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Insuffisance cardiaque

Publié le 01 avr 2017Lecture 6 min

Indications actuelles du DAI et de la CRT dans l’insuffisance cardiaque

Ghassan MOUBARAK, Hôpital Lariboisière, Paris ; Département de rythmologie, CMC Ambroise Paré, Neuilly-sur-Seine

Les indications de l’implantation d’un défibrillateur automatique (DAI) et d’une resynchronisation (CRT) ont été actualisées dans le document de recommandations récent de la société européenne de cardiologie sur la prise en charge de l’insuffisance cardiaque (IC) (2016)(1), qui reprend en grande partie les recommandations sur la stimulation cardiaque et la resynchronisation (2013)(2)

Indications de la resynchronisation Les données des essais cliniques La resynchronisation a d’abord été évaluée chez des patients insuffisants cardiaques avec FEVG ≤ 35 % et QRS larges (≥ 120-130 ms) en classe III-IV de la NYHA. Un effet favorable a été démontré sur la capacité à l’effort et la qualité de vie (études MUSTIC(3) et MIRACLE(4)), les hospitalisations (COMPANION(5)) et la mortalité globale (CARE-HF(6)). Des résultats similaires ont été ensuite observés chez les patients moins symptomatiques, en classe II de la NYHA (études REVERSE(7), MADIT-CRT(8) et RAFT(9)). Les critères d’éligibilité en termes de FEVG étaient hétérogènes (≤ 40 % dans REVERSE et ≤ 30 % dans MADIT-CRT et RAFT) mais la magnitude de l’effet de la CRT était similaire pour les FEVG < 30 % et entre 30 et 35 %, de sorte que les recommandations n’ont retenu que le chiffre de 35 % commun aux classes II à IV. Sont exclus de l’indication de la resynchronisation les patients en classe I car ils ont été très peu représentés dans les essais (18 % dans REVERSE, 15 % dans MADIT-CRT et aucun dans RAFT). De même, les patients en phase terminale de l’IC, en classe IV non ambulatoires (hospitalisés et a fortiori s’ils sont sous inotropes) ne sont pas a priori des bons candidats et en tout cas pas au défibrillateur. Depuis 2003, les indications de la CRT ont été affinées analysant a posteriori les sous-groupes de patients selon la largeur et la morphologie de leur QRS. La probabilité de réponse augmente quand la largeur du QRS est ≥ 150 ms et quand l’aspect du QRS est celui d’un bloc de branche gauche (BBG) (par opposition au bloc de branche droit ou au trouble non systématisé de la conduction). Pour bien définir ce qu’est un BBG, on peut recourir aux critères plus stricts de Strauss (tableau 1)(10). Enfin, la CRT est actuellement contre-indiquée chez les patients avec QRS fins < 130 ms. L’étude Echo-CRT(11) avait randomisé 809 patients avec FEVG ≤ 35 %, NYHA III-IV, QRS < 130 ms et désynchronisation mécanique, et n’avait pas montré de différence sur le critère principal de mortalité totale ou première hospitalisation pour aggravation de l’IC ; elle montrait même une augmentation de la mortalité dans le groupe CRT. Les recommandations actuelles de la CRT sont résumées dans la figure. Figure. Recommandations actuelles de la CRT. CRT-pacemaker (CRT-P) ou CRT-défibrillateur (CRT-D) ? L’étude COMPANION avait randomisé les patients en 3 groupes — traitement médicamenteux optimal seul ou avec CRT-P ou avec CRT-D —, mais n’avait pas été construite pour comparer CRT-P et CRT-D. CARE-HF n’avait inclus que des patients implantés d’un CRT-P. Enfin, seuls 17 % des patients dans REVERSE avaient été implantés d’un CRT-P et aucun dans MADIT-CRT et RAFT, ces deux dernières ayant comparé le CRT-D au DAI seul. Ainsi, le choix d’un CRT-P versus un CRT-D se fera sur l’évaluation globale au cas par cas du patient, son âge et ses comorbidités (tableau 2). Situations particulières • Le patient en fibrillation atriale (FA) permanente Très peu de patients en FA ont été inclus dans les essais cliniques de la CRT, qui pour la plupart faisait de la présence d’une FA à l’entrée un critère d’exclusion. On peut retenir deux enseignements : - la CRT est tout de même retenue chez les patients en FA avec FEVG ≤ 35 %, NYHA IV et QRS ≥ 130 ms (classe IIa, niveau de preuve B) ; - cela doit s’accompagner à tout prix d’une capture biventriculaire aussi proche de 100 % que possible (classe IIa-B), avec un recours extrêmement facile à l’ablation de la jonction auriculoventriculaire en cas de réponse ventriculaire trop rapide. • Le patient avec dysfonction VG modérée et indication de stimulation pour BAV L’étude BLOCK-HF(12) a inclus 691 patients avec FEVG ≤ 50 % et une indication de stimulation classique pour BAV et a montré une diminution du risque d’aggravation de l’IC. Ainsi, quand la FEVG est entre 35 et 50 % et un BAV pour lequel une stimulation ventriculaire fréquente est anticipée, une CRT est préférée à un pacemaker double chambre classique (classe IIa-B). Indications du défibrillateur Prévention secondaire Comparé à l’amiodarone, le DAI réduit le risque de mort subite et de mortalité totale chez les survivants d’un arrêt cardiaque et après tachycardie ventriculaire soutenue instable sur le plan hémodynamique. Il est clairement recommandé dans cette situation en l’absence de cause aiguë réversible (classe I, niveau de preuve A). Sa place est un peu plus discutée en cas de tachycardie ventriculaire monomorphe stable avec FEVG > 30 %(13). Prévention primaire L’amiodarone ne réduit pas la mortalité en complément du traitement bêtabloquant et ne doit pas être utilisée dans cette indication. Les antiarythmiques de classe I et la dronédarone sont contre-indiqués. Dans la cardiopathie ischémique, le DAI ne doit pas être envisagé dans les 40 jours après un infarctus du myocarde (classe III, niveau de preuve A). Les études DINAMIT(14) et IRIS(15) ont en effet montré que durant cette période initiale la réduction de mortalité rythmique était contrebalancée par une augmentation de la mortalité non rythmique, de sorte que la mortalité globale n’était pas affectée. L’utilisation d’une veste de défibrillation portable (LifeVest® de Zoll) est une solution envisageable quand la FEVG est < 30 %, le temps de réévaluer la récupération myocardique (classe IIb, niveau de preuve C). Dans la cardiopathie ischémique stable, le DAI est indiqué pour réduire la mortalité subite et la mortalité globale chez des patients symptomatiques en classe II ou III de la NYHA, avec FEVG ≤ 35 % et un traitement médicamenteux optimal depuis plus de 3 mois (classe I, niveau de preuve A), pourvu que leur espérance vie soit supérieure à 1 an (figure). Cette recommandation repose sur les données des études MADIT(16), MADIT-II(17) et SCD-HeFT(18). Comme pour la resynchronisation, il n’y a pas d’indication au DAI en classe I de la NYHA, ni en classe IV car pour cette catégorie de patients, la mortalité non subite élevée empêche d’observer un bénéfice du DAI sur la mortalité totale. Dans la cardiomyopathie non dilatée (CMD), les preuves cliniques du DAI étaient jusqu’à récemment moins nombreuses que dans la cardiopathie ischémique. Les études CAT(19), AMIOVIRT(20), DEFINITE(21) et le sous-groupe des CMD dans SCDHeFT(18) n’ont inclus qu’un total de 729 patients et aucune n’a montré individuellement un bénéfice sur la mortalité totale. Seule une métaanalyse de ces essais a montré une réduction de la mortalité totale de 26 %(22). L’indication actuellement retenue du DAI dans la CMD est cependant identique à celle dans la cardiopathie ischémique (classe I, niveau de preuve B). Une étude randomisée publiée postérieurement à la parution de ces recommandations pourrait bouleverser la donne dans la CMD. L’étude DANISH(23) a inclus 1 116 patients avec CMD en classe II-III NYHA, une FEVG ≤ 35 % et un NT-proBNP > 200 pg/ml. Ces patients ont été randomisés pour avoir ou non un DAI en plus du traitement médicamenteux et d’un CRT-P si indiqué. L’implantation d’un DAI n’a pas diminué la mortalité globale après un suivi médian de 68 mois (21,6 % vs 23,4 % dans le groupe contrôle, p = 0,28), bien que la mortalité subite ait été réduite. Il faudra attendre de voir comment ces nouvelles données seront intégrées dans les recommandations futures de la prise en charge de la CMD.  En pratique  La place de la CRT est maintenant bien définie pour les patients avec FEVG ≤ 35 % et QRS ≥ 130 ms, notamment en fonction de la largeur et de la morphologie du QRS. La place du DAI, seul ou en association à la CRT, est bien établie dans la cardiopathie ischémique stable mais pourrait nettement s’amoindrir dans la CMD dans le futur (proche ?) suite à la publication de l’étude DANISH. Références sur demande à la rédaction : biblio@axis-sante.com

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