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Explorations-Imagerie

Publié le 04 déc 2007Lecture 6 min

Cardiomyopathies dilatées et insuffisance cardiaque : IRM, le nouveau gold standard ?

J. GAROT, CHU Henri Mondor, Créteil

Initialement, le développement de l’IRM myocardique de contraste (chélates de gadolinium) par la technique du rehaussement tardif s’est centré sur l’imagerie de l’infarctus du myocarde (IDM)(1). En moins de 10 ans, cette technique s’est imposée comme une technique de référence pour la détection de la viabilité myocardique après la survenue d’un IDM récent ou au cours des dysfonctions ventriculaires gauches (VG) chroniques d’origine ischémique(2).

La probabilité de récupération d’un segment myocardique est inversement corrélée à la présence et à l’extension transmurale du rehaussement tardif, correspondant aux lésions tissulaires irréversibles. Récemment, une étude d’une cohorte de 195 patients présentant une cardiomyopathie ischémique a montré que la présence d’un rehaussement tardif en IRM représente le facteur pronostique indépendant le plus important par rapport aux facteurs cliniques et à la fraction d’éjection VG(3).   À quoi est dû le rehaussement tardif ? Ces foyers de rehaussement tardif ne correspondent pas de manière exclusive à un infarctus. En effet, la prise de contraste tardive observée 10 à 15 min après injection de gadolinium représente la fibrose myocardique, quelle que soit son étiologie. Le gadolinium a une distribution extravasculaire. Son accumulation se produit dans les espaces interstitiels et se traduit par un foyer de rehaussement lorsque ces espaces interstitiels sont augmentés et lorsque l’élimination tissulaire myocardique du gadolinium est ralentie. Ainsi, le gadolinium s’accumule au sein des zones de nécrose myocardique, mais aussi de fibrose, d’accumulation de protéines (pathologies de surcharge, amylose), ou au sein des zones inflammatoires (myocardite, granulomes sarcoïdosiques, etc.). Le rehaussement est dû à une accumulation interstitielle de gadolinium qui, par son effet paramagnétique, raccourcit le temps de relaxation longitudinale T1 (spin lattice relaxation time), se traduisant sur les images pondérées en T1 en inversion-récupération par un hypersignal.   Cardiomyopathies non ischémiques Les enjeux pour les nouvelles techniques d’imagerie non invasives ne résident pas tant dans le diagnostic positif de cardiomyopathie dilatée ou dans l’analyse précise de la fonction ventriculaire, mais dans : - l’aide au diagnostic étiologique, - la possibilité de suivi individuel des thérapeutiques (amélioration de la FE, remodelage inverse), - la contribution au pronostic, avec la stratification du risque particulier de mort subite, - la détection de l’asynchronisme et la meilleure sélection des répondeurs à la stimulation multisite.   Cardiomyopathies dilatées primitives Séquences en inversion-récupération acquises 10 min après injection de Gadolinium en vue petit axe VG chez 3 patients présentant une cardiomyopathie dilatée avec dysfonction systolique VG. Absence de prise de contraste chez un patient présentant une cardiomyopathie dilatée à coronaires saines (A), cardiomyopathie ischémique avec séquelle d’infarctus antérieur et occlusion chronique de l’IVA (B), réhaussement tardif médio-pariétale en bande chez un patient ne présentant pas de lésion coronaire (C, flèche). D, E, F. Cardiomyopathie hypertrophique avec réhaussement tardif au niveau du septum (D), amylose (E), et granulome sarcoïdosique (F, flèche). Le rôle pronostique défavorable est démontré pour B, C, et D. L’IRM est une technique précise et reproductible pour l’évaluation de la morphologie et de la fonction VG et VD. Les cardiomyopathies dilatées primitives sont caractérisées, outre les paramètres morphologiques et de fonction ventriculaire, par l’absence de rehaussement tardif (dans environ 60 % des cas) (figure A), les différenciant ainsi des cardiomyopathies dilatées d’origine ischémique à dysfonction VG systolique (figure B), ou par des prises de contraste linéaires en bandes médiopariétales (30 %), ou nodulaires prédominant dans le sous-épicarde et évoquant alors une étiologie virale(4). Dans 10 % des cas, ces cardiomyopathies dilatées à coronaires saines angiographiquement, présentent des aspects de rehaussement tardif comparables à ceux de l’infarctus (sous-endocardique à distribution transmurale). Un des éléments forts réside dans la valeur pronostique que revêtent la présence et l’importance du rehaussement tardif au cours des myocardiopathies dilatées (figure C). Assomull et coll. ont étudié la valeur pronostique de la présence de fibrose médio-pariétale (rehaussement tardif) au cours des cardiomyopathies dilatées(5). Cent un patients présentant une cardiomyopathie dilatée primitive ont été suivis 2 ans de manière longitudinale. Il existait une fibrose médiopariétale en rehaussement tardif dans 35 % des cas. Elle était associée à un taux plus élevé d’événements incluant décès de toutes causes et hospitalisations pour un événement cardiovasculaire (RR : 3,4, p < 0,001). En analyse multivariée, la présence d’une fibrose médiopariétale est le seul facteur prédictif indépendant de survenue d’un décès ou d’une hospitalisation. Elle est également un facteur prédictif de survenue de mort subite ou de tachycardie ventriculaire (RR : 5,2 ; p < 0,001). Ces données indiquent que l’IRM devrait prendre une place importante pour stratifier le risque chez les patients porteurs de cardiomyopathie dilatée, et peut-être pour aider à la décision d’implantation d’un stimulateur et/ou d’un défibrillateur.   Myocardites aiguës Des prises de contraste tardives sont observées, avec des aspects particuliers qui les distinguent en tout points des lésions de type ischémique(6). Le rehaussement a un aspect multifocal, nodulaire, prédominant dans les couches médiopariétales et sous-épicardiques, au niveau de la paroi latérobasale du ventricule gauche (VG).   Cardiomyopathies hypertrophiques L’IRM permet une imagerie morphologique détaillée (figure D) : - mesure de la masse VG, - mise en évidence d’une hypertrophie régionale (apicale), de l’obstruction sous-aortique, du mouvement systolique antérieur de la valve mitrale, déformations myocardiques réduites et infiltration fibreuse, qui revêt une valeur pronostique particulière(7,8). L’IRM de contraste montre souvent des prises de contraste tardives prédominant au niveau du septum basal proche du site d’insertion avec le ventricule droit, localisation habituelle de la fibrose interstitielle dans les études anatomopathologiques. La présence de rehaussement tardif est très liée à l’épaisseur pariétale dans cette pathologie et revêt un impact pronostique évident(8). L’IRM permet également de suivre les patients après ablation septale.   Cardiomyopathies restrictives L’infiltration du myocarde par de la fibrose ou d’autres tissus peut se traduire par une fonction systolique et une cavité VG de taille normale, une dysfonction diastolique sévère, et une dilatation bi-auriculaire. L’IRM permet la caractérisation tissulaire au cours de ces processus pathologiques (figures E et F) en mettant en évidence des granulomes sarcoïdosiques (hypersignal T2, hypersignal tardif après injection de gadolinium) pouvant involuer sous corticoïdes(9). L’amylose se caractérise par une prise de contraste diffuse, circonférentielle parfois, prédominant dans le sous-endocarde(10). L’hémochromatose se caractérise par un hyposignal T1 et T2, associé à un hyposignal hépatique marqué. D’autres cardiomyopathies peuvent être à l’origine de prises de contraste comme dans la maladie de Chagas(11), ou au niveau du VD dans la dysplasie arythmogène(12).   Dysplasie arythmogène du VD L’IRM représente une technique de choix pour l’exploration d’une dysplasie arythmogène du VD. Elle révèle les infiltrations graisseuses au niveau du myocarde VD sur les images pondérées T1, les anomalies de cinétique VD en ciné-IRM, l’amincissement pariétal du VD, les structures trabéculaires dysplasiques, les anévrismes sacculaires, ainsi que la fibrose sur les images tardives après injection de gadolinium. Ces lésions sont particulièrement fréquentes au niveau de l’infundibulum pulmonaire.   Cardiopathies valvulaires L’échocardiographie est la technique de référence pour l’évaluation des cardiopathies valvulaires. L’IRM permet de mesurer la surface aortique par planimétrie dans les sténoses aortiques, de mesurer la vitesse maximale du jet par contraste de phase et d’intégrer la vitesse au cours de la systole. Elle permet l’appréciation semi-quantitative du volume d’une fuite mitrale ou aortique, en précisant son mécanisme.   En pratique   L’IRM de contraste permet de caractériser la fibrose myocardique au cours de diverses cardiomyopathies avec une implication pronostique majeure. La présence de fibrose permet d’identifier les patients à haut risque d’arythmies sévères et de décès d’origine cardiaque. La possibilité d’obtenir l’imagerie de la fibrose myocardique par la technique du rehaussement tardif contribue à améliorer le diagnostic étiologique et à l’établissement du pronostic chez les patients porteurs de cardiomyopathies. On peut prévoir un rôle grandissant de l’IRM pour stratifier le risque chez ces patients porteurs de cardiomyopathies, et peut-être affiner la sélection de ceux qui bénéficieront de l’implantation d’un stimulateur et/ou d’un défibrillateur. Pour le moment, ces appareils contre-indiquent toujours la réalisation d’une IRM cardiaque, sauf dans des conditions de procédure très particulières(13). L’autre grande limitation reste l’accessibilité limitée aux machines, malgré le poids que représentent en termes de santé publique, les nombreux patients souffrant de pathologies cardiaques.

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