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Explorations-Imagerie

Publié le 24 jan 2006Lecture 8 min

Scanner coronaire - Réponses à des questions essentielles

J.-M. FOULT, Clinique Ambroise Paré, Neuilly.

AHA

Quelles sont principales innovations technologiques ?   La plupart des présentations concernent désormais les fameux « 64 barrettes » ; en termes de recherche clinique, l’Allemagne reste le pays le plus actif, suivie par les États-Unis, et le Japon. Quelles que soient les performances des machines actuelles, il faut savoir qu’environ 10 % des examens restent inexploitables, en raison d’irrégularités de la fréquence cardiaque, ou de calcifications trop nombreuses. Les solutions proposées sont différentes selon les constructeurs. Elles vont du logiciel de « recalage » d’un battement déphasé, à la mise au point de véritables systèmes « bi-tubes », permettant, entre autres, d’améliorer la résolution temporelle à environ 85 ms, en attendant les 256 barrettes et les capteurs plans, à un horizon de 3 à 5 ans... Concernant l’exploitation des données, plusieurs logiciels d’analyse de la plaque athéromateuse coronaire non calcifiée sont en cours d’évaluation : il s’agit à la fois de valider les performances techniques du scanner par rapport à la méthode référence que sont les ultrasons intracoronaires (IVUS), et de déterminer la pertinence clinique d’une telle analyse. Les autres innovations technologiques importantes — et qui pourraient bien occuper le devant de la scène à moyen terme — concernent le couplage du scanner à une caméra PET ou SPECT. Ces machines hybrides doivent permettre d’évaluer au cours d’un seul et même examen l’anatomie des artères coronaires, par scanner, et la perfusion myocardique, au moyen d’une gamma-caméra conventionnelle, ou d’une caméra à positrons. Ces matériels « lourds » sont dans les stands de l’exposition technique ; leur exploitation clinique n’en est qu’à un stade préliminaire.   Quelles sont les performances actuelles des « 64 barrettes » ? Une analyse de 30 études parues entre 1990 et mars 2005, donc avant l’ère des « 64 barrettes », regroupant 1 849 patients, donne une sensibilité/spécificité de la technique de 83/9 % (par segment), et de 87/6 % (par patient). De nombreuses communications ont, bien entendu, été consacrées aux performances des « 64 barrettes » actuels, en sachant que chacune d’entre elles ne concerne en général que quelques dizaines de patients. Schématiquement, les chiffres de sensibilité/spécificité du scanner pour faire le diagnostic d’une sténose > 50 %, se situent autours de 90/95 %, le critère référence étant, bien sûr, la coronarographie « invasive ». Figure 1. Sténose excentrée de l’IVA segment I. Figure 2. Plaques calcifiées non-sténosantes de l’IVA Commentaire - Entre 5 et 12 % des patients n’ont pas été inclus dans les résultats (troubles du rythme en cours d’acquisition, blurring). - Il est souvent difficile d’apprécier la sévérité anatomique d’une sténose lorsque le segment coronaire concerné est très calcifié. Les chiffres présentés reflètent une « moyenne » entre des examens de bonne qualité, sans calcifications, où la sensibilité est probablement voisine de 100 %, et des examens quasi ininterprétables, où la sensibilité est certainement beaucoup plus basse… - Les résultats obtenus peuvent être très différents selon qu’ils sont présentés par « segment » ou par « patient ». Si l’on individualise par exemple 13 segments artériels coronaires et qu’il existe une sténose « significative » sur l’un de ces segments, mais qu’elle est manquée par le scanner, en présentation par segments, le scanner aura donné la bonne réponse 12 fois sur 13, alors qu’il s’agit d’une erreur potentiellement grave. Inversement, s’il existe 7 sténoses à la coronarographie, mais que le scanner n’en voit que 6, il s’agit d’une erreur aux conséquences a priori minimes, mais en présentation par patient, le scanner donne 100 % de mauvaise réponse. - Le critère référence est et reste la coronarographie « invasive ». Or, la coronarographie est une technique en « projection » : l’image obtenue est la somme de tout ce qui est traversé par le faisceau de rayons X au cours de son trajet. Ce volume traversé – tridimensionnel par définition est restitué — écrasé — sous forme d’une image bidimensionnelle. Si l’on considère l’aspect fréquemment tortueux du trajet des artères coronaires, et le caractère en règle complexe de la géométrie des plaques et sténoses athéromateuses, et si l’on réalise que l’angle entre le faisceau X et l’artère est par définition inconnu — et de surcroît variable au cours du cycle cardiaque — on conçoit que l’information délivrée par la coronarographie puisse faire l’objet de discussions. Il n’est d’ailleurs pas rare qu’une sténose apparaisse « serrée » sur une incidence, et pas sur une autre. Il n’est pas non plus exceptionnel que deux observateurs expérimentés n’aient pas la même lecture d’un examen. En fait, ce sont les ultrasons intracoronaires (IVUS) qui constituent actuellement la référence anatomique. - Le scanner, lui, n’est pas une technique en projection : c’est une méthode tomographique. On peut se placer exactement dans l’axe du vaisseau, ou de manière rigoureusement perpendiculaire à cet axe : c’est la vue « petit axe », accessible aux ultrasons (IVUS), mais pas en coronarographie classique. Certes, les vues « petit axe » obtenues avec les scanners actuels évoquent plutôt les ruelles de Londres à la fin janvier par temps de brouillard, mais le principe est là : la « vérité anatomique » est sans doute du côté des techniques tomographiques, notamment en vue petit axe.   La « sensibilité » du scanner pour faire le diagnostic de sténose « significative » semble donc > 90 % ; cela signifie-t-il qu’on puisse passer directement du scanner à la coronarographie dans ce cas ? Certainement pas ! Voir une lésion apparaissant possiblement sténosante ne préjuge pas de son caractère « ischémiant ». Or, comme l’ont montré de très nombreux travaux, seuls les patients ischémiques justifient d’une coronarographie, car seuls les patients ischémiques ont un risque évolutif supérieur au risque d’une procédure interventionnelle. Les sujets non ischémiques, mêmes s’ils ont des sténoses paraissant « serrées », ont un risque évolutif très faible, de l’ordre de 0,6 % par an, ne justifiant pas qu’on prenne le risque d’une procédure invasive, dont le risque se situe en moyenne à 1 %, c’est-à-dire proche du double. Il est donc nécessaire de documenter l’ischémie lorsqu’existe une suspicion de lésion sténosante au scanner, ce qui peut être réalisé au moyen d’une simple épreuve d’effort, couplée ou non à une scintigraphie, d’une échographie ou d’une IRM de stress. Figure 3. Plaques athéromateuses non- sténosantes de l’IVA et de la Circonflexe. Une solution alternative pourrait se faire jour si les quelques travaux préliminaires concernant la possibilité d’évaluer la perfusion myocardique par scanner venaient à être confirmés. Deux études montrent, en effet, une bonne corrélation entre scanner et scintigraphie pour l’évaluation des défects ischémiques, en sachant qu’il s’agit de travaux portant sur de très courtes séries, où la question de l’irradiation est abordée avec beaucoup de discrétion. Figure 4. Analyse de la plaque en fonction du gradient d’atténuations. Que faut-il penser du scanner coronaire « en urgence » dans un contexte de douleur thoracique aiguë ? Plusieurs équipes ont évalué l’intérêt du scanner dans cette indication, c'est-à-dire en présence d’une sémiologie douloureuse thoracique ne faisant pas sa preuve au plan électrocardiographique et biologique. Les résultats rejoignent ceux qui sont obtenus en dehors du contexte de l’urgence : le scanner est performant dans un contexte de prévalence basse, c’est-à-dire lorsque l’on s’adresse à une population où la probabilité de maladie coronaire est relativement faible, type « urgences généralistes » : un scanner normal élimine l’hypothèse SCA, et évite ainsi jusqu’à 50 % d’hospitalisations. - Dans un contexte de prévalence élevée, qui constitue en règle générale le recrutement des unités de soins intensifs coronariens, le scanner coronaire est moins probant : une proportion significative des examens est de lecture difficile (arythmies, calcifications), et l’on est fréquemment confronté à un athérome coronaire étendu, dont il est difficile de dire s’il est, ou non, à l’origine du tableau clinique. Figure 5. Sténose ulcérée de l’IVA. Le scanner est-il fiable pour le diagnostic de la plaque athéromateuse coronaire ? Le scanner coronaire, comme les ultrasons intracoronaires, mais à la différence de la coronarographie, permet de voir les plaques athéromateuses, y compris celles qui ne modifient pas le calibre intra-luminal du vaisseau. Ces lésions athéromateuses débutantes n’induisent pas d’ischémie et ne justifient pas d’un geste de revascularisation. Mais leur prise en charge constitue sans doute l’ébauche d’une véritable cardiologie préventive. Les plaques athéromateuses calcifiées peuvent gêner considérablement la lecture des images, mais elles constituent aussi une information utile dans la mesure où le « score calcique » reflète l’étendue totale de l’athérome coronaire chez un individu donné. Cette « charge athéromateuse totale » est fortement corrélée au pronostic individuel. La plus grosse série présentée à l’AHA porte sur 25 253 sujets suivis 6,8 ± 3 ans et montre que plus le score calcique est élevé, plus le risque individuel est grand ; la survie est de 99,7 % pour un score calcique à zéro, mais elle n’est que de 87,8 % si le score calcique dépasse 1 000. La valeur pronostique du score calcique peut être couplée à celle de la scintigraphie myocardique : dans une population de 510 diabétiques asymptomatiques suivis 18 ± 5mois, la combinaison score calcique/score ischémique affine le pronostic. La survie sans événement est de 100 % en l’absence de calcification coronaire et d’ischémie, mais elle n’est que de 74 % si le score calcique est compris entre 100 et 400 et qu’il y a plus de 5 % d’ischémie, et passe à 64 % pour des sujets ayant un score calcique > 1 000 et plus de 5 % d’ischémie. (Ces sujets ont donc une probabilité de 36 % de présenter un accident coronaire sur une période de 18 mois !). La combinaison d’informations anatomiques — issues du scanner — et fonctionnelles — venant de la scintigraphie — a très probablement de beaux jours devant elle, et devrait permettre d’optimiser les choix thérapeutiques. Concernant les plaques athéromateuses non calcifiées, la technologie « 64 » semble être raisonnablement performante dans la mesure où les corrélations obtenues avec les ultrasons (IVUS) sont bonnes pour des artères >1,5 mm de diamètre. Plusieurs logiciels sont actuellement en cours d’évaluation pour quantifier le volume total d’athérome non calcifié chez un individu donné, et déterminer le cas échéant sa valeur pronostique. Le scanner, pas plus qu’aucune autre méthode, ne permet actuellement d’identifier avec certitude la « plaque à risque », même si certains travaux (japonais) montrent que l’association plaque hypodense (lipidique), remodelage positif et microcalcification semble plus fréquente au décours d’un SCA.   Les traitements pharmacologiques permettent-ils de ralentir la progression des plaques athéromateuses coronaires ? Il s’agit bien entendu d’une question essentielle. À titre de repère, il faut savoir que la progression « spontanée » du score calcique est en moyenne de 25 à 30 % par an. Sur un suivi de 3 ans, cette progression n’est pas altérée par un traitement hormonal (œstroprogestatif) chez 324 femmes ménopausées. Il n’y a pas non plus de différence entre 10 et 80 mg d’atorvastatine pour ce qui concerne la progression du score calcique sur un an (25 vs 27 %, n = 366 pa- tients). En revanche, les IEC semblent à même de ralentir la progression du score calcique : + 3 % dans le groupe IEC, vs + 38 % dans le groupe témoin (p < 0,01, n = 60).

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