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Valvulopathies

Publié le 22 jan 2008Lecture 5 min

Prise en charge de la sténose aortique du sujet âgé : un travail d'équipe

D. HIMBERT1, N. AL ATTAR2, J.-P. DEPOIX3, P. NATAF2 et A. VAHANIAN1 1Département de cardiologie, 2Service de chirurgie cardiaque, 3Département d’anesthésie–réanimation, hôpital Bichat-Claude-Bernard, Paris

En France, la sténose aortique est la valvulopathie la plus fréquente, et concerne fréquemment des personnes âgées avec de nombreuses comorbidités. La prise en charge de ces patients est compliquée car il s’agit d’un groupe très hétérogène où la décision d’intervenir, ou non, est souvent difficile.
Aujourd’hui, la situation est rendue d’autant plus complexe par la disponibilité, en supplément du traitement chirurgical conventionnel, de nouvelles techniques d’implantation valvulaire percutanée.

L'axiome de départ est l’envisagement d’une intervention chez tous les patients symptomatiques porteurs d’une sténose aortique serrée.   Première étape La première étape est bien sûr de déterminer la sévérité de l’obstacle aortique, le plus souvent grâce à l’échographie, combinant les mesures de surfaces valvulaires et de gradients transvalvulaires en tenant compte de la fonction ventriculaire gauche.   Deuxième étape La deuxième étape est d’évaluer le risque. À partir de ce moment, il est indispensable d’avoir une approche multidisciplinaire associant cardiologues, chirurgiens cardiaques, anesthésistes, et éventuellement gériatres afin de pouvoir établir un jugement individualisé basé sur le rapport bénéfice/risque. La notion du risque repose sur l’analyse de 3 composantes principales : l’histoire naturelle de la maladie cardiaque, le risque chirurgical et l’espérance de vie. L’intervention, quelle qu’elle soit, ne doit être envisagée que chez les patients symptomatiques. Dans de rares cas, elle peut aussi être discutée chez des  sujets âgés très actifs, asymptomatiques à l’interrogatoire mais ayant une dysfonction ventriculaire gauche ou une mauvaise tolérance à l’épreuve d’effort. L’estimation du risque chirurgical doit reposer sur le jugement clinique, aidé par l’utilisation de scores quantitatifs tels le score STS (American Society of Thoracic surgery) ou l’Euroscore. Il faut se garder de chercher des seuils précis pour définir le haut risque parce qu’aucun des scores disponibles ne permet de « capturer » toutes les variables de cette population hétérogène. L’évaluation de l’espérance de vie, essentiellement basée sur les comorbidités, nécessite souvent une approche multidisciplinaire. L’âge seul n’est pas un critère suffisant pour choisir ou écarter une thérapeutique.   Troisième étape La troisième étape est thérapeutique. Trois solutions sont possibles : - pour certains patients, le plus raisonnable est sans doute de ne pas aller plus loin : ceux dont l’espérance de vie est très limitée ou qui ne sont pas volontaires ; - pour d’autres, il est possible de retenir la solution chirurgicale classique, à savoir un remplacement valvulaire par bioprothèse par sternotomie et sous circulation extracorporelle. Cette technique, fiable et reproductible par l’ensemble des chirurgiens, donne de très bons résultats chez les octogénaires, et même au-delà, s’ils sont bien sélectionnés ; - enfin, si la chirurgie paraît contre-indiquée ou le risque trop élevé, on peut aujourd’hui discuter une implantation valvulaire percutanée (figure 1). Figure 1. Implantation d’une prothèse valvulaire aortique (SAPIENTM). A : position-nement de la prothèse au niveau de l’anneau aortique; B : déploiement de la prothèse par gonflage du ballon ; C : aspect de la prothèse déployée ; D : angiographie sus-sigmoïdienne : prothèse en position sous-coronaire, sans fuite visible. L’implantation valvulaire percutanée : une expérience conséquente L’expérience de l’implantation valvulaire percutanée, inventée par Alain Cribier, porte aujourd’hui sur un millier de cas, dont plus de 200 réalisés par voie transapicale. On peut utiliser une prothèse déployée par un ballon (SAPIENTM) ou une prothèse autoexpansible (ReValvingTM) (figure 2). Figure 2. Prothèses valvulaires commercialisées : A : prothèse autoexpansible CoreValve RevalvingTM System (CRS) ; B : prothèse déployée par ballon Edwards SAPIENTM THV (Transcatheter Heart Valve). Un taux de succès de 90% La faisabilité de la procédure a été montrée avec les 2 types de substituts : le taux de succès d’implantation est voisin de 90 %. Des progrès restent à faire quant à l’optimisation du choix, de la taille et du positionnement des valves. Les résultats hémodynamiques à court et moyen termes sont bons avec un recul au maximal de 4 ans, le plus souvent de 2 ans.   Restent des points d’interrogation Il reste des points d’interrogation, en particulier sur la sécurité. Les complications vasculaires périphériques sont toujours possibles à cause de la taille importante des cathéters utilisés et du caractère souvent calcifié et sinueux des axes ilio-fémoraux et de l’aorte dans cette population âgée. Pour la voie transapicale, des déchirures immédiates ou secondaires de la pointe du cœur sont possibles. Les régurgitations périvalvulaires sont rarement importantes au niveau de recul actuel mais il faudra connaître leur devenir à moyen terme (figure 3). Enfin, la durabilité de ces substituts et la possibilité d’une réintervention ultérieure ne sont pas encore connues. Figure 3. Échographie trans-œsophagienne post-implantation. A : aspect de la prothèse en place ; B : flux couleur montrant une fuite para-prothétique modérée. Cette technique est à un stade préliminaire et doit être considérée comme une procédure invasive comportant un risque propre, encore non parfaitement connu, qui devra être évalué sur la base d’études contrôlées. Sa réalisation doit être limitée à des centres ayant une grande expérience de la prise en charge de cette pathologie, tant au niveau chirurgical que pour les techniques interventionnelles de dilatation valvulaire. Comme pour la sélection des patients, la collaboration médico-chirurgicale est essentielle pour choisir la meilleure approche et réaliser l’implantation percutanée. Elle doit associer, outre des cardiologues interventionnels et des chirurgiens cardiaques, des anesthésistes-réanimateurs spécialisés en chirurgie cardiaque et des échocardiographistes habitués aux interventions valvulaires percutanées. Le choix entre les voies transfémorale et transapicale nécessite une évaluation par l’aortographie et le scanner pour déterminer la taille des vaisseaux iliaques et leur tortuosité (figure 4), et par l’échographie pour estimer la taille de l’anneau aortique (figure 5). Figure 4. Angiographie des axes ilio-fémoraux. A : axes artériels compatibles avec une implantation valvulaire par voie transfémorale ; B : axes sinueux et calcifiés, non compatibles, imposant une approche transapicale. Figure 5. Mesure du diamètre de l’anneau aortique, défini par la distance séparant les zones d’insertion des feuillets valvulaires. La voie transthoracique sous-estime en général le diamètre d’environ 1 cm par rapport à la voie transœsophagienne. En règle, l’implantation par voie transapicale (figure 6) est proposée en cas de contre-indication à la voie transfémorale, mais le choix dépend aussi des conditions locales et de l’expérience des équipes. Enfin, le bon positionnement de la prothèse, pour éviter le risque de migration, d’occlusion coronaire ou de fuite paraprothétique importante, nécessite une réflexion technique (expérience des équipes, exploration angiographique, échographique pré- et perprocédure…) et technologique (matériel utilisé, système d’imagerie performant). Figure 6. Implantation valvulaire aortique par voie transapicale. A : vue opératoire ; B : cicatrice de mini thoracotomie latérale. Conclusion   Il semble qu’aujourd’hui, l’approche multidisciplinaire réunissant cardiologues, chirurgiens cardiaques et autres spécialistes soit la solution permettant d’optimiser la prise en charge des patients âgés avec sténose aortique serrée. On peut espérer que les nouvelles techniques percutanées tiendront leurs promesses et permettront d’augmenter significativement le nombre des patients pouvant bénéficier de l’implantation d’une prothèse valvulaire, seul traitement curatif de la sténose aortique.

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