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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 19 avr 2005Lecture 7 min

Quand proposer une ablation de première intention dans le flutter auriculaire typique ?

F. ANSELME, A. SAVOURE et A. CRIBIER, CHU de Rouen

Les Journées européennes de la SFC

Le prérequis indispensable pour proposer une ablation en première intention chez un patient présentant un flutter auriculaire est d'identifier son caractère isthmique dépendant. Ce n'est que pour ce type de flutter, dont l'ablation est actuellement relativement aisée, que se discute une telle stratégie. En effet, pour les flutters auriculaires non isthmiques dépendants, la procédure d'ablation est souvent plus complexe avec des taux de succès moins importants.

Identification d'un flutter isthmique dépendant En clinique, le seul outil disponible pour identifier un flutter auriculaire isthmique dépendant est l'électrocardiogramme. - L'aspect classique est celui d'ondes F s'inscrivant à 300/min, négatives dans les dérivations inférieures et en V6, et positives en V1. Cet aspect correspond à une macroréentrée intra-auriculaire droite, dont le circuit utilise l'isthme cavo-tricuspide comme passage obligatoire et dont la rotation se fait dans le sens antihoraire (figure 1). Figure 1. Flutter typique antihoraire. - Lorsque la rotation se fait dans le sens horaire, l'aspect électrocardiographique peut être différent. Les ondes F sont toujours négatives dans les dérivations inférieures mais cette fois, il s'y associe souvent des encoches, notamment au niveau du plateau de l'onde F, et la dépolarisation auriculaire est alors négative en V1 et positive en V6 (figure 2). Figure 2. Flutter horaire. - Parfois, l'aspect électrocardiographique en cas de circuit à rotation horaire peut être totalement différent et engendrer des ondes F positives dans les dérivations inférieures ; alors, seule la cartographie endocavitaire peut identifier qu'il s'agit bien d'un flutter isthmique dépendant. Une fois le flutter auriculaire isthmique dépendant identifié, deux stratégies sont à notre disposition : • la stratégie médicamenteuse avec un temps pour la cardioversion et un temps pour la prévention de la récidive, • la stratégie invasive d'ablation qui permettra en une seule procédure de traiter l'épisode et de prévenir les récidives.   Quel arsenal thérapeutique pour le flutter typique ?   Traitement de la crise Différentes possibilités thérapeutiques s'offrent aux cliniciens pour traiter une crise de flutter auriculaire typique. Les traitements médicamenteux antiarythmiques ont été proposés, avec cependant des taux d'efficacité variables, allant de 0 % pour les antiarythmiques de classe I aux doses usuelles jusqu'à environ 30 % pour l'amiodarone. En plus de cette efficacité très médiocre, l'utilisation de ces médicaments antiarythmiques est associée à un risque d'effet proarythmique. La stimulation auriculaire rapide peut s'effectuer par voie endocardique ; dans ce cas, elle nécessitera une ponction veineuse avec montée d'une sonde jusqu'à l'oreillette droite, ou par voie transœsophagienne. Dans les deux cas, l'efficacité de cette approche est moyenne avec des taux de succès aux alentours de 65 % dans la littérature. De plus, cette technique expose au risque non négligeable de passage en fibrillation auriculaire. La cardioversion électrique externe a, en revanche, une excellente efficacité, voisine de 100 %, mais son inconvénient principal est celui de nécessiter une anesthésie générale. L'autre traitement extrêmement efficace est l'ablation par cathéter qui lui aura pour inconvénient principal son coût.   Prévention de la récidive de flutter auriculaire Le traitement médicamenteux : l'évaluation de l'efficacité des traitements médicamenteux est difficile car, dans la littérature, les études ont souvent inclus des patients présentant à la fois de la fibrillation auriculaire et du flutter auriculaire. Cependant, les taux d'efficacité pour maintenir le rythme sinusal à distance sont tout à fait médiocres et avoisinent 50 % à 6 mois–1 an pour les antiarythmiques de classe I, et 40 % pour les antiarythmiques de classe III, alors qu'avec un placebo, 30 à 40 % des patients restent en rythme sinusal à cette échéance. Comme pour tout traitement médicamenteux antiarythmique, il existe un risque d'effet proarythmique : flutter 1 pour 1 pour les antiarythmiques de classe I et torsade de pointe, notamment avec le sotalol. Dernièrement, l'efficacité des traitements médicamenteux a été évaluée dans une étude rétrospective portant sur 53 patients atteints d'un premier épisode de flutter auriculaire symptomatique sans cause curable et sans antécédent de fibrillation auriculaire. Au terme d'un suivi moyen de 22 ± 12 mois, 92 % des patients ont présenté une récidive documentée de flutter auriculaire. Le temps moyen de survenue de la récidive était de 101 ± 2 mois. Cinquante-trois pour cent des patients ont dû être réhospitalisés pour une récidive de flutter et 42 % des patients ont présenté cette récidive durant le premier mois de suivi. Bien que cette étude présente certaines limites, elle apporte des éléments forts en faveur d'une très faible efficacité des traitements médicamenteux en prévention de la récidive de flutter auriculaire. Le traitement médicamenteux est très peu efficace pour prévenir la récidive de flutter auriculaire après restauration du rythme sinusal. L'ablation par cathéter de radiofréquence : cette technique d'ablation, actuellement extrêmement bien codifiée, nécessite l'utilisation de deux ou trois cathéters et se fait sous anesthésie locale. Les critères de succès de la procédure ont été bien déterminés dans la littérature. Il faut obtenir un bloc de conduction complet et bidirectionnel dans l'isthme cavo-tricuspide. L'élaboration de ce critère de succès a permis ultérieurement la réalisation de procédures d'ablation en rythme sinusal. Le bloc isthmique complet peut être identifié sur plusieurs critères utilisant l'analyse des potentiels enregistrés sur la ligne d'ablation et la cartographie d'activation de part et d'autre de la ligne d'ablation lors de manœuvres de stimulation. Dans un certain nombre de cas, l'ablation peut s'avérer difficile, soit pour des raisons anatomiques soit pour des raisons d'interprétation électrophysiologique . On retiendra notamment la présence d'une poche isthmique qui peut rendre l'ablation difficile en cas d'impossibilité de délivrer suffisamment d'énergie aux tissus pour créer une lésion. C'est l'insuffisance de flux sanguin pour refroidir l'électrode d'ablation qui est souvent responsable de ce phénomène. C'est dans ces cas que l'utilisation d'un cathéter irrigué permet de surmonter le problème. L'interprétation des signaux électriques peut également être rendue difficile par la présence d'une conduction à l'intérieur de la crista terminalis, ce qui va modifier la séquence de dépolarisation de la région antéro-inférieure de l'oreillette droite lors de la stimulation du sinus coronaire proximal. Dans ce cas nous avons développé la technique de la stimulation positionnelle qui consiste à stimuler sur la berge septale de la ligne d'ablation puis au niveau du septum interauriculaire postérieur afin de différencier une conduction isthmique résiduelle d'un bloc isthmique complet avec conduction dans la crista terminalis. À l'aide de ces différents outils, le taux de succès de l'ablation est extrêmement élevé, voisin de 100 % avec des temps de procédure qui maintenant se situent entre 1 heure et 1 heure 30, associés à une quasi-absence de complication si l'on s'applique à effectuer la ligne d'ablation à distance de la région septale. Après l'ablation, il a été montré à de nombreuses reprises que le traitement antiarythmique des patients est significativement diminué. Par ailleurs, les taux de récidive de flutter auriculaire après ablation sont tout à fait acceptables entre 6 et 10 % suivant les études. En cas de récidive, une nouvelle session d'ablation est envisageable avec les mêmes taux de succès que pour une primo-intervention. Toutefois dans le suivi postablation, il est constamment retrouvé des taux de survenue de fibrillation auriculaire d'environ 30 %. Un des critères pronostiques majeurs de la survenue de fibrillation auriculaire dans le suivi est indiscutablement des antécédents de fibrillation auriculaire paroxystique documentée avant l'ablation. Cependant, qu'il y ait ou non une FA associée, l'ablation par radiofréquence, lorsqu'elle est couronnée de succès, est corrélée très significativement avec une amélioration de la qualité de vie des patients. L'ablation est une approche sûre et efficace tant pour traiter la crise de flutter auriculaire typique que pour en prévenir la récidive après restauration du rythme sinusal.   Quand proposer une ablation de flutter ? Les résultats de l'ablation par cathéter du flutter auriculaire typique étant extrêmement bons, des auteurs ont proposé de pratiquer systématiquement une ablation après deux épisodes symptomatiques de flutter auriculaire en comparant l'efficacité de cette procédure à celle du traitement médicamenteux dans une étude randomisée prospective. Soixante et un patients ont été inclus dans cette étude avec un suivi moyen de 21 ± 11 mois. Étaient exclus de cette étude les patients ayant des antécédents de fibrillation auriculaire, ceux porteurs d'un diamètre auriculaire gauche à l'échographie > 45 mm et déjà traités par des médicaments antiarythmiques. Les résultats de cette étude sont clairement en faveur de l'attitude invasive avec une amélioration très significative de la qualité de vie des patients dans le groupe « traitement par ablation » comparativement au groupe « traitement par médicaments ». Dans le groupe des patients traités médicalement, 93 % des patients ont présenté une récidive de flutter contre 6 % dans le groupe « ablation », 60 % ont présenté une fibrillation atriale contre 29 % dans le groupe « ablation » et surtout, 63 % des patients ont du être réhospitalisés pour un deuxième épisode arythmique contre 22 % dans le groupe « ablation ». Les résultats de cette étude ont conduit à modifier, en 2003, les recommandations des sociétés savantes pour le traitement du flutter auriculaire typique. - L'ablation est une indication de classe I bien tolérée pour traiter un flutter auriculaire mal toléré, un flutter auriculaire apparaissant sous traitement antiarythmique de classe Ic ou amiodarone prescrit pour prévenir les récidives de fibrillation auriculaire, et pour un flutter auriculaire récidivant. - L'ablation est maintenant également une indication de classe II A, niveau de preuve B, dans le cadre d'un premier épisode de flutter auriculaire bien toléré.   En conclusion Les résultats actuels concernant l'efficacité et la sécurité des divers traitements du flutter auriculaire typique sont très en faveur de l'ablation de l'isthme cavo-tricuspide comme traitement de première intention des épisodes symptomatiques, même si cette approche n'a toujours pas été validée par une grande étude prospective randomisée.

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