrement posées. Les diagnostics sont de plus en plus posés tôt, dès les premiers mois de vie, entraînant une inquiétude compréhensible chez les parents. Plusieurs arguments invitent à tempérer l’envie des parents d’une solution thérapeutique rapide : certaines CIA se ferment spontanément jusqu’à l’âge de 3 ans. La tolérance fonctionnelle d’une CIA est généralement excellente. Les bronchites ont rarement comme cause principale une CIA et c’est le même choix pour un retard de croissance.
L’HTAP n’apparaît que très exceptionnellement avant l’âge de 8 ans. Fermer une CIA par voie percutanée dans les premières années conduit à implanter une prothèse de taille relative très grande dans l’oreillette gauche avec risque de contact avec la mitrale, de déformation de la valve aortique. Ce risque est d’autant plus paradoxal que la fermeture percutanée est plus facile à cet âge grâce à la petite taille des oreillettes par rapport à la prothèse.
Les limites
L’âge
L’âge reste une limite essentielle : le petit enfant a des dimensions des deux oreillettes qui sont peu compatibles avec les prothèses disponibles.
Aucune de celles-ci ne semble résoudre cette difficulté. Cette limite est d’autant plus importante que le diagnostic de CIA est fait de plus en plus précocement alors même que l’échographie est d’un accès particulièrement facile à ces âges. Une CIA est susceptible de se fermer spontanément dans les trois premières années de vie. C’est le premier argument à soulever auprès de parents volontiers impatients. Mais la 4e année de vie se révèle trop précoce pour loger sans danger une prothèse volumineuse dans un petit cœur. Il est donc essentiel, dès la première consultation, d’expliquer les limites raisonnables aux parents. L’âge de 7-8 ans est le meilleur choix. Il est alors assez facile avec l’ETT d’apprécier la faisabilité de l’implantation. On détermine en incidence 4 cavités la longueur de l’oreillette gauche, entre la mitrale et la veine pulmonaire supérieure droite : ce sera le diamètre maximal acceptable pour la prothèse à implanter. On mesure alors le diamètre de la CIA en incidence 4 cavités, chiffre que l’on multiplie par 1,4 pour obtenir le diamètre étiré prévisible de la CIA lors de la future mise en place de la prothèse. À ce chiffre doivent être ajoutés les deux rebords de la prothèse, soit 14 mm. On comprend donc qu’il est assez facile de prévoir la faisabilité du geste . Chez l’enfant de moins de 3 ans, il est souhaitable d’essayer de prévoir cette faisabilité pour ne pas faire attendre une famille dont l’inquiétude serait croissante et la déception grande à l’âge de 7-8 ans. On doit alors s’attacher, outre les mesures précédentes à déterminer si les rebords de la CIA seront suffisants.
Les très larges CIA
On regroupe sous ce terme les CIA de plus de 25 mm en ETT. C’est le progrès essentiel fourni par l’expérience de cette technique : le diamètre lui-même de la CIA n’est plus en aucun cas une cause d’exclusion. On dispose de prothèses de 40 mm de diamètre interne (58 mm de diamètre externe), voire de 44 mm chez un fabricant asiatique.
En fait, seule la nature des rebords résiduels autour de la CIA va permettre de prévoir la faisabilité.
Cette analyse, temps essentiel de l’étude en ETT, va distinguer 6 rebords à bien différencier. Tous peuvent être, dans la grande majorité des cas, mesurés en ETT.
La petite taille
Les CIA de petite taille sont toutes très aisées à fermer par voie percutanée. Si leur découverte est fortuite, en l’absence d’une quelconque complication, l’indication est en théorie la même que du temps de la chirurgie. Cependant, il est bien certain que certaines CIA de taille moyenne (10 à 12 mm), n’auraient pas été fermées par voie chirurgicale et le sont par voie percutanée. La mesure du shunt gauchedroit, argument en principe de référence, est difficile à apprécier avec sureté : en ETT, elle repose sur le diamètre de la voie pulmonaire dont la mesure est souvent imprécise et parfois difficile. La dilatation des cavités droites est elle aussi difficile à quantifier de façon reproductive. La mesure au cathétérisme des saturations étagées ne peut s’appliquer correctement à un shunt gauche-droit auriculaire en raison de l’absence de sang veineux mêlé.
Finalement, un mouvement paradoxal du septum, en l’absence d’une autre cause et une saturation supérieure à 80 % dans l’artère pulmonaire sont de bons arguments pour un shunt important, justifiant une fermeture.
Des cas particuliers peuvent justifier la fermeture de petites CIA : leur révélation par une embolie systémique, le shunt gauche droit important par une petite CIA dans les cardiopathies hypertensives, les shunts droit-gauche de certaines cardiopathies congénitales (Ebstein, sténose pulmonaire, Fallot réparé). Il faut cependant retenir qu’une très petite CIA, à la limite du PFO (patent foramen ovale), ne justifie pas une fermeture percutanée sans une raison spécifique.
En pratique
La fermeture percutanée des communications interauriculaires de type ostium secondum s’inscrit dans le développement spectaculaire des méthodes de traitement non chirurgical des maladies ou malformations cardiaques et vasculaires.
Elle est devenue la thérapeutique de premier choix en 2016.
Les limites d’application sont maintenant bien précises et la procédure peut être largement simplifiée.
Les résultats au long cours sont excellents, sans aucune complication secondaire.
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