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Risque

Publié le 24 oct 2006Lecture 8 min

Les facteurs de risque CV - Interactions et stratégie thérapeutique

A. MARQUAND, Saint-Raphaël


ESC et WWC
Le concept de prise en charge du risque cardiovasculaire (CV) global est maintenant bien compris des cardiologues, et également du reste du corps médical, seule approche permettant d’améliorer la prise en charge de patients candidats aux maladies CV, toujours en tête de la mortalité dans les pays du monde entier.

La conjonction des facteurs de risque En illustrant leurs propos de cas cliniques très concrets, puisés dans la pratique de tous les jours, les présidents de séance L. Erhardt (Malmö, Suède) et J. Zamorano (Madrid) ont rappelé que c’est la globalité du patient qu’il faut prendre en charge et non pas les facteurs de risque, dissociés les uns des autres. Les données statistiques ont permis de constater que la population hypertendue, par exemple, est plus fréquemment dyslipidémique que la population normotendue. Si un patient présente initialement une dyslipidémie, il arrive fréquemment que s’additionne nt ultérieurement au cours de sa vie d’autres facteurs de risque : surpoids, diabète, HTA… Un patient ayant un cholestérol au-dessus des normes et des chiffres de pression artérielle discrètement élevés, bénéficiera d’un traitement, mais peut échapper à celui-ci si l’on se cantonne aux seuils arbitraires, conduisant aux décisions de traitement. Pour nous aider à cibler le risque cardiovasculaire, nous disposons de grilles de risque, comme la grille SCORE, mais elle est insuffisante car elle n’estime que le risque de décès. La prise en charge du risque global conduit à proposer fréquemment une polythérapie à ces patients, la prise de nombreux comprimés risquant de représenter un frein à l’observance ; rassembler plusieurs médicaments à dose fixe au sein d’un même comprimé représente à cet égard un avantage.   Interaction entre les facteurs de risque L’athérosclérose commence très tôt dans la vie, dès la première décennie, de même que la dysfonction endothéliale qui est favorisée par le tabagisme, l’hypercholestérolémie, l’HTA, facteurs de risque modifiables, mais aussi par l’inflammation et le stress. Cette dysfonction endothéliale, d’abord préclinique, est prédictrice de complications cardiovasculaires ; la prise en charge précoce de ces facteurs de risque se traduira par un bénéfice significatif, bien plus tard dans la vie, si bien que la prise en charge du risque cardiovasculaire doit se concevoir sur toute une vie. Cette approche permet d’accroître la longévité à l’échelle de toute une population. À côté des règles hygiénodiététiques, une approche thérapeutique médicamenteuse est souvent indispensable en cas d’association de facteurs de risque. Dans l’étude HPS, le risque cardiovasculaire des individus est amélioré par la statine, quel que soit le niveau lipidique de base. Il existe une corrélation entre les niveaux de pression artérielle, de cholestérolémie et les maladies cardiovasculaires, sans effet seuil. L’essentiel du bénéfice de la réduction des niveaux de cholestérol et de PA s’observe dans les premières années suivant l’intervention thérapeutique ; le bénéfice de cette stratégie concerne aussi bien la population générale, mais également, et encore de façon plus visible, les populations à risque élevé.   ASCOT-LLA Aucune étude n’avait encore considéré la prévention des accidents coronaires chez des hypertendus non considérés comme dyslipidémiques. Ce vaste essai (Anglo-Scandinavian Cardiac Outcomes Trial : Morbidity-Mortality Outcomes from Lipid Lowering in a Hypertensive population), présenté dans plusieurs grands congrès (ACC 2003, ESC 2005), a comparé d’une part deux stratégies antihypertensives et d’autre part l’intérêt de l’atorvastatine versus placebo dans une population d’hypertendus. Nous ne reviendrons pas sur le détail de ces essais, déjà largement rapportés dans Cardiologie Pratique, pour rappeler que l’effet bénéfique, dans le bras atorvastatine, a conduit à l’arrêt précoce de l’essai. ASCOT, effet très favorable de 10 mg d’atorvastatine : - diminution de 36 % du critère principal (IDM non mortels et accidents coronariens mortels) ; - diminution de 27 % des AVC mortels ou non ; - diminution de 21 % de tous les événements cardiovasculaires et procédures ; - diminution de 29 % de l’ensemble des événements coronaires ; - diminution de 40 % de l’apparition d’un angor ; - diminution non significative de la mortalité de 13 %, mais l’étude a été arrêtée précocement. Les résultats spectaculaires de l’étude ASCOT ont conduit à l’AMM pour Tahor® 10 mg, qui peut être prescrit chez l’hypertendu ayant plus de 3 facteurs de risque et ce, quel que soit son niveau de base de cholestérol. On a comparé ici deux approches thérapeutiques, l’une classique : aténolol ± thiazidique et l’autre moderne : amlodipine ± perindopril. Près de 20 000 hypertendus ont été randomisés entre les deux groupes et, là aussi, la moindre survenue d’événements cardiovasculaire et une moindre mortalité dans le groupe basé sur la stratégie amlodipine a conduit à l’arrêt de l’étude. L’arrêt prématuré de l’essai n’a pas permis d’atteindre un niveau de significativité pour le critère composite principal, associant infarctus non mortel et mortalité coronaire, mais le traitement « moderne » a permis une réduction significative de : - 13 % des infarctus symptomatiques et décès coronariens ; - 23 % des AVC mortels ou non ; - 16 % du total des événements cardiovasculaires et procédures ; - 35 % de la survenue de signes d’artériopathie périphérique ; - 32 % d’angor instable ; - 11 % de la mortalité toute cause. Il est intéressant de noter que l’effet de cette stratégie est très précoce, se traduisant par une séparation dès les premiers mois des deux courbes (figure).   Étude ASCOT : efficacité de l'atorvastatine sur le critère primaire.   Une synergie d’action entre l’atorvastatine et l’amlodipine Pour les investigateurs, la différence observée de pression artérielle ne pouvait pas, à elle seule, rendre compte du bénéfice sur le risque de survenue des accidents coronariens et des AVC. Plusieurs hypothèses ont été avancées, nous en retiendrons deux : - l’étude CAFE (Conduit Artery Function Evaluation) s’est intéressée à la mesure de la pression artérielle centrale : à baisse comparable de la pression artérielle humérale, la stratégie dite « moderne » abaisse plus la pression pulsée centrale contribuant ainsi à expliquer le plus grand bénéfice observé avec l’association amlodipine ± perindopril ; - l’atorvastatine permettrait de resensibiliser les récepteurs des canaux calciques au niveau de la plaque, facilitant l’effet et restaurant l’action des anticalciques.   Bénéfice et insuffisance du traitement hypolipémiant aujourd’hui Le bénéfice du traitement par statines a été très bien mis en évidence par la métaanalyse des Cholesterol Treatments Trialists publiée dans le Lancet en 2005. Chaque réduction du LDL-cholestérol de 0,39 g/l sur une durée moyenne de 5 ans s’accompagne d’une réduction de 12 % de la mortalité, avec une diminution de 23 % des décès coronaires et des infarctus, de 24 % des revascularisations coronaires et de 17 % des AVC. Ces résultats dépendent de l’intensité du traitement, comme l’a objectivé l’essai PROVE-IT (PRavastatin Or atorVastastin Evaluation and Infection Therapy) où la prescription de 80 mg d’atorvastatine permet une amélioration rapide comparativement à 40 mg de pravastatine dans le postinfarctus du myocarde. L’essai TNT (Treating to New Targets) a montré également le bénéfice de la stratégie « agressive » (80 mg d’atorvastatine), permettant d’obtenir un LDL moyen de 0,77 versus 1 g/l sous 10 mg d’atorvastatine, qui se traduit par une diminution du risque de 22 % des événements coronaires et de 25 % des AVC. Enfin, l’essai REVERSAL (REVERSing of atherosclerosis with Aggressive Lipid lowering study) a permis de documenter cette efficacité clinique par la moindre progression des plaques sous 80 mg d’atorvastatine versus 40 mg de pravastatine. À l’heure actuelle, si cette stratégie d’abaissement drastique du LDL-cholestérol se solde par un bénéfice clinique, les recommandations n’ont pas encore entériné ce résultat et il faut s’attacher à abaisser le LDL-cholestérol jusqu’à la cible de < 1 mg/l chez l’ensemble de nos patients en prévention secondaire.   Bénéfices et insuffisances du traitement antihypertenseur L’amlodipine, dans les études ALLHAT (Antihypertensive and Lipid Lowering treatment to prevent Heart Attack Trial) et VALUE (Valsartan Antihypertensive Long-term Use Evaluation trial), a montré sa capacité à abaisser plus rapidement la pression artérielle, mécanisme qui pourrait expliquer le bénéfice clinique plus grand observé avec cette molécule. Mais le traitement antihypertenseur seul est insuffisant dans la prévention des événements cliniques, et comme nous l’avons vu plus haut, l’étude ASCOT permet de potentialiser l’effet favorable des antihypertenseurs sur le risque de survenue des événements cliniques. Enfin, nos connaissances actuelles sur la prise en charge de l’hypertension artérielle sont basées sur des essais classiques portant sur des populations plutôt âgées ayant déjà une atteinte des organes cibles, et il sera intéressant de déterminer la portée d’une approche plus précoce des différentes stratégies thérapeutiques dans les différents groupes d’âge.   Prévention des AVC L’AVC est un problème considérable, avec 15 millions de nouveaux patients atteints chaque année dans le monde, dont 5 millions resteront handicapés et dont la mortalité est importante. Ici aussi, les statines sont intéressantes car elles diminuent de façon très nette l’incidence des AVC (CARE, HPS et ASCOT-LLA). Une métaanalyse a chiffré le bénéfice apporté par les  statines : chaque réduction du LDL-cholestérol de 10 % entraîne une diminution du risque d’AVC de 15,6 % chaque année. L’étude SPARCL (Stroke Prevention by Aggressive Reduction of Cholesterol Level), présentée à ce même congrès, a testé l’action de 80 mg d’atorvastatine chez les patients ayant déjà présenté un AVC ou un AIT : ce traitement permet une réduction de 16 % des AVC à 10 ans, notamment des AVC mortels (- 43 %) et des AVC ischémiques (- 22 %).   Comment faire en pratique ? Le clinicien doit s’aider de grilles d’évaluation du risque ; le calcul du score de risque cardiovasculaire global est possible et validé ; des ajustements des équations dérivées de Framingham ont été réalisés pour permettre une évaluation du risque adaptée à l’Europe.   Comment améliorer l’observance du traitement ? Les registres et les études observationnelles ont montré combien l’observance du traitement reste insuffisante,  antihypertenseurs ou hypolipémiants confondus. L’éducation est l’une des solutions essentielles pour améliorer cette observance. Le concept de polypill est également une solution ; il consiste à intégrer dans un même comprimé plusieurs principes actifs ; en diminuant le nombre de prises dans journée, il offre un meilleur confort au patient et devrait amélioree l’observanre. L’arrivée de Caduet®, associant atorvastatine 10 mg et amlodipine 5 ou 10 mg, devrait permettre d’améliorer la prise en charge du risque cardiovasculaire global.   D’après un symposium des laboratoires Pfizer.

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