Publié le 15 mar 2021Lecture 4 min
Hot topics en thrombose
Michèle DEKER, Paris
Le développement des anticoagulants oraux directs (AOD) se poursuit. Les questions résolues et en suspens dans deux domaines choisis : la maladie thrombo-embolique veineuse associée au cancer et la fibrillation atriale.
• Traitement de la MTEV associée au cancer
Le traitement de référence de la maladie thromboembolique veineuse (MTEV) associée au cancer est la daltéparine. Les anticoagulants oraux directs ont fait l’objet de plusieurs études dans cette indication et montré un effet comparable sur le risque MTEV à celui de la daltéparine. Cependant, l’edoxaban (Hokusai Cancer study) et le rivaroxaban (Select D study) se distinguent par une augmentation du risque d’hémorragie majeure versus daltéparine, en particulier de saignements digestifs plus fréquemment en cas de cancer digestif. Dans ce contexte, les résultats de l’étude Caravaggio avec l’apixaban étaient très attendus (Agnelli G et al. NEJM 2020 ; 382 : 1599-607). La non-infériorité de l’apixaban est atteinte dans cette étude (5,6 % de récidives thromboemboliques veineuses vs 7,9 % sous HBPM) sans différence sur le risque de saignements majeurs entre les deux comparateurs ; la seule en défaveur de l’apixaban concerne le risque de saignements pertinents non majeurs. Bien que ces trois études diffèrent par les critères d’évaluation (récidives thromboemboliques dans les études Select-D et Caravaggio, critère composite de récidive et saignements dans Hokusai) et la durée (6 vs 12 mois), les résultats plaident en faveur de l’efficacité des AOD.
Les recommandations françaises ont été revues en 2020 à la lumière des résultats de ces études. Elles préconisent : un traitement anticoagulant de 6 mois chez les patients porteurs d’un cancer actif et d’une MTEV (TVPP ou EP) ; la prescription d’une HBPM ou de l’apixaban ; en l’absence de cancer digestif ou uro-génital, il est possible d’utiliser l’edoxaban ou le rivaroxaban ; en cas d’insuffisance rénale, une HBPM est recommandée.
La question de prolonger le traitement au-delà de 6 mois reste en suspens. L’étude APICAT apportera des éléments de réponse. L’étude, en cours, teste deux posologies d’apixaban, 5 mg x 2/j et 2,5 mg x 2/j avec un objectif de non-infériorité, voire de supériorité de la plus faible dose. On s’oriente aujourd’hui vers une prise en charge individualisée de la thrombose associée au cancer, en tenant compte de la localisation du cancer, des caractéristiques du patient et du traitement anticancéreux. En effet, les interactions entre le traitement du cancer et les AOD posent des questions non résolues car ils sont susceptibles d’utiliser des transporteurs communs (PGP ou cytochromes) dont l’expression peut être modulée. Dans le contexte actuel avec la multiplicité des anticancéreux en développement, il est difficile de disposer d’une mise à jour des interactions potentielles. Les données actuellement disponibles sont souvent issues d’études in vitro ou chez l’animal, à défaut de preuves cliniques. Selon une revue de la littérature, moins de 2 % des associations de l’apixaban ou du rivaroxaban ave les anticancéreux seraient susceptibles de donner lieu à des interactions cliniquement significatives.
En attendant les résultats de l’étude Apicat, la décision de prolonger le traitement au-delà de 6 mois dépend du caractère actif ou non de la tumeur. Si le risque de récidive est estimé élevé, on a la possibilité de poursuivre le traitement anticoagulant par une HBPM ou un AVK, selon les recommandations. Le risque de récidive de MTEV reste cependant élevé en cas de cancer en rémission, ce qui légitime la poursuite des anticoagulants.
• Anticoagulants oraux dans la FA : un traitement à vie ?
Dans la pratique, les recommandations de traitement anticoagulant dans la FA semblent bien respectées, selon le registre EORP.
En cas de cardioversion, le traitement anticoagulant peut être transitoire pour une durée de 4 semaines ; il est interrompu si le score CHA2DS2- VASc est < 1 chez l’homme ou < 2 chez la femme. Après ablation par cathéter, la durée de traitement est de 2 mois, sa poursuite étant fonction du score de risque CHA2DS2-VASc.
Le risque de récidive est identique lorsque la FA est liée à une cause présumée temporaire, à celui de la FA liée à d’autres causes. Le traitement anticoagulant offre les mêmes bénéfices quelle que soit la cause.
Une enquête réalisée en France a montré que la survenue de saignements mineurs entraîne des adaptations souvent mineures (changement de dose ou de produit) du traitement anticoagulant par les prescripteurs, sans arrêt. Dans l’étude de registre NAXOS, le traitement le moins affecté dans ces conditions est l’apixaban.
Au final, le traitement anticoagulant est le plus souvent à vie dans la FA…
D’après un e-symposium organisé avec le concours de l’Alliance BMS/Pfizer « Hot topics en thrombose », avec la participation de A. Cohen, R. Martins, I. Mahé, F. Couturaud, P. Mismetti, L. Fauchier, N. Danchin et J.-C. Deharo
JESFC 2021
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