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Coronaires

Publié le 20 nov 2007Lecture 5 min

Quelles sont les limites du scanner coronaire ?

J.-P. LAISSY et J.-M. SERFATY, Service d’Imagerie Médicale, hôpital Bichat, Paris

Le scanner coronarien a bénéficié d’évolutions très spectaculaires au cours des cinq dernières années avec une augmentation significative du nombre de détecteurs et une résolution temporelle accrue. Les publications à son sujet ont été très nombreuses, donnant initialement des résultats très optimistes, puis convergentes pour être plus critiques, soulignant certains défauts de la technique. Or, il est vrai que le coroscanner connaît encore de nombreuses limites, inhérentes soit à la machine, soit au patient.

Artefacts de mouvement Comme pour tout examen TDM, la durée de l’acquisition peut être génératrice d’artefacts de respiration chez des patients qui n’arrivent pas à tenir l’apnée. Les appareils à 64 détecteurs et bitubes, limitant l’apnée à moins de 10 s, permettent d’obtenir des examens sans ce type d’artefact, alors qu’avec les appareils 16 barrettes, l’acquisition dure une vingtaine de secondes. Il est important d’expliquer au patient que l’apnée est un élément essentiel de qualité avant de débuter l’examen. En cas de difficulté à tenir l’apnée pendant cette durée, il est préférable de programmer l’acquisition dans le sens caudo-crânial, les mouvements de la cage thoracique supérieure lors de la reprise de la respiration étant d’amplitude plus faible qu’au niveau de la base du thorax. Les arythmies sont un problème majeur de la technique, elles engendrent des artefacts en pile d’assiettes sur les reconstructions (figure 1). Les artefacts de synchronisation peuvent donner le même type d’anomalie. Des logiciels de réjection des arythmies sont actuellement commercialisés avec la plupart des appareils les plus récents. Par ailleurs, il a clairement été montré une relation inverse entre le nombre de vaisseaux analysables et la fréquence cardiaque(1-4). C’est pourquoi, en dehors des examens avec appareil bitube où cela n’apparaît pas indispensable à titre systématique, il est fréquemment recommandé de faire l’acquisition après administration de bêtabloquants, per os une heure avant ou par voie intraveineuse immédiatement au début de l’examen. Figure 1. Artefacts en piles d’assiettes dus à des extrasystoles. Artefacts liés à la phase de reconstruction La fixité des coronaires varie en fonction de la phase et du rythme cardiaques(5). Habituellement, la coronaire gauche est bien figée pour un pourcentage de phase cardiaque aux alentours de 75 %, ce qui représente la méso-télédiastole, alors que la coronaire droite est plus souvent figée à 40 % du cycle cardiaque, en fin de systole(6). Pour une fréquence cardiaque < 65/min, l’ensemble des coronaires est en général figé à une phase entre 70 et 80 % du cycle cardiaque ; pour une fréquence cardiaque de 75/min, l’ensemble des coronaires est immobile soit en systole soit en diastole ; pour une fréquence > 85/min, les branches de la coronaire gauche sont en général figées à 75 % et la coronaire droite à 40 %.   Le produit de contraste et les structures denses L’injection adaptée de produit de contraste est fondamentale pour obtenir un examen de qualité, ce qui facilite les reconstructions et l’interprétation. L’utilisation d’une injection monophasique de produit de contraste, c’est-à-dire non rincée par du sérum physiologique peut engendrer des artefacts de scintillement dans la veine cave supérieure ; ces artefacts peuvent être responsables d’une trop forte concentration de produit de contraste dans les cavités droites, qui empêche une analyse fiable de la coronaire droite. De plus, une synchronisation inappropriée et les défauts de rehaussement qui en découlent peuvent provoquer des images de sténose ou de pseudo-sténose. Les calcifications sont un des problèmes majeurs de la TDM du fait de son extrême sensibilité aux importantes différences de densité (figure 2). Elles peuvent entraîner une non-visualisation de la lumière lorsqu’elles sont abondantes, en dépit d’un rehaussement de bonne qualité ; elle peuvent également donner lorsqu’elles sont moins abondantes, un « blooming effect » qui surestime leur volume par rapport à la lumière coronarienne(7). Figure 2. Non-visualisation de la lumière coronaire de l’interventriculaire antérieure à cause de l’abondance des calcifications. Les problèmes posés par la forte densité des endoprothèses sont également un facteur limitant. Il est actuellement reconnu que la technique est fiable pour des diamètres de stent supérieurs ou égaux à 3,5 mm(8) ; en deçà de cette limite, la fiabilité du coroscanner décroît de façon exponentielle. Il est important, lorsqu’un stent est présent, de faire des reconstructions avec deux types de filtre, un filtre mou pour la lumière coronaire native, un filtre dur pour apprécier la lumière à l’intérieur du stent.   Résolution spatiale La taille des vaisseaux est une des limites de la technique, les vaisseaux de moins de 1 mm (de 1 à 2 pixels pour une résolution spatiale actuelle de 0,6 mm) pouvant répondre à la loi du tout ou rien en cas de sténose peu importante. Le sens des flux ne peut être précisé.   Dosimétrie Les protocoles d’acquisition proposés par les constructeurs sont en général dans des échelles d’irradiation élevées, même si la modulation de dose est proposée(9-11). Le coroscanner peut être effectué en diminuant significativement les kV, en les adaptant à la corpulence du patient. Le contraste sur bruit de l’injection de produit iodé est meilleur à 100 kV qu’à 140 kV, et l’irradiation est 4 fois moindre. Il vaut mieux alors augmenter les mA pour lesquels l’irradiation augmente de façon proportionnelle.   Interprétation des examens Il est nécessaire de n’interpréter que des images de bonne qualité, ce qui doit être précisé dans le compte-rendu (rehaussement, netteté des bords, fixité de la coronaire). Il faut accepter de ne pas interpréter des segments massivement calcifiés, ce qui doit également figurer dans le compte-rendu. Le compte-rendu doit mentionner les segments ininterprétables ou non vus. Il est nécessaire de retravailler les fenêtres, de faire de nombreux plans de reconstructions après la lecture des coupes natives. Il faut être très prudent avec le VRT. Cette technique de reconstruction n’a d’utilité que pour suivre le réseau coronaire, mais pas pour apprécier une éventuelle sténose ou occlusion. Les plans les plus intéressants sont les coupes natives, ainsi que les reconstructions MPR dans l’axe et perpendiculaires aux vaisseaux. Il faut être très prudent dans l’interprétation d’une sténose hyper- serrée, qui peut être une occlusion avec flux rétrograde. De même, la détermination d’une sténose entre 40 et 60 % peut être difficile, et il est préférable de ne pas chercher à en faire de quantification, mais d’estimer si elle semble significative ou non. Enfin, le degré de sévérité d’une sténose calcifiée est souvent très difficile à apprécier. Il est indispensable de regarder l’environnement du massif cardiaque (aorte, péricarde, poumons, plèvres) pour ne pas méconnaître une pathologie associée. Enfin, cet examen peu vulnérant ne doit pas conduire à une demande abusive, lorsque l’on sait que son principal atout est d’éliminer de façon fiable la maladie coronaire, et non de la classifier. Il ne faut pas tomber dans le piège d’indications discutables (dépistage, recherche de sténose coronaire sans épreuve d’effort documentée…), même en l’absence de recommandations publiées dans ce domaine.

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