Publié le 14 oct 2013Lecture 5 min
Le paysage changeant de l’anticoagulation : les dernières pièces du puzzle
P. ATTALI, CHU Strasbourg
ESC
Anticoagulation dans la FA : résultats récents et questions en suspens
D’après R. de Caterina (Chieti, Italie)
La FA est une pathologie fréquente, avec une prévalence prévue en augmentation dans les prochaines décennies en Europe, en raison du vieillissement de la population. La prise en charge de la FA a été surtout marquée par l’avènement des nouveaux anticoagulants oraux (NACO) et l’utilisation plus large de l’ablation de la FA. Les NACO devraient permettre de surmonter les nombreux inconvénients des AVK qui sont la cause de leur sous-utilisation.
Le registre européen PREFER in AF chez des patients en FA (n = 7 243) a montré, qu’en 2012, un AVK (majorité des prescriptions) ou un NACO, a été prescrit à plus de 80 % des patients éligibles. Cependant, un contrôle adéquat de l’INR n’a été obtenu que chez environ 70 % des patients sous AVK. Enfin, ce registre a permis de montrer que près de 10 % des patients en FA ont reçu un anticoagulant en association à 1 ou 2 antiagrégants plaquettaires, de façon inappropriée dans plus de 70 % des cas.
L’utilisation des nouveaux anticoagulants oraux en pratique clinique
D’après H. Heidbuchel (Louvain, Belgique)
Malgré l’apparente facilité de prescription des NACO, ils nécessitent une information soigneuse des patients, des médecins et des soignants en vue d’une utilisation sûre. Une publication sous la signature de l’orateur reprend de manière très pratique un certain nombre de scénarios critiques.
• Connaître le petit groupe de patients qui ne doivent pas recevoir ces NACO : FA valvulaire, insuffisance rénale sévère ou dysfonction hépatique sévère. C’est la première chose à mettre en exergue.
• La gestion du traitement anticoagulant en période périchirurgicale. C’est un autre point délicat. Elle est certes plus simple avec les NACO puisqu’un relais n’est pas nécessaire du fait de leur courte demi-vie, mais le moment approprié pour interrompre et reprendre un NACO doit tenir compte de la molécule elle-même, de la nature de l’intervention chirurgicale et de la fonction rénale du patient.
• En cas de surdosage de NACO, avec ou sans saignement associé, les tests de coagulation de routine peuvent fournir une information utile. Bien que des tests spécifiques existent, leur disponibilité est limitée et leur utilisation reste délicate du fait de manque d’expérience.
• Enfin, si l’absence de monitoring en routine de l’anticoagulation n’est pas nécessaire avec les NACO, l’obligation d’un suivi clairement planifié et bien communiqué aux différents soignants est de mise (la délivrance d’une carte d’anticoagulation par un NACO est indispensable).
Étude ENGAGE AF-TIMI 48 : qu’apportera-t-elle aux connaissances actuelles ?
D’après R. Giugliano (Boston, États-Unis)
L’étude ENGAGE AF-TIMI 48 avec l’edoxaban (anti-Xa oral, en une prise quotidienne) chez des patients atteints de FA non valvulaire à haut risque thromboembolique (n = 21 105) est terminé, et les résultats seront présentés à l’AHA 2013 en novembre prochain. C’est le plus grand essai réalisé dans la FA, avec une moyenne de suivi de plus de 2 ans et un design unique qui permet un ajustement de posologie à n’importe quel moment de l’étude. Cette étude inclut également un monitoring rigoureux de l’INR (en aveugle) et un schéma extensif de traitement pour la période de transition/relais de l’edoxaban au terme de l’étude. Lors de la randomisation, les sujets ont été stratifiés selon le score CHADS2 et la posologie pouvait être réduite tout au long de l’essai, si le patient venait à présenter des facteurs de risque de saignement (clairance de la créatinine > 30 et < 50 ml/min, poids ≤ 60 kg). Pour la fin de l’essai, un plan de transition a été prévu en cas de nécessité de superposition edoxaban/placebo et AVK pour éviter de reproduire l’augmentation des AVC et des embolies systémiques constatée au terme d’autres études avec les NACO. Des analyses secondaires d’efficacité et de sécurité stratifiées sur différents paramètres ont été envisagées : score CHADS2, exposition antérieure à un AVK, niveau de TTR des différents centres, événements majeurs avec ou sans ajustement de dose et résultats lors de la période de transition.
L‘étude ENGAGE AF-TIMI 48 devrait fournir des résultats solides sur l’efficacité et la sécurité d’emploi des deux dosages d’edoxaban (30 et 60 mg) en une prise quotidienne comparativement à la warfarine bien gérée.
Étude Hokusai-VTE : qu’apporte-t-elle à la prise en charge de la maladie veineuse thromboembolique ?
D’après H. Buller (Amsterdam, Pays-Bas)
Hokusai-VTE est la plus grande étude d’un NACO (n = 8192) dans la maladie veineuse thromboembolique (non provoquée dans près de 65 % des cas), avec pour objectif d’évaluer l’efficacité et la sécurité d’emploi de l’edoxaban dans le traitement et la prévention des récidives d’événements thromboemboliques.
C’est un essai de phase III, randomisé, multicentrique, en double aveugle et double « dummy », sur une durée de 12 mois. Les patients ont été randomisés sous edoxaban 60 mg en une prise quotidienne ou sous warfarine (INR cible 2,0 et 3,0) après une période de charge par une héparine non fractionnée ou une HBPM.
Cette étude a inclus des durées variables de traitement de 3 à 12 mois selon la décision du clinicien. À tout moment, une réduction de posologie de l’edoxaban a été autorisée en fonction de l’éventuelle apparition de facteurs de risque de saignement (la dose réduite de 30 mg a été prescrite chez environ 17 % des patients).
L‘edoxaban a été non inférieur au traitement standard quel que soit la présentation clinique : de la TVP proximale à l’embolie pulmonaire avec dysfonction du ventricule droit, où l’edoxaban a même été supérieur à la warfarine. Enfin, il a été associé à significativement moins de saignements.
D’après un symposium « The changing landscape in oral anticoagulation – the last pieces of the puzzle » présidé par A.J. Camm (Londres, Royaume-Uni) et J. Weitz (Hamilton, Canada), organisé par Daiichi-Sankyo, ESC 2013.
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