Diabéto-Cardio
Publié le 03 déc 2024Lecture 4 min
Diabète de type 2 : jusqu’où faire baisser la pression artérielle ? (ou le retour d’un éternel débat…)
Patrice DARMON, Marseille
L’hypertension artérielle (HTA) est extrêmement fréquente chez les personnes vivant avec un diabète de type 2 (DT2) et contribue fortement à l’élévation du risque cardiovasculaire chez ces patients. S’il est démontré depuis longtemps que la réduction de la pression artérielle (PA) permet d’améliorer le pronostic cardiovasculaire, les cibles optimales de PA à atteindre chez les patients présentant un DT2 restent débattues. On se souvient en particulier des résultats de l’étude ACCORD échouant à démontrer la supériorité d’un objectif de PA systolique (PAS) < 120 mmHg versus 140 mmHg. Les analyses en sous-groupes des essais randomisés menés avec un design similaire après ACCORD sont discordantes et ne permettent pas de savoir avec certitude si le bénéfice cardiovasculaire obtenu grâce à un contrôle intensif de la PA chez les personnes indemnes de diabète est transposable chez les patients vivant avec un DT2 et donc de statuer clairement sur les cibles à atteindre dans cette population.
L’hypertension artérielle (HTA) est extrêmement fréquente chez les personnes vivant avec un diabète de type 2 (DT2) et contribue fortement à l’élévation du risque cardiovasculaire chez ces patients. S’il est démontré depuis longtemps que la réduction de la pression artérielle (PA) permet d’améliorer le pronostic cardiovasculaire, les cibles optimales de PA à atteindre chez les patients présentant un DT2 restent débattues. On se souvient en particulier des résultats de l’étude ACCORD échouant à démontrer la supériorité d’un objectif de PA systolique (PAS) < 120 mmHg versus 140 mmHg. Les analyses en sous-groupes des essais randomisés menés avec un design similaire après ACCORD sont discordantes et ne permettent pas de savoir avec certitude si le bénéfice cardiovasculaire obtenu grâce à un contrôle intensif de la PA chez les personnes indemnes de diabète est transposable chez les patients vivant avec un DT2 et donc de statuer clairement sur les cibles à atteindre dans cette population.
Présentée lors du congrès de l’AHA en novembre 2024 et publiée simultanément dans le New England Journal of Medicine, l’étude BPROAD (Blood Pressure Reduction in Overweight and Obese Adults with Diabetes) vise à déterminer si un contrôle intensif de la pression artérielle (PA) est plus efficace qu’un contrôle standard pour réduire les événements cardiovasculaires majeurs chez les patients présentant un DT2 et une HTA. Mené dans 145 centres à travers la Chine, l’essai a inclus 12 821 patients de plus de 50 ans présentant un DT2, une PAS élevée et à haut ou très haut risque cardiovasculaire : âge moyen 63,8 ans, hommes 54,7 %, PA 140/76 mmHg avec 99 % des patients sous traitement antihypertenseur, ancienneté du diabète 10,3 ans, HbA1c 7,6 %, IMC 26,7 kg/m2, antécédent d’événement cardiovasculaire 22,6 %, fumeurs actifs 25,1 %, insuffisance rénale chronique stade 3 ou plus 7,6 %, traitement par statine 65 % des cas, traitement par aspirine 50 % des cas. Les participants ont été randomisés (en ouvert) en deux groupes, l’un avec un objectif de pression systolique < 120 mmHg (contrôle intensif), l’autre avec un objectif < 140 mmHg (contrôle standard). Dans les deux groupes, les cliniciens étaient incités à suivre les recommandations internationales pour le choix des traitements antihypertenseurs, antihyperglycémiants et hypolipémiants. Le critère principal de jugement était un composite associant infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, insuffisance cardiaque justifiant une hospitalisation ou l’instauration d’un traitement ou décès de cause cardiovasculaire. À un an, la PAS était en moyenne de 133,2 mmHg dans le groupe contrôle standard vs 121,6 mmHg dans le groupe contrôle intensif et ce delta s’est maintenu tout au long de l’étude. Au terme d’un suivi moyen de 4,2 ans durant lesquels les autres facteurs de risque ont évolué de façon similaire dans les deux groupes, le contrôle intensif a réduit les événements cardiovasculaires majeurs de 21 % par rapport au contrôle standard (HR 0,79 [IC95% 0,69-0,90] ; p < 0,001 ; soit 1,65 vs 2,09 événements pour 100 patients-année). Ce bénéfice était observé à l’identique dans tous les sous-groupes préspécifiés (incluant sexe, âge < ou ≥ 65 ans, âge < ou ≥ 80 ans, niveau initial de PAS, niveau initial du taux d’HbA1c, ancienneté du diabète, ancienneté de l’HTA et présence ou non d’antécédents de maladie cardiovasculaire). Parmi les critères secondaires, seul le risque d’accident vasculaire cérébral fatal ou non a également diminué de façon significative dans le groupe contrôle intensif (HR 0,79 [IC95% 0,67-0,92]). On retrouve également dans ce groupe une réduction du risque d’apparition d’une albuminurie (HR 0,87 [IC95% 0,77-0,97]). Le risque d’effets indésirables sévères était identique dans les deux groupes, mais on retrouvait dans le groupe contrôle intensif une augmentation significative des cas d’hypotension symptomatique (0,12 % vs 0,02 %) et d’hyperkaliémie > 5,5 mmol/l (2,8 % vs 2,0 %).
La plupart des recommandations internationales s’accordent aujourd’hui pour fixer une cible de PAS entre 120 et 130 mmHg, sous couvert d’une bonne tolérance, chez les patients vivant avec un DT2. Quinze ans après les résultats négatifs d’ACCORD (sans doute liés à un manque de puissance), les conclusions de l’étude BPROAD pourraient conduire à proposer désormais une cible de PAS inférieure à 120 mmHg avec une vigilance accrue sur les effets secondaires des traitements, sous réserve de pouvoir être extrapolés à des populations non chinoises. Il faut toutefois souligner le faible recours aux inhibiteurs de SGLT2 et agonistes des récepteurs du GLP-1 dans BPROAD (10,4 % et 4,4 %, respectivement) : l’usage de plus en plus répandu chez les patients vivant avec un DT2 de ces molécules aux propriétés cardioprotectrices pourrait également modifier les conclusions de ce type d’étude et changer la donne.
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