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Valvulopathies

Publié le 25 nov 2008Lecture 9 min

Quelle est la prothèse valvulaire percutanée idéale ?

A. CRIBIER, Hôpital Charles Nicolle, Rouen

De très importants efforts ont été consacrés au développement du traitement non chirurgical des valvulopathies au cours de ces dernières années. Ceci touche notamment au remplacement par cathétérisme de la valve aortique.
Ces technologies innovantes ont été précédées pendant plus de 10 ans par des études élaborées en laboratoire et chez l’animal avec l’espoir d’aboutir à des prothèses valvulaires implantables ayant des caractéristiques aussi proches que possible des valves chirurgicales.

Les technologies utilisées aujourd’hui dans les études et les applications cliniques associent les connaissances acquises par la chirurgie cardiaque à de nouvelles modalités interventionnelles, ceci expliquant la collaboration exemplaire que l’on peut observer entre les équipes chirurgicales et médicales tant pour la sélection des patients que pour la réalisation des gestes d’implantation valvulaire. Pourquoi des valves aortiques implantables par voie transcutanée ? Peu de traitements en cardiologie sont aussi largement reconnus et acceptés que le remplacement chirurgical de la valve aortique pour le rétrécissement aortique symptomatique, avec plus de 40 ans d’existence, une faible mortalité, une amélioration constante des techniques opératoires et péri-opératoires et une augmentation reconnue de la longévité des valves, notamment des bioprothèses qui restent fonctionnelles jusqu’à 20 ans. Néanmoins, il existe une population croissante de patients, le plus souvent âgés, pour lesquels l’implantation non chirurgicale d’une prothèse aortique est souhaitable. Il s’agit notamment de patients ayant des comorbidités cardiaques ou non cardiaques sévères, des calcifications importantes de l’aorte ascendante (aorte porcelaine), une déformation thoracique, des antécédents d’irradiation ou de chirurgie du thorax. Ces patients pourraient éventuellement être confiés aux chirurgiens mais avec un risque accru, voire inacceptable, de mortalité ou de morbidité postopératoires. On sait aujourd’hui qu’environ un tiers des patients atteints d’un RA symptomatique ne sont jamais opérés malgré un pronostic spontané gravissime. Ce sous-groupe de patients considérés comme à « haut risque opératoire » constitue actuellement la population relevant des techniques innovantes d’implantation valvulaire. Quelles caractéristiques pour une valve implantable « idéale » ? Une valve implantable pourrait être considérée comme « idéale » si elle associait aux caractéristiques physiques, mécaniques et à la durabilité des valves chirurgicales récentes, une sécurité optimale d’implantation. Bien que l’on soit certainement encore loin du compte, on ne peut que souligner la rapidité et l’efficacité des avancées technologiques depuis la première valve implantée chez l’homme à Rouen en avril 2002. Les objectifs recherchés sont multiples. Les ingénieurs ont favorisé jusqu’alors l’utilisation de valves biologiques tricuspides (bioprothèses), dont le matériel valvulaire est en péricarde. Ces valves sont suturées à l’intérieur d’un stent expansible par ballonnet ou auto-expansible par retrait d’une gaine, et serties sur un cathéter de délivrance. Le profil du système doit être aussi faible que possible, compatible avec son utilisation pour la majorité des patients, toutes voies d’abord confondues. La bioprothèse, une fois déployée à l’intérieur de la valve native qui sert de support, doit rester fixée de façon définitive par la force d’expansion du stent, et les résultats hémodynamiques doivent être similaires à ceux des valves chirurgicales. Il est essentiel que la perméabilité des coronaires soit assurée et qu’il n’y ait pas d’interférence avec la fonction de la valve mitrale sous-jacente ou avec le septum interventriculaire et les voies de conduction. L’ouverture du stent doit être aussi circulaire que possible pour assurer la qualité et la durabilité de la fonction valvulaire et l’apposition du stent sur l’anneau aortique doit être optimale pour limiter le risque de fuite paravalvulaire. La possibilité de repositionnement de la valve après largage est souhaitable. Quelles conditions générales pour l’implantation ? Quelle que soit la prothèse utilisée, une attention particulière doit être portée à la sélection des patients et au respect de la méthodologie. L’évaluation de l’accès vasculaire (par angiographie et/ou scanner) est primordiale ainsi que la détermination du diamètre de l’anneau aortique (par échocardiographie) qui déterminera la taille de la bioprothèse. Celle-ci doit être surdimensionnée de quelques millimètres par rapport à l’anneau aortique pour assurer sa fixation. Les dimensions de l’aorte ascendante doivent être également calculées dans le cas des prothèses auto-expansibles. Alors que les premiers cas étaient réalisés par voie trans-septale (voie antérograde), les implantations se font aujourd’hui beaucoup plus facilement par voie artérielle rétrograde ou, dans le cas de la valve expansible par ballonnet, par voie transapicale si l’accès vasculaire est insuffisant. Toute implantation nécessite une prédilatation de la valve native par ballonnet pour améliorer son ouverture et sa flexibilité. Les critères souhaités correspondent-ils aux bioprothèses actuellement utilisées ? Deux bioprothèses sont actuellement disponibles et commercialisées, la valve Edwards-Sapien™ (Edwards Lifesciences, Irvine, Ca, USA), expansible par ballonnet et la Corevalve Revalving System™ (Corevalve Inc, Irvine, Ca, USA) auto-expansible. La valve Edwards-Sapien™ Cette bioprothèse est constituée de trois feuillets de péricarde bovin montés sur un stent en acier inoxydable. Ses caractéristiques technologiques sont proches des valves de Carpentier-Edwards, tant en ce qui concerne le conditionnement du péricarde et son traitement anticalcaire, que son système d’attache et ses propriétés hémodynamiques. On pourrait donc espérer une durabilité proche de celle des bioprothèses chirurgicales d’Edwards qui ont démontré leur fiabilité à très long terme. Elle constitue la dernière génération des bioprothèses initialement implantées chez l’homme (valve de Cribier-Edwards) (figure) où le matériel valvulaire était en péricarde équin (avec un recul maximal de 5 ans, sans dysfonction prothétique). Elle existe en deux tailles, 23 et 26 mm en expansion, et nécessite un introducteur de 22F ou de 24F en fonction de la taille sélectionnée. Elle est montée jusqu’à la valve native sur un guide rigide, par voie artérielle trans-fémorale (sous anesthésie locale ou générale) ou par voie transapicale, si l’état ilio-fémoral est incompatible avec l’utilisation de gros introducteurs, et délivrée par gonflage du ballonnet sous stimulation cardiaque rapide. Elle ne permet aucun repositionnement après implantation. L’abord fémoral peut être fait par dénudation ou en percutané, l’artère étant fermée chirurgicalement ou par suture interne (Prostar). La voie transapicale nécessite une courte ouverture latéro-thoracique et l’abord de la pointe du cœur pour l’introduction du désilet, la technique étant ensuite pratiquement similaire à celle utilisée par voie fémorale, à cœur battant et sans assistance circulatoire. Avec ces deux voies d’abord, cette valve offre une possibilité d’implantation chez la quasi-totalité des patients. Pour la voie rétrograde, un cathéter de délivrance à extrémité orientable est utilisé (cathéter Retroflex) qui facilite l’avancée de la valve, le franchissement des sinuosités vasculaires et de la valve native et diminue le frottement contre les parois de l’aorte, notamment au passage des vaisseaux du cou qui comporte le risque de mobilisation de plaque et d’AVC. Un matériel spécifique a été conçu pour la voie transapicale qui est techniquement plus simple en raison de la proximité de la valve aortique par rapport au point d’entrée mais plus lourde sur le plan interventionnel. Figure. Valve Cribier-Edwards™. La bioprothèse est placée en position sous-coronaire, sans contact avec la valve mitrale et le septum interventriculaire. La force d’expansion du stent lui permet de conserver une forme quasi circulaire dans tous les cas même les plus calcifiés, comme le montrent les études en cours. Les résultats hémodynamiques sont remarquables tant en ce qui concerne la surface aortique obtenue (de 1,70 à 1,90 cm2) que l’amélioration de la fonction ventriculaire. Le degré d’insuffisance aortique paravalvulaire est mineur dans la vaste majorité des cas. Le taux de succès est élevé, de l’ordre de 90 % et la mortalité péri-interventionnelle est de 7,8 à 12 % avec une survie à 1 an de 81 % pour la voie transfémorale et de 76 % pour la voie transapicale, les décès relevant des comorbidités. Un nouveau modèle de valve comprenant un stent en cobalt-chrome va permettre une diminution de 3 à 4F du système d’introduction, favorisant de ce fait la voie fémorale, tandis que deux autres tailles de valve (18 et 29 mm) permettront de s’adapter à toutes les situations anatomiques. La Corevalve Revalving System™ La bioprothèse est constituée de péricarde porcin montée sur un stent auto-expansible en nitinol avec trois sections étagées, un segment distal à haute force radiale pour s’insérer dans la valve aortique, un segment intermédiaire plus étroit au site d’implantation des coronaires et un segment proximal plus large à faible force radiale qui s’insère sur l’aorte ascendante et permet l’orientation du système. Deux diamètres de stent sont disponibles, 26 et 29 mm. La valve s’insère par retrait d’une gaine. Depuis la première implantation humaine en 2004, les progrès technologiques ont été rapides, avec diminution du calibre du système de 25F à 21F puis 18F pour la dernière génération, un important avantage qui élargit les possibilités d’implantation transfémorale percutanée avec fermeture artérielle par Prostar. Les résultats obtenus avec les deux dernières génération de cette bioprothèse sont également très favorables avec un taux de succès d’environ 90 %. La surface aortique finale est de l’ordre de 1,7 cm2 et les fuites paravalvulaires sont mineures. La mortalité est de 6 et 12 % en périprocédural et à 1 mois respectivement. La mortalité à un an est comparable à celle de la valve d’Edwards. Les avantages de ce système sont sa taille plus réduite et la possibilité d’un repositionnement avant déploiement final. Quelques questions restent en suspens telles que l’incidence relativement élevée des BAV complets nécessitant un pacemaker et relevant du débordement sous-aortique du stent, l’impact potentiel de ce débordement sur la fonction mitrale, la durabilité du péricarde porcin, et la qualité d’ouverture des stents auto-expansible en nitinol au sein des valves calcifiées. Autres modèles de valve Plusieurs autres prothèses aortiques transcutanées sont en développement avec des modalités mécaniques différentes supposées apporter une réponse aux limitations des modèles actuels. Quelques caractéristiques communes de ces valves sont leur implantation par voie rétrograde, une implantation en position sous-coronaire, un calibre réduit pour l’insertion et l’habilité de repositionnement après largage. Parmi les modèles les plus avancés ayant fait l’objet de premières implantations humaines, on peut individualiser : La valve Direct Flow (Santa Rosa, Ca, USA), une bioprothèse en péricarde équin, sans stent, avec deux anneaux d’insertion valvulaire gonflables au produit de contraste après positionnement sous-coronaire. Lorsque la position finale est confirmée, le contraste est remplacé par un polymère solide, maintenant la prothèse en position transvalvulaire. La valve Lotus de Sadra Medical (Saratoga, Ca, USA) est faite d’une armature métallique tressée en nitinol au sein de laquelle est fixée une bioprothèse en péricarde bovin. La valve est auto-expansible après retrait d’une gaine qui permet le raccourcissement de l’armature à 19 mm avec augmentation de la force radiale. Le système de délivrance, complexe, permet de réallonger la bioprothèse et de la replacer. La valve Aor’Tx (Palo-Alto, Ca, USA) consiste en un support métallique enroulé sur lui-même et contenant une valve en péricarde offrant également la possibilité de retrait et de réimplantation avant détachement du système de largage. En pratique Le champ d’investigation dans le domaine des implantations valvulaires aortiques est en pleine progression et évolue rapidement. La comparaison aux valves chirurgicales est favorable sur le plan hémodynamique. La question de la durabilité demeure car peu de patients ont dépassé les trois ans de suivi. Près de 3 000 patients ont déjà été traités à part égale avec les deux modèles de valve existants et les résultats sont prometteurs, avec une amélioration notable de la fonction cardiaque et une excellente amélioration fonctionnelle. Seuls un suivi rigoureux à plus long terme et des études randomisées contre chirurgie comme celle en cours aux États-Unis (étude PARTNER-US) avec la valve d’Edwards permettront de prévoir les indications futures éventuellement élargies de ces valves transcutanées.

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