Publié le 20 juin 2023Lecture 6 min
De nouvelles armes thérapeutiques dans la prise en charge de la MRC du patient avec un diabète de type 2
Catherine LAMBERT, d’après une table ronde organisée lors du congrès de la SFD 2023
Au cours d’une table ronde enregistrée lors du congrès de la Société francophone du diabète (SFD), qui s’est tenue du 21 au 24 mars à Montpellier, Lyse Bordier (Hôpital Bégin, Saint-Mandé) et Samy Hadjadj (CHU de Nantes) ont précisé les modalités d’utilisation des nouvelles classes thérapeutiques indiquées dans la prise en charge de la maladie rénale chronique (MRC) chez le patient diabétique de type 2.
Comme l’a précisé Lyse Bordier, la prise en charge de la maladie rénale chronique n’avait pas évolué depuis une dizaine d’années, après que les inhibiteurs du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA), IEC et ARA 2, ont montré leur capacité de retarder la dégradation de la fonction rénale. On remarquera d’ailleurs que l’association de ces deux familles thérapeutiques n’est pas recommandée chez ces patients pour des raisons de tolérance car elle entraine un risque accru d’hyperkaliémie, d’hypotension et d’insuffisance rénale fonctionnelle (étude ON TARGET(1)). L’absence d’innovation s’est traduite sur le plan épidémiologique par la persistance d’un taux élevé de MRC et d’insu
ffisance rénale terminale enregistré chez les patients ayant un diabète de type 2, à un moment où l’ensemble des autres complications micro- et macrovasculaires régressaient au fil des ans dans cette population. Dans ce contexte, l’arrivée de nouvelles classes thérapeutiques indiquées dans la prise en charge de la MRC représente un progrès majeur pour les patients avec un diabète, qui reste actuellement la principale cause d’insuffisance rénale terminale.
DE NOUVELLES CLASSES THÉRAPEUTIQUES
Du fait d’une meilleure prise en charge, la population des patients diabétiques de type 2 vieillit, remarque Samy Hadjadj, et plutôt en bonne santé. Le risque rénal devient donc, pour ces patients, un risque majeur et il n’est plus permis de ne pas utiliser tous les outils aujourd’hui à disposition des professionnels de santé. L’arrivée des inhibiteurs de SGLT2 et d’un inhibiteur non stéroïdien des récepteurs aux minéralocorticoïdes, la finérénone, vient renforcer l’arsenal thérapeutique qui avait peu évolué depuis plus d’une décennie. Les nouveaux médicaments de l’obésité comme les agonistes des récepteurs du GLP-1 ou les doubles agonistes GLP-1 GIP, vont également participer à la prévention et la prise en charge de la MRC, leur effet rénal étant actuellement évalué dans les essais cliniques. Ces traitements doivent être débutés chez les patients ayant un diabète de type 2 avec une MRC se traduisant par une altération du débit de filtration glomérulaire (DFG) et/ou une excrétion rénale d’albumine non normalisée par un IEC ou un ARA2.
Pour une prise en charge optimale et une initiation du traitement à un stade précoce de la maladie, les patients avec un diabète de type 2 doivent être régulièrement dépistés. Ce dépistage est réalisé de façon très simple, d’une part, par le dosage de la créatininémie permettant l’évaluation du débit de filtration glomérulaire (DFG) selon la formule CKD-EPI et, d’autre part, la recherche d’une microalbuminurie par la quantification du rapport albuminurie/créatininurie (RAC) sur un échantillon urinaire, généralement les premières urines du matin sans doute par habitude, mais cet examen peut être effectué à n’importe quel moment de la journée. Comme le souligne Samy Hadjadj, il suffit de réaliser le RAC à chaque fois que le patient se rend au laboratoire d’analyse médicale pour un examen sanguin, que le prélèvement doive être fait à jeun ou non.
LES RECOMMANDATIONS KDIGO POUR LA PRISE EN CHARGE DE LA MRC
KDIGO (Kidney Disease Improving Global Outcomes) est une organisation internationale qui publie des recommandations sur la prévention et le traitement des maladies rénales. Dans les récents guidelines consacrées à la MRC(2) chez les patients avec un diabète de type 2, les experts plaident d’abord pour une prise en charge globale de l’ensemble des facteurs de risque : lutte contre le surpoids et l’obésité, exercice physique régulier, normalisation du bilan lipidique, arrêt du tabac et une diététique équilibrée. Sur le plan rénal, le traitement de la MRC doit viser une diminution de l’albuminurie grâce à la prescription de médicaments néphroprotecteurs comprenant : un IEC ou ARA2 à dose maximale tolérée ; de façon systématique un iSGLT2, et ce quel soit le niveau d’HbA1c car cette famille thérapeutique est ici utilisée comme néphroprotecteur et non comme antihyperglycémiant. Selon les recommandations KDIGO, la finérénone est indiquée lorsque le DFG est ≥25 mL/min/1,73m2 avec kaliémie normale et une albuminurie ≥ 30mg/g, en association avec un IEC ou ARA2 et, le cas échéant, un iSGLT2.
Ne pas recourir à ces traitements en cas de MRC constitue aujourd’hui une perte de chance pour un patient diabétique de type 2. Il faut lutter contre l’inertie thérapeutique et suivre les patients de façon réactive, en adaptant les traitements à la réponse thérapeutique et à l’évolution de la maladie car la persistance d’une albuminurie représente en elle-même un facteur de risque de dégradation de la fonction rénale et un facteur de risque cardiovasculaire.
DES ASSOCIATIONS THÉRAPEUTIQUES AU BÉNÉFICE DU PATIENT
Comme l’indiquent les recommandations KDIGO, il est possible d’associer ces différentes classes thérapeutiques, inhibiteurs du SRAA, iSGLT2 et finérénone, lorsque l’albuminurie persiste et/ou que la fonction rénale se dégrade. Ces médicaments qui agissent sur l’hémodynamique rénale sont introduits successivement en fonction de la réponse thérapeutique et de l’évolution de la MRC, en surveillant bien sûr la tolérance à chaque nouvelle introduction. L’étude FIDELITY(3), qui a regroupé les études FIDELIO et FIGARO ayant testé l’e
fficacité et la sécurité d’emploi de la finérénone chez des patients avec un diabète de type 2 et une MRC traités par la dose maximale d’inhibiteur du SRAA (5734 dans FIDELIO-DKD et 7437 dans FIGARO-DKD), a montré que la finérénone permet de diminuer le RAC en moyenne de 32% par rapport au placebo après 4mois de suivi, et ce qu’elle soit associée ou non à un inhibiteur de SGLT2. Il existe donc un effet additif de la fi érénone à l’action des traitements néphroprotecteurs déjà instaurés.
Confirmant cette donnée, Samy Hadjadj remarque qu’il existe déjà de nombreuses données permettant d’a
ffirmer que l’association iSGLT2/finérénone est non seulement bénéfi que pour le patient mais qu’elle pourrait également améliorer la tolérance du traitement. On sait que l’un des effets indésirables des inhibiteurs des récepteurs aux minéralocorticoïdes est l’hyperkaliémie. Or l’association de la finérénone aux iSGLT2 semble diminuer la fréquence de ces hyperkaliémies comme le montre une analyse complémentaire de l’étude FIDELITY.
UNE PRISE EN CHARGE HOLISTIQUE
Comme l’a souligné Lyse Bordier, le diabétologue doit mettre en œuvre une prise en charge holistique des patients avec un diabète de type 2 selon les recommandations KDIGO et la prise de position de la SFD. Il doit donc veiller à la maîtrise de l’ensemble des facteurs de risque. La MRC accroît à la fois le risque cardiovasculaire et de mortalité, son traitement fait donc partie intégrante de cette prise en charge globale et doit aujourd’hui être conduit avec l’ensemble des familles thérapeutiques ayant la preuve d’un effet néphroprotecteur.
D’après une table ronde organisée lors du congrès de la SFD 2023, avec le soutien institutionnel des laboratoires
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