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Cardiologie générale

Publié le 15 jan 2021Lecture 5 min

Perspectives thérapeutiques dans le syndrome cardio-rénal

Antoine FAYOL*/**, Étienne PUYMIRAT***, Marine LIVROZET*, Jean-Sébastie HULOT*,*Centre d’investigation clinique **Unité médico-chirurgicale d’insuffisance cardiaque sévère ***Unité de soins intensifs de cardiologie Hôpital européen Georges Pompidou, Paris

La prise en charge du syndrome cardio-rénal va probablement évoluer dans les années à venir grâce à l’arrivée d’un nouvel arsenal thérapeutique pour les patients insuffisants cardiaques. L’objectif de ce troisième article est de présenter ces nouvelles classes thérapeutiques qui arrivent progressivement sur le marché : les gliflozines, la finérénone, le vériciguat ou l’omecamtiv mecarbil. Ils ont très probablement une place à trouver dans la prise en charge des syndromes cardio-rénaux.

Une meilleure organisation En 2019, l’AHA recommande la création d’unités spéciales pour la prise en charge des patients ayant un syndrome cardio-rénal via la création de structures regroupant cardiologues et néphrologues pour proposer une prise en charge commune au patient(1). L’identification d’un diagnostic étiologique, tant cardiologique que néphrologique, semble indispensable pour la prise en charge des patients et pour l’optimisation des thérapeutiques. Le bilan d’insuffisance cardiaque et d’insuffisance rénale doit donc être fait en même temps. La création d’une consultation spécialisée avec une surveillance régulière de la volémie du patient pourrait limiter les récidives de décompensations cardiaques. Les caractéristiques cliniques des patients dans les essais thérapeutiques portant sur le syndrome cardio-rénal nous permettent d’envisager l’intérêt de l’évaluation de nouvelles classes thérapeutiques. Pour rappel, la majorité des patients présentant un syndrome cardio-rénal sont des hommes avec des comorbidités (hypertension, diabète dans 50 à 60 % des cas, fibrillation atriale) et une cardiopathie ischémique avec une altération de la FEVG dans 50 à 60 % des cas(2,3). Les gliflozines Le bénéfice cardiovasculaire des gliflozines a d’abord été confirmé chez les patients diabétiques. Le tableau 1 récapitule les principaux essais thérapeutiques. Une métaanalyse en 2019 (EMPA-REG, CANVAS, DECLARE TIMI(4-6)) s’est intéressée aux patients ayant un DFG entre 30 et 60 ml/min/1,73 m2. Pour ce groupe de patients, on observe une diminution du risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (HR 0,6), du nombre de MACE (HR 0,82) et des événements rénaux (HR 0,67). Leurs bénéfices concernant l’insuffisance cardiaque sont également confirmés pour les patients ayant une HFrEF qu’ils soient diabétiques ou non(6,7). Dans une métaanalyse récente portant toujours sur les patients ayant une HFrEF, les patients ayant un DFG < 60 ml/min/1,73 m2 avaient une diminution significative des hospitalisations pour décompensation cardiaque et de la mortalité cardiovasculaire (HR 0,77). Dans l’étude CREDENCE(8) (figure 1), les patients inclus étaient cette fois-ci diabétiques avec une albuminurie > 300 mg/g et un DFG entre 30 et 90 ml/ min (sous traitement conventionnel maximal). Le critère de jugement principal n’était plus cardiaque mais rénal : il s’agissait d’un critère composite d’apparition d’insuffisance rénale terminale (dialyse ou transplantation), d’un doublement de la créatinine basale ou de la mortalité cardiovasculaire et/ou rénale. L’étude a été interrompue précocement du fait d’une diminution des événements rénaux de 30 % (doublement de la créatinine ou mortalité rénale et cardiovasculaire). Figure 1. Résultats de l’étude CREDENCE(8). Dans l’étude DAPA-CKD (figure 2), les patients étaient diabétiques ou non avec un DFG entre 25 et 75 ml/min/1,73 m2 et une albuminurie comprise entre 0,2 g/g et 5 g/g. Le critère composite principalement rénal a lui aussi été rapidement validé (réduction de risque relatif de 37 %) avec de nouveau un arrêt précoce de l’étude(9). Figure 2. Résultats de l’étude DAPA-CKD(9). Enfin on peut également citer l’étude VERTIS qui s’est intéressée à l’ertugliflozine, et qui a montré qu’elle était non inférieure au placebo pour la prévention de la récidive d’événements cardiovasculaires majeurs(10). La finérénone La finérénone (antagoniste du récepteur aux minéralo-corticoïdes) a été évaluée chez les patients diabétiques, insuffisants rénaux dans l’étude FIDELIODKD(11) (figure 3). Au total, 5 734 patients avec un DFG compris entre 25 et 75 ml/min/1,73 m2 (avec une albuminurie > 30 mg/g) ont été inclus. Le critère de jugement principal était un critère composite associant la mortalité rénale, l’apparition d’une insuffisance rénale et une diminution de 40 % du eDFG. Figure 3. Résultats de l’étude FIDELIO(11). Après 2,6 ans de suivi, les patients traités par finérénone avaient une réduction significative du critère de jugement principal par rapport aux patients traités par placebo (HR 0,82 ; IC95% : 0,73-0,93 ; p = 0,001). Il y avait aussi une diminution significative du risque de survenue de MACE (AVC, infarctus du myocarde, décès d’origine cardiovasculaire) (HR 0,86 ; IC95% : 0,75- 0,99 ; p = 0,03). Le vériciguat Le vériciguat est un stimulateur de guanylate cyclase soluble oral, qui intervient via la voie de la guanosine monophosphate (GMP) cyclique. Il favorise la sensibilité de la guanylate cyclase soluble à l’oxyde nitrique (NO) endogène (stabilise la liaison) ce qui entraîne une vasorelaxation et une inhibition de la prolifération des muscles lisses(12). Il a été evalué chez des patients avec une insuffisance cardiaque à FE réduite. Au total, 10 % d’entre eux avaient un DFG estimé à moins de 30 ml/min/m2 et 42 % entre 30 et 60 ml/min/m2. Le critère de jugement principal était composite associant la mortalité cardiovasculaire et la survenue d’une hospitalisation pour insuffisance cardiaque (figure 4). Figure 4. Résultats du critère de jugement principal et dans les analyses de sous-groupe en fonction du DFG(13). Le critère de jugement principal est survenu chez 35,5 % des patients traités et chez 38,5 % des patients ayant reçu le placebo (HR 0,90 ; IC95% : 0,82- 0,98 ; p = 0,02). Les analyses en sous-groupe n’étaient pas en faveur de l’utilisation du vériciguat chez les patients ayant un DFG < 30 ml/min/1,73 m2. L’omecamtiv mecarbil L’omecamtiv mecarbil(14) est un activateur direct de la myosine cardiaque, agissant directement au niveau du sarcomère, ce qui a comme effet d’augmenter le volume d’éjection systolique et de favoriser le remodelage du ventricule gauche. Il a été évalué chez 8 256 patients avec une FEVG altérée (FEVG ≤ 35 %), ayant été hospitalisés pour un épisode de décompensation cardiaque dans l’année. Le DFG médian des patients inclus était de 58 ml/min/1,73 m2. Le critère de jugement principal était composite associant la mortalité d’origine cardiovasculaire et la survenue d’une hospitalisation pour insuffisance cardiaque. Après 21,8 mois de suivi (figure 5), on observe une diminution significative du risque de survenue du critère composite chez les patients traités par omecamtiv mecarbil (1 523/4 120 patients [37,0 %] vs 1 607/4 112 patients [39,1 %] — HR 0,92 ; IC95% : 0,86-0,99 ; p = 0,03) ; sans diminution de la mortalité cardiovasculaire (HR 1,01 ; IC95% : 0,92- 1,11). Figure 5. Résultats de l’étude et dans les sous-groupes d’intérêts GALACTIC-HF(14). Les analyses en sous-groupes sont en faveur d’une efficacité plus importante du traitement chez les patients ayant une FEVG < 28 % (HR 0,84 ; IC95% : 0,77-0,92).

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