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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 14 sep 2010Lecture 5 min

Le risque thromboembolique de la fibrillation atriale : l'étude RELY

J.-Y. LE HEUZEY, Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris

Comme chacun le sait, l’incidence de la fibrillation atriale croit rapidement, notamment du fait du vieillissement de la population. Chez les hommes comme chez les femmes, aussi bien pour les fibrillations paroxystiques que permanentes, cette incidence est en croissance. Il en résulte un nombre également croissant d’hospitalisations en rapport avec ce diagnostic, qu’il soit principal ou associé.
Les chiffres de projection américains envisagent une multiplication par un facteur 2,5 du nombre de cas de fibrillation atriale dans les années 2050. On sait que la moitié environ des coûts de traitement de la fibrillation atriale sont représentés par les hospitalisations. Parmi celles-ci figurent les hospitalisations pour accidents vasculaires cérébraux et pour accident hémorragique des anticoagulants.

Les facteurs de risque thromboemboliques sont maintenant bien connus, résumés par exemple par le score CHADS2, score sur 6 points avec insuffisance cardiaque (1 point), hypertension artérielle (1 point), âge supérieur à 75 ans (1 point), diabète (1 point) et accident vasculaire cérébral ou accident ischémique transitoire préalable (2 points). A l’heure actuelle, dans les recommandations, il est considéré que les patients ayant un score CHADS2 de 2 ou plus doivent relever des antivitamines K, ceux qui ont un score CHADS2 à 0 de l’aspirine, pour les scores CHADS2 à 1, la décision est à prendre au cas par cas mais, chaque fois que possible, le choix de l’antivitamine K est préféré. Les recommandations vont être profondément modifiées dans les prochaines années du fait de l’arrivée des nouveaux antithrombotiques. En effet, les antivitamine K ont un certain nombre de limitations, pharmacocinétiques et pharmacodynamiques difficiles à prévoir : facteurs génétiques influençant l’efficacité, interactions médicamenteuses avec la nourriture, nécessité d’un ajustement sur la mesure de l’INR avec un risque d’instabilité, rapport bénéfice/risque étroit, impossibilité d’utilisation chez les patients avec des troubles cognitifs, difficultés dans les relais, tout particulièrement pour les procédures interventionnelles. C’est la raison pour laquelle de nombreux développements sont actuellement en cours, avec des médicaments antithrombine ou anti Xa. Le médicament qui est le plus avancé dans ce domaine est le dabigatran (Pradaxa®) qui a réalisé l’étude RELY. Dessin de l’étude RELY L’étude RELY est une étude s’intéressant aux patients ayant une fibrillation atriale non valvulaire paroxystique, permanente ou persistante avec des facteurs de risque modérés à élevés d’accident vasculaire cérébral ou d’embolie systémique. L’étude a comparé de façon ouverte la warfarine avec un INR cible entre 2 et 3 au dabigatran à 2 doses, soit 2 fois 110 mg, soit 2 fois 150 mg. L’attribution de l’une ou l’autre dose était faite de façon aveugle. Par contre le dessin global du protocole est ouvert, c’est-à-dire que l’investigateur savait s’il donnait de la warfarine ou du dabigatran. Par contre les événements étaient jugés en aveugle par le comité d’adjudication qui les analysait, il ne savait pas si le patient recevait de la warfarine ou du dabigatran. Critères d’inclusion Les patients devaient avoir une fibrillation atriale non valvulaire et au moins un facteur de risque thromboembolique : antécédents d’accident ischémique transitoire, d’accident vasculaire cérébral ou d’embolie systémique, dysfonction ventriculaire gauche avec une fraction d’éjection inférieure ou égale à 40 %, insuffisance cardiaque avec une classe NYHA supérieure ou égale à 2, âge supérieur ou égal à 75 ans, diabète, maladie coronaire ou hypertension artérielle. Critères de jugement Le critère de jugement principal était la date de survenue du premier accident vasculaire cérébral ou de la première embolie systémique. Il est à noter que parmi les accidents vasculaires cérébraux figuraient aussi bien des accidents ischémiques que des accidents hémorragiques. Les critères de jugement secondaire étaient la date de survenue du premier accident vasculaire cérébral, de la première embolie systémique, les décès toutes causes, les embolies pulmonaires, les infarctus du myocarde ou les décès vasculaires. Résultats de l’étude RELY Un total de 18 113 patients a été inclus, avec une très grande vitesse d’inclusion. Ceci souligne l’intérêt des cardiologues pour ce type de thérapie nouvelle. Parmi les patients inclus 36 % étaient nord-américains, 38 % européens. Lorsque l’on examine les caractéristiques de base, on s’aperçoit que l’âge moyen des patients était de 71 ans environ, 64 % étaient des hommes. Concernant le score CHADS2, à peu près un tiers des patients avaient un score CHADS à 0 ou 1, un tiers à 2 et un tiers à 3 ou plus. Environ 20 % avaient déjà fait un accident vasculaire cérébral ou un accident ischémique transitoire préalable, 17 % environ avaient eu un infarctus du myocarde, 31 % étaient en insuffisance cardiaque et 50 % n’avaient pas reçu de warfarine auparavant. Enfin il faut noter qu’à peu près 40 % des patients prenaient de l’aspirine à l’inclusion. Le résultat principal peut être résumé sur la figure 1 : le dabigatran à 2 fois 110 mg n’est pas inférieur à la warfarine, le dabigatran à 2 fois 150 mg lui est supérieur. Lorsque l’on regarde dans les détails on s’aperçoit que le taux d’accident vasculaire cérébral ou d’embolie systémique a été de 1,5 % pour le groupe dabigatran à 110 mg, 1,1 % pour le groupe dabigatran à 150 mg et 1,7 % pour le groupe warfarine. La différence est hautement significative. Un élément frappant est le faible nombre d’accidents hémorragiques sous dabigatran (figure 2), qu’il s’agisse de la dose de 110 ou de 150 mg. Globalement les saignements ont été de 14,6 % dans le groupe dabigatran 110 mg, de 16,4 % dans le groupe dabigatran 150 mg et de 18,2 % dans le groupe warfarine. Les hémorragies gastro- intestinales sont par contre plus fréquentes dans les groupes dabigatran : 1,1 % à 110, 1,5 % à 150 contre 1,0 % seulement sous warfarine. Autre élément à noter, un plus grand nombre - même si les chiffres absolus sont relativement faibles- d’infarctus du myocarde dans le groupe dabigatran : 0,7 % contre 0,5 % dans le groupe warfarine, la différence étant juste significative dans la bras dabigatran 150 mg. Il n’y a pas eu d’élévation des enzymes hépatiques, cet élément a été surveillé de très près pendant la durée du protocole étant donné la toxicité hépatique qui avait été trouvée avec un autre médicament antithrombine, le ximélagatran. Sur le plan de la tolérance il faut noter un chiffre élevé de dyspepsies avec environ 11,5 % de patients se plaignant de cet effet secondaire contre 5,8 % seulement sous warfarine. Ceci est probablement dû au fait que la molécule contient de l’acide tartrique et n’est donc pas parfaitement supporté sur le plan digestif par certains patients. On peut également rapprocher de cette observation le taux plus élevé d’hémorragie digestive. Il y a une diminution du nombre de décès cardiovasculaires sous dabigatran : 3,8 % à 2 fois 110 mg, 3,6 % à 2 fois 150 mg contre 4,1 % sous warfarine, la différence est significative. Figure 1. Non infériorité du dabigatran à 2 fois 110 mg par rapport à la warfarine, supériorité à la dose de 2 fois 150 mg. Figure 2. Survenue des hémorragies cérébrales pendant la durée du protocole. On peut noter le faible nombre d’hémorragies cérébrales sous dabigatran, que la dose soit de 110 ou 150 mg. En pratique Le dabigatran 150 mg 2 fois par jour réduit significativement les accidents vasculaires cérébraux par comparaison à la warfarine avec un risque similaire de saignement majeur. Le dabigatran à 110 mg a un taux d’accident vasculaire cérébral similaire à celui de la warfarine avec une réduction significative des saignements majeurs. Les deux doses réduisent significativement les hémorragies intracérébrales, les hémorragies menaçant le pronostic vital et les saignements totaux. Le dabigatran n’a pas de toxicité majeure mais augmente la dyspepsie et les saignements gastro-intestinaux. Les deux doses de dabigatran offrent des avantages par rapport à la warfarine. Le dabigatran à 150 mg est plus efficace et le dabigatran à 110 mg présente un profil de tolérance meilleure.

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