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HTA

Publié le 28 nov 2006Lecture 7 min

L'HTA chez les insuffisants rénaux non diabétiques

J.-M. HALIMI, hôpital Bretonneau (Tours) et O. Hanon, hôpital Broca (Paris)

Quelques études ont permis de préciser les objectifs tensionnels chez le patient hypertendu insuffisant rénal et les moyens d’y parvenir. Les recommandations thérapeutiques sont strictes à cet égard.

Les essais publiés   • Dans l’étude HOT (Hypertension Optimal Treatment), 18 790 patients ont été randomisés selon trois cibles thérapeutiques : • PAD ≤ 90 mmHg, • PAD ≤ 85 mmHg, • ou PAD ≤ 80 mmHg. Le traitement initial était constitué de félodipine, puis plusieurs étapes étaient prévues pour obtenir le contrôle tensionnel désiré : addition d’un IEC ou d’un bêtabloquant, augmentation de la dose de félodipine puis addition d’un diurétique. La publication initiale n’avait pas permis de définir, chez les patients non diabétiques, la PAD pour laquelle la réduction des événements CV était maximale. Dans l’analyse parue en 2003, il a été montré que l’incidence des infarctus du myocarde n’était pas différente quand on comparait le groupe PAD ≤ 90 mmHg au groupe PAD ≤ 85 ou ≤ 80 mmHg, chez les patients ayant une créatininémie > 115 µmol/l. En revanche, chez les patients ayant une créatininémie ≤ 115 µmol/l, il a été constaté une incidence plus basse des infarctus du myocarde dans le groupe où la cible de PAD à atteindre était la plus basse ((PAD < 80 mmHg ; RR = 0,81, 0,68-0,97). Une autre analyse portant sur la relation entre fonction rénale et pression artérielle au cours de l’étude HOT a complété ces données : • la mortalité CV était nettement augmentée chez les pa-tients dont la créatininémie était > 141 µmol/l (RR : 3,24 ; IC95% : 2,13-4,94 ; p < 0,0001) ou ayant une clairance < 60 ml/min (RR : 1,80 ; IC : 1,33-2,44 ; p <0,001) ; • dans ce dernier cas, l’incidence des événements CV majeurs (p < 0,001), des infarctus (p = 0,06), des AVC (p = 0,01) et de la mortalité totale (p < 0,001) était augmentée ; • l’incidence des événements CV majeurs n’était pas différente chez les patients ayant une créatininémie > 1,5 mg/l (133 µmol/l), quel que soit le groupe dans lequel ils ont été randomisés (i.e. cible thérapeutique de PAD ≤ 90 mmHg, ≤ 85 mmHg ou ≤ 80 mmHg). Dans l’étude AASK (African American Study of Kidney disease) multicentrique prospective randomisée en double aveugle, les effets d’un IEC (ramipril), d’un bêtabloquant (métoprolol) et d’un inhibiteur calcique (amlodipine) sur la progression de l’insuffisance rénale ont été comparés chez 1 094 patients afro-américains, âgés de 18 à 70 ans, ayant une néphroangiosclérose probable définie par une HTA avec insuffisance rénale. Leur débit de filtration glomérulaire (DFG) était compris entre 20 à 65 ml/min/1,73 m2). Ils ont été randomisés pour recevoir soit du ramipril à la dose de 2,5 à 10 mg/jour, soit du métoprolol à la dose de 50 à 200 mg/jour ou de l’amlodipine à la dose de 5 à 10 mg/jour. De plus, au sein de ces options thérapeutiques, les patients étaient randomisés selon la cible thérapeutique à atteindre : PA usuelle (PA moyenne à atteindre : 102 à 107 mmHg) ou pression artérielle basse (PA moyenne tensionnelle à atteindre : ≤ 92 mmHg). Le critère d’évaluation principal était la modification du DFG (la pente en ml/min/an) en séparant la période initiale (les 3 premiers mois = phase aiguë) de la période ultérieure (phase chronique). Le comité de surveillance a pris la décision d’arrêter le groupe amlodipine dans cette étude en septembre 2000 car l’incidence de l’insuffisance rénale terminale était significativement plus élevée dans le groupe amlodipine lors d’une analyse intermédiaire. Les caractéristiques initiales des patients des trois groupes étaient comparables. Le suivi a été de 36 mois. • Le déclin de la fonction rénale (phase chronique) a été de 2,07 ml/ min/1,73 m2/an dans le groupe ramipril et de 3,22 dans le groupe amlodipine, donc plutôt en faveur du ramipril, mais la pente moyenne n’était pas différente entre les deux groupes. • L’effet du traitement a été nettement influencé par le niveau initial de protéinurie (valeur seuil : 0,22 protéinurie/créatininurie [mg/mg], c’est-à-dire environ 300 mg/jour). • La pente moyenne de DFG était meilleure chez les patients traités par amlodipine lorsque la protéinurie était < 0,22 mais le ramipril était meilleur chez ceux dont la protéinurie était > 0,22. • Dans tous les cas, la dégradation du DFG était plus marquée chez les patients ayant une protéinurie initiale supérieure à 0,22 (-3,55 vs - 5,92 ml/min/ 1,73 m2/an dans les groupes ramipril et amlodipine respectivement) par rapport aux autres (- 1,22 vs - 2,22 ml/min/ 1,73 m2/an dans les groupes ramipril et amlodipine). • L’effet du traitement était nettement influencé par le niveau initial de DFG. Quand le DFG initial était compris entre 40 et 65 ml/min/1,73 m2, le déclin sur les 3 ans de suivi était significativement plus mauvais chez les patients sous ramipril (-1,53 ml/min/1,73 m2/an) que sous amlodipine (- 0,55 ml/ min/1,73 m2/an). À l’inverse, quand le DFG initial était < 40 ml/min/1,73 m2, le déclin sur les 3 ans de suivi était significativement plus mauvais chez les patients sous amlodipine (- 4,33 ml/min/1,73 m2/an) que sous ramipril (- 2,73 ml/ min/1,73 m2/an). Finalement, le risque d’atteindre le stade d’insuffisance rénale chronique terminale (IRCT) était le plus élevé chez les patients ayant le DFG le plus bas et/ou la protéinurie la plus élevée ; le risque d’IRCT était plus faible dans le groupe ramipril que dans le groupe amlodipine. La réduction sévère de la PA (cible PA basse atteinte : 126/77 mmHg vs PA usuelle atteinte : 139/84 mmHg) n’a pas permis une meilleure préservation de la fonction rénale, qui s’est avérée identique dans les deux groupes. Dans une étude chinoise publiée au début de l’année 2006, les auteurs ont cherché à savoir si le traitement par IEC permettait une néphroprotection lorsqu’il est institué à un stade tardif (créatininémie comprise entre 250 et 450 µmol/l). Les patients étaient composés surtout de sujets ayant une glomérulonéphrite. Après une phase de run-in permettant d’exclure les sujets ne tolérant pas les IEC ou le placebo (hyperkaliémie ou insuffisance rénale aiguë par exemple), les 224 pa-tients non diabétiques insuffisants rénaux ont été randomisés pour recevoir un IEC (bénazépril, 20 mg/j) ou un placebo. Ils ont été suivis pendant 3,4 ans. Dans le groupe bénazépril, 22 % (vs 41 % dans le groupe placebo, p = 0,005) ont présenté le critère de jugement principal (doublement de la créatininémie ou insuffisance rénale chronique terminale). La PA a baissé de manière équivalente dans les deux groupes. Dans le groupe bénazépril, la réduction de la protéinurie a été de 52 % et le déclin de la fonction rénale de 23 %. Au cours de l’étude REIN-2 (Ramipril Efficacy in Nephropathy), 338 patients insuffisants rénaux protéinuriques et chez qui la PAD initiale était < 90 mmHg ont été randomisés pour recevoir un inhibiteur calcique (félodipine = traitement intensif) ou un placebo (= traitement habituel) afin de réduire la PA à des niveaux plus bas, en plus de leur traitement habituel comportant systématiquement un IEC (ramipril). Les patients inclus avait soit une protéinurie comprise entre 1 et 3 g/24h et une clairance de la créatinine < 45 ml/min, soit une protéinurie > 3 g/24 h et une clairance de la créatinine <70 ml/min. La PA a baissé d’une valeur de 137/84 mmHg à une valeur moyenne de 130/80 mmHg dans le groupe « traitement intensif » et de 136/84 mmHg à 134/82 mmHg dans le groupe « traitement habituel », après une médiane de suivi de 19 mois (p < 0,05 vs traitement habituel). La protéinurie n’était pas différente entre les deux groupes au cours du suivi. À l’issue de cette période, 23 % du groupe traitement intensif et 20 % du groupe traitement habituel ont progressé vers l’insuffisance rénale chronique terminale (différence non significative). La réduction de la PA était faible entre les deux groupes. Il est possible qu’une réduction plus importante de la PA permette une néphroprotection, mais ces résultats ne le suggèrent pas.   Intérêt de l’association IEC/sartan Dans un travail japonais prospectif en double aveugle (COOPERATE), 263 patients insuffisants rénaux non diabétiques ont été randomisés pour recevoir un IEC (trandolapril), un ARAII (losartan) ou les deux. Ces patients avaient une créatininémie en moyenne de 267 µmol/l, soit une clairance calculée de 38 ml/min, et une protéinurie en moyenne de 2,5 g/24 h. Deux tiers d’entre eux avaient une maladie glomérulaire (dans la moitié des cas une néphropathie à IgA) et leur PA moyenne initiale était de 130/75 mmHg. Le critère principal de l’étude était le délai de survenue du doublement de la créatinine ou une insuffisance rénale terminale. La médiane de suivi a été de 2,9 ans. L’étude a été interrompue car une analyse intermédiaire a montré une différence significative entre le groupe association et les deux autres groupes. Finalement, 11 % des patients du groupe association IEC/ARA II versus 23 % dans les deux autres groupes ont développé une insuffisance rénale terminale ou un doublement de la créatinine. Les facteurs modifiant ce risque étaient : le traitement IEC/ARAII, la fonction rénale initiale et la réduction de la protéinurie au cours du temps.   En pratique   La protection rénale est bien exposée dans les recommandations nationales « HTA » (HAS 2005) : elle repose sur un dépistage et une prise en charge précoces. Le but du traitement est la réduction de la PA < 130/ 80 mmHg et de la protéinurie < 0,5 g/j. En première intention, le traitement pharmacologique est un bloqueur du système rénine-angiotensine (à dose suffisante) ; plutôt un IEC dans les néphropathies non diabétiques et chez les sujets diabétiques de type 1 ; et plutôt ARAII chez les sujets diabétiques de type 2 dès le stade de microalbuminurie. En deuxième intention, le diurétique est justifié car il est synergique sur la PA (voire sur la réduction de la protéinurie). Le blocage double du système rénine-angiotensine peut être envisagé chez certains patients n’ayant pas une réduction suffisante de la protéinurie, mais le niveau de preuve est moins élevé.

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