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Congrès et symposiums

Publié le 07 fév 2012Lecture 6 min

Hypertension artérielle et fibrillation atriale

M. DEKER

31es Journées d’HTA

L’hypertension artérielle (HTA) et la fibrillation atriale (FA) sont à la fois très fréquentes et étroitement intriquées. La prévalence de la FA est estimée à environ 600 000 à 1 million en France ; son incidence a notablement augmenté pour atteindre 110 à 130 000 nouveaux cas par an. Le facteur de risque le plus souvent associé à cette pathologie rythmique est l’HTA. La prévention primaire de la FA passe déjà par le contrôle de la PA.

Plusieurs facteurs expliquent l’augmentation de prévalence de la FA : l’âge, dont l’avancée est clairement associée à la FA et à l’HTA ; l’HTA, elle-même responsable d’un remodelage ventriculaire gauche et d’une dilatation de l’oreillette gauche ; parmi les autres facteurs de risque, l’obésité, le diabète, le tabagisme, l’alcool, l’allongement de l’espace PR qui traduit une augmentation de la pression pulsée (PP). Parmi ces facteurs de risque, certains sont modifiables, tels que l’HTA, l’obésité, le diabète ou le tabagisme, qui expliquent, conjointement à la maladie coronaire, 45 % des FA. Certains sont des facteurs de risque indépendants (âge, PR, souffle cardiaque, PAS, PP).   Faut-il faire un dépistage systématique de la FA ? Les FA diagnostiquées ne forment que la partie émergée de l’iceberg. En effet, il existe des FA silencieuses, reconnues a posteriori au Holter chez des patients ayant fait un accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique, ce qui pose la question d’un dépistage systématique chez les sujets à risque. Plusieurs méthodes sont disponibles pour dépister les FA silencieuses : le Holter ECG, d’autant plus efficace qu’il est prolongé (48 h font mieux que 24 h) ; le monitoring en continu, soit par système implantable (Reveal), soit par système externe (R-test, Spider Flash). Une fois détecté le trouble du rythme, il faudra prendre une décision thérapeutique en s’aidant des scores de risque ischémique (CHADS2, CHA2DS2-VASc) et hémorragique (HAS-BLED) pour évaluer la balance bénéfice/risque du traitement anticoagulant. Ces deux types de score ont en commun 3 facteurs, l’HTA, l’âge et les antécédents cérébrovasculaires. Dans ce contexte, l’arrivée de nouveaux anticoagulants devrait modifier quelque peu la donne.   Comment mesurer la PA chez un sujet avec FA ? Dans ce domaine, les études de validation des appareils sont rares et portent sur de petits effectifs. Elles couvrent néanmoins la mesure clinique, l’automesure et la MAPA. Aucune de ces études ne montre de concordance entre les mesures de PAD réalisées par les appareils de mesure automatique et manuelle ; la mesure de la PAS est possible avec toutefois des valeurs très dispersées et une très large déviation standard de la différence de mesure (qui évalue la variabilité des mesures), ce qui fait des appareils de mesure automatique des moyens de mesure de la PA peu fiables chez les sujets en FA.   Au final, pour mesurer la PA chez ces patients en FA, il est nécessaire de multiplier les mesures auscultatoires, sans chercher à mesurer la PAD ; les mesures oscillométriques ne sont pas fiables.   Traitement de l’HTA en cas de FA Il faut rechercher une HTA chez un patient en FA car ces deux pathologies sont liées : la baisse de la PA diminue le risque de nouveaux épisodes de FA. En outre, en traitant l’HTA, on diminue aussi le risque d’AVC ischémique et hémorragique. La Société européenne de cardiologie (ESC) recommande : un bloqueur du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA), ARA II ou IEC, dans la FA persistante ; un bêtabloquant ou un inhibiteur calcique (ICa) bradycardisant dans la FA permanente. En prévention de la FA, des analyses préspécifiées de plusieurs études renseignent sur l’intérêt des traitements : TRACE et CHARM chez des patients avec dysfonction VG en post-IDM ont montré une diminution du risque de FA chez les patients hypertendus traités par inhibiteur du SRAA versus placebo ; chez les hypertendus, LIFE et VALUE ont montré la supériorité d’un sartan sur un bêtabloquant et un ICa respectivement. Chez des patients dont la FA avait été réduite, en association avec l’amiodarone, les sartans sont plus efficaces qu’un placebo en termes de récidive. Chez des patients après réduction de FA, non hypertendus, les sartans n’ont pas montré d’effet sur la récidive dans l’étude GISSI. Mais dans une étude chez des hypertendus à risque après réduction de la FA, le telmisartan est supérieur au ramipril, lui-même supérieur à l’ICa. Trois métaanalyses ont été réalisées. La première (en 2005 sur 50 000 patients) a montré un bénéfice significatif de 28 % des inhibiteurs du SRAA, versus autres antihypertenseurs. La deuxième (2010 sur 80 000 patients) montre un bénéfice de 35 % sur la récidive ou la survenue de FA. La troisième (91 000) confirme ces bénéfices, encore plus importants chez les patients en prévention secondaire de la FA. En prévention primaire ou secondaire, les bloqueurs du SRAA diminuent le risque de FA de 25 %. Le rationnel de l’utilisation des bloqueurs du SRAA s’appuie sur leur effet bénéfique sur le stress et le remodelage auriculaires. Ils pourraient aussi agir sur l’hypokaliémie, laquelle est étroitement liée au risque de FA. L’association FA et hypokaliémie doit faire évoquer un hyperaldostéronisme primaire. Au total, l’HTA est un facteur de risque de FA et en aggrave le pronostic. Ces deux pathologies associées augmentent le risque d’AVC hémorragique sous anticoagulant. Le traitement de l’HTA réduit le risque d’AVC et d’hémorragie cérébrale et probablement aussi le risque de récidive de FA. Les données en faveur d’un traitement par bloqueur du SRAA sont de plus en plus nombreuses pour prévenir une récidive de FA chez les hypertendus.   Comment traiter la FA chez l’hypertendu ? Les dernières recommandations de l’ESC stratifient le traitement de la FA pour le contrôle du rythme, selon l’existence ou non d’une HVG : antiarythmiques classiques en l’absence d’HVG ; si HVG, dronédarone, dont le déremboursement repose la question du choix thérapeutique (pourquoi ne pas utiliser le sotalol ?). Chez les hypertendus, la place de l’ablation n’est pas établie ; l’amiodarone devrait probablement la précéder. En présence d’une HVG mineure ou en son absence, et sans dilatation de l’oreillette gauche, l’ablation est probablement rapidement envisageable, avant de recourir aux antiarythmiques (flécaïne, propafénone, sotalol, puis amiodarone). Dans la stratégie de contrôle de la fréquence, les bêtabloquants ou les ICa sont privilégiés, les digitaliques ayant un rôle marginal. La prévention de la FA par les bloqueurs du SRAA bénéficie d’un rationnel physiopathologique fort (inhibition via l’inhibition de l’angiotensine II des facteurs de croissance d’où une action sur le remodelage structurel des cavités cardiaques et électrophysiologique). Ce sont les seuls médicaments, parmi les antihypertenseurs pouvant postuler à un effet préventif antiarythmique. Cliniquement, leur bénéfice est prouvé, mais seulement s’il existe une autre indication, telle l’HTA ou l’insuffisance cardiaque, à les prescrire. Les dernières recommandations de l’ESC classent les bloqueurs du SRAA en IIa A et IIa B en prévention primaire et secondaire respectivement. Quant aux bêtabloquants, hormis leur intérêt comme ralentisseurs de la fréquence cardiaque et dans l’insuffisance cardiaque, ils suscitent moins d’intérêt aujourd’hui dans le traitement de l’HTA. Les ICa sont, pour leur part, dépourvus d’effet antiarythmique. D’après un symposium du laboratoire Boehringer Ingelheim, avec la participation de P. Gosse (Bordeaux), R. Asmar (Paris), O. Hanon (Paris) et J.-C. Deharo (Marseille)

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