Congrès et symposiums
Publié le 04 déc 2012Lecture 8 min
F. DIÉVART, Clinique Villette, Dunkerque
CNCF
Plus le taux plasmatique de HDL-cholestérol est bas, plus le risque d’événement coronaire est élevé. Au terme de trois décennies d’essais thérapeutiques ayant évalué des traitements modifiant les taux plasmatiques des paramètres lipidiques, il n’a pas été démontré qu’une élévation du HDL plasmatique par un moyen pharmacologique diminue le risque d’événement coronaire. En pratique, le taux plasmatique du HDL doit donc être conçu uniquement comme un marqueur de risque. Si le taux de HDL contribue à indiquer qu’un patient a un risque coronaire élevé, aucune action pharmacologique ne doit être dirigée vers le HDL, mais il est utile de recourir à des stratégies permettant de diminuer le risque cardiovasculaire. Les statines figurent au premier rang de ces stratégies.
Le taux de HDL-cholestérol plasmatique est corrélé au risque coronaire…
Par simplification, dans cet article, le terme « HDL » sera utilisé en place de l’expression « taux plasmatique de HDL cholestérol ».
L’étude de Framingham a été la première à démontrer que plus le HDL est bas, plus le risque d’événement coronaire est élevé. Depuis, ce résultat a été confirmé par de nombreuses autres études épidémiologiques d’observation, dans de nombreux pays.
Le regroupement d’un grand nombre de ces études a montré qu’en moyenne, dans une population, pour toute valeur de HDL moindre de 1 %, le risque d’infarctus est majoré de 2 % chez l’homme et de 3 % chez la femme. Ce marqueur de risque est à la fois puissant et indépendant. Des analyses ont montré que la prise en compte du HDL modifie significativement la classification des niveaux de risque des patients lorsque ce risque est évalué par l’équation de Framingham. Le HDL a donc été inclus dans l’équation de risque de Framingham.
Le HDL est un marqueur du risque coronaire puissant et indépendant :
- plus il est bas, plus le risque coronaire est élevé.
Le HDL fait partie des critères permettant d’évaluer le risque cardiovasculaire absolu dans la grille de risque de Framingham.
... y compris chez les patients sous statine
La plupart des analyses conduites à partir d’essais thérapeutiques contrôlés ayant évalué des statines, notamment les études 4S, CARE, LIPID et HPS, ont montré que, chez les patients recevant une statine, la relation inverse entre risque coronaire et taux de HDL est conservée. Une analyse complémentaire de l’étude TNT a même montré que cette relation persiste lorsque le taux de LDL-cholestérol a été abaissé en dessous d’1 g/l avec une statine.
Il n’y a aucun bénéfice démontré de l’augmentation pharmacologique du HDL …
Les essais thérapeutiques ayant évalué des traitements pharmacologiques permettant d’augmenter le HDL ont, lorsqu’ils sont pris isolément, des résultats discordants.
Ainsi, dans l’étude VA-HIT, par rapport au placebo, le gemfibrozil a augmenté significativement, et de 6 % en valeur relative le HDL et il a été observé une réduction modérée mais significative des événements coronaires. Mais, dans l’étude BIP, par rapport au placebo, un autre fibrate, le bézafibrate a augmenté de 18 % le HDL, mais il n’y a pas eu de diminution d’incidence des événements coronaires.
Par ailleurs, s’il est généralement attribué un effet clinique bénéfique et significatif à l’augmentation du HDL lorsqu’est utilisé de l’acide nicotinique, cette croyance est due à une interprétation inappropriée des résultats de l’étude CDP (Coronary Drug Project) conduite avec l’acide nicotinique et ce, pour deux raisons. La première est que le résultat de cette étude, sur le critère primaire évalué, n’était pas significatif par rapport au placebo : toute interprétation d’analyses en sousgroupe ou sur des critères secondaires n’a donc pas de fiabilité. La seconde est, qu’à l’époque où cette étude a été conduite, le HDL des patients inclus n’avait pas été dosé et donc aucune corrélation n’a pu ou ne peut être faite entre un quelconque résultat observé et la modification éventuelle du HDL sous traitement.
Afin de juger de l’effet clinique potentiel d’une modification du HDL plasmatique sous traitement, une métaanalyse a été conduite et ses résultats publiés en 2009 (BMJ 2009 ; 338 : b92). Ce travail fait référence sur le sujet.
Ce travail a regroupé les données de 108 essais thérapeutiques contrôlés ayant inclus 299 310 patients. Son objectif était de corréler les modifications du HDL sous traitement et les modifications du risque d’événements coronaires. Au terme de ce travail, les auteurs ont reconnu qu’il était impossible de tracer une droite de régression corrélant l’augmentation du HDL sous traitement et une modification du risque coronaire. Leur conclusion a été la suivante : les données disponibles montrent que l’augmentation du taux de HDL plasmatique n’est pas associée à une diminution des événements coronaires, de la mortalité coronaire ou de la mortalité totale.
Une métaanalyse publiée en 2009, ayant regroupé plus de 100 essais thérapeutiques contrôlés ayant inclus 300 000 patients, n’a pas permis de démontrer que l’augmentation du HDL par un moyen pharmacologique diminue le risque d’événements coronaires, de décès coronaires ou de mortalité totale.
… y compris chez les patients sous statine
Quatre essais thérapeutiques contrôlés, conduits contre placebo, ont évalué spécifiquement l’apport clinique de traitements augmentant le HDL chez des patients recevant une statine. Dans ces 4 essais, le HDL-C a significativement augmenté sous le traitement évalué par rapport au placebo. Dans 3 essais, les études ACCORD lipid (fénofibrate), AIM-HIGH (acide nicotinique) et DalOutcomes (dalcétrapib), il n’y a eu aucune différence significative entre les groupes ayant reçu le traitement et ceux ayant reçu le placebo, concernant l’incidence des événements cardiovasculaires majeurs. Dans l’étude ILLUMINATE, ayant évalué le torcétrapib, il y a eu une augmentation significative de la mortalité totale et de la mortalité cardiovasculaire chez les patients ayant reçu le torcétrapib, et ce, alors que sous ce traitement, le HDL avait augmenté de 72 % et que le LDL avait diminué significativement de 25 % par rapport au placebo.
De quelques pistes…
Ces résultats, peu attendus, ont été attribués à diverses causes :
- dans l’étude ILLUMINATE, il est possible que l’effet constaté ait été un effet néfaste spécifique de la molécule, annulant un potentiel effet bénéfique de la modification des paramètres lipidiques ;
- dans les autres essais, il est possible que la variation du HDL obtenue sous traitement n’ait pas été suffisante ;
- il est possible que ces résultats soient liés au manque de puissance des études jusqu’ici effectuées ;
- le métabolisme du HDL est complexe et il est possible que la simple augmentation de son taux plasmatique ne reflète pas la fonctionnalité de cette particule : l’hypothèse de l’effet bénéfique du HDL serait bonne à la condition d’utiliser un moyen pharmacologique adapté ;
- il est possible que l’augmentation du HDL ne soit bénéfique que chez certains types de patients : ceux ayant un HDL très bas et une élévation de la triglycéridémie. C’est ce que suggèrent des analyses en sous-groupes de quelques essais thérapeutiques contrôlés (rappelons que les résultats d’une analyse en sous-groupes ont une probabilité élevée d’être dus à un effet chance, et ce d’autant plus que le résultat principal de l’étude n’était pas significatif).
De ce fait, il est apparu légitime de continuer à explorer cette voie pharmacologique avec des molécules permettant une diminution plus importante et plus soutenue du HDL et/ou avec des molécules supposées mieux adaptées au métabolisme complexe du HDL et/ou dans des groupes de patients qui sont susceptibles d’en tirer un réel bénéfice. Plusieurs de ces hypothèses sont en cours d’évaluation et, dans les années à venir, les résultats des essais HPS 2 THRIVE, HPS 3 REVEAL et d’un essai de phase 3 avec l’evacetrapib nous indiquerons leur valeur.
… et incertitudes persistantes
Ainsi, en 2012, il n’y a aucune preuve que l’augmentation du HDL par un moyen pharmacologique améliore le pronostic cardiovasculaire.
De même, et bien que cela soit promu par la communauté médicale, il n’y aucune preuve que l’augmentation du HDL par un moyen non pharmacologique (exercice physique régulier et/ou faible consommation d’alcool) permette de diminuer le risque cardiovasculaire, uniquement par l’effet exercé sur le HDL.
Alors que faire ?
L’hypothèse HDL envisage que l’augmentation du HDL serait cliniquement bénéfique. En 2012, cela demeure une hypothèse et uniquement une voie de recherche. Ceci implique de considérer que l’effet d’une action thérapeutique, pharmacologique ou non, sur le HDL n’a pas d’implication clinique directe démontrée.
Il reste néanmoins socialement utile de promouvoir un mode de vie supposé diminuer le risque cardiovasculaire et dont un des effets remarqués est l’augmentation du HDL.
Mais, l’augmentation du HDL en elle-même n’est pas l’objectif de ce mode de prise en charge, elle n’en est qu’un reflet supposé participer au potentiel bénéfice.
Le HDL doit cependant être pris en compte dans l’évaluation du risque cardiovasculaire, notamment lors de l’utilisation de la grille de risque de Framingham.
Une valeur basse est corrélée à un risque cardiovasculaire augmenté. Si l’utilisation d’une grille de risque indique qu’un patient a un risque cardiovasculaire élevé, il faut alors utiliser les moyens ayant démontré qu’ils peuvent réduire ce risque, et ce, quelle que soit la valeur du HDL.
La seule voie thérapeutique de ce type au bénéfice clinique démontré est celle des statines. Plusieurs métaanalyses des études ayant évalué des statines ont en effet démontré que l’utilisation de cette classe thérapeutique procure une diminution du risque cardiovasculaire (infarctus du myocarde, AVC et décès cardiovasculaire) d’ampleur constante, quelle que soit la valeur initiale du HDL.
Dès lors que le HDL contribue à indiquer qu’un patient a un risque cardiovasculaire élevé, quelle que soit sa valeur plasmatique, la seule action thérapeutique bénéfique, passant probablement par un effet sur les paramètres lipidiques, est l’utilisation d’une statine afin de réduire le risque cardiovasculaire.
Conflits d’intérêts de l’auteur : Honoraires pour conférence ou conseils pour les laboratoires : Abbott, Astra- Zeneca, BMS, Boehringer-Ingelheim, IPSEN, Menarini, MSD, Novartis, Pfizer, Roche-diagnostics, sanofi-aventis France, Servier, Takeda
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