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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 02 oct 2007Lecture 7 min

Les applications du DTI en routine

A. OBLAK, hôpital européen Georges Pompidou, Paris

L’examen échographique de routine utilise très largement le Doppler tissulaire pulsé (DTI), notamment pour l’évaluation des pressions de remplissage ventriculaire gauche et de l’asynchronisme mécanique intraventriculaire gauche.

Quelques bases… En routine, on utilisera surtout le Doppler tissulaire en mode pulsé en positionnant le volume d’échantillonnage au niveau du segment basal des parois antérieure, inférieure, latérale et septale. On s’intéressera au pic de vélocité de l’onde Ea (évaluation du remplissage VG), de l’onde S, et du délai séparant le début du QRS et le début de l’onde S (ou le sommet de l’onde S si la mesure est possible) pour l’évaluation de l’asynchronisme mécanique (figure 1). Figure 1. Spectre Doppler tissulaire myocardique en mode pulse (segment basal de la paroi septale);B. Flux mitral (Doppler pulse standard). CI : contraction isovolumique, S : onde systolique; Ea : onde de remplissage rapide initial, Aa : onde de remplissage terminal ou systole auriculaire, RI : relaxation isovolumique. Évaluation des pressions de remplissage VG (recueil de Ea) Utilisation du DTI en routine Il est à utiliser en cas de profil mitral normal, quelle que soit la FEVG, de flux restrictif associé à une FEVG > 45 % et lorsque le rapport Em/Ea < 1 en présence d’une HVG. On recueillera en plus du flux mitral en Doppler pulsé, la vélocité de l’onde Ea à l’anneau mitral en Doppler tissulaire, en privilégiant au moins deux mesures. L’onde Ea reflète la relaxation VG et semble très peu dépendante des conditions de charge notamment en cas de relaxation altérée. Notons également que la vélocité de Ea diminue avec l’âge. L’évaluation des pressions de remplissage se fonde alors sur le rapport Em/Ea avec des valeurs seuil différentes : - un rapport Em/Ea > 15 est très en faveur de pressions élevées (excellente spécificité) ; - un rapport < 8 signe plutôt des pressions normales(1) ; - entre les deux, il existe une zone floue où il est indispensable d’utiliser d’autres indices de relaxation VG.   Qu’en est-il en cas de trouble du rythme, de valvulopathie mitrale ?   Fibrillation auriculaire Concernant la fibrillation auriculaire, peu d’études sont à notre disposition. Sohn nous propose de considérer un rapport Em/Ea > 10 pour conclure à des pressions élevées avec une spécificité de 93 % et une sensibilité de 75 %(2). Tachycardie sinusale Concernant la tachycardie sinusale, le travail de Nagueh reflète bien notre pratique quotidienne. Si l’on veut affirmer des pressions de remplissage VG élevées, il faut préférer un rapport Em/Ea > 15 qui s’accompagne d’une meilleure spécificité (100 %), comparativement à un rapport Em/Ea > 10 (80 %)(3). Valvulopathie mitrale évoluée En cas de valvulopathie mitrale évoluée (rétrécissement mitral serré et insuffisance mitrale sévère), l’évaluation des pressions de remplissage n’est pas facile et le rapport E/Ea ne doit pas vraisemblablement être utilisé. Dans ces situations, la question n’est heureusement pas tellement de donner une réponse sur l’état des pressions de remplissage mais plutôt de définir le moment de la chirurgie et le type de chirurgie à proposer.   Y a-t-il un intérêt à recueillir les vélocités des ondes Sa et Ea ?   Des valeurs très basses de Ea et de Sa (< 3 cm/s) (353 patients avec cardiopathie, suivis 2 ans)(4), et un rapport Em/Ea > 15 (116 patients avec insuffisance cardiaque, suivis 527 jours)(5) ont été considérés comme des facteurs pronostiques indépendants. Ce dernier indice a très certainement tout son intérêt dans le suivi des patients en insuffisance cardiaque, notamment dans l’adaptation du traitement médicamenteux.   DTI et asynchronisme mécanique   Comment mesurer ? La resynchronisation ventriculaire des patients en insuffisance cardiaque est un véritable sujet d’actualité. Les recommandations actuelles se fondent notamment sur l’élargissement du QRS pour décider de l’implantation de trois sondes. Cependant, il est très probable que la recherche échographique d’un asynchronisme mécanique affine la sélection des patients candidats à la stimulation biventriculaire. En pratique quotidienne, on utilise principalement le DTI pulsé. Il s’agit de recueillir aux 4 sites accessibles dans le plan longitudinal l’intervalle de temps séparant le début du QRS du début de l’onde S (figure 2). Un delta de plus de 40 ms entre les 4 valeurs ainsi obtenues définit un asynchronisme intraventriculaire. Même si son utilisation est simple, son interprétation est parfois plus difficile (vitesses très altérées en cas de cardiopathie ischémique évoluée). Le mode bidimensionnel couleur peut dans ce cas nous aider : il s’agira de mesurer le même intervalle de temps séparant le début du QRS du début de l’onde S sur des courbes de vélocités reconstruites. Figure 2. Exemple de recherche d’asynchronisme mécanique : mesure du délai entre le début du QRS et le début de l’onde S. Y a-t-il un intérêt ? Très certainement, et le plus difficile reste le choix du critère consensuel. Par exemple, dans une étude réalisée chez 104 patients avec insuffisance cardiaque stabilisée (suivi de 1 an en moyenne), Bader a défini l’asynchronisme mécanique comme un délai de plus de 40 ms entre les 4 parois en DTI pulsé(6). Les facteurs de réhospitalisations étaient des QRS > 140 ms, une FEVG < 25 % et la présence d’un asynchronisme intra-VG. D’autres études apportent des éléments sur l’intérêt du DTI pulsé et/ou tissulaire couleur et/ou TM tissulaire couleur dans la sélection des candidats à la resynchronisation.   Évaluation de la fonction ventriculaire en DTI   Peut encore mieux faire… FEVG L’évaluation de la fonction ventriculaire gauche est essentielle en raison des implications diagnostiques, pronostiques et thérapeutiques. Trois méthodes en routine sont à notre disposition et suffisent en général pour conclure : la méthode Simpson, les mesures en mode M et l’estimation visuelle. Chacune d’entre elles a ses limites et ses conditions d’application, ce qui peut rendre parfois leur utilisation hasardeuse. Le Doppler tissulaire peut alors dans ces cas nous aider. Elnoamany a étudié 133 pa-tients atteints de cardiopathies d’étiologie diverse (ischémique, dilatée, à fonction diastolique altérée isolée) vs population témoin et a évalué entre autres l’intérêt de la valeur de l’onde S dans l’évaluation de la FEVG globale(7). Une valeur moyennée inférieure à 8 cm/s de l’onde S recueillie en Doppler tissulaire pulsé (4 parois) pourrait prédire avec une sensibilité de 94 % et une spécificité de 93 % une FEVG < 50 %. La corrélation entre la vélocité de l’onde Sa et la FEVG était meilleure dans le groupe de patients avec FEVG > 50 % par rapport à ceux ayant une FEVG < 50 % (r = 0,82, p < 0,001 vs r =71, p < 0,001). FEVD L’estimation de la FEVD est en pratique plus difficile. Le Doppler tissulaire pulsé offre une aide directement inspirée de la mesure de l’excursion de l’anneau tricuspide. Le recueil de l’onde S semble bien reproductible(8) ; la corrélation entre l’onde S et la FEVD a été souvent étudiée et validée(9). Une vitesse inférieure à 11,5 cm/s reflèterait une FEVD isotopique < 45 % avec une sensibilité de 90 % et une spécificité de 85 % dans une population d’insuffisants cardiaques avec altération de la FEVG. Mais attention aux valeurs basses qui s’accompagnent d’une mauvaise spécificité(10)! Même s’il est prometteur, ce paramètre doit encore être encore largement validé, notamment en cas d’HTAP et de fuite tricuspide importante.   DTI et cardiopathie   Cardiopathie hypertrophique (CMH) Dans la CMH, le seul flux mitral ne permet pas d’évaluer les pressions de remplissage VG : un rapport Em/Am < 1 peut, en effet, traduire des pressions augmentées du fait d’une anomalie de la relaxation VG concomitante à une augmentation de la pression de l’oreillette gauche (POG). Nagueh nous propose d’utiliser la rapport Em/Ea pour l’estimation des pressions de remplissage en prenant un seuil à 10 (sensibilité 92 %, spécificité 85 %). Mais le DTI a certainement une application plus prometteuse : il pourrait dépister des anomalies myocardiques avant même l’apparition de l’hypertrophie VG chez des patients porteurs de la mutation(11). Des résultats identiques ont été mentionnés chez les patients porteurs du gène de la maladie de Fabry.   HVG pathologique ou HVG physiologique ?   Vinereanu a étudié 60 patients présentant une HVG d’étiologie différente (15 CMH authentifiée, 15 sujets atteints d’HTA essentielle et 30 athlètes)(12). Une valeur moyennée de l’onde S recueillie aux 4 sites en Doppler pulsé < 9 cm/s était en faveur d’une HVG pathologique (sensibilité de 87 %, spécificité de 97 %). De même, une valeur moyenne de la vélocité de l’onde Ea < 9 cm/s orientait vers une HVG pathologique (sensibilité = 73 %, spécificité = 97 %). Constriction ou restriction ? C’est un diagnostic parfois difficile. Chez des patients ayant un profil suspect de cardiopathie constrictive ou restrictive, le Doppler tissulaire a, là aussi, un intérêt : il peut orienter, en effet, vers une étiologie constrictive quand la vélocité de l’onde Ea recueillie en DTI pulsé est > 8 cm/s (sensibilité 89 %, spécificité = 90 %)(13).   En pratique   Les deux grandes applications en routine du Doppler tissulaire sont l’évaluation des pressions de remplissage et la recherche d’un asynchronisme mécanique. Dans le premier cas, les seuils semblent maintenant bien définis pour caractériser le niveau des pressions. Dans le second cas, nous sommes encore loin du critère consensuel et du seuil pour définir l’état de synchronisation du cœur, mais les études sont prometteuses.

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