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Diabéto-Cardio

Publié le 17 juin 2024Lecture 3 min

Accident vasculaire cérébral et diabète de type 2 : les enseignements d’une étude médico-économique française

Patrice DARMON, Marseille

En dépit des progrès dans la prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaire, le diabète de type 2 (DT2) expose encore à un risque d’accident vasculaire cérébral (AVC) environ une fois et demie plus élevé que dans la population générale et le pronostic des patients après un AVC reste moins bon en présence d’un DT2. Pour autant, les données épidémiologiques relatives au pronostic, à la prise en charge et au coût économique des AVC chez les patients DT2 sont beaucoup moins nombreuses que celles portant par exemple sur les infarctus du myocarde ou l’insuffisance cardiaque, en particulier dans notre pays.

C’est tout l’objet de l’étude INSIST, étude rétrospective réalisée à partir de l’échantillon EGB (Echantillon Général des Bénéficiaires, environ 700 000 individus) issu de la base nationale de santé SNDS (Système National des Données de Santé) regroupant 99 % des assurés sociaux français. Parmi les 45 331 patients DT2 inclus dans l’étude, 2 090 (n = 4,6 %) ont été hospitalisés pour un premier AVC entre 2012 et 2018 (âge moyen 75 ans ; hommes 55,3 % ; hypertension artérielle 83,0 % ; dyslipidémie 63,6 % ; obésité 11,9 % ; arythmies 19,4 % ; coronaropathie 15,2 % ; insuffisance cardiaque 11,4 % ; artériopathie des membres inférieurs 8,5 % ; maladie rénale chronique et/ou aiguë 11,7 %). Il s’agissait d’un AVC ischémique dans 75,7 % des cas, d’un AVC hémorragique dans 15,6 % des cas et d’un AVC d’étiologie non spécifiée dans 8,6 % des cas. Après standardisation pour l’âge, l’incidence des AVC est passée de 10,3 à 7,6 pour 1 000 patients-année entre 2012 et 2018. L’incidence des AVC ischémiques était près de 5 fois supérieure à celle des AVC hémorragiques (6,80 vs 1,38 pour 1 000 patients-année). Au terme d’un suivi de 2,8 ans en moyenne après l’AVC initial, et après ajustement sur l’âge, le sexe et l’existence d’un antécédent d’arythmie, le pronostic était plus défavorable après un AVC hémorragique qu’après un AVC ischémique (décès 291,5 vs 144,1 pour 1 000 patients-année ; événements cardiovasculaires 130,9 vs 126,4 pour 1 000 patients-année ; nouvel AVC 86,5 vs 66,5 pour 1 000 patients-année) mais seul le risque de mortalité était significativement accru (HR 1,95 [IC95% 1,66-2,92]). Cet excès de mortalité après un AVC hémorragique vs ischémique était retrouvé dès les premières semaines de suivi (35,4 vs 12,4 % à 30 jours ; 47,1 vs 23,9 % à 1 an ; 60,3 % vs 41,9 % au terme du suivi). Au final, 68,8 % des patients ont été hospitalisés au moins une fois après leur AVC initial, avec une incidence largement plus élevée après un AVC hémorragique qu’après un AVC ischémique (3 110 vs 1 926 hospitalisations pour 1 000 patients-année). Concernant l’évolution des prescriptions d’anti-hyperglycémiants avant et après l’AVC initial (dans une ère pré-gliflozines), si le recours à la metformine est resté à peu près stable (54,8 vs 56,3 %), l’utilisation des sulfamides hypoglycémiants a diminué (28,2 vs 36,3 %) alors que celle de l’insuline, des inhibiteurs de la DPP4 et des agonistes des récepteurs du GLP-1 a augmenté (37,5 vs 27,7 % ; 20,7 vs 17,9 % ; 6,6 % vs 4,2 %, respectivement). La prescription de plusieurs autres traitements a également progressé après l’AVC (anti-hypertenseurs 85,5 vs 78,3 % ; antiagrégants plaquettaires 72,2 vs 50,3 % ; anticoagulants 40,0 vs 23,0 %) tandis que, de façon surprenante, la fréquence de recours aux statines n’a quasiment pas évolué (30,0 vs 31,4 %). Enfin, les coûts de santé annuels (hospitalisations, consultations, traitements) étaient estimés en moyenne à 18 592 € (écart-type 20 558 €), avec une médiane à 12 199 € (écart interquartile 6 846-22 378 €) comparable entre AVC ischémique et hémorragique. En dépit des limites inhérentes à sa méthodologie, avec notamment l’absence de données sur l’équilibre glycémique, le profil lipidique ou le contrôle tensionnel, cette étude sponsorisée par le laboratoire Novo Nordisk montre que l’incidence des AVC reste élevée chez les patients DT2 en France (bien qu’une baisse progressive se dessine entre 2012 et 2018) et qu’il s’agit d’AVC ischémiques dans plus de trois-quarts des cas. Ce travail illustre également le fardeau médical que représente cette pathologie dans cette population – risque très élevé de survenue d’un événement cardiovasculaire (53,2 %), d’un nouvel AVC (16,5 %) ou d’un décès (45,6 %) dans les 2,8 années suivant l’épisode initial, avec un risque de décès multiplié par deux après un AVC hémorragique vs ischémique – ainsi que son poids économique majeur (coûts directs annuels multipliés par trois par rapport à un patient DT2 sans maladie cardiovasculaire). Ces résultats soulignent enfin le travail qu’il reste à accomplir pour que ces patients DT2 à très haut risque bénéficient de l’ensemble des médicaments aujourd’hui recommandés à visée de protection cardiovasculaire (en particulier statines et anti-hyperglycémiants cardioprotecteurs)n même si l’on peut espérer que les choses se soient un peu améliorées depuis 5 ans.  Publié par Diabétologie Pratique

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