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HTA

Publié le 26 juin 2012Lecture 5 min

Intérêt de la PPC dans l’HTA réfractaire du patient apnéique

J.-P. BAGUET, CHU de Grenoble

Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) est la conséquence d’un collapsus des voies aériennes supérieures. Sa prévalence est estimée entre 5 et 10 % de la population générale, plus élevée chez l’homme que chez la femme, augmentant avec l’âge pour atteindre un plateau vers la soixantaine. Son diagnostic est porté par la polysomnographie ou la polygraphie de ventilation, avec un index d’apnées-hypopnées (IAH) > 10 par heure d’enregistrement. Le traitement de référence du SAOS est la pression positive continue par voie nasale (PPC).

Les principaux stimuli à l’origine des mécanismes physiopathologiques impliqués dans les complications cardiovasculaires du SAOS sont au nombre de quatre : alternance hypoxie-réoxygénation, alternance hypercapnie-hypocapnie, fragmentation du sommeil et variations de pression et de volume intrathoraciques.   SAOS et hypertension : quelles relations ?   La relation entre SAOS et hypertension artérielle (HTA) est maintenant bien démontrée, de type dose-réponse : plus le SAOS est sévère, plus l’incidence et la prévalence de l’HTA sont élevées. Cette relation persiste après avoir tenu compte de facteurs potentiellement confondants tels que l’âge, le sexe ou encore l’indice de masse corporelle. Les mécanismes expliquant l’élévation des chiffres tensionnels au cours du SAOS sont nombreux.   En premier lieu, il existe une hyperactivité sympathique bien mise en évidence par l’élévation des taux de catécholamines circulantes ou mieux, par les données de la microneurographie du nerf péronier (MSNA, figure 1).   Figure 1. Microneurographie du nerf péronier. Noter les « bouffées sympathiques » (SNA) maximales en fin d’apnées (OSA) avec élévation tensionnelle (BP) concomitante.   Il existe par ailleurs une diminution de la sensibilité baroréflexe, une augmentation de la variabilité de la pression artérielle (PA), une inflammation systémique, un stress oxydatif augmenté et une dysfonction endothéliale. De plus, plusieurs systèmes neuro-hormonaux ou humoraux sont activés au cours du SAOS : système rénine angiotensine-aldostérone (SRAA), peptides natriurétiques, NO ou encore endothéline. Enfin, les anomalies métaboliques sont nombreuses et fréquentes chez le patient apnéique, expliquant en partie l’HTA : surpoids (voire obésité), hyperinsulinisme, augmentation de la leptine circulante.   Une étude récente s’est intéressée à la mobilisation des fluides (mesurée par impédance bioélectrique) des membres inférieurs vers le haut du corps, en particulier le cou dans l’HTA. Elle a montré que cette mobilisation est plus importante lorsque l’HTA est réfractaire (N = 25) que lorsqu’elle est contrôlée par le traitement médical (N = 15). Dans cette même étude, l’IAH augmentait de 58 % pour chaque réduction de 100 ml du volume des fluides des membres inférieurs. Ces données très intéressantes apportent un éclairage nouveau sur la physiopathologie de l’HTA liée au SAOS. Ainsi, certains patients seraient plus sujets à la mobilisation des fluides de leurs membres inférieurs vers le haut du thorax et le cou, entrainant ainsi SAOS et résistance au traitement de leur HTA.   Caractéristiques de l’HTA liée au SAOS   L’HTA est très fréquente, plus de 60 % des patients apnéiques étant hypertendus. Le contrôle tensionnel est d’autant plus faible que le SAOS est sévère. De plus, près de 80 % des patients porteurs d’une HTA réfractaire (PA non à l’objectif malgré les règles hygiéno-diététiques et une trithérapie antihypertensive à doses optimales comportant un diurétique thiazidique) ont un SAOS. Cette HTA est par ailleurs à prédominance diastolique (essentiellement du fait de l’hyperactivité sympathique) et nocturne (on dort plus souvent la nuit…).   Elle est volontiers (deux tiers des cas environ) associée à un profil non dipper, la baisse de PA la nuit par rapport au jour étant inférieure à 10 %.   Ces caractéristiques expliquent la place privilégiée de la MAPA des 24 heures pour l’analyse de la PA dans cette pathologie (figure 2).   Figure 2. MAPA des 24 heures montrant le caractère permanent de l’HTA (moyenne des 24 heures à 154/87 mmHg), l’absence de chute nocturne de la PA et un effet blouse blanche lors de la pose et de la dépose de l’appareil.   Récemment, une étude a montré que le SAOS était la cause la plus fréquente (64 %) d’HTA secondaire chez 125 patients porteurs d’une HTA réfractaire. Dans une autre étude, le seul paramètre qui différenciait les patients avec HTA réfractaire de ceux ayant une HTA contrôlée était la présence d’un SAOS (OR = 4,8).   Comment la traiter ?   Le traitement de l’HTA associée au SAOS comprend des règles hygiéno-diététiques, en particulier la perte de poids, la limitation de la consommation d’alcool et la prise de médicaments antihypertenseurs. Une étude randomisée en cross-over menée chez 40 patients apnéiques s’est intéressée à la baisse tensionnelle sous 5 thérapeutiques différentes. La plus efficace était l’aténolol 50 mg (-13,3 et -10,0 mmHg respectivement pour les PA systolique et diastolique de nuit), puis l’hydrochlorothiazide 25 mg (-8,5 et -5,8 mmHg), loin devant l’énalapril 20 mg, l’amlodipine 5 mg et le losartan 50 mg. Nous avons récemment retrouvé dans une étude randomisée en cross over (deux périodes de 8 semaines de traitement actif), réalisée chez 23 patients apnéiques hypertendus, une baisse de la PA moyenne des 24 heures de 2,1 ± 4,9 mmHg sous PPC et de 9,1 ± 7,2 mmHg sous valsartan 160 mg par jour. Dans cette même étude, les patients non contrôlés sous valsartan voyaient (en ouvert) leur PA baisser de façon significative lorsque la PPC était ajoutée au traitement médical. Une autre étude a montré que, lorsque de la spironolactone (25 à 50 mg par jour) était ajoutée au traitement antihypertenseur conventionnel de 12 patients apnéiques avec HTA réfractaire, la baisse tensionnelle sur les 24 heures était de 17 mmHg pour la PA systolique et de 10 mmHg pour la PA diastolique.   L’ensemble de ces données confirme que le système sympathique et le SRAA représentent des cibles majeures pour traiter les hypertendus apnéiques.   La PPC réduit de façon significative l’activité sympathique des patients avec SAOS ainsi que leur degré d’inflammation systémique. La baisse de PA sous PPC reste modérée pour l’ensemble des patients apnéiques mais certains d’entre eux voient leurs valeurs de PA baisser nettement. Ce sont avant tout les patients hypertendus, surtout si l’HTA n’est pas traitée et/ou est sévère et/ou est réfractaire. De plus, le bénéfice tensionnel est plus net lorsque les patients tolèrent bien leur PPC et, par la même, sont observant à leur machine (> 3, voire 5 heures par nuit).   Une étude déjà ancienne, menée sur un petit (N = 11) échantillon de patients apnéiques avec HTA réfractaire, a montré qu’un traitement de deux mois par PPC diminue la PA systolique de 9,6 et 13,7 mmHg respectivement le jour et la nuit, et la PA diastolique de 5,0 et 7,9 mmHg durant les mêmes périodes. Une étude plus récente a retrouvé chez des patients apnéiques une baisse de PA clinique de 5,6 mmHg après 12 mois de PPC lorsque l’HTA était réfractaire (N = 42) contre 0,8 mmHg quand l’HTA était contrôlée (N = 56). Enfin, et de façon encore anecdotique, la dénervation rénale a permis d’abaisser la PA clinique à 6 mois de 34/13 mmHg chez 10 patients apnéiques avec HTA réfractaire.   En pratique   L’association entre SAOS et HTA réfractaire est bien démontrée. Le traitement de cette HTA dans ce contexte d’hypoxémie intermittente chronique repose sur les règles hygiénodiététiques et les molécules antihypertensives « classiques », les bêtabloquants et les bloqueurs plus directs du SRAA devant être privilégiés. La PPC est, quant à elle, potentiellement efficace en sus du traitement médicamenteux pour diminuer les chiffres de PA des patients apnéiques avec HTA réfractaire.

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