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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 06 juil 2004Lecture 8 min

NASPE 2004

A. LAZARUS, InParys, Saint-Cloud

Pour ses 25 ans, la « NASPE » (Société nord-américaine de stimulation et d’électrophysiologie) change de nom pour devenir la « Heart Rhythm Society », et cède à la mondialisation avec un nouveau logo symbolisant un globe terrestre …
Sur le plan scientifique, on note cette année encore la dominance des deux thèmes phares que sont l’ablation à visée curative dans la fibrillation atriale et la stimulation biventriculaire dans l’insuffisance cardiaque.

Ablation de la FA L’ablation de la fibrillation atriale (FA) continue de prendre de l’ampleur. Les résultats du registre européen sur l’ablation curative de la FA ont été présentés par Jaïs, incluant 30 des 80 centres pratiquant cette technique. En moyenne, ces équipes ont un volume d’activité élevé, réalisant 324 ± 205 ablations/an (80 à 850) dont 65 ± 93 (2 à 400) ablations de FA. Les données colligées de 6 759 procédures révèlent des méthodes variables. Les opérateurs effectuent eux-mêmes la ponction transseptale et, dans 80 % des cas, traitent les 4 veines pulmonaires. L’approche des veines cibles est majoritairement (90 %) de type électrophysiologique à l’aide de cathéters « lassos », alors que 10 % des procédures sont basées sur des critères anatomiques à partir du système d’imagerie Carto. Ce système, qui permet de reconstruire une carte d’activation cavitaire en 3 dimensions, est au total employé dans 27 % des procédures. En complément de l’ablation des veines pulmonaires, chez 24 % des patients sont réalisées des lésions linéaires intra-atriales (isthme mitral entre la veine pulmonaire inférieure gauche et l’anneau mitral, ligne entre les deux veines pulmonaires supérieures, ablation de l’isthme cavo-tricuspidien, afin de prévenir la survenue d’un flutter intra-atrial droit). Si quelques patients (3 %) ont été traités par cryothérapie, l’écrasante majorité (97 %) a été ablatée de manière classique par courant de radiofréquence.   Résultats cliniques La variabilité des techniques employées et des volumes d’activité explique en partie les résultats cliniques inhomogènes avec 11 à 100 % (51 % en moyenne) de patients sans récidive de FA après arrêt des antiarythmiques. Si aucun décès lié à la procédure n’est signalé, la morbidité n’est toutefois pas nulle : - une sténose veineuse pulmonaire (> 50 %) est retrouvée dans 1,85 % des cas (0 à 11 %), - un accident vasculaire cérébral ischémique s’est produit chez 1 % (0 à 10 %) de la population traitée, - 1,9 % (0 à 11 %) des patients ont présenté une tamponnade. Deux cas de lésion phrénique droite ont eu pour conséquence une paralysie diaphragmatique. Au total, cette thérapie, pour un coût technologique élevé (investissement en matériel d’imagerie, temps et consommables), est donc efficace avec, cependant, une variabilité importante des résultats et un taux non négligeable d’effets indésirables sérieux. Packer propose une variante, surtout dans les formes chroniques ou persistantes de FA, par la réalisation de larges lésions circonférentielles englobant les 4 veines pulmonaires. Cette technique présente l’avantage d’écarter le risque de sténose veineuse pulmonaire — ce que confirme Mahapatra dans un autre travail — mais se complique trois fois plus souvent de tamponnades. Sanders a, de son côté, étudié les zones atriales à dominance fréquentielle maximale, montrant qu’elles sont nécessaires à la persistance de l’arythmie et que leur ablation modifie le substrat atrial et permet de mettre fin à la FA. Après une ablation pour FA chronique, chez 70 patients, Jaïs précise que deux, voire trois, procédures ont été nécessaires chez respectivement 43 et 16 % des patients. La récidive arythmique correspondait à une FA dans 37 % des cas et, plus souvent (63 %), était en rapport avec une arythmie atriale organisée : macroréentrée intra-atriale gauche (35 % : autour de l’anneau mitral ou des veines pulmonaires droites), réentrée autour de l’insertion du faisceau de Bachmann (8 %), arythmie focale (10 %) ou flutter commun (10 %). Les récidives de FA apparaissaient plus fréquemment à la faveur d’un bloc incomplet de l’isthme mitral ou de la récupération d’une conduction au niveau veineux pulmonaire. Dans les FA paroxystiques, la même équipe conclut à l’intérêt de tester la réinductibilité de la FA en fin de procédure afin de prédire le succès ou la nécessité de poursuivre l’ablation du substrat atrial. L’inductibilité est testée par salves rapides intra-atriales gauches puis droites, et considérée comme positive en cas de FA se maintenant plus de 10 minutes. Figure 1. Holter ECG : extrasystoles atriales de type « P sur T », évocatrices d’un foyer arythmique situé au niveau des veines pulmonaires. Quel est le coût ? Le traitement curatif de la fibrillation atriale répond à un important besoin de santé, comme le rappelle Wu. À partir d’une base de données de 1,8 million de salariés américains, il ressort un surcoût de 11 500 USD/an lié à la FA, l’hospitalisation représentant la part dominante des dépenses. Dans son étude, la FA apparaît génératrice d’infarctus, d’insuffisance cardiaque, d’accidents vasculaires cérébraux, d’autres troubles rythmiques, de dépression et, plus généralement, d’anxiété.   Resynchronisation cardiaque La transition est naturelle de la fibrillation atriale à l’insuffisance cardiaque, le vieillissement de la population faisant monter en puissance ces deux pathologies qui, par ailleurs, sont fréquemment intriquées. La resynchronisation cardiaque (CRT) souffle cette année ses 10 bougies ! À l’occasion de cet anniversaire, en complément du bénéfice fonctionnel dorénavant bien établi, des preuves solides de son effet favorable sur la mortalité commencent à voir le jour avec, en particulier, la publication de l’étude COMPANION (Comparison of medical therapy and pacing and defibrillation in chronic heart failure) dans le numéro du New England Journal of Medicine sorti pendant la semaine du congrès. Les données du registre Insync italien, incluant 1 502 patients, sont concordantes en montrant une survie à 1, 2 et 3 ans de 88,5, 82,8 et 76 % respectivement. À noter dans ce travail une mortalité accrue en cas de cardiopathie d’origine ischémique (6,5 %/an vs 4,4 %/an si non ischémiques).   Comment sélectionner les candidats ? On sait que sélectionner les candidats à la CRT sur la largeur des QRS n’est pas une bonne méthode car la corrélation avec la désynchronisation mécanique est imparfaite, comme le rappelle Bleeker à partir d’un collectif de 90 patients. Une désynchronisation intraventriculaire gauche échographique (délai septum vs paroi latérale) est présente chez 27 % des individus à QRS < 120 ms et seulement 70 % des patients à QRS > 150 ms sont désynchronisés. Le QRS comme critère essentiel de sélection expose donc à deux écueils : récuser des patients authentiquement désynchronisés sous prétexte d’un QRS insuffisamment large, et implanter sur la notion de QRS larges des patients insuffisamment désynchronisés qui risquent de venir gonfler les rangs des patients non répondeurs à la technique. Lane arrive aux mêmes conclusions à l’aide du Doppler tissulaire avec une bonne valeur prédictive de cette technique quant au résultat postopératoire. Les Bordelais apportent un éclairage intéressant par l’échographie d’effort, montrant sur 25 patients que le degré d’asynchronisme intraventriculaire gauche peut varier substantiellement durant l’exercice, stable (40 %), s’aggravant (43 %) ou s’améliorant (17 %), avec une relation étroite entre ces variations d’asynchronisme à l’effort et les variations du débit cardiaque.   Bénéfices de la stimulation biventriculaire Le bénéfice (classe NYHA, fraction d’éjection, dimensions ventriculaires gauches) de l’ajout d’une sonde de stimulation ventriculaire gauche, chez des insuffisants cardiaques symptomatiques déjà porteurs d’un stimulateur cardiaque, ressort du travail présenté par Joseph. Le gain observé est de même amplitude que pour les patients primo-implantés. Gras rapporte des résultats comparables à partir des 88 patients de l’étude Insync III, dont 18 avaient déjà un stimulateur. L’amélioration de la distance parcourue lors du test de marche de 6 minutes est même supérieure chez ces patients (152 mètres) par rapport à ceux primo-implantés (67 mètres). Daoud donne des informations concordantes à partir d’un collectif de 165 patients en classe NYHA 2 ou 3 issus de l’étude PAVE et ayant eu une ablation de la jonction auriculo-ventriculaire suivie de l’implantation d’un stimulateur, soit monoventriculaire droit, soit biventriculaire. Parmi ceux dont la fraction d’éjection était < 35 %, le test de marche de 6 min révèle une amélioration clinique nettement plus importante chez les patients stimulés en biventriculaire (104 m vs 67 m). Les effets de la mise à niveau d’un système de stimulation monoventriculaire droit par l’ajout d’une sonde ventriculaire gauche sont l’objet de l’étude RD-CHF présentée par Daubert. Sur 44 patients randomisés, le passage à un système biventriculaire a permis une baisse du délai interventriculaire, du délai prééjectionnel gauche et une diminution de la régurgitation mitrale avec tendance au remodelage inverse du ventricule gauche, toutefois non significative après un court recul de 3 mois. Figure 2. Resynchronisation cardiaque : le positionnement latéral de la sonde ventriculaire gauche assure habituellement le meilleur niveau de resynchronisation. Figure 3. Test peropératoire de l’efficacité du défibrillateur implanté, sur une fibrillation ventriculaire préalablement induite. Deux tests successifs sont-ils encore nécessaires ? Défibrillation implantable Pour conclure, quelques lignes sur la défibrillation implantable. Certains confrères posent parfois la question de la nécessité de systématiquement tester l’efficacité de l’appareil à l’implantation par l’induction d’une fibrillation ventriculaire.   Faut-il tester systématiquement ? Russo apporte un élément de réponse en montrant rétrospectivement, sur une série de 1 100 patients, que 69 (6,3 %) d’entre eux avaient des seuils élevés, c’est-à-dire une marge insuffisante, < 10 joules, entre le seuil de défibrillation et l’énergie maximale délivrable par l’appareil. Diverses mesures ont alors dû être prises, au premier rang desquelles l’implantation d’un défibrillateur à haute énergie (> 35 joules), afin d’être conforme au critère d’implantabilité habituel (marge de 10 joules au-dessus du seuil de défibrillation), inversion de polarité de choc, ou ajout/modification du système de sondes.   Un ou deux accès de FV ?   Pour autant, faut-il persister à induire systématiquement à deux reprises une fibrillation ventriculaire en peropératoire ? Deux travaux bousculent ce dogme historique en montrant qu’induire un seul accès de fibrillation suffit. Chen décrit le suivi de 162 patients, dont 95 % avaient un premier choc efficace à l’implantation avec une marge de sécurité > 10 J. Dans ce groupe, avec un recul moyen d’un peu plus d’un an, tous les épisodes de tachycardie et de fibrillation ventriculaire spontanés postopératoires ont été traités efficacement par les appareils sans aucun décès par défibrillation inefficace. Sterns va plus loin avec les résultats de l’étude EMPIRIC au cours de laquelle un seul choc de 10 joules était testé à l’implantation chez 468 patients. Ce simple choc était efficace chez 78 % d’entre eux et prédisait alors le bon fonctionnement du système de défibrillation dans 99,6 % des cas et le bon positionnement des sondes dans 100 % des cas. Une procédure de test simplifiée apparaît donc envisageable à l’implantation en ne testant qu’une seule fois, sous réserve d’être efficace, la défibrillation d’une fibrillation ventriculaire induite. Le temps de procédure, la durée d’anesthésie et la sécurité de l’intervention pourrait s’en trouver améliorés.

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