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Cardiologie générale

Publié le 20 juin 2006Lecture 7 min

Prise en charge des dyslipidémies - Des interprétations des faits, des AMM et des recommandations

F. DIÉVART, Clinique Villette, Dunkerque

Depuis plus de 30 ans maintenant, des recommandations sont régulièrement proposées pour la prise en charge des dyslipidémies dans la pratique. En France, en mars 2005, sous l’égide de l’Afssaps, nous avons pu disposer d’une mise à jour du texte précédent, datant de 2000.

Les recommandations françaises de 2005 Les grands messages mis en avant dans les recommandations pour la prise en charge thérapeutique du patient dyslipidémique, éditées par l’Afssaps en 2005, sont les suivants : – le dépistage d’une dyslipidémie repose sur l’exploration d’une anomalie lipidique, qui détermine les concentrations de cholestérol total, triglycérides, HDL cholestérol et LDL cholestérol ; – tous les adultes doivent être dépistés mais il n’est pas justifié de répéter ce bilan, lorsqu’il est normal ; – cinq niveaux « cibles » de LDL cholestérol définissent l’intervention thérapeutique ; – ces objectifs ont été déterminés en fonction de l’état vasculaire du patient et du nombre des facteurs de risque cardiovasculaire associés ; – la prescription d’hypolipémiants n’est pas justifiée chez de nombreux patients ayant un risque cardiovasculaire faible. Le traitement diététique est la base de la prise en charge de ces patients ; – quand une thérapeutique médicamenteuse est indiquée, il s’agit le plus souvent d’une statine, sauf dans les 3 circonstances suivantes : • intolérance aux statines ; • LDL cholestérol < 1 g/l associé à des triglycérides élevés et un HDL-cholestérol bas ; • hypertriglycéridémie sévère isolée (TG > 4 g/l) ; – le traitement hypolipémiant débute habituellement par les posologies les plus faibles. En l’absence d’évaluation suffisante, l’utilisation de fortes doses, voire de combinaisons thérapeutiques, est à discuter au cas par cas. Elle ne doit pas se faire au détriment d’une bonne tolérance et d’une bonne observance du traitement ; – la surveillance de l’efficacité et de la tolérance commence entre 1 et 3 mois après le début du traitement ; – la prise en charge d’une dyslipidémie doit être associée à celle des autres facteurs de risque cardiovasculaire. Les objectifs thérapeutiques résultent d'un accord professionnel en l’absence d'essais de prévention comparant une cible thérapeutique à une autre. En fonction du nombre de facteurs de risque présents, ces objectifs sont les suivants : – en l’absence de facteur de risque, les concentrations de LDL cholestérol doivent être < 2,20 g/l (5,7 mmol/l) ; – en présence d’un facteur de risque, les concentrations de LDL cholestérol doivent être < 1,90 g/l (4,9 mmol/l) ; – en présence de deux facteurs de risque, les concentrations de LDL cholestérol doivent être < 1,60 g/l (4,1 mmol/l) ; – en présence de plus de deux facteurs de risque, les concentrations de LDL cholestérol doivent être < 1,30 g/l (3,4 mmol/l) ; – en présence d’antécédents de maladie cardiovasculaire avérée ou de risques équivalents, les concentrations de LDL cholestérol doivent être < 1 g/l (2,6 mmol/l).   À souligner L’essentiel de la prise en charge repose sur l’obtention d’une valeur cible, absolue, de LDL dépendant du niveau de risque. La réduction du risque est proportionnelle à l’abaissement du LDL-cholestérol. Elle est observée même pour des sujets ayant des valeurs proches de la moyenne de la population générale. La prévention secondaire a été étendue aux patients ayant d’autres maladies vasculaires avérées (AVC/AIT/artérite des membres inférieurs). Il a été indiqué que le bénéfice de la prévention par les hypolipémiants n’est pas exclusivement coronaire. Le bénéfice de la prévention est acquis dans de nombreux groupes de patients : - sujets de 70 à 80 ans, - femmes ménopausées, - hypertendus, - diabétiques de type 2, - patients ayant des antécédents vasculaires personnels. Chez les patients ayant eu un événement coronaire, le traitement doit être débuté au décours immédiat de l’événement.   De quelques autres recommandations et de quelques AMM Les grands principes des recommandations françaises, en règle superposables avec ceux d’autres recommandations, divergent sur certains points. Ainsi, dans certaines recommandations (ESH 2003), il a été proposé d’abaisser le LDL de 30 % chez les patients à risque, quelle que soit la valeur de ce LDL, dès lors que le risque cardiovasculaire absolu du patient est élevé. Il est donc proposé d’obtenir une diminution relative du LDL et non une valeur cible absolue. Dans d’autres recommandations, comme les recommandations françaises, chez les patients les plus à risque (notion dont la définition est parfois différente suivant le statut accordé au patient diabétique) il est proposé d’obtenir non pas une diminution relative du LDL mais une valeur cible absolue, de même quelle que soit la valeur du LDL. Cette recommandation française peut être à l’origine de deux problèmes potentiels : – lorsque la valeur de base du LDL est très élevée, cela peut rendre illusoire l’atteinte de l’objectif lorsqu’il est très strict : que faut-il faire ? Se contenter du résultat obtenu ? Utiliser de très fortes doses de statines ? Avoir recours à des associations thérapeutiques diverses ? Tout en sachant que tant le bénéfice que le risque de cette dernière stratégie n’ont pas été évalués ; – quel objectif absolu fixer ? Ce second problème est réel puisqu’à l’analyse des divers textes de recommandations, il est apparu que cet objectif est variable, tout à la fois dans le temps pour un même texte de recommandations (moins de 1,0 g/l en France à la fin des années 1990, puis moins de 1,30 g/l en 2000, en s’appuyant sur des études qui semblaient ne pas démontrer de bénéfice clinique de l’abaissement du LDL en dessous de… 1,25 g/l et, depuis 2005, de nouveau moins de 1 g/l) et suivant les recommandations (moins de 1,15 g/l pour les recommandations européennes, moins de 1 g/l pour les recommandations nord-américaines en 2003, puis un an plus tard moins de 0,70 g/l). Aucun texte ne propose de diminuer le LDL d’une valeur fixe et absolue, comme par exemple 0,387 g/l, comme ce qui est quantifié dans les études et les métaanalyses effectuées avec les statines.   Deux exceptions   Enfin, alors que la pratique paraît être encadrée par ces recommandations, fixant des niveaux et des cibles d’intervention conditionnées par la valeur du LDL, deux statines (la simvastatine et l’atorvastatine) peuvent, selon leur AMM et dans certaines situations cliniques, être prescrites « qu’il y ait ou non hypercholestérolémie associée ». Plus encore, en termes de complexité, lorsque l’on considère la simvastatine dont l’action peut être renforcée par l’ézétimibe. L’AMM perd son indication « qu’il y ait ou non hypercholestérolémie associée » pour devenir un « traitement… de patients ayant une hypercholestérolémie primaire… non contrôlés par une statine seule ». Ces paradoxes engendrent une question : en cas de problème médico-légal, qu’est-ce qui devient opposable au médecin : l’AMM ? Si oui laquelle ? La recommandation ? Et si oui, laquelle ?   Le point de vue sceptique En 2006, alors qu’il existe des faits bien établis ne permettant plus de dire que l’hypothèse lipidique est une hypothèse et reliant notamment le LDL et le risque coronarien, il existe encore des sceptiques qui remettent complètement en cause cette relation sous divers prétextes. Ils considèrent que le cholestérol en lui-même est un nutriment non seulement indispensable mais de plus utile et réfutent l’hypothèse lipidique. Les thèses de ces sceptiques peuvent être consultées sur différents sites internet avec les liens suivants sur Google : Weston A. Prince foundation, The International Network of Cholesterol Skeptics, The Cholesterol Myths and LDL Cholesterol Does NOT Cause Atherosclerosis or Heart Disease. Comment ne pas comprendre que certains médecins généralistes et/ou spécialistes, pris entre les feux de toutes ces interprétations, et notamment des rapports synthétisés des publications d’études, des recommandations, des délégués de l’assurance maladie, des délégués de la visite médicale, des propos parfois divergents des experts locaux ou nationaux, ne savent plus très bien quelle conduite adopter ? Liste des acronymes des études citées 4S : Scandinavian Simvastatin Survival Study A-to-Z : Aggrastat to Zocor ALLIANCE : Aggressive Lipide Lowering Initiation Abates New Cardiax Events ARMYDA : Antiplatelet therapy for Reduction of MYocardial during Angioplasty ASCOT-LLA : Anglo-Scandinavian Cardiac OuTcomes - Lipid Lowering Arm BIP : Bezafibrate Infarction Prevention study CARDS : Collaborative AtoRvastain Diabetes Study CARE : Cholesterol And Recurrent Events trial CHAOS-2 : Cambridge Heart AntiOxydant Study FIELD : Fenofibrate micronised Intervention and Events Lowering in Diabetes HHS : Helsinki Heart Study HPS : Heart Protection Study IDEAL : Incremental Decrease In Endpoints through Aggressive Lipid lowering IMPROVE IT : Improved Reduction of Outcomes : Vytorin Efficacy International lowering JUPITER : Justification for the Use of statins in Primary prevention : an Interventionnal Trial Evaluating Rosuvastatin LIPS : Lescol Intervention Prevention Study MIRACL : Myocardial Ischaemia Reduction with Aggressive Cholesterol Lowering PACT : Plasminogen activator and Angioplasty Compatibility Trial PRINCESS : Prevention of Re-INfarction by early treatment of CErivaStatin Study PROSPER : PROspective Study of Pravastatin in the Elderly at Risk PROVE IT : PRavastatin Or atorVastastin Evaluation and Infection Therapy TNT : Treating to New Targets VA-HIT : Veterans Affairs HDL Intervention Trial VISP : Vitamin Intervention for Stroke Prevention WOSCOPS : West Of Scotland COronary Prevention Study

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