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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 08 juin 2010Lecture 4 min

La cryoablation : une solution pour le traitement des tachycardies jonctionnelles ?

W. AMARA(1), A. DE SISTI(2), J. TONET(3), (1)Groupe Hospitalier Le Raincy-Montfermeil, (2)CH Poissy, St-Germain, (3)Hôpital Pitié-Salpêtrière

Les tachycardies jonctionnelles par réentrée intranodale constituent un motif de consultation fréquent, pour les sujets jeunes et pour lesquels les traitements médicamenteux restent peu efficaces. Jusque récemment, le clinicien était en retrait dans les indications d’ablation dans le cas de la réentrée intranodale, du fait du risque de bloc auriculo-ventriculaire qui peut être potentiellement induit par la radiofréquence. La cryoablation permet de réaliser des ablations avec sécurité sans risque de bloc auriculo-ventriculaire. Cet article de synthèse passe en revue les preuves en faveur de la cryoablation et dresse un tableau de ses indications.

    Les points clés à retenir pour la réentrée intranodale Elle représente environ la moitié des causes de tachycardies jonctionnelles. Elle est plus fréquente chez les sujets d’âge moyen (40 à 50 ans), et plus particulièrement la femme. Dans ce cas, le nœud auriculo-ventriculaire est constitué de deux voies de conduction : – une voie lente à vitesse de conduction lente et à période réfractaire courte. – une voie rapide à vitesse de conduction rapide et à période réfractaire longue. Le plus souvent l’activation, lors des tachycardies, se fait par la voie lente dans le sens antérograde avec une remontée ventriculo-atriale par la voie rapide. On parle de tachycardie de type slow-fast. L’inverse est parfois possible (réentrée de type fast-slow, voire slow-slow). La cible de l’ablation, que ce soit par radiofréquence ou par cryoablation, est la voie lente car son ablation n’altère pas le fonctionnement de la voie rapide et notamment la tolérance fonctionnelle du patient à l’effort (figure). Figure. Mécanismes de tachycardies jonctionnelles et ECG associés. À propos de l’ablation par radiofréquence La radiofréquence est la méthode de référence du traitement interventionnel des tachycardies sur voie accessoire. Le taux d’efficacité de la méthode dans cette indication est supérieur à 95 % avec un taux de récidive inférieur à 5 %. L’ablation par radiofréquence est la méthode la plus efficace du traitement interventionnel des tachycardies par réentrée intranodale. Elle consiste en l’ablation de la voie lente. Cependant, en raison de la proximité de la voie lente et de la voie rapide, elle peut se compliquer d’un bloc auriculo-ventriculaire définitif aux conséquences fâcheuses notamment chez les sujets les plus jeunes. Principes de la cryoablation L’effet tissulaire de la cryoablation est obtenu grâce à un refroidissement des tissus de proximité obtenus sous l’effet du refroidissement de la sonde. Le froid est obtenu par un changement d’état du protoxyde d’azote (de l’état liquide à l’état gazeux) qui est injecté dans le cathéter. Pour un faible refroidissement tissulaire, on observe une inhibition de la fonction cellulaire sans nécrose expliquant les effets réversibles de la cryothérapie (c’est ce qu’on appelle cryomapping). Un refroidissement plus important (appelé « cryoablation ») engendre une congélation de la cellule(1). Les avantages de la cryoablation Les avantages de la cryoablation sont récapitulés dans le tableau 1. Globalement, la cryoablation a des effets réversibles, notamment lors de la phase de cryomapping. Ceci permet de tester l’efficacité du tir d’ablation et sa sécurité. Lors du refroidissement, le cathéter adhère au tissu, permettant de délivrer l’énergie sur une zone limitée. Par ailleurs, la méthode est parfaitement indolore et entraîne moins de lésions endothéliales que la radiofréquence, diminuant les risques de perforation cardiaque et de thrombus. Que disent les principales études évaluant les résultats de la cryothérapie ? Plusieurs études ont évalué l’intérêt de la cryoablation dans le traitement des réentrée intranodales. Si certaines étaient comparatives avec la radiofréquence, la majorité d’entre elles restent des études de suivi au long cours de cohortes de patients traités par cryoablation. Globalement, en se limitant aux études les plus récentes(2,3,4), utilisant les sondes de cryoablation actuelles munies d’une électrode distale de 6 mm, on observe un taux de succès aigu de 95 à 99 % avec un taux de succès à long terme variable, dépendant de la durée de suivi (de 80 à 93 %) (tableau 2). Il est important de noter qu’aucun bloc auriculo-ventriculaire définitif n’a été publié à ce jour pour la cryoablation. Quels messages faire passer au patient ? Les tachycardies jonctionnelles par réentrée intranodales peuvent ne pas justifier de traitement (ou alors un traitement uniquement de la crise). En cas de crises récidivantes, il existe plusieurs possibilités thérapeutiques qui doivent être expliquées au patient : – traitement antiarythmique chez les patients acceptant de prendre un traitement antiarythmique au long cours. – ablation par radiofréquence, notamment chez les sujets les plus âgés ou ceux ayant une distance importante en radioscopie entre les deux voies lente et rapide. – la cryoablation qui est la méthode préférentielle de traitement des tachycardies par réentrée intranodale chez les patients jeunes pour lesquels la survenue d’un bloc auriculo-ventriculaire (même rare) aurait des conséquences fâcheuses, car nécessiterait l’implantation d’un stimulateur cardiaque définitif, des changements de prothèse non évitables et les risques notamment infectieux qui leurs sont inhérents. Ainsi, du fait du moindre risque de complications qui lui est associé, la cryoablation pourrait être proposée plus précocement dans l’arsenal thérapeutique des tachycardies par réentrée intranodale. Les indications de la cryoablation, telles qu’indiquées dans les recommandations des sociétés savantes (et notamment de la Société Européenne de Cardiologie)(5) sont les mêmes que celles de l’ablation par radiofréquence. L’ablation est indiquée avec une classe de recommandation I et un niveau de preuve B pour les patients présentant : – des tachycardies réciproques mal tolérées hémodynamiquement. – des tachycardies réciproques récidivantes. – et même pour les tachycardies non fréquentes et bien tolérées. En pratique La cryoablation est une alternative récente à la radiofréquence. Elle a comme avantage principal de ne pas entraîner de bloc auriculo-ventriculaire définitif. Cette possibilité reste, cependant, insuffisamment utilisée dans le panel thérapeutique proposé par le praticien. Son utilisation doit être encouragée au vu des données disponibles.

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