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Cardiologie générale

Publié le 01 sep 2020Lecture 16 min

Cœur et adénosine

BaptisteMAILLE*/**, Régis GUIEU**, Pierre DEHARO*/** *CHU La Timone, service de cardiologie, Marseille **AMU, C2VN, Marseille

L’adénosine est synthétisée à partir de la déphosphorylation intracellulaire ou extracellulaire de l’adénosine triphosphate (ATP) via une nucléotidase, à partir du cycle de la méthionine intracellulaire, aboutissant à la synthèse d’homocystéine et d’adénosine ou encore à partir de la déphosphorylation intracellulaire de l’adénosine monophosphate cyclique (AMPc).

Métabolisme de l’adénosine (figure 1) Figure 1. Métabolisme de l’adénosine. Flèche bleue : action enzymatique conduisant à la synthèse de l’adénosine. Flèche marron : action enzymatique conduisant à la dégradation de l’adénosine. Flèche rouge : mécanisme d’action. ENT : transporteurs nucléosidiques équilibratifs ; SAH : S-adénosyl homocystéine ; SAM : S-adénosyl méthionine ; ATP : adénosine triphosphate ; AMPc : adénosine monophosphate cyclique. L’adénosine est synthétisée à partir de la déphosphorylation intracellulaire ou extracellulaire de l’adénosine triphosphate (ATP) via une nucléotidase, à partir du cycle de la méthionine intracellulaire, aboutissant à la synthèse d’homocystéine et d’adénosine ou encore à partir de la déphosphorylation intracellulaire de l’adénosine monophosphate cyclique (AMPc). Elle est libérée dans les espaces extracellulaires en particulier lors du stress oxydatif, de la baisse de la pression partielle en oxygène, lors de phénomènes ischémiques ou hypoxiques ou au cours des processus inflammatoires. Grâce aux transporteurs nucléosidiques équilibratifs les compartiments intra- et extracellulaires sont équilibrés. Ainsi l’augmentation intracellulaire du métabolisme énergétique ou la libération massive d’ATP extracellulaire, conduit à une augmentation intra- et extracellulaire de l’adénosine. Dans le sang, l’adénosine possède une demi-vie courte (30 s), car rapidement capturée par les globules rouges via le système de diffusion facilitée équilibratif, et également dégradée en inosine par l’adénosine déaminase, enzyme ubiquitaire ou encore rephosphorylée en ATP par l’action de l’adénosine kinase. En contexte d’hypoxie notamment, l’action de l’adénosine kinase est inhibée, ce qui entraîne donc une hyperadénosinémie. L’adénosine résiduelle (qui n’a été ni incorporée aux érythrocytes par diffusion facilitée ni désaminée) va agir sur un groupe de récepteurs qui lui sont propres, appelés A1, A2A, A2B, ou A3 ; cette fixation est fonction de la séquence primaire du récepteur et de leur affinité pour le ligand. L’activation des récepteurs A1 et A2A et A2B est responsable des principaux effets cardiovasculaires. Comme de nombreux récepteurs transmembranaires, le nombre de ces récepteurs est régulé par les variations de concentrations en adénosine. Adénosine et arythmies cardiaques Mécanismes électrophysiologiques La figure 2 illustre les différents effets de l’adénosine sur les potentiels d’actions intracardiaques, par activation directe du canal potassique I KADO, et inactivation indirecte du canal calcique lent I Ca,L. Concernant l’effet chronotrope négatif, celui-ci repose principalement sur l’activation des récepteurs A1, localisés en majorité au niveau du noeud atrio-ventriculaire (NAV), ou ils entraînent localement une hyperpolarisation et une diminution de l’amplitude du potentiel d’action. Il en résulte une diminution de l’automaticité, ainsi qu’un allongement des périodes réfractaires. Il s’agit du principe physiopathologique de base de l’apport de l’adénosine dans le diagnostic différentiel des tachycardies supra-ventriculaires, en entraînant un ralentissement puis un blocage transitoire de la conduction à travers le NAV. Cette action de l’adénosine via les récepteurs A1 est de courte durée et est dose dépendante. Figure 2. Effet de l’adénosine sur les différents potentiels d’action intracardiaques. Trait noir : potentiel d’action avant adénosine. Trait rouge : potentiel d’action après adénosine. *Activation directe du canal potassique IKADO ; # Inhibition indirecte du canal calcique ICaL. À l’étage atrial, l’action de l’adénosine a des effets électrophysiologiques différents. Le nombre de récepteurs A1 est plus faible ce qui explique l’effet chronotrope négatif moindre. Une fois les récepteurs A1 saturés, l’adénosine restante active alors les récepteurs A2A et A2B. À l’inverse des récepteurs A1, les récepteurs A2A et A2B, lorsqu’ils sont activés, induisent la production d’AMPC dans les cellules cibles via l’activation de l’adénélylcyclase(1). Ceci est responsable d’une diminution de la durée des potentiels d’action et d’une hyperpolarisation cellulaire(2). Ceci conduit à un raccourcissement des périodes réfractaires atriales(3). L’adénosine n’a pas d’action sur les cellules myocardiaques ventriculaires ou hissiennes. Injection d’adénosine dans les tachycardies supraventriculaires(4) Dans les tachycardies à QRS fins, le test à l’adénosine est utilisé en pratique courante à but diagnostique, et parfois thérapeutique lorsqu’elle permet l’arrêt de la tachycardie. Le tableau 1 illustre les différentes réponses attendues au test à l’adénosine en fonction de la tachycardie sousjacente. L’injection d’adénosine doit se faire en intraveineux le plus rapidement possible (posologie entre 6 et 18 mg/bolus), suivi d’un rinçage avec un soluté salin. En raison de la demi-vie courte de l’adénosine, sa durée d’action l’est également. Ainsi, les effets cliniques disparaissent totalement en 20-30 s et une nouvelle injection peut être envisagée 1 min après la précédente. L’injection d’adénosine triphosphate (posologie entre 20 et 30 mg/bolus), peut remplacer l’injection d’adénosine. L’injection d’adénosine peut provoquer dans de rares cas une bronchoconstriction, via l’activation des récepteurs A1, et doit être utilisée avec prudence chez les patients asthmatiques. Les autres effets indésirables attendus sont la survenue d’une bouffée de chaleur, d’une hypotension artérielle et d’une hyperventilation. Son mécanisme d’action sur les tachycardies à QRS fins est principalement médié par l’effet chronotrope négatif (via A1 R) sur le NAV, mais aussi à moindre échelle sur le nœud sinusal et sur les myocytes atriaux. Elle n’a aucun effet sur une potentielle voie accessoire et doit être utilisée avec prudence dans toutes les tachycardies préexcitées, puisqu’en inhibant la conduction dans les voies normales, elle favorise le passage dans la voie accessoire et augmente le risque d’arythmies ventriculaires malignes. Reconnexion des conductions dormantes post-ablations Plusieurs études sur l’animal(2) et sur l’homme(5,6) ont montré que l’isolation électrique des veines pulmonaires en radiofréquence entraînait une dépolarisation cellulaire. Ainsi, il existe une élévation du potentiel membranaire basal au niveau des cellules lésées. Cette dépolarisation est différente entre les cellules avec et sans conduction dormante, respectivement de -57 ± 6 mV et -46 ± 5 mV. Dans les cellules à conduction dormante, cette seule élévation du potentiel membranaire basal inhibe le canal sodique entrant dépolarisant et donc la dépolarisation cellulaire. À l’inverse, l’adénosine entraîne une hyperpolarisation membranaire résultant de l’activation des canaux potassiques IK adénosine. Ainsi, l’hyperpolarisation membranaire résultant de l’injection d’adénosine peut suffire à réactiver le canal sodique dans le cas de conduction dormante. Dans les cellules ne présentant pas de conduction dormante, malgré l’hyperpolarisation secondaire à l’injection d’adénosine, la conduction ne peut être rétablie. Ainsi, l’adénosine peut être utilisée en pratique courante en salle d’électrophysiologie, au décours d’une procédure d’isolation électrique des veines pulmonaires, pour démasquer des conductions électriques dormantes, qui justifient un complément d’ablation. Rôle de l’adénosine endogène dans les arythmies cardiaques Les ectopies de veines pulmonaires sont impliquées dans le déclenchement des épisodes de fibrillation atriale. Maille et coll.(7) ont associé le taux d’adénosine plasmatique circulant (APLs) au rythme atrial sousjacent chez les patients en FA paroxystique ou persistante. Celui-ci étant plus élevé en arythmie qu’en rythme sinusal. L’équipe de Llach et coll. a quant à elle montré qu’il existait un relargage anormal de calcium par le réticulum sarcoplasmique résultant de l’hyperactivation des récepteurs A2A chez les patients en fibrillation atriale, via l’augmentation de la phosphorilation du récepteur RyR2(8). Les récepteurs A2A et RyR2 sont deux types de récepteurs colocalisés. Ces relargages intracellulaires de calcium sont par ailleurs connus pour être le mécanisme sous-jacent des post-dépolarisations diastoliques, impliquées dans les phénomènes de trigger, déclenchant les arythmies cardiaques. Ces hypothèses électrophysiologiques sont supportées par différentes études cliniques. Chez 200 patients explorés pour une tachycardie supraventriculaire, sans antécédent de FA, Strickberger et coll.(9) ont montré que 24 (12 %) patients présentaient un épisode de FA ou flutter après l’injection d’adénosine terminant la tachycardie supraventriculaire en cours d’exploration. Parmi les autres patients, 102 (58 %) présentaient des ectopies de veines pulmonaires. Une seconde étude(10) réalisée chez 36 patients référés pour une ablation de FA, avait montré la survenue d’ectopies de veine, d’arythmies atriales organisées ou de FA chez respectivement 26 (72 %), 1 (3 %) et 4 (11 %) patients, après une injection d’adénosine. Bertolet et coll.(11) ont aussi évoqué que l’élévation de l’APLs, résultant de l’ischémie myocardique, pouvait être le trigger des arythmies atriales dans ce contexte. Ainsi malgré des données encore manquantes, l’adénosine semble être parfois impliquée dans la survenue des épisodes de FA, notamment en favorisant les activités déclenchées, principalement au niveau des veines pulmonaires. Adénosine et syncope Rôle de l’adénosine dans les syncopes neuro-cardiogéniques - Mécanismes physiopathologiques L’activation du récepteur A1 a des effets chronotrope, dromotrope et inotrope négatif. Du fait d’une concentration importante en récepteurs A1 hypersensible, au niveau du NAV, comparativement au nœud sinusal, l’effet chronotrope négatif s’exprime surtout au niveau du NAV. En parallèle l’activation des A2A et des A2B est responsable d’une relaxation artérielle. Les récepteurs A1 présentent la plus grande affinité pour l’adénosine, les récepteurs A2B ayant l’affinité la plus faible et les récepteurs A2A ayant une affinité intermédiaire. - Implications cliniques Plusieurs auteurs ont déjà évoqué l’implication de l’adénosine, comme trigger de syncope neuro-cardiogéniques. Ainsi, le test à l’adénosine a été proposé dans le bilan de syncope sans prodrome. Une première étude avait montré une sensibilité plus forte au test à l’adénosine chez les patients présentant des antécédents de syncope, comparativement à ceux qui n’en avaient pas. Il a aussi été montré que l’injection d’adénosine pouvait entraîner la survenue d’un bloc atrio-ventriculaire (BAV) complet, chez des patients connus pour présenter des BAV paroxystiques, surtout chez les patients ne présentant ni anomalies de la conduction AV à l’état de base, ni dysautonomie. La positivité du test à l’adénosine dans le bilan de syncope, repose sur la survenue d’un BAV complet prolongé > 10 s ou la survenue d’une asystole > 6 s. Néanmoins du fait d’une faible spécificité, l’utilisation de ce test en pratique courante présente un faible niveau de recommandation(12). Saadjian et coll.(13) ont mesuré la concentration en adénosine plasmatique (APL) au cours d’un test d’inclinaison, chez 26 patients présentant des syncopes inexpliquées. Concernant le taux d’APL basal. Les patients qui avaient un test d’inclinaison négatif présentaient des taux d’APL basaux similaires au groupe témoins. En revanche, lorsque le test d’inclinaison était positif, le taux d’APL basal était significativement plus important, sans chevauchement entre les deux groupes. Parmi ces patients au moment de la syncope, il existait une augmentation de 52 % du taux d’APL, comparés au taux d’APL basaux. Plus l’APL basal était haut, plus la syncope survenait précocement et plus la bradycardie était importante. Cela faisait évoquer, le relargage d’adénosine comme trigger de la syncope survenant au cours d’un test d’inclinaison. Dans une autre étude(14), 46 patients ayant présenté une syncope neuro-cardiogénique, ont bénéficié d’une mesure d’APL associé à un test à l’adénosine et à un test d’inclinaison. Un APL haut était associé avec un test d’inclinaison positif, alors qu’un APL bas était associé avec un test à l’adénosine positif. En parallèle, l’expression des récepteurs A2A était plus faible chez les patients présentant un test à l’adénosine positif comparativement à ceux ayant un test d’inclinaison positif. Cela suggère donc deux mécanismes distincts dans la syncope neuro-cardiogénique, les syncopes adénosine sensibles, présentant un taux d’APL bas, avec une expression basse des récepteurs A2A, et un test à l’adénosine positif. Ici, les patients sont sensibles à de faibles variations de concentration en adénosine surtout par l’intermédiaire des récepteurs A1 de forte affinité, expliquant la cardio-inhibition et la sensibilité à l’adénosine. La deuxième forme de syncope neuro-cardiogénique présentant un taux d’APL haut, avec une expression en récepteurs A2A élevée et des syncopes déclenchées au test d’inclinaison (syncopes vasovagales typiques). Ainsi, dans ce cas, les récepteurs A1 sont désensibilisés du fait d’une exposition chronique à des taux d’APL haut et lors de variation minime de l’APL, il n’y a pas de retentissement ni sur les récepteurs A1 ni sur le A2A de faible affinité. En revanche, lors d’une augmentation suffisante d’adénosine (ex. : test d’inclinaison), les récepteurs A2A peuvent être activés conduisant à une vasoplégie provoquant la baisse de la tension artérielle. En pratique clinique, on peut résumer ainsi les données de la littérature (tableau 2) : chez les patients avec une concentration en APL basse, un relargage même faible transitoire d’adénosine endogène, peut être suffisant pour entraîner rapidement un BAV paroxystique via les récepteurs A1 hyperaffins restés disponibles, présents au niveau du NAV. À l’inverse chez les patients avec une concentration élevée d’adénosine, lors d’une syncope neuro-cardiogénique ou d’un test d’inclinaison, lorsqu’il existe un relargage important d’adénosine endogène, la majorité des récepteurs A1 sont cette fois saturés/désensibilisés, et c’est alors qu’il peut exister une vasodilatation secondaire à l’activation des récepteurs A2A. BAV paroxystique idiopathique Une première série de patients(15) avait décrit la documentation de BAV paroxystiques documentés lors de la récidive de syncope. La figure 3 illustre un exemple typique d’un tel BAV paroxystique. Le terme BAV idiopathique, s’explique par la normalité du bilan morphologique, l’absence d’anomalie de conduction sur l’ECG et la normalité de l’exploration électrophysiologique. Le suivi prolongé de ces patients a montré la persistance du caractère paroxystique, aucun BAV ne devient permanent. Il s’agit typiquement des patients présentant une concentration d’adénosine plasmatique basse avec une propension importante à présenter des BAV complets prolongés lors de la réalisation d’un test à l’adénosine. L’implantation d’un stimulateur cardiaque implantable permet de prévenir la récidive de syncope. Le BAV idiopathique se différencie des autres formes de BAV paroxystiques par ses caractéristiques cliniques et électrophysiologiques (tableau 3). Le BAV paroxystique extrinsèque secondaire à la cardioinhibition vagale, se distingue du BAV idiopathique, par des circonstances de survenues souvent stéréotypées, la présence de prodromes, une atteinte concomitante du NAV et du nœud sinusal responsable d’un allongement des PP et du PR, ainsi qu’une moins bonne réponse à la stimulation cardiaque, expliquée par la persistance de symptômes en lien avec la vasoplégie. De plus, un taux d’adénosine basal élevé avec une réponse positive au test d’ inclinaison permet d’en confirmer le diagnostic. Le BAV extrinsèque reste aussi paroxystique. Quant à lui, le BAV paroxystique intrinsèque est une entité caractérisée par une pathologie du tissu conductif sous-jacent évoluant vers le BAV complet persistant. Figure 3. Exemple de BAV paroxystique. Asystole brutale due à un BAV complet, sans modification de l’intervalle PP et sans rythme d’échappement. Les mouvements cloniques survenant après 10 s d’asystolie sont responsables des interférences enregistrées à la fin du tracé. Tracé de télémétrie enregistré pendant une syncope survenant chez une patiente de 72 ans. Elle avait présenté 5 épisodes similaires dans les 4 ans qui avaient précédé. Elle ne décrivait aucun prodrome et les syncopes s’étaient systématiquement compliquées de traumatisme grave. L’ECG de base était normal, ainsi que l’exploration électrophysiologique. Le test à l’adénosine a révélé une asystolie de 6,3 s, en rapport avec un BAV complet. Elle a également présenté une syncope au test d’inclinaison, mais en rapport avec une vasodepression isolée après sensibilisation à la trinitrine. Le taux d’adénosine plasmatique était bas (0,15 μmol/l). Elle a bénéficié de l’implantation d’un stimulateur cardiaque. Après 10 ans de suivi, elle n’a pas récidivé de syncope et n’a pas présenté non plus d’anomalie conductive permanente. Adénosine et coronaropathie Depuis plusieurs années il a été mis en évidence le fait que le système adénosinergique joue un rôle clef dans le flux sanguin coronaire. L’activation des récepteurs A2AR (exprimés aussi bien sur les fibres lisses que sur l’endothélium) conduit à un relâchement des fibres musculaires des parois vasculaires et donc à une vasodilatation. Dans l’aorte et dans les artères coronaires, cet effet vasodilatateur passe en partie par la voie de l’AMPc. De plus, il a été démontré que l’activation des A2AR (ainsi que les A3R) avait une action protectrice contre certains effets délétères secondaires au phénomène d’ischémiereperfusion, et que cet effet protecteur était dû, en partie, à une action anti-inflammatoire via les lymphocytes. Dans les plaquettes, l’activation des A2AR induit une inhibition de l’agrégation plaquettaire en augmentant la concentration intracellulaire en AMP. Par ailleurs l’adénosine déaminase (ADA) enzyme de dégradation de l’adénosine jouerait un rôle important in situ. En effet, l’inhibition de cette enzyme conduit à diminuer la production de molécules pro-inflammatoires. Par ailleurs, cette inhibition ralentirait le processus inflammatoire lié à l’athérosclérose au niveau coronaire. Les travaux de notre équipe(16) ont conduit à démontrer que la présence d’une coronaropathie sévère est associée à des concentrations plus élevées d’adénosine et d’homocystéine. De plus ces taux sont corrélés à l’étendue et la sévérité de la coronaropathie (évaluée par le score SYNTAX). L’HHCy, est considérée depuis longtemps comme un facteur de risque cardiovasculaire potentiel. En effet, une l’HHCy es t as sociée à la survenue d’événements cardiovasculaires. Toutefois, sa correction ne permet pas de diminuer le risque. Les métabolismes de l’adénosine et de l’homocystéine sont très liés (figure 1). Nous avons démontré une corrélation forte en homocystéine et adénosine chez le coronarien(17). Il est à noter que nous avons démontré qu’une corrélation forte existait entre expression des récepteurs A2A sur la paroi vasculaire (artère coronaire et artère membre inférieur) et sur cellules mononucléées(18,19). Cela nous a permis de poursuivre les travaux en utilisant des prélèvements sanguins périphériques. Nous avons observé que les patients atteints de coronaropathie avaient une expression de récepteurs A2A inférieure à celle des témoins. Ces niveaux d’expression desrécepteurs A2A sont inversement proportionnels aux concentrations en homocystéine. Ainsi HHCy aboutit à une diminution de l’expression des A2A récepteurs de l’adénosine et d’une diminution des concentrations en AMPc donc de l’effet biologique de l’adénosine. Récepteurs A2A de réserve La notion de récepteurs de réserve est une notion ancienne qui stipulait que si les effets biologiques d’une drogue augmentaient généralement linéairement avec sa concentration, dans certaines conditions, les effets biologiques maximaux pouvaient être obtenus alors que tous les récepteurs n’étaient pas occupés par le ligand, et donc que les effets biologiques étaient maximaux alors que seule une fraction des récepteurs étaient activés. La notion de récepteurs de réserve dans le système coronaire a été plus récemment remise en évidence par Shryock et Belardinelli(20) qui ont montré que chez l’animal, l’activation de seulement 5 % des récepteurs A2A de la paroi coronaire conduisait à une vasodilatation maximale de l’artère. Ce mécanisme serait un système de protection pour faire face à une pénurie de ligand et/ou de récepteurs. Pour étudier la présence de ses récepteurs de réserve (spare receptors), il est indispensable de disposer d’un ligand (agoniste ou antagoniste) se fixant de manière irréversible (au moins le temps des mesures) au récepteur. Notre équipe a développé un anticorps Adonis, qui possède en outre des propriétés agonistes. Ainsi, l’incubation d’Adonis avec des cellules exprimant le récepteur A2A permet à la fois de calculer l’affinité (KD), mais aussi la production d’AMPc. On définit ainsi le KD comme la concentration en agoniste (ici Adonis) qui permet d’occuper 50 % des récepteurs. On définit également l’EC50 qui est une notion d’effets biologiques et qui est la concentration en Adonis qui produit la moitié de la quantité maximale d’AMPc par la cellule cible. En temps normal, pour les récepteurs de l’adénosine, la valeur du KD est ≤ EC50, ce qui signifie que les effets biologiques maximaux sont obtenus seulement lorsque tous les récepteurs sont activés. Dans le cas de présence de recteurs de réserve, on retrouve l’EC50 < au KD. C’est ce que permet d’étudier Adonis. Depuis, notre équipe a mis en évidence le rôle de ces « spares » dans les coronaropathies et sa corrélation avec la présence d’ischémie myocardique(21). Ainsi, le dépistage des récepteurs de réserve pourrait devenir un moyen peu invasif de dépister la présence de coronaropathie associée à une ischémie myocardique. En pratique ▸ L’adénosine est un nucléoside ubiquitaire synthétisé en particulier lors du stress oxydatif, de la baisse de la pression partielle en oxygène, lors de phénomènes ischémiques ou hypoxiques ou au cours des processus inflammatoires. Elle présente une demi-vie courte (30 s). Son mécanisme d’action est basé sur l’activation de récepteurs transmembranaires (A1, A2A, A2B, A3), entraînant des conséquences multiples et en particulier cardiovasculaires. ▸ C’est un agent majeur pour induire une hyperhémie lors de la FFR. ▸ L’injection d’adénosine est une étape clé dans le diagnostic différentiel des tachycardies à QRS fins et peut être utilisée en aiguë pour réduire les tachycardies impliquant le nœud atrio-ventriculaire. ▸ Au cours des procédures d’ablation de fibrillation atriale, en réactivant les conductions dormantes post-ablation, par hyperpolarisation membranaire, l’adénosine permet d’identifier des zones de reconnexion justifiant un complément d’ablation. ▸ Les syncopes adénosine-sensibles représentent une entité spécifique de syncopes neuro-cardiogéniques cardio-inhibitrices, pour lesquelles les patients présentent une concentration basale d’adénosine plasmatique basse, chez qui une augmentation même faible de l’adénosinémie entraîne un BAV paroxystique idiopathique, par hypersensibilité des récepteurs A1. ▸ Adénosine, homocystéine et acide urique sont étroitement liés sur le plan métabolique. L’adénosine est fortement impliquée dans les mécanismes d’ischémie que l’on retrouve chez le coronarien stable et dans le syndrome coronarien aigu. Marqueurs de risque ou facteurs de risque cardiovasculaire ? Cela reste à éclaircir. ▸ Le concept de récepteurs A2A à l’adénosine de réserve semble être un mécanisme adaptatif en cas d’ischémie chronique. Son intérêt dans le dépistage non invasif de l’ischémie coronaire reste un enjeu majeur pour notre équipe.

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