Publié le 14 nov 2016Lecture 10 min
Valvulopathies et endocardites
C. VINCENT, Hôpital du Haut-Lévêque, CHU de Bordeaux, Pessac
Journées Écho Cardio Bordeaux
Évaluation de l’IM organique : le 3D est-il indispensable ?
D’après S. Lafitte
Le 3D, et surtout l’ETO 3D, est un outil prodigieux :
- pour mieux appréhender l’anatomie mitrale en surface et en profondeur par rapport au bidimensionnel ;
- pour réaliser un balayage en mode biplanaire de la structure étudiée.
Son utilisation permet une réduction effective du temps de l’examen, notamment intéressant chez les patients vigiles. Son application dans l’étude d’une insuffisance mitrale (IM) est particulièrement utile :
• L’acquisition tridimensionnelle en ETO s’effectue au niveau de l’œsophage moyen avec recadrage sur la structure. La valve mitrale est présentée en vue chirurgicale (figure 1) avec l’aorte à 12 h, l’auricule à 9 h et la tricuspide à 3 h. On visualise de gauche à droite la commissure antérolatérale (externe), les feuillets A1P1, puis A2P2, A3 P3 et la commissure postéromédiane (interne). On note au niveau postérieur et en diastole deux indentations qui délimitent la zone 2 des zones 1 et 3. Cette vue permet d’évaluer qualitativement les prolapsus, et notamment leur localisation (particulièrement intéressant pour visualiser les prolapsus commissuraux), les éversions de valve et les ruptures de cordage.
• Le mode biplan/multiplan (figure 2) permet de réaliser un balayage de la valve mitrale en discriminant les zones 1, 2 et 3. L’image de gauche sera la vue bicommissurale, avec l’auricule gauche à droite de la valve. Le curseur est placé en zone 2, permettant la visualisation sur l’image de droite de la vue 3 cavités passant par A2P2. Puis le curseur est déplacé vers la zone 1, révélant à droite A1P1 et la commissure antérolatérale puis la zone 3 et la commissure postéromédiane.
En absence de sonde 3D, ce balayage peut être réalisé en mode bidimensionnel à partir de la coupe 120° par rotation de la poignée de la sonde (mouvement de moto), dans le sens horaire pour explorer la zone 3 et la commissure postéromédiane ou antihoraire pour la zone 1 et la commissure antérolatérale.
L’application mitral view permet d’aider à la compréhension de la valve mitrale en dynamique.
Figure 1. Vue 3D ETO ou vue chirurgicale avec segmentation mitrale.
CE : commissure externe ; CI : commissure interne.
Figure 2. Utilisation du mode biplan en 3D ETO.
Traitement percutané de l’IM, sélection des patients
D’après É. Brochet
La principale technique percutanée développée actuellement est la technique de réparation bord à bord inspirée de la technique chirurgicale d’Alfieri appelée MitraClip. Les autres techniques sont basées sur une technique d’annuloplastie directe (Cardioband) ou annuloplastie indirecte (annuloplastie dans le sinus coronaire) ou l’implantation de néo-cordages par voie apicale (Néochord).
Le MitraClip est indiqué chez les patients symptomatiques présentant une IM sévère primaire ou secondaire malgré un traitement médical optimal (incluant si indiqué une resynchronisation et/ou une revascularisation coronaire) avec des contre-indications opératoires ou jugés à trop haut risque opératoire par une Heart Team et ayant une espérance de vie supérieure à un an(1).
Les critères échographiques d’éligibilité nécessitent :
• Une ETT devant répondre aux questions suivantes :
- l’IM est-elle primaire (organique) ou secondaire (fonctionnelle) ?
- l’IM est-elle sévère ? Les critères ESC en faveur d’une IM sévère sont notamment la SOR et le VR (en cas d’IM primaire, une SOR ≥ 40 mm2 et un VR ≥ 60 ml et en cas d’IM secondaire, une SOR ≥ 20 mm2 et un VR ≥ 30 ml) ;
- la morphologie valvulaire estelle compatible avec la technique de réparation envisagée ? En cas d’IM secondaire, l’anatomie valvulaire est normale et la dysfonction est une restriction valvulaire systolique (type IIIb de Carpentier) avec déplacement apical du point de coaptation et déformation valvulaire (tenting avec surface et hauteur de tenting à mesurer en systole, caractère symétrique ou asymétrique de la déformation à caractériser). En cas d’IM primaire, l’anatomie est anormale et il faut confirmer et localiser le prolapsus (seule atteinte organique accessible au MitraClip) et caractériser sa hauteur et largeur. Les autres informations à déterminer sont les dimensions de l’anneau, la recherche de calcifications de l’anneau mitral, l’absence de RM significatif (gradient transmitral < 4 mmHg) et une surface de mitrale large (surface > 4 cm2) ;
- quel est le degré de dysfonction ventriculaire gauche et droite ? Au niveau du ventricule gauche, seront mesurées les dimensions du VG, la FEVG, un asynchronisme sera recherché. Au niveau du ventricule droit, la fonction systolique du VD et la PAPs seront étudiées ;
- existe-il d’autres valvulopathies (aortique, tricuspide) significatives ?
- existe-il des contre-indications anatomiques ou techniques à la procédure ?
Les critères d’éligibilité favorables EVEREST sont :
- jet central (A2P2) ;
- anatomie favorable dans la zone de capture avec une coaptation résiduelle ≥ 2 mm et profondeur de coaptation < 11 mm ;
- longueur de la valve postérieure ≥ 10 mm ;
- épaisseur des feuillets et mobilité normale ;
- absence de calcification valvulaire et de l’anneau ;
- surface mitrale large (> 4 cm2) ;
- en cas de prolapsus, mesure du diastasis (flail gap en anglais) ≤ 10 mm.
• Une ETO qui est systématique permettant une analyse plus détaillée de l’anatomie mitrale, d’éliminer un thrombus intraauriculaire gauche ou une anomalie du SIA empêchant l’abord transeptal ou encore une fente mitrale qui contre-indiquerait le MitraClip.
Faut-il redéfinir le rétrécissement aortique serré ? Les principaux pièges de l’évaluation
D’après J.-L. Monin
Les critères « durs » pour définir un RA serré restent une V max > 4 m/s, un gradient moyen (GM) > 4 mmHg et une surface < 1 cm2. Les critères « mous » pour définir un RA serré sont l’indice de perméabilité et la surface indexée (non valable en cas de gabarit extrême).
Un bas-gradient sur bas-débit paradoxal peut être envisagé en cas de valve nettement calcifiée, Vmax < 4,0 m/s (GM < 40 mmHg) et surface aortique < 1,0 cm2, sous réserve d’un VES indexé < 35 ml/m2.
Cependant, même en cas de bas débit avéré, on peut quasiment éliminer un RA sévère si la Vmax < 3,0 m/s ou GM < 20 mmHg.
En cas de paramètres discordants, il est nécessaire de vérifier toutes les mesures et calculs en s’assurant d’une technique d’examen rigoureuse. Les principaux pièges sont dans les mesures :
- de la chambre de chasse aortique : importance de régler les gains pour faire la mesure aux pieds des sigmoïdes aortiques ;
- de l’ITV sous-aortique en Doppler pulsé : le click de fermeture aortique est non requis (risque de surestimer l’ITV sous-aortique), il est conseillé de régler la vitesse de défilement à 100 mm/s ;
- du gradient moyen aortique et de l’ITV aortique en Doppler continu avec nécessité de multiplier les incidences avec notamment la parasternale droite en prenant les chiffres les plus élevés.
Enfin, en cas de doute, la décision thérapeutique doit intégrer la clinique mais aussi d’autres techniques d’imagerie comme le TDM cardiaque avec le score calcique.
Actualité sur le RA, bas débit, bas gradient, à FE conservée
D’après C. Tribouilloy
La fréquence du RA paradoxal varie selon les séries entre 3 et 13 %. Avant de conclure à un authentique RA serré à bas débit paradoxal, l’orateur nous propose 7 étapes pour ne pas poser ce diagnostic par excès et confondre avec un RA modérément serré :
- éliminer une HTA mal contrôlée qui conduirait à une diminution du débit cardiaque et du gradient moyen ;
- éliminer une erreur de mesure échographique comme décrit précédemment ;
- tenir compte de la surface corporelle en cas de petit gabarit pour ne pas surestimer la surface aortique (par contre non valable chez l’obèse) ;
- éliminer une sous-estimation de la surface valvulaire aortique liée à un phénomène de recouvrement de pression, notamment chez les patients avec petite aorte ascendante (jonction sino-tubulaire < 30 mm). Pour tenir compte de ce phénomène de restitution de pression, on mesure une surface « corrigée » appelée index de perte d’énergie : IPE = (SAOx- SAA)/(SAA-SAO) avec SAO surface fonctionnelle aortique par équation de continuité et SAA surface de l’aorte ascendante calculée à partir du diamètre de la jonction sino-tubulaire ;
- éliminer un RA paradoxal pseudo-sévère par un écho de stress à la dobutamine faible dose ou à l’effort ;
- calculer systématiquement le score calcique aortique valvulaire par TDM multicoupes (score chez l’homme > 20 000 UA et > 1 200 UA chez la femme est très en faveur d’un RA serré) ;
- en cas de doute persistant après ces 6 étapes, mesurer la surface aortique par TDM ou par IRM ou réaliser un cathétérisme cardiaque complet.
Le pronostic du RA paradoxal est actuellement controversé : pour certains sévère, pour d’autres plus proche du RA modérément serré. Le mauvais pronostic pourrait être lié à l’association chez ces patients d’un RA modéré avec une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée associée à de l’HTA, une fibrillation atriale ou à des comorbidités extracardiaques. La chirurgie ou le TAVI se discute qu’après avoir confirmé que le RA est serré et qu’il est responsable des symptômes.
Évaluation postopératoire du TAVI et suivi à long terme
D’après M. Dijos
L’évaluation postopératoire a pour objectif de dépister les dysfonctions aiguës de prothèses qui sont rares (rupture de l’anneau aortique, embolisation/migration, IA sévère intra/périprothétique, rupture septale, obstruction coronaire, tamponnade, IM sévère), les complications locales et les complications à distance (AVC, insuffisance rénale, hémorragie sévère, complications au niveau de l’abord vasculaire). Les complications les plus fréquentes sont les fuites paraprothétiques modérées (entre 3 et 15 % selon les études) et les troubles conductifs de haut grade (15 % d’implantation de pacemakers). Les facteurs favorisant une fuite paraprothétique sévère sont un undersizing, un mauvais positionnement, un défaut de déploiement, des calcifications volumineuses ou une bicuspidie. Cette fuite paraprothétique sévère peut nécessiter une nouvelle dilatation, la pose d’une nouvelle valve dans la valve, voire une conversion en chirurgie.
Le suivi nécessite une ETT de référence avant la sortie d’hospitalisation puis à 1 mois, 1 an puis tous les ans et a pour but de mettre en évidence des dysfonctions du TAVI.
Fuites paraprothétiques
Leur évaluation échographique est difficile : les critères recommandés(2) sont la vitesse télédiastolique isthmique dans l’aorte, l’extension circonférentielle de la fuite en petit axe et selon certaines études, le volume régurgitant, la fraction de régurgitation et la SOR.
Endocardites infectieuses
La prévalence de l’endocardite infectieuse est de 1 %(3). Les principaux facteurs favorisants sont le sexe (homme), l’âge, un diabète et la présence d’une IA modérée ou sévère. Les principales bactéries rencontrées sont par ordre décroissant : l’entérocoque, le staphylocoque aureus, le staphylocoque coagulase négative, et le streptocoque viridans. La médiane de survie est de 5,3 mois avec une mortalité très élevée.
Dégénérescence dans 1,4 % des cas.
Thrombose de TAVI très rare.
Endocardite : place de l’imagerie multimodalités - À propos des nouvelles recommandations
D’après G. Habib
Les principales nouveautés dans les recommandations 2015 sur l’endocardite infectieuse (EI) sont l’intérêt d’une Endocarditis Team et le rôle majeur de l’imagerie qui devient multimodale.
En effet, l’échographie reste au centre du diagnostic d’EI mais sa sensibilité n’est pas de 100 % (végétation de moins de 2 mm, EI non végétante, prothèses et pacemakers, prolapsus valvulaires avec valves épaissies, végétations ayant déjà embolisé). Ainsi un PET-TDM ou une scintigraphie aux leucocytes marqués positifs ou un TDM cardiaque mettant en évidence des lésions paravalvulaires sont devenus un critère majeur dans le diagnostic d’EI. Le PET-TDM est particulièrement intéressant en cas d’ETT et ETO initiales négatives sur prothèses valvulaires ou sur sondes de stimulation. Par contre, ses limites sont un taux de faux positifs de 15 % notamment en cas de tube aortique ou de thrombose de prothèse et en postopératoire précoce (< 3 mois pour une prothèse valvulaire). La scintigraphie aux leucocytes marqués est recommandée en cas de PETTDM douteux ou en période postopératoire.
Valvulopathies médicamenteuses, actualités
D’après S. Maréchaux
Devant toute valvulopathie restrictive (sténosante et/ou fuyante) ou prothèse valvulaire, il est nécessaire d’interroger les patients sur la prise antérieure d’anorexigènes (plus de 10 millions de personnes exposées) ou autres substances valvulotoxiques (dérivés de l’ergot de seigle…).
Les valvulopathies médicamenteuses peuvent être dynamiques et très symptomatiques malgré un examen de repos rassurant : dans ce cas, peut être discuté l’intérêt d’un écho d’effort et/ou d’un cathétérisme cardiaque.
En cas d’indication de chirurgie cardiaque, il est primordial d’envoyer la valve à un anapath compétent pour cette pathologie (Pr Bruneval, HEGP, Paris).
Flash d’actualité : la cardiopathie rhumatismale (CR) en 2016
D’après M. Mirabel
La CR résultant de poussées successives de rhumatisme articulaire aigu a quasiment disparu des pays développés, mais reste la cardiopathie acquise la plus fréquente chez l’enfant et l’adulte jeune dans le monde.
Le dépistage de ces valvulopathies rhumatismales par échoscopie a permis de proposer une prise en charge thérapeutique(4) avec une antibioprophylaxie secondaire pendant 10 ans ou jusqu’à l’âge de 21 ans et :
- en cas de valvulopathie modérée ou minime, arrêt de l’antibioprophylaxie ;
- en cas de valvulopathie moyenne, poursuite jusqu’à 35 ans ;
- en cas de valvulopathie sévère, poursuite jusqu’à 40 ans.
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