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Publié le 25 mar 2024Lecture 5 min
Julien JEANNETEAU, Unité de cardiologie interventionnelle, Clinique Saint-Joseph, Trélazé, Angers
Le congrès High Tech est le rendez-vous traditionnel du début d’année en cardiologie Interventionnelle.
Cette année, la communauté des cardiologues interventionnels a rendu un hommage vibrant au Pr Jean-Philippe Collet. Une émouvante session a eu lieu au cours de laquelle ses qualités à la fois humaines et scientifiques, et son investissement au quotidien, ont été rappelés.
Nous ne savions pas que quelques semaines plus tard une autre personnalité inspirante et marquante allait nous quitter : le Pr Alain Cribier, qui a révolutionné la cardiologie. Nous nous remémorons sa lecture inaugurale lors du congrès High Tech 2022, pour les 20 ans du TAVI. L’histoire du développement de cette technique, initialement semée d’embûches, était passionnante et extraordinaire.
Le congrès 2024 s’est centré principalement autour de l’imagerie endocoronaire. Les preuves scientifiques s’accumulent avec de nouvelles données en 2023.
L’IMAGERIE ENDOCORONAIRE
L’étude RENOVATE-COMPLEXE-PCI nous incite à améliorer nos pratiques dans ce domaine(1). Cette étude multicentrique randomisée a testé l’IVUS (75 % des cas) et l’OCT (25 % des cas) dans l’angioplastie complexe : vraies lésions de bifurcations, occlusions coronaires chroniques, lésions du tronc commun, lésions longues > 38 mm.
L’utilisation de l’imagerie endocoronaire dans ces situations a permis une diminution du taux d’échec sur le vaisseau cible, ainsi que d’un critère composite associant infarctus sur le vaisseau cible et mortalité cardiovasculaire. Dans le groupe imagerie, il y a eu plus de recours à l’usage du ballon non compliant, mais cela n'explique qu’en partie le bénéfice clinique. Par ailleurs, une méta-analyse publiée en 2023, regroupant 32 études et plus de 22 patients, montre une diminution des événements cardiovasculaires, des thromboses de stent et du taux de revascularisation en cas d’angioplastie sous imagerie endocoronaire(2).
La place de l’imagerie endocoronaire augmente dans les recommandations ESC 2023(3), au moment du diagnostic (recommandation de grade IIb), mais aussi pour guider l’angioplastie (recommandation de grade IIa).
Malgré cela, l’utilisation de l’imagerie endocoronaire est marginale en France (< 2 % des angioplasties) car les freins sont nombreux, avec en premier lieu, le coût des sondes et l’absence de remboursement. Mais l’allongement du temps de la procédure, les difficultés d’interprétation des images par les opérateurs peu expérimentés, l’absence de conviction du praticien, qui a la (fausse) impression clinique que la procédure ne sera pas modifiée par l’analyse de l’imagerie, sont aussi des explications à son utilisation restreinte.
L’imagerie endocoronaire en pratique
Son utilisation en pratique a bien été rappelée au cours du congrès, et on peut s’aider du consensus d’experts de la Société européenne (EAPCI)(4). Pour mémoire, après l’angioplastie, l’aire minimale intrastent (MSA) doit être > 5,5 mm2 à l’IVUS et > 4,5 mm2 en OCT, avec un rapport MSA/moyenne des surfaces de référence > 80 %. On accepte de ne pas couvrir les dissections de moins de 60 degrés, avec un flap limité à l’intima, et d’une longueur < 2 mm. Une malapposition doit être traitée si la distance axiale du stent par rapport à la paroi est > 0,4 mm, sur une longueur > 1 mm.
LES LÉSIONS CALCIFIÉES
Un autre thème a été l’objet de nombreuses présentations en session plénière, symposium ou lors de la présentation de cas cliniques : les lésions calcifiées. À nouveau, dans ce type de lésion, l’imagerie endocoronaire est un outil particulièrement intéressant, et peu de cas de lésions calcifiées ont été présentés sans l’utilisation de cet outil durant le congrès. Un consensus d’experts a aussi été publié sur ce sujet, en 2023, et propose des algorithmes de prise en charge des lésions calcifiées(5). Ainsi, l’utilisation de l’athérectomie rotationnelle est préconisée en cas de lésions superficielles, longues, difficiles à franchir, tandis que la lithotripsie est proposée pour les calcifications plus profondes, les nodules calcaires, les lésions ostiales, ou encore lorsqu’il est souhaitable de maintenir deux guides dans une lésion de bifurcation.
LA CARDIOLOGIE STRUCTURELLE
Concernant la cardiologie structurelle, l’activité en France est toujours en forte hausse, notamment les procédures de fermeture de foramen ovale perméable et de MitraClip. De nombreux échanges ont eu lieu autour du TAVI, qui représente 66 % de l’activité structurelle. La question de l’ouverture du TAVI à des centres sans autorisation de chirurgie cardiaque sur place reste ouverte, et la HAS se positionnera à la fin de l’année 2024. Actuellement, 78 % des centres reçoivent des équipes travaillant dans des centres sans chirurgie. Il y a 100 équipes « nomades » en France. Les sujets récurrents ont été débattus ou présentés : stratégie sur la vie entière et problématique du valve in valve, choix raisonné du type de prothèse, accès coronaire post-TAVI, durabilité des prothèses, etc.
L’organisation des soins
L’étude FAST-TAVI II et le registre BENCHMARK démontrent la possibilité d’obtenir des séjours de très courte durée, si les soins sont bien organisés en amont, avec mise en place de mesures pour améliorer la logistique et prévenir les complications. Il s’agit par exemple d’éduquer des patients en amont, de réaliser une mobilisation précoce, ou encore de ponctionner sous échographie ou radioscopie.
Les indications
Concernant les indications, on attend les résultats des études TAVR UNLOAD et PROGRESS.
• TAVR UNLOAD testera l’intérêt du TAVI en cas de sténose aortique modérée, avec FEVG < 50 % et NT-proBNP > 1 500 pg/ml ou d’hospitalisation récente pour insuffisance cardiaque.
• L’étude PROGRESS testera aussi le TAVI dans les sténoses aortiques modérées, quelle que soit la FEVG.
Dans la fuite aortique, les résultats du TAVI sont moins bons mais ceux de la valve dédiée Jena-Valve, qui comporte un système d’ancrage pour éviter les embolisations, sont encourageants.
Hors TAVI
L’essai qui retient l’attention en cardiologie structurelle en 2023 est TRILUMINATE(6). Cet essai, jamais réalisé dans le domaine de la chirurgie tricuspide, a randomisé la réparation bord à bord de la valve tricuspide versus le traitement médical. Il s’agissait de 350 patients présentant une insuffisance tricuspide sévère symptomatique avec une pression artérielle pulmonaire systolique (PAPS) < 70 mmHg. Le succès procédural est proche de 99 % avec 2,2 clips en moyenne mis en place. La durée moyenne d’hospitalisation est de 1 journée, sans décès intrahospitalier, et le taux de complication est < 2 % à 30 jours.
Il s’agit d’une étude positive montrant un rapport bénéfice/risque favorable du clip tricuspide, sachant que l’amélioration de la qualité de vie par rapport au groupe contrôle tire le bénéfice. Les résultats hémodynamiques persistent à 1 an, mais n'y a pas de différence en termes de mortalité et d’insuffisance cardiaque. On espère une confirmation de ces données avec l’étude TRiFR.
Le congrès High Tech est surtout l’occasion de rencontrer des collègues, de retrouver des amis, d’échanger sur les pratiques, le tout sous le soleil marseillais ! À l’année prochaine !
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