HTA
Publié le 15 juin 2022Lecture 16 min
Hypertension artérielle : la mesure oubliée !
Alberto TIRITILLI, Professeur au Collège de médecine des Hôpitaux de Paris (CMHP)
La pression pulsée augmente naturellement avec le vieillissement en raison de l’artériosclérose et reflète le degré de la rigidité artérielle. Ainsi, à côté des causes physiologiques, d’autres, celles-ci pathologiques, peuvent être responsables de cette élévation et notamment, l’insuffisance cardiaque, la régurgitation aortique importante, l’hyperthyroïdie. En l’absence de causes sous-jacentes, une pression pulsée augmentée est un signe de détérioration du système cardiovasculaire. Ceci comporte un risque accru de mortalité, une progression accélérée de la maladie, des effets cliniques indésirables dans les maladies chroniques, y compris cardiovasculaires et rénales.
Aujourd’hui, le traitement antihypertenseur met l’accent sur la pression artérielle systolique et diastolique et montre un intérêt assez limité pour la pression pulsée. Par ailleurs, il ne semble pas y avoir de médicaments spécifiques pour la traiter. Négliger ce facteur de risque indépendant signifie priver les patients hypertendus d’une réflexion thérapeutique intéressante capable d’aboutir à un traitement spécifique pour cette affection. Le contrôle de la pression pulsée est plus efficace avec les diurétiques thiazidiques et les dérivés nitrés à action prolongée par rapport à d’autres classes d’antihypertenseurs. Des recherches supplémentaires sont certainement nécessaires pour évaluer les avantages additionnels du contrôle de la pression pulsée par rapport à la thérapie conventionnelle de la pression artérielle.
Depuis plusieurs années, les recommandations portant sur le diagnostic et le traitement de l’hypertension artérielle (HTA) sont publiées régulièrement par l’American Heart Association et la Société internationale d’hypertension artérielle, elle-même associée à l’Organisation mondiale de la santé. Ceci présente l’avantage de définir un cadre clair non seulement pour déterminer les niveaux tensionnels, mais aussi l’approche thérapeutique. Cependant, le contenu de ces recommandations varie selon les années et demande à être reconsidéré(1). Nous savons que, pendant de nombreuses années, la classification de l’HTA s’est faite essentiellement sur la seule pression artérielle diastolique (PAD), alors que la pression artérielle systolique (PAS) est un bien meilleur prédicteur du risque cardiovasculaire. Ceci est conforté par les résultats obtenus dans le traitement de l’HTA systolique isolée du sujet âgé et qui a fait reconsidérer ce problème. Aujourd’hui, les chiffres tensionnels systoliques et diastoliques doivent être pris en compte comme évaluations indépendantes dans la sévérité de la maladie hypertensive.
Une des avancées importantes dans le traitement de l’HTA a été de considérer la courbe de pression artérielle comme l’association de deux composantes : la pression artérielle moyenne (PAM) et la pression artérielle pulsée (PP). La PAM est une pression potentielle, considérée comme constante. C’est un outil important, mais insuffisant pour définir la pression artérielle, car elle suppose un débit cardiaque constant et un degré de résistance artériolaire périphérique homogène. Or, nous savons que le cœur bat et que la pression artérielle change autour d’une valeur moyenne, la pression différentielle (appelée aussi PP). Ainsi, une information plus nuancée sur la pression artérielle devrait prendre en considération la PAM et la PP. Aujourd’hui, nous disposons d’importants travaux qui ont montré que la PP peut être considérée comme un facteur de risque cardiovasculaire indépendant. Le rôle de la PP dans la morbi-mortalité cardiovasculaire a été démontré dans l’HTA(2,3), la maladie coronarienne(4), l’insuffisance cardiaque(5), mais aussi, pour quelques auteurs, dans des populations considérées comme ayant une pression artérielle normale(6-8). Le travail pionnier de Madhavan et coll. a montré que la PP à elle seule pouvait être un facteur prédictif d’infarctus du myocarde. En effet, le risque relatif d’accident coronarien chez les sujets ayant une PP > 63 mmHg était multiplié par 3 par rapport au groupe de patients hypertendus ayant une PP < 47 mmHg. Par la suite, ces résultats ont été confirmés sur une plus large série de 5 730 hypertendus(2-3).
L’implication de la PP dans la morbi-mortalté cardiovasculaire a été démontrée par d’autres groupes de travail. Un des plus importants a été celui de Benetos et coll., qui ont évalué la PP sur une cohorte de 20 000 hommes ayant bénéficié d’un bilan de santé pendant les années 1972-1977. Les résultats ont montré que la mortalité cardiovasculaire était positivement corrélée au niveau de PP, ceci après ajustement à l’âge, au niveau de la pression moyenne et aux autres facteurs de risque. De plus, l’étude précise les causes de mortalité et montre que la PP était un déterminant majeur dans la mortalité coronaire, mais pas dans celle cérébro-vasculaire. Dans une analyse subséquente, ce même groupe observe qu’une PP > 65 mmHg s’accompagne d’une franche élévation du risque cardiovasculaire et notamment coronaire même avec des valeurs de PAS et PAD dans le rang de la normale(7). Des résultats comparables ont été démontrés par d’autres études portant sur d’importantes cohortes des sujets normotendus et hypertendus et notamment dans la population de Framingham(8) et dans la britannique MRC(9). La PP fait toujours l’objet de publications, parmi les plus récemment divulguées, il faut mentionner l’excellente revue de Tang et coll.(10). Le but de cet article est, d’une part, de faire un point sur cette entité, à la lumière des dernières publications et, d’autre part, de chercher quelques stratégies efficaces de traitement antihypertenseur spécifique.
• Définition et rappel physiologique
La pression pulsée est définie comme la différence entre la PAS et la PAD qui représentent les pressions circulatoires maximales et minimales pendant le cycle cardiaque(11). Les valeurs « normales » pour la PAS et la PAD sont estimées à 120 mmHg et 80 mmHg, respectivement, ce qui donne une valeur approchante de 40 mmHg pour la PP moyenne. Ainsi, une variation de PP (delta PP) est directement proportionnelle au changement de volume (delta V) et inversement corrélée à la compliance artérielle. Puisque la variation de capacité est essentiellement liée au volume éjecté, nous pouvons approximativement dire que la PP est égale au débit cardiaque divisé par la compliance artérielle. Chez un sujet normal, nous savons que le volume d’éjection du ventricule gauche est d’environ 80 ml et que la compliance est estimable à 2 ml/mmHg. Ceci confirme que la PP normale est d’environ 40 mmHg, la compliance artérielle étant, elle, égale à delta V/delta P. Une PP < 25 % de PAS est basse de façon inappropriée, tandis qu’une PP > 100 mmHg de PAS est considérée comme haute(11). Sachant que les chiffres de PP doivent être toujours considérés dans le contexte, il a été montré qu’une PP haute est le plus souvent responsable de maladies cardiovasculaires et du risque de maladie coronaire(12). De plus, elle semble être un marqueur indépendant de la progression de la maladie et de la mortalité toutes causes confondues(13-15).
• Physiopathologie et épidémiologie
La pathogenèse de la PP peut varier considérablement d’une population à l’autre. Son élévation se voit essentiellement dans 3 situations : dans l’HTA systolique isolée (PAS > 140 et PAS < 90 mmHg) où la PP est par définition supérieure à 50 mmHg, dans l’HTA systolo-diastolique avec augmentation disproportionnée par rapport à la diastolique (ex. 200/100 mmHg), et enfin, chez des patients considérés non hypertendus (PAS < 140 et PAD < 90 mmHg), mais avec une PP élevée (ex. 135/65 mmHg).
Sur le plan physiopathologique, le niveau de la PP reflète le degré de rigidité des gros troncs artériels. Il est intéressant de noter qu’une PP augmentée est une conséquence normale de la sénescence(16) (tableau 1). Nous savons que la PAS comme la PAD augmentent régulièrement avec l’âge jusqu’à environ 55 ans, après quoi elles divergent à mesure que les pressions diastoliques diminuent et que les pressions systoliques continuent d’augmenter(17). On assiste ainsi à un élargissement progressif de la PAS au-delà de 60 ans avec l’apparition d’une HTA systolique isolée, par définition PAS > 130 mmHg et PAD < 80 mmHg. Plusieurs auteurs rapportent une prévalence pouvant atteindre 50 % chez les sujets de plus de 65 ans dans les pays industrialisés(18). Pour mémoire, une enquête épidémiologique déjà ancienne menée aux États-Unis, la NHANES III, met en évidence une prévalence d’HTA > 60 % chez les sujets de plus de 60 ans(19). Plus récemment, une PAS isolée chez le sujet âgé représenterait environ 65 %(20,21).
Sur le plan hémodynamique, l’augmentation de la PP liée à l’âge et à l’hypertension artérielle systolique « pure » peut être attribuée rapidement à l’artériosclérose. En effet, en cas de rigidité artérielle accrue, la vitesse de l’onde de pouls va être accélérée, entraînant un retour précoce des ondes de réflexion, et donc une sommation de l’onde incidente et de l’onde réfléchie pendant la composante systolique de la pression artérielle. Ceci montre que pour une même valeur de PAM, un accroissement de PP est lié, d’une part à l’augmentation de la PAS, d’autre part, à la diminution de la PAD(6). On rappelle également que la vitesse de l’onde de pouls est un indice direct de la rigidité aortique et un fidèle marqueur du risque cardiovasculaire(22), ainsi qu’un déterminant indépendant de mortalité chez les patients hémodialysés(23). Une élévation de la PP a été aussi observée chez les athlètes bien entraînés. L’exercice augmente à la fois le volume d’éjection et le débit cardiaque tout en diminuant les résistances vasculaires périphériques, ce qui entraîne une PP accrue. L’augmentation de la PP chez les patients de moins de 45 ans est peu fréquente. Plusieurs études épidémiologiques ont cherché à établir un lien génétique. Wain et coll. ont montré six gènes spécifiques pour un risque accru de développer une PP élevée, mais le mécanisme et la prévalence de ces variantes n’ont pas encore été confirmés(24,25). En revanche, de plus en plus d’attention est portée à l’obésité pédiatrique et plus communément au syndrome métabolique, tous deux capables d’augmenter la PP et de la considérer comme un marqueur de détérioration cardiovasculaire(26).
• Diagnostic différentiel
D’une manière générale, chez un patient présentant une nouvelle HTA avec ou sans élévation de la PP, les valeurs de la pression artérielle doivent être confirmées par des techniques de mesure précise (figure 1). Si la mesure de la pression artérielle auscultatoire au cabinet reste la technique traditionnelle la plus utilisée pour diagnostiquer l’HTA, nous connaissons aussi ses limites, sa faible reproductibilité, sa vulnérabilité face à des causes confondantes, y compris l’effet de blouse blanche et des variations de mesure de la PAS plus importantes chez les patients âgés(27,28,29). L’American Heart Association considère la mesure ambulatoire de la pression artérielle (MAPA) sur 24 heures comme la référence pour l’évaluation de la pression artérielle(30). D’autres études montrent que la surveillance automatisée de la pression artérielle au cabinet peut être considérée comme équivalente à la MAPA, conservant ainsi le confort des patients avec cette technique(27,31). De façon tout à fait volontaire, je ne parle pas de l’automesure à domicile. En conséquence, le diagnostic et les traitements pharmacologiques ultérieurs doivent être vérifiés par une de ces deux techniques. Face à une élévation de la PP, le clinicien doit éliminer les pathologies sous-jacentes qui peuvent impliquer une augmentation de cette dernière dans la symptomatologie.
Au-delà des conditions physiologiques comme le vieillissement, la grossesse, l’athlète bien entraîné, le clinicien doit éliminer toutes les causes pathologiques pouvant entraîner un hyper débit cardiaque. Parmi les plus importantes, notons l’insuffisance aortique(16) et ses causes secondaires, y compris l’anévrisme(32), la dissection(33,34), mais aussi l’endocardite(35) et les troubles du tissu conjonctif(36). De même, les fistules artério-ve neuses élèvent de manière continue à la fois le débit cardiaque et la PP, ce qui expose le patient à un risque d’insuffisance cardiaque à haut débit(37, 38). Parmi les autres diagnostics différentiels plus anecdotiques, rappelons que le béribéri (la carence en thiamine) se manifestera d’abord par une neuropathie périphérique et à plus long terme par une insuffisance cardiaque à haut débit(39). Pour Houston, une PP accrue est une caractéristique commune du choc anaphylactique(40,41) et, dans le choc septique, une PP élevée peut même être considérée comme un indicateur de mortalité(42). Une élévation de la PP a été aussi observée dans l’hypertension intracrânienne dont les mécanismes pour le moment restent spéculatifs(43). La thyrotoxicose induit une augmentation de la PP par son effet sur le métabolisme basal(44) ; de plus, il a été démontré qu’elle diminue après traitement par bêtabloquants(45).
• Résultats cliniques
L’impact d’une PP élevée sur les résultats cliniques et sur la morbi-mortalité globale est largement documenté. De même, il ne semble plus faire de doute qu’une PP élevée est responsable d’une morbi-mortalité élevée. Néanmoins, aujourd’hui encore reste débattue l’utilité relative de la PP par rapport à la PAS ou à la PAD pour prédire le risque cardiovasculaire(13-15, 46,47).
Nous disposons de plusieurs essais cliniques qui ont démontré la valeur prédictive d’une augmentation de la PP dans les maladies coronariennes(15), l’insuffisance cardiaque congestive(48), l’accident vasculaire cérébral(49) et la mortalité générale toutes causes confondues(13,14) avec une augmentation statistiquement significative du risque d’événements cardiovasculaires composites à partir d’une PP > 80 mmHg(50). L’étude Framingham Heart Study comportant 1 924 patients âgés de 50 à 79 ans a conclu que chaque augmentation de 10 mmHg de PP donnait collectivement un risque accru de 23 % de développer une maladie coronarienne(15) et chaque augmentation de 16 mmHg était associée à un risque accru de 55 % de développer une insuffisance cardiaque congestive(51).
D’autres essais ont démontré qu’une augmentation de 10 mmHg de la PP, incrémentait de 11 % le risque d’accident vasculaire cérébral et de 16 % la mortalité toutes causes confondues(52). Il a été aussi publié qu’une PP élevée est également associée au risque de développer une fibrillation atriale et ceci indépendamment d’autres valeurs de pression artérielle telles que PAS, PAD et PAM(53). Parmi les autres importantes études, il faut mentionner l’essai MERFIT. Celui-ci a collectionné 342 815 patients âgés de 35 à 57 ans sans antécédents de diabète ou nécrose myocardique, il a montré que la PAS et la PAD étaient plus fortement corrélées aux atteintes cardiovasculaires par rapport à la PP et notamment à la mortalité. En revanche, chez les patients âgés de moins de 45 ans ou plus âgés l’augmentation de la PP était associée à une plus forte mortalité, quel que soit le contrôle de la pression artérielle(54). Une autre importante étude publiée en 2009, la San Antonio Heart Study incluant 3 632 patients âgés de 25 à 64 ans sans antécédents de diabète ou maladies cardiovasculaires, a montré que des patients préhypertensifs avec une PP basse (tertile inférieure) étaient considérés à bas risque comparé à ceux avec une PP dans le tertile supérieur(14). Plus récemment, la JPHC Study, impliquant 33 372 patients japonais âgés de 40 à 69 ans sans histoire clinique de maladies cardiovasculaires, a montré que les augmentations de la PP, PAS, PAD étaient toutes positivement associées au risque d’accident vasculaire cérébral. De plus, l’élévation de la PP chez les patients par ailleurs normotendus a également augmenté le risque d’accident vasculaire cérébral(55).
L’importance de la PP est reconnue au-delà du champ cardiovasculaire. Une PP augmentée prédit de très mauvais résultats dans l’insuffisance rénale chronique. Dans une étude portant sur 329 patients atteints d’insuffisance rénale légère à modérée, la PP et la PAS initiales étaient corrélées à une diminution du débit de filtration glomérulaire(56). Une PP > 65 mmHg a été associée à une détérioration plus importante de la fonction rénale et peut être considérée comme meilleur prédicteur des résultats rénaux indésirables que la PAS ou la PAD.
L’étude phare RENAAL portant sur 1 513 patients atteints de néphropathie diabétique et hypertendus a non seulement révélé qu’une PP de base plus élevée était associée à un plus grand risque de progression de la maladie, mais aussi que ce même risque était réduit après contrôle de la PP par le losartan. Retenons que chaque augmentation de 10 mmHg de PP conférait un risque accru de 17 % de développer une maladie rénale terminale(57). Dans l’insuffisance rénale chronique et chez les patients hémodialysés, les données suggèrent une augmentation de la PP, qui est positivement corrélée au taux accru de mortalité. Il serait intéressant de montrer si une réduction de la PP pourrait améliorer le pronostic pour ces patients. Une PP élevée ne semble pas être un bon indicateur pronostique quant à la survenue d’infarctus ou accident vasculaire cérébral post-procédure chez les patients bénéficiant d’une dilatation coronarienne percutanée(58,59). Dans une étude portant sur 10 876 patients bénéficiant d’une dilatation coronaire percutanée, les patients porteurs d’une PP augmentée étaient plus souvent des femmes avec hypercholestérolémie, insuffisance rénale, diabète et atteintes vasculaires multiples(59). Par conséquent, il est admissible que la PP augmentée soit plutôt indicateur de patients à risque plus élevé avec un pronostic plus sombre en raison d’une mauvaise santé vasculaire et d’autres facteurs de risque préexistants.
• Traitement
Le traitement de la PP reste actuellement un des arguments les plus débattus. Une attention spécifique devrait être accordée au traitement d’une PP élevée lors de la découverte d’une HTA. Malgré l’abondante littérature, aucune classe thérapeutique ne semble s’imposer. Nous constatons seulement l’expression d’une certaine tendance. Ceci est probablement lié au fait que le traitement actuel de l’HTA est largement focalisé sur la réduction del a PAS et de la PAD, même si un traitement bien conduit et efficace ne réduit pas toujours la PP(60,61). Les plus importantes études publiées ont montré que différents médicaments antihypertenseurs ont des effets variables sur la PP, les diurétiques thiazidiques étant largement supérieurs aux bêtabloquants dans la réduction de la PP. Cushman et coll., ont montré que, après 1 an de traitement avec l’hydrochlorothiazide, la réduction de la PP était plus importante comparée à la clonidine, au captopril, au diltiazem, à l’aténolol et la prazosine. L’hydrochlorothiazide a diminué la PP de 8,6 mmHg, la clonidine de 6,3 mmHg, le captopril de 4,1 mmHg, le diltiazem de 5,5 mmHg, l’aténolol de 4,1 mmHg et la prazosine de 5 mmHg(62). En 2003, Chang et coll. ont montré, chez des patients âgés recevant un ou deux antihypertenseurs, que la PP moyenne était de -7 mmHg chez ceux recevant des diurétiques seuls ou en association avec des bêtabloquants par rapport à ceux utilisant des bêtabloquants seuls(63). Deux essais contrôlés randomisés en double aveugle ont démontré l’efficacité de l’isosorbide dinitrate dans la diminution de la PAS sans changement significatif de la PAD ou de la fréquence cardiaque, indiquant que ce médicament peut être un choix efficace pour contrôler la PP et traiter l’hypertension systolique isolée(64,65). Pour Williams et coll., la supplémentation en acide folique était supérieure au placebo pour augmenter la compliance artérielle systémique et réduire la PP brachiale sans modifier la pression artérielle moyenne(66). Plusieurs études, dont l’essai TNT, ont évoqué qu’une baisse agressive de la PAD < 85 mmHg, selon un effet de courbe en J, pouvait augmenter le risque d’événements cardiovasculaires. Cela peut être dû à une comorbidité subclinique parallèle ou à une perfusion coronaire insuffisante pendant la diastole conduisant à une ischémie myocardique(67,68). Toutefois, l’événement de la courbe en J a été contesté par de nombreux autres grands essais contrôlés randomisés, dont l’essai HOT(69). De plus, l’étude cardiaque de San Antonio a révélé qu’une PAD faible n’était pas corrélée à la mortalité cardiovasculaire, mais à toutes causes liées à l’athérosclérose(14). Cependant, la capacité de réduire la PP et les avantages sur la mortalité toutes causes confondues à long terme des médicaments antihypertenseurs ont été largement attribués à leurs effets prédominants sur la PAS(70,71). En conséquence, les recommandations actuelles sur l’HTA et les objectifs du traite- ment antihypertenseur sont cadrés sur la réduction de la PAS et moins sur le contrôle de la PP(72). De même, l’essai SPRINT et les recommandations de l’American College of Cardiology/AHA de 2017 sur l’HTA insistent sur l’avantage d’un contrôle intensif de la PAS(73). Une publication très récente montre la pertinence pronostique de la PP dans l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée. L’étude comporte 4 796 patients atteints d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée de l’essai PARAGON-HF. Les patients ont bénéficié de valsartan et sacubitril/valsaltan avant la randomisation. Les patients étaient répartis par quartile de PP. L’influence de la PP de base a été évaluée sur le taux d’hospitalisation total pour insuffisance cardiaque et décès cardiovasculaires. Lors de la prospection, la PP médiane était de 58 mmHg. L’étude montre une association non linéaire d’aspect en J entre la PP et les résultats. Les modèles de Cox ont montré que les patients du quartile PP le plus élevé présentaient un risque supérieur concernant le nombre total d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque et d’infarctus du myocarde par rapport à ceux du deuxième quartile PP à risque plus faible. Le traitement sacubitril/valsartan montre une diminution de la PP associée à une réduction du risque d’hospitalisation totale. Après un an de traitement, la PP était significativement plus faible dans le groupe sacubitril/valsartan que dans le groupe valsartan (-3,0 mmHg ; p < 0,001). En conclusion, la PP était un prédicteur indépendant des événements cardiovasculaires chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection préservée recrutés dans l’étude PARAGON- HF. De plus, le sacubitril/valsartan a davantage abaissé la PP par rapport au valsartan(74). Il semble désormais clair qu’une PP élevée doit être considérée comme un facteur de risque de mortalité cardiovasculaire indépendant. Nous avons déjà considéré la PP comme marqueur indépendant de mortalité toutes causes confondues. Une étude très récente le confirme. Dans cette étude, la PP brachiale a été utilisée, d’une part, comme mesure de la rigidité artérielle, d’autre part, pour déterminer son impact sur la mortalité toutes causes confondues et/ou spécifiques dans une population rurale chinoise. Au total, 13 223 ont participé à l’étude. Au cours d’un suivi moyen de 5,96 ans, la mortalité toutes causes confondues était de 78,61/10 000 personnes/années. L’association de la PP avec toutes les causes et d’autres causes de mortalité était significative. Finalement, le risque de mortalité toutes causes confondues et autres a augmenté avec l’accroissement de la PP. Ainsi, une PP plus élevée peut amplifier le risque de mortalité toutes causes confondues et cardiovasculaires chez les hommes et les personnes < 65 ans, ainsi que le risque d’autres causes de mortalité chez les hommes dans cette population(75). Des recherches pharmacologiques supplémentaires sont certainement nécessaires pour mieux explorer sa réduction en tant qu’indicateur de la réponse clinique au traitement antihypertenseur.
Références sur demande à la redaction : biblio@axis-sante.com
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