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Valvulopathies

Publié le 08 juin 2004Lecture 7 min

Les valves porcines stenless

U. HVASS, hôpital Bichat, Paris

Les principales valves stentless, c’est-à-dire sans armature, ont maintenant plus de 10 ans de recul. Ces prothèses ont-elles tenu leurs promesses ? Quels sont les problèmes et ont-elles contribué à une évolution des valves classiques avec armature ?

Un bref rappel historique Pour comprendre l’intérêt de ces valves sans armature, il faut rappeler certains reproches adressés aux valves montées sur une armature. Les résultats des bioprothèses sont dominés par les problèmes de dégénérescence tissulaire, dont l’étude a attiré l’attention sur une participation probable de l’armature de la valve. Effets indésirables de l’armature En effet, la topogaphie des lésions, qu’il s’agisse de déchirures ou de calcifications, siègeait là où se concentraient les stress mécaniques développés pendant la fermeture et l’ouverture de la valve. Cette constatation suggérait un amortissement insuffisant des contraintes et la responsabilité de l’armature, encore trop rigide, contenant une valve qui ne pouvait pas suivre les variations dynamiques de la racine de l’aorte. On sait, en particulier, que l’expansion systolique de la racine de l’aorte permet une ouverture valvulaire physiologique, sans plicatures, et que la mise sous tension des sinus de Valsalva, associée à l’élasticité des attaches commissurales, assure l’amortissement diastolique. Ces facteurs sont essentiels au contrôle des contraintes imposées au tissu valvulaire pendant le cycle cardiaque. L’effet indésirable d’une armature sur les valves biologiques n’est pas une notion nouvelle. Il avait déjà été établi par des études comparant la survie valvulaire de valves identiques, l’une montée sur une armature, l’autre sans, au bénéfice évident de cette dernière. Il en va de même pour les valves humaines. En effet, une homogreffe aortique, lorsqu’elle est montée sur une armature, se comporte, en termes de longévité, comme les valves animales montées sur un support, alors que la même homogreffe, cousue librement au niveau de la racine de l’aorte, offre une survie tissulaire bien supérieure. Encombrement On reproche aussi aux valves montées sur une armature leur encombrement, surtout en présence d’anneaux aortiques de petite dimension. La valve, qu’elle soit porcine ou péricardique, peut être responsable de gradients transvalvulaires résiduels anormalement élevés, et surtout qui se majorent considérablement pour des efforts mêmes modérés.   Modèles les plus courants de valves sans armature rigide   La valve stentless de Cryolife-O’Brien est la plus implantée en France (fabriquée et distribuée par Cryolife Atlanta, États-Unis) (figure 1). C’est une valve composite fabriquée à partir de trois cupules non coronaires et assemblées avec un souci de symétrie et de coaptation. On élimine ainsi la zone musculaire plus fragile et plus rigide de la valve porcine. Techniquement, elle est la plus simple à poser avec une seule ligne de suture. L’implantation de cette valve au-dessus de l’anneau aortique permet de l’adapter facilement aux contours des sinus de Valsalva dilatés, même dilatés tels qu’on peut les trouver dans les insuffisances aortiques et les bicuspidies. Figure 1. Cryolife-O’Brien.     Figure 2. Freestyle.   Figure 3. Toronto SVP.   Figure 4. Devenir des stentless en fonction de l’âge.   La valve stentless Freestyle (Medtronics, États-Unis) et la valve stentless Prima Plus (Baxter, États-Unis) sont des racines de l’aorte d’origine porcine et se présentent comme des petits conduits valvulaires avec une étroite collerette de Dacron pour renforcer l’orifice d’entrée. La valve stentless de Toronto SVP (Saint-Jude, Minnesota, États-Unis) est renforcée sur toute sa surface externe par une mince couche de Dacron. Elle se présente comme une couronne avec un orifice d’entrée horizontal et un contour distal qui suit les valvules. Ces valves nécessitent une double ligne de suture, la proximale est placée sous l’anneau aortique et la ligne distale se place dans la paroi des sinus de Valsalva, sous les ostia coronaires. Toutes ces valves sont tannées à la glutaraldéhyde, de la même manière que les valves biologiques montées sur une armature. La famille des valves stentless s’est agrandie avec des valves péricardiques (Sorin) et des valves porcines, dont la fixation tissulaire s’adresse à d’autres produits que la glutaraldéhyde. Les résultats manquent encore de recul et ne permettent pas d’en parler plus.   Résultats des valves stentless à moyen terme Dès que la technique est maîtrisée, les résultats à moyen terme sont excellents : - les gradients sont faibles, entre 5 à 10 mmHg, la régression de l’hypertrophie ventriculaire gauche est plus rapide et plus prononcée qu’avec les valves sur armature ; - l’adaptation à l’effort reproduit les résultats obtenus avec les homogreffes : élévation modeste des gradients transprothétiques et augmentation du débit cardiaque par augmentation du volume d’éjection systolique ; - ce type d’adaptation traduit une amélioration de la fonction diastolique qui suit l’amélioration de la fonction systolique après levée presque complète de l’obstacle. Deux études randomisées (Toronto, Canada et Oxford, Grande-Bretagne) suggèrent une amélioration de la survie avec moins d’événements valvulaires et cardiaques chez les patients qui ont reçu une valve stentless plutôt qu’une valve avec une armature. Avec les valves stentless, contrairement aux valves sur armature, les stress mécaniques que subissent les valvules pendant l’ouverture et la fermeture sont très bien amortis par les variations dynamiques de la racine de l’aorte. De plus, les faibles gradients postopératoires entraînent une meilleure régression de l’hypertrophie ventriculaire gauche, assurant la récupération des fonctions systolique et diastolique, ce qui, à son tour va se traduire par une meilleure adaptation aux efforts, même modérés.   Résultats des valves stentless à long terme   Les valves stentless Cryolife-O’Brien Elles sont implantées dans le service à Bichat depuis plus de 12 ans ; 650 valves ont fait l’objet d’une étude à 10 ans. Le nombre d’implantations dépasse aujourd’hui les 800. Chez les patients de plus de 65 ans, la stentless montre une excellente stabilité avec peu d’événements valvulaires. La dégénérescence primaire est exceptionnelle. Les résultats à 10 ans sont comparables en termes de durabilité à ceux des valves péricardiques montées sur une armature de Carpentier-Edwards. Les stentless sont cependant meilleures en termes de complications valvulaires telles que les accidents emboliques, les endocardites ou les fuites périvalvulaires. Ches les patients plus jeunes, dont l’âge moyen est autour de 40 ans, une dégénérescence valvulaire peut commencer à se manifester à partir de 7 à 8 ans. Ces résultats sont assez comparables à ceux des valves classiques. Les résultats à 10 ans des valves stentless de Toronto Ils sont stables, à condition que les valves ne soient pas soumises à l’effet de la dilatation de la jonction sinotubulaire qui perturbe la géométrie initiale de la valve et entraîne une regurgitation centrale. Ces complications traduisent les conséquences d’une implantation proximale sous-annulaire de ces valves, dont les montants — qui portent les commissures — sont nécessairement plus écartés que l’anneau aortique en raison de l’implantation de la suture distale sur la paroi aortique. Il est significatif que les résultats ne sont pas satisfaisants dans deux groupes de patients : les insuffisances aortiques et les bicuspidies. En effet, c’est dans ces groupes de pathologies que les sinus de Valsalva sont les plus dilatés et présentent un diamètre sinotubulaire au-delà des 10 à 15 % tolérables par rapport au diamètre de l’anneau aortique. Toute augmentation de ce rapport défavorable des diamètres d’entrée et de sortie de la valve va écarter les commissures valvulaires, entraînant une fuite centrale. Dans ces deux groupes de patients, pour éviter les conséquences de la dilatation des sinus de Valsalva, il est préférable d’employer ici la technique de replacement de la racine de l’aorte. Cette technique est parfois un peu lourde pour des patients âgés qui ont seulement besoin d’un remplacement valvulaire aortique. Convenablement sélectionnés, les patients peuvent en bénéficier. En effet, la valve Freestyle, documentée par une étude multicentrique, montre des résultats stables à 8 ans dans un sous-groupe de 104 remplacements de la racine aortique.   Les valves stentless ont-elles influé sur les valves classiques ? Le développement des valves sans armature a eu des retombées au niveau des valves avec armature. Depuis quelques années, certains constructeurs ont mis sur le marché des bioprothèses avec des supports plus légers, flexibles et moins encombrants. Les armatures sont même devenues « à minima » dans certaines valves qui apparaissent comme le chaînon manquant entre stentless et « stented ». Malgré la flexibilité accrue des armatures modernes et l’amélioration des contours et des techniques d’ancrage du tissu valvulaire sur un support prothétique, l’armature flexible la plus physiologique et la moins encombrante reste incontestablement la racine de l’aorte elle-même. Celle-ci est bien la structure dynamique à préserver qui permet le meilleur amortissement des stress mécaniques que subissent les feuillets valvulaires pendant le cycle cardiaque.   Conclusion   Les valves de Cryolife-O’Brien sont les seules stentless qui donnent à 10 ans des résultats comparables à ceux des valves classiques. Elles sont peu sensibles aux problèmes liés aux variations de la jonction sinotubulaire et elles ont l’avantage sur les valves avec armature de produire moins d’événements valvulaires tardifs, endocardites et accidents emboliques. De plus, les valves stentless retiennent des avantages physiologiques (gradients, surface orificielle et réduction de la masse myocardique) qui se traduisent par une meilleure adaptation aux efforts, même modérés.

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