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Fibrillation atriale

Publié le 04 avr 2017Lecture 5 min

La fibrillation atriale : l’épidémie du siècle ?

Jérôme BOUET, Centre hospitalier d’Aix-en-Provence

La fibrillation atriale (FA) est le trouble du rythme cardiaque soutenu le plus fréquent. Cette pathologie est en constante augmentation dans le monde du fait du vieillissement des populations. La prévalence de cette arythmie augmente avec l’âge et de ce fait plus de deux tiers des patients présentant une FA ont plus de 75 ans. La FA représente un problème de santé publique avec 600 000 à 1 million de patients concernés en France, entraînant un coût global de plus de 2,5 milliards d’euros par an dont la moitié liée aux frais d’hospitalisations.

Physiopathologie    Le vieillissement cardiaque s’accompagne de modifications structurelles au niveau du myocarde qui induisent des troubles de la relaxation du ventricule gauche compensés par la systole auriculaire mais entraînant une dilatation du massif atrial et l’apparition de fibrose favorisant la survenue de FA. Parallèlement à cela, on note une augmentation de l’activité électrique au niveau des veines pulmonaires.    Définitions    En épidémiologie, la prévalence désigne l’état de santé d’une population à un moment donné. La prévalence d’une maladie représente ainsi le nombre de personnes atteint par cette maladie à un instant donné. De ce fait, elle comptabilise à la fois les nouveaux cas et ceux diagnostiqués plus anciennement. Elle s’exprime le plus souvent en pourcentage. Le taux d’incidence, quant à lui, rapporte le nombre de nouveaux cas d’une pathologie observés pendant une période donnée. Il est un des critères les plus importants pour évaluer la fréquence et la vitesse d’apparition d’une pathologie. Le taux d’incidence s’exprime généralement en « nombre de personnes pour 100 000 personnes par année ».    Classification de la FA    Une FA est paroxystique si elle survient par crises qui cèdent spontanément en moins de 7 jours. Une FA est persistante si elle dure depuis plus de 7 jours et ne se réduit pas spontanément. Une FA est permanente si tous les électrocardiogrammes enregistrés sont en fibrillation sur une période prolongée (en général plus d’un an). Une FA persistante devient une FA permanente à partir du moment où une cardioversion n’a pas été proposée ou a échoué.    Épidémiologie de la FA    La prévalence La prévalence de la FA augmente avec l’âge, elle double pour chaque décennie après l’âge de 50 ans (figure 1) et passe de moins de 0,5 % entre 40 à 50 ans à 10 à 20 % chez les patients de 80 ans et plus(1-3). Ainsi, près de 70 % des patients en FA ont plus de 75 ans(4). La répartition homme/femme se fait de façon inégale. En effet, la prévalence de la FA est plus élevée chez les hommes (figure 1)(5), mais en raison d’une espérance de vie supérieure chez les femmes, le nombre de cas apparaît plus élevé chez ces dernières. De même, les sujets de type caucasien semblent plus touchés par la FA que les sujets de type africain(3). La prévalence de la FA a augmenté de façon significative au cours des 50 dernières années et cela indépendamment de l’allongement de l’espérance de vie(4). L’étude ALFA(6) a répertorié la prévalence relative de chaque type de FA. On répertorie ainsi 22,1 % de FA paroxystique, 51,4 % de FA persistante et 26 % de FA permanente. C’est dans le groupe des sujets présentant une FA permanente que l’on retrouve les patients les plus âgés. La FA constitue un problème de santé publique puisqu’elle concernerait entre 600 000 et 1 million de personnes en France(4). Figure 1.   L’incidence La Rotterdam study(2) qui a porté sur une population de 6 808 habitants âgés de plus de 55 ans a dénombré au cours d’un suivi de 10 ans (1900-2000), 437 sujets présentant un épisode de fibrillation, d’où une incidence globale de la FA de 9,9/1 000 personnes/années. En d’autres termes, au cours d’une année de suivi, près d’une personne sur 100 développe un nouvel épisode de FA. De manière similaire à la prévalence, l’incidence (nouveaux cas de FA) augmente avec l’âge passant de 1,1/1 000 personnes/années pour les 55-60 ans à 20,7/1 000 personnes/années pour les 80-85 ans. L’incidence est également plus importante chez les hommes que chez les femmes avec une incidence globale 11,5/1 000 hommes/années contre 8,9/1 000 femmes/années. En extrapolant ces données à la population française, on estime qu’il y a entre 110 000 et 230 000 nouveaux cas de FA par an en France(4).    Hospitalisations    Approximativement un tiers des admissions à l’hôpital pour troubles du rythme cardiaque est dû à une FA. En France en 2008, l’analyse des données du Programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) a permis de recenser 84 000 hospitalisations pour lesquelles la FA était le diagnostic principal et 349 000 hospitalisations pour lesquelles la FA était l’un des diagnostics associés, soit un total de 412 000 patients correspondant à 610 198 hospitalisations(4). Le nombre de patients a augmenté de 26 % et celui des hospitalisations de 32 % en 3 ans (figure 2). La quasi-totalité (92 %) d’entre eux est âgée d’au moins 60 ans, et 48 % ont plus de 80 ans. Les pathologies associées à la FA étaient l’HTA, les cardiopathies, l’insuffisance cardiaque, les AVC, les syncopes et la dialyse rénale. Le taux de mortalité chez ces patients était de 5,6 %. On peut estimer que chaque année, 41 % des patients en FA sont hospitalisés dont 8 % pour un problème directement en rapport avec la FA. Selon l’étude française COCAF(7), 31,3 % des hospitalisations des 671 patients présentant une FA avaient un rapport avec cette maladie. Les sujets porteurs d’une FA persistante et permanente ont un taux d’hospitalisation et de décès plus important que les sujets présentant une FA paroxystique. Le coût moyen annuel de la prise en charge d’un patient en FA est de l’ordre de 3 000 euros. Le coût global de la maladie est de l’ordre de 2,5 milliards d’euros par an dont la moitié (52 %) est due aux frais d’hospitalisation, 23 % sont liés aux frais de traitement et 9 % aux frais de consultation.  Figure 2.   Ces dernières années, le nombre de patients atteint d’une FA est en constante augmentation et le coût socio-économique lié à la FA va augmenter de façon inexorable dans les prochaines décennies. On estime, qu’avec une population en France de 70 millions d’habitants en 2050, entre 1,1 et 2 millions de Français seront porteurs d’une FA(4).   Conclusion    Du fait de l’augmentation constante et continue de la prévalence de FA ces dernières décennies, on peut penser que le nombre de patients présentant une FA va doubler d’ici 2050, touchant ainsi près de 2 millions de Français. La FA constitue une véritable « épidémie » en France et dans les pays développés. Le coût moyen d’un patient en FA est de l’ordre de 3 000 euros par an dont la moitié est liée aux frais d’hospitalisation. Le coût socio-économique global de cette pathologie ne peut que s’alourdir dans l’avenir. C’est pourquoi une prise en charge en amont des complications en s’appuyant sur les dernières recommandations de la Société européenne de cardiologie(8) devrait permettre une réduction de la morbidité, de la mortalité et du coût lié à la FA.

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