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Études

Publié le 20 oct 2009Lecture 7 min

De REVERSE à RELY, la rythmologie en vedette

J.-Y. LE HEUZEY, Hôpital Georges Pompidou, Paris

ESC

Le congrès de Barcelone a été un très grand cru pour la cardiologie, en particulier en rythmologie avec la présentation des données de grands essais : REVERSE, MADIT CRT, ACTIVE I et RELY. Pour ces deux derniers, aucune donnée préalable n’avait encore été présentée. Indiscutablement, c’est RELY qui remporte la palme avec des résultats très impressionnants.
À vrai dire, la rythmologie occupe maintenant une place de premier plan car elle est sortie de son carcan traditionnel qui la faisait considérer il y a une vingtaine d’années comme une hyper spécialité ne concernant qu’un tout petit nombre, à la fois de médecins et de patients, et ne s’intéressant qu’à des bizarreries ! Actuellement, la rythmologie sort progressivement de ces frontières, les essais REVERSE et RELY en sont des preuves, REVERSE s’intéresse principalement à l’insuffisance cardiaque, RELY à la thrombose.

L’essai REVERSE Rappelons qu’il s’agit d’un essai qui avait inclus 621 patients insuffisants cardiaques en classe fonctionnelle II ou I (mais avec des antécédents de poussée d’insuffisance cardiaque). Ils avaient des complexes QRS d’une durée supérieure à 120 ms, leur fraction d’éjection était ≤ 40 %. Ils avaient été implantés avec un stimulateur de resynchronisation et randomisés pour que la resynchronisation soit en fonctionnement ou non. Le critère principal de jugement était un indice clinique associant la mortalité toutes causes, les hospitalisations pour insuffisance cardiaque, la nécessité d’un cross-over pour aggravation, la classe NYHA et l’état fonctionnel du patient. Les résultats présentés par C. Linde (Stockholm) concernent 262 patients européens. Le critère principal est positif dans le groupe resynchronisé, 34 % contre 19 % (p = 0,01). Il y avait également des critères secondaires comme les volumes télésystoliques indexés : la réponse est très positive de même que pour la fraction d’éjection ventriculaire gauche. Enfin sur le plan clinique, il existe un allongement des délais de survenue de décès ou de première hospitalisation : 11,7 % contre 24 %. Ces données confirment donc celles qui avaient été préalablement présentées sur la partie européenne de l’essai. L’essai MADIT CRT Là aussi, il a été possible d’avoir la confirmation des premières données de MADIT CRT qui avaient fait l’objet d’un communiqué de presse. Elles ont été présentées par A. Moss (Rochester, USA). On savait déjà que cette étude avait été interrompue en juin 2009 en raison de résultats considérés comme positifs. Les patients inclus étaient des patients avec une fraction d’éjection ≤ 30 % et des complexes QRS larges, en classe I ou II de la NYHA. Il s’agit d’un essai qui a comparé des patients implantés d’un défibrillateur avec ou sans resynchronisation. Plus de 1 000 patients ont été resynchronisés et plus de 700 ne l’ont pas été. Globalement, il s’agissait d’hommes dans les trois quarts des cas, en classe NYHA II pour 85 % d’entre eux. Les QRS étaient réellement larges, ≥ 150 ms pour 65 % d’entre eux. La moitié avaient une fraction d’éjection < 25 %. En ce qui concerne le traitement médical, 77 % recevaient des inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), 20 % des antagonistes de l’angiotensine II (ARA II), 93 % des bêtabloquants, 75 % des diurétiques et 67 % des statines. Les résultats montrent un avantage indiscutable au groupe qui a eu la resynchronisation avec une réduction de 34 % du risque de décès et d’insuffisance cardiaque. La réduction des événements type insuffisance cardiaque est importante, de 41 %. Les auteurs concluent également que la resynchronisation paraît plus efficace chez les femmes que chez les hommes et chez les patients qui ont les QRS les plus larges. Cette étude montre donc également l’intérêt de la resynchronisation. Rappelons que, chez un certain nombre de ces patients, le problème qui se pose également est de savoir, si l’on met en place une resynchronisation, s’il faut associer ou non un défibrillateur. L’étude MADIT CRT n’avait pas pour but d’en juger puisque tous les patients avaient un défibrillateur et que la randomisation concernait la resynchronisation. L’essai ACTIVE I ACTIVE était un vaste programme composé de deux bras et d’un plan factoriel. Dans ce programme étaient enrôlés des patients qui avaient une fibrillation atriale (FA) et au moins un facteur de risque constitué par un âge ≥ 75 ans, une hypertension artérielle (HTA), un accident vasculaire cérébral (AVC) ou un accident ischémique transitoire (AIT) préalable, une fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) < 45 %, une maladie artérielle périphérique, une coronaropathie ou un diabète pour ceux dont l’âge était compris entre 55 et 74 ans. Ils ont été placés dans deux bras, d’une part, ACTIVE W comparant la warfarine à l’association clopidogrel + aspirine, d’autre part, un bras ACTIVE A qui comparait clopidogrel + aspirine à aspirine seule. Tous les patients de ces deux bras pouvaient également entrer dans un plan factoriel, ACTIVE I dans lequel ils recevaient de l’irbesartan ou un placebo. On connaît les résultats des bras ACTIVE A et ACTIVE W qui ont été présentés et publiés ces dernières années. Selim Yusuf (Hamilton, Canada) a présenté les résultats de cette étude ACTIVE I avec l’irbesartan. L’âge moyen des patients était de 69,5 ans (60 % d’hommes) ; il s’agissait de FA permanente dans 65 % des cas, paroxystique dans 20 % et persistante dans 14,5 %. Par ailleurs, 35 % de ces patients étaient en insuffisance cardiaque. Leur score CHADS2 moyen était proche de 2. Concernant les médicaments associés ils avaient des IEC dans 60,4 % des cas, des bêtabloquants 54,5 %, des diurétiques 54,2 %, des anticalciques 27 %, de l’aspirine 59 %, des antivitamines K 38 %, des antiarythmiques 23 % et des digitaliques 35 %. Il n’y avait pas de différence significative entre les deux groupes en ce qui concerne ces traitements. La pression artérielle systolique moyenne à l’inclusion était de 138,2, la diastolique de 82,5. Lorsque l’on examine les critères de jugement primaire : AVC, infarctus du myocarde (IDM), décès vasculaire d’une part et AVC, infarctus du myocarde, décès vasculaire et hospitalisation pour insuffisance cardiaque d’autre part, il n’y a pas de différence significative. Pour le deuxième critère, il y a une tendance favorable. Parmi les critères secondaires figuraient les hospitalisations pour insuffisance cardiaque. Cette fois, la différence est significative (p = 0,018). On peut donc considérer que cette étude n’a pas atteint son objectif initial mais qu’elle démontre que les ARA II sont capables de diminuer sensiblement le nombre d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque (figure 1). Figure 1. Hospitalisation pour IC. De même, il y a une différence significative pour un critère associant AVC, AIT et embolie systémique hors système nerveux. Le nombre de séjours à l’hôpital et le nombre de jours passés à l’hôpital sont significativement diminués dans le groupe irbesartan. L’essai RELY Comme chacun sait, la FA est responsable d’environ 1/6e de tous les accidents vasculaires cérébraux. Les antivitamines K réduisent le risque d’AVC d’environ 60 %. Malheureusement, à peine plus de la moitié des patients qui devraient recevoir des antivitamines K les reçoivent effectivement, d’après les séries internationales publiées. La difficulté de maniement des antivitamines K fait qu’un traitement plus simple est souhaitable. Le dabigatran est une prodrogue qui a une biodisponibilité de 6,5 % et dont 80 % sont excrétés par le rein. La demi-vie est de 12 à 17 heures. L’essai RELY était une étude de non-infériorité incluant des patients avec une fibrillation atriale et au moins un facteur de risque thromboembolique. Il comparait trois bras : warfarine avec des INR dans la fourchette de 2 à 3, dabigatran 110 mg 2 fois par jour et dabigatran 150 mg 2 fois par jour. L’étude a été réalisée entre décembre 2005 et mars 2009. Le suivi moyen a été de 2 ans. Les caractéristiques des patients à l’inclusion montrent qu’ils avaient un âge moyen de 71,5 ans, qu’il s’agissait d’hommes dans 63 % des cas. Leur score CHADS moyen était un peu supérieur à 2. Un total de 20 % d’entre eux avait déjà eu un AVC ou un AIT, plus de 16 % avaient déjà eu un infarctus, 32 % de l’insuffisance cardiaque. Enfin, environ 40 % recevaient de l’aspirine à l’inclusion et 50 % avaient déjà reçu des antivitamines K (patients non « naïfs »). Les résultats globaux sont très impressionnants : la dose de 110 mg 2 fois par jour n’est pas inférieure à la warfarine et la dose de 150 mg 2 fois par jour est supérieure (figure 2). Lorsque l’on regarde les chiffres, le taux d’AVC ou d’embolie systémique est de 1,5 % pour la dose de 110 mg, de 1,1 % pour la dose de 150 mg et de 1,7 % pour la warfarine. Ces différences sont hautement significatives. Il en va de même pour les AVC pris isolément. Figure 2. AVC ou embolie systémique. L’élément le plus impressionnant est la diminution très importante des accidents hémorragiques intracrâniens dans les groupes dabigatran, y compris le groupe 150 par rapport à la warfarine (figure 3). Concernant les saignements, si l’on envisage les saignements totaux, ils sont de 14,6 % à 110 mg, de 16,4 % à 150 mg et de 18,2 % pour la warfarine. La différence est également très en faveur du dabigatran pour ce qui concerne les hémorragies majeures et les hémorragies menaçant le pronostic vital. Seule discordance, les saignements gastro-intestinaux majeurs sont plus importants dans les groupes dabigatran : 1,1 % à 110 mg, 1,5 % à 150 mg et 1 % pour la warfarine. Il existe une discrète, mais significative, augmentation du nombre d’infarctus dans les groupes dabigatran (0,7 %) par rapport à la warfarine (0,5 %, p = 0,048). Figure 3. AVC hémorragiques. Il était important de vérifier que le dabigatran ne posait pas de problème hépatique, compte tenu de ce qui était connu avec le ximélagatran, antithrombine qui avait déjà été développé. Il n’y a pas de différence significative dans les élévations des enzymes hépatiques dans les groupes dabigatran par rapport au groupe warfarine. En ce qui concerne les effets secondaires les plus fréquents, les dyspepsies sont retrouvées dans plus de 11 % des cas, alors que cela n’a été noté pour la warfarine que dans 5,8 % des cas. En pratique Le dabigatran, médicament antithrombine, apporte des espoirs très importants dans la prévention des AVC et de la FA. À la dose de 150 mg 2 fois par jour, le dabigatran réduit significativement les accidents vasculaires cérébraux, par comparaison à la warfarine, avec un risque de saignement majeur similaire. Le dabigatran à 110 mg 2 fois par jour a un taux similaire d’accident vasculaire cérébral mais réduit significativement les saignements majeurs. Les deux doses diminuent de façon très nette les saignements intracérébraux, les saignements totaux et les saignements menaçant le pronostic vital. Le dabigatran n’a pas de toxicité majeure, notamment hépatique, mais on observe une augmentation, par rapport à la warfarine, des dyspepsies et des saignements gastro-intestinaux. Ces avancées sont majeures et marquent certainement un tournant dans la prise en charge antithrombotique de la FA. Ces résultats sont positifs et sont tous concordants, allant dans le même sens. Ils laissent entrevoir la possibilité d’utiliser deux doses différentes en fonction de chaque patient et de leurs risques thromboembolique d’une part, hémorragique d’autre part.

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