Publié le 20 sep 2005Lecture 12 min
Blocage du système rénine-angiotensine : plus de patients traités, un meilleur contrôle, des bénéfices vasculaires
M. JOBBÉ DUVAL, Neuilly-sur-Seine
Le XVe congrès de l’ESH a permis de faire le point sur les données pharmacologiques et cliniques d’un certain nombre de thérapeutiques apparues récemment sur le marché. À ce titre, le symposium de Menarini/Sankyo sur l’olmésartan était attendu, tant pour une remise en mémoire des caractéristiques de ce nouveau sartan que sur les perspectives du développement actuel et plus particulièrement l’étude ROADMAP, première étude en prévention primaire réalisée avec un sartan chez le diabétique.
Ce symposium dont le sous-titre « plus de pa-tients traités, un meilleur contrôle, des bénéfices vasculaires » apportait déjà un élément de réponse, avait pour but de faire le point sur notre expérience thérapeutique avec les antagonistes de l’angiotensine II (ARA II).
Les deux présidents de session, Mme le Pr Serap Erdine (université de Cerrahpasa à Istanbul) et le Pr Sverre E. Kjeldsen (hôpital universitaire de Ullevaal, Oslo, Norvège) ont évoqué l’état actuel de la prise en charge de l’HTA dans le monde, en soulignant :
- l’homogénéisation des recommandations faites par les différentes Sociétés savantes et qui sont, semble-t-il, de mieux en mieux suivies ;
- le vieillissement de la population qui s’accompagne d’une augmentation des risques cardiovasculaires.
À ce titre, l’utilisation des ARA II apparaît comme réellement bénéfique en termes d’efficacité non seulement sur les chiffres tensionnels, mais aussi, et surtout, sur la protection des organes cibles.
Les ARA II semblent plus spécifiques dans l’inhibition du SRAA que les IEC et apportent des bénéfices supplémentaires notamment en diminuant le risque de néphropathie diabétique.
Hypertension artérielle du sujet âgé : une prise en charge particulière
Il est aujourd’hui largement prouvé que l’élévation de la pression artérielle constitue un facteur de risque cardiovasculaire majeur, notamment en termes de mortalité vasculaire et de toute cause, sans effet de seuil, du moins à partir de valeurs > 115/75 mmHg. Cette notion est aujourd’hui considérée comme une certitude et ce, quel que soit l’âge.
Le sujet âgé se singularise toutefois par la valeur prédictive dominante de la pression systolique vis-à-vis du risque vasculaire et la fréquence de l’hypertension systolique isolée (HTASI), définie par des valeurs de PAS > 140 mmHg avec une PAD < 90 mmHg, et qui représenterait plus de 50 % des HTA du sujet âgé.
Les bénéfices du traitement antihypertenseur chez le sujet âgé présentant une HTASI sont largement prouvés. Toutefois, ce traitement est souvent difficile. Les études ont montré que, dans cette population particulière, les meilleurs résultats sont obtenus avec les diurétiques et les inhibiteurs calciques.
Concernant les sartans, nous disposons des données concernant des sujets âgés (> 65 ans) répondant à la définition de l’HTASI (PP > 55 mmHg) issues de 7 essais comparatifs randomisés en double insu versus placebo ayant évalué l’efficacité de l’olmésartan 40 mg/j durant 6 à 12 semaines. Dans ce groupe de 296 patients, l’olmésartan a entraîné une diminution significative de la PAS de 22,5 mmHg (p < 0,001, versus 9,9 mmHg sous placebo), de la PAD de 15 mmHg (p = 0,005, versus 8,5 mmHg sous placebo) et de la PP de 7,6 mmHg (p < 0,005 versus 1,4 sous placebo).
Intérêt de l’olmésartan
Ces données préliminaires attestant de l’intérêt de l’olmésartan dans le traitement de l’hypertendu âgé ont ouvert la voie à d’autres études qui viennent confirmer les bénéfices de cette thérapeutique. Notamment, l’étude OASYS (Olmesartan And Nitrendipine in SYStolic Hyper-tension in the Elderly) est d’autant plus intéressante qu’elle compare, chez des patients âgés de plus de 65 ans ou d’au moins de 75 ans ayant une HTASI, l’olmésartan, 20 ou 40 mg, à un inhibiteur calcique, la nitrendipine 10 ou 20 mg, connue pour son efficacité dans le traitement du sujet âgé.
Au bout de 12 semaines de traitement, le pourcentage de répondeurs est comparable sous les deux thérapeutiques, soit toutes doses confondues près de 31 % sous olmésartan ou nitrendipine ; à 24 semaines, après ajustement du traitement et adjonction d’hydrochlorothiazide (HCTZ) si besoin, ce pourcentage est d’environ 63 % chez les patients du groupe olmésartan et de 56 % sous nitrendipine. À souligner qu’à résultats équivalents en termes de contrôle de l’HTA (PAD, PAS et PP [figure 1]) les patients traités par l’olmésartan ont présenté beaucoup moins d’effets indésirables, notamment d’œdèmes et de céphalées.
Ces résultats encourageants dans le traitement de l’HTA du sujet âgé en termes d’efficacité et de tolérance incitent à poursuivre l’évaluation de l’olmésartan comparativement à d’autres molécules.
Figure 1. Réduction de la pression pulsée.
Que peut-on attendre des ARA II au-delà de la simple baisse tensionnelle ?
Nous savons que l’angiotensine II est impliquée dans l’initiation et la persistance des pathologies cardiaques et rénales de même que l’on connaît son rôle dans le maintien de pressions artérielles élevées.
Chez le diabétique hypertendu
Les divers traitements antihypertenseurs ont été testés chez le diabétique hypertendu et, plus particulièrement, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), les inhibiteurs calciques (IC) et les ARA II, le plus souvent versus traitement conventionnel.
L.-M. Ruilope (Université Computense à Madrid), hypertensiologue et néphrologue reconnu sur le plan international, a repris toutes les études comparatives réalisées avec ces trois classes thérapeutiques. Il a ainsi démontré que les IEC et les ARA II permettent de réduire beaucoup plus significativement le nombre de cas de nouveaux diabètes que les IC et, a fortiori, les bêtabloquants ou les diurétiques.
Par ailleurs, il a souligné l’homogénéité des recommandations, européennes (ESH/ESC) ou américaines (JNC VII) où les chiffres tensionnels à obtenir chez le diabétique doivent être inférieurs à 130/80 mmHg. Or, lorsque l’on reprend toutes les grandes études chez le diabétique hypertendu (UKPDS, ABCD, HOT, IDNT, ALLHAT), l’atteinte de ces valeurs cibles nécessite en moyenne entre 2,5 et 4 traitements antihypertenseurs.
La simple baisse des chiffres tensionnels n’entraîne pas pour autant une protection rénale équivalente quel que soit l’agent thérapeutique ; en effet, les différentes études réalisées ces dernières années montrent que les ARA II présentent des avantages potentiellement plus importants :
- un blocage soutenu et complet du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA), indépendamment de la voie de production de l’angiotensine II ;
- l’ensemble des effets secondaires est sensiblement comparable à ceux du placebo en raison de l’absence d’accumulation de la bradykinine et de la diminution importante de l’incidence des toux ;
- la recherche suggère que le maintien de la stimulation des récepteurs AT2 (par les ARAII, contrairement au IEC) pourrait être associée à des bénéfices cliniques et éventuellement à une activité antiproliférative au niveau du glomérule.
Par conséquent, les ARA II pourraient être considérés comme le traitement de première intention chez l’hypertendu diabétique. Dans ce cas, manifestement l’ARA II permettant en outre la baisse tensionnelle la plus importante offrirait un bénéfice supplémentaire chez ces patients.
ARA II : un bénéfice supplémentaire chez les diabétiques hypertendus
C’est ce qu’a démontré L.-M. Ruilope en reprenant différentes études comparant les ARAII avec l’olmésartan.
- Smith et coll. ont comparé les effets du valsartan 80 mg et de l’olmésartan 20 mg administrés pendant 24 heures, sur la pression artérielle mesurée par MAPA chez 266 patients randomisés : une différence significative a été mise en évidence en faveur de l’olmésartan ; la baisse des chiffres est constamment plus prononcée sous olmésartan, l’écart étant maximal au petit matin, soit 5 mmHg (figure 2) (Am J CV Drugs 2005 ; 5 : 41-46).
- De même, une étude réalisée par S. Oparil et coll. a montré la supériorité de l’olmésartan sur les pressions systolique et la diastolique comparativement au losartan 50 mg, au valsartan 80 mg et l’irbésartan 150 mg.
Figure 2. PAS et PAD des 24 h en position assise.
L’utilisation optimale des ARA II a été évoquée par A.-M. Heagerty (Manchester, UK) à travers deux études réalisées dans plusieurs pays européens avec l’olmésartan.
- Dans une métaanalyse ayant regroupé 7 études incluant 2 693 patients, Greathouse et coll. ont montré que l’olmésartan en monothérapie est au moins aussi efficace que l’association d’un autre sartan avec 12,5 mg d’HCTZ : la PAD baisse de 12,2 et 13,1 mmHg respectivement sous olmésartan 20 et 40 mg ; comparativement les baisses de PAD sous traitements combinés sont de 9,9 mmHg avec le candésartan 8 mg, 12,2 mmHg avec l’irbésartan 150 mg, 12,4 mmHg avec le losartan 50 mg et 13,6 mmHg avec le valsartan 80 mg (CHF 2002 ; 8 : 313-20) (figure 3).
Figure 3. Comparaison bithérapie et monothérapie.
Efficacité en monothérapie
- Pour prouver l’efficacité de cette molécule en monothérapie, un essai en ouvert a été réalisé en Allemagne avec la collaboration de 3 426 médecins chez 11 959 patients hypertendus (étude OLMEPASS).
Protocole. Les doses d’olmésartan étaient de 10 à 40 mg/j en une prise chez des patients ayant une HTA pour la majorité légère à modérée, mais avec cependant plus de 20 % ayant une HTA sévère. La PA a été contrôlée au bout de 6 semaines de traitement puis à 12 semaines. Le taux de répondeurs a été de 70 % à 6 semaines et de plus de 80 % à 12 semaines.
Résultats. La baisse de la systolique a été en moyenne de 28,4 mmHg et celle de la dias-tolique de 14,2 mmHg. La proportion de patients ayant une HTA légère ou modérée à sévère est passée de 80,4 % à l’entrée dans l’étude à 7,2 % au bout de 3 mois. Plus de 70 % des patients n’ont eu besoin que de 20 mg/j, qui est la dose habituellement recommandée en monothérapie.
Une autre étude multicentrique menée en Autriche, Belgique, Allemagne, Pays-Bas et Royaume-Uni a été réalisée en ouvert, partiellement randomisée et en double aveugle.
Protocole. Après une période de wash out de 2 semaines, 1 620 patients ayant une HTA légère à modérée ont reçu 20 mg d’olmésartan.
Au bout de six semaines, 1 065 patients étaient encore sous traitement et 485 d’entre eux ont été randomisés pour une durée de 8 semaines et recevaient soit 40 mg d’olmésartan, soit l’association olmésartan 20 mg + HCTZ 12,5 mg.
Premiers résultats. Au bout de 8 semaines de traitement, le taux de répondeurs était de 75 % avec olmésartan 20 mg.
Cette étude (OLMEBEST) n’a pas encore donné les résultats sur les patients randomisés. Cependant, on peut déjà tirer un certain nombre de conclusions sur l’efficacité de cette molécule en monothérapie :
- elle apparaît plus puissante que les autres AAII dans le traitement de l’HTA ;
- elle semble démontrer un bénéfice vasculaire au delà de la baisse de la PA.
Des bénéfices vasculaires additionnels sous olmésartan
En termes de prévention des maladies cardiovasculaires, les attentes à l’égard d’un traitement antihypertenseur vont au-delà de l’effet sur les chiffres de pression artérielle. Non seulement, la thérapeutique ne doit pas favoriser l’apparition d’un déséquilibre métabolique, mais surtout elle devrait protéger les organes cibles, et notamment le rein.
Des effets bénéfiques sur des marqueurs de risque cardiovasculaire ont été mis en évidence chez les patients traités par olmésartan comparativement au placebo dans le cadre de l’étude EUTOPIA. Sous traitement, une baisse de 15 % des concentrations sériques de CRPhs a été observée, baisse qui s’est accentuée jusqu’à plus de 20 % à la 12e semaine de traitement (figure 4). Cette diminution significative comparativement au placebo (p < 0,01) témoigne d’un effet anti-inflammatoire vasculaire de l’olmésartan, également confirmé par des modifications comparables du TNF alpha.
Figure 4. Effet anti-inflammatoire de l’olmésartan.
Des effets plus spécifiques de la fonction rénale ont également été rapportés chez des patients présentant un diabète de type 2. Comparativement au placebo, les patients traités par olmésartan voient leur flux sanguin rénal sans augmentation concomitante de la fraction de filtration, ce qui témoigne d’une amélioration fonctionnelle et d’une moindre souffrance rénale.
Ces résultats augurent d’un effet bénéfique de l’olmésartan sur le rein, qui complète son efficacité antihypertensive et ses atouts en termes de tolérance clinique et biologique, garants d’une bonne observance.
Néphropathie diabétique et système rénine-angiotensine
La néphropathie diabétique est de plus en plus fréquente avec le vieillissement de la population et, surtout, avec les habitudes alimentaires, comme le montre l’évolution constante des cas d’obésité.
La prévention d’une pathologie rénale passe par la surveillance des éventuelles modifications survenant sur le glomérule entre 5 à 10 ans après l’apparition de la néphropathie. Pendant cette période, en effet, on observe des modifications structurelles de cet organe délicat qu’est le glomérule avec augmentation de la matrice cellulaire, épaississement de la membrane basale et hypertrophie glomérulaire. Bien que les variations interindividuelles soient extrêmement importantes dans la vitesse de progression de cette sclérose glomérulaire, ce n’est en général qu’à ce stade que le diagnostic de néphropathie est posé, c’est-à-dire à un stade le plus souvent irréversible. C’est pourquoi la détection d’une microalbuminurie permet un diagnostic simple et précoce d’une pathologie rénale débutante.
Trois mécanismes semblent impliqués dans cette atteinte rénale précoce
l’angiotensine II, qui entraîne une vasoconstriction de l’artère glomérulaire efférente, tandis que l’artère afférente est dilatée, entraînant une hypertension glomérulaire et donc, de facto, une albuminurie ;
concomitamment un épaississement de la membrane basale. Il existe des données physiopathologiques mettant en cause l’angiotensine II et le glucose dans l’altération de l’expression des protéoglycanes matriciels, responsables du passage des protéines telles que l’albumine ;
une microalbuminurie est responsable d’une fibrose interstitielle avec atteinte inflammatoire du tubule proximal, responsable par la suite de l’insuffisance rénale terminale.
Ainsi, la pathologie diabétique se présente essentiellement comme le résultat d’une augmentation de la perméabilité vasculaire, au même titre que les modifications survenant au niveau de la rétine, du cœur ou du cerveau C’est la raison pour laquelle on pense de plus en plus que la microalbuminurie serait un marqueur précoce et fiable de l’atteinte vasculaire chez le diabétique et donc d’une évolution de la maladie diabétique. Sa présence nécessite donc un traitement préventif agressif pour éviter les évolutions terminales de cette maladie.
Tel est le but de l’étude ROADMAP mise en place avec l’olmésartan médoxomil.
L’étude ROADMAP
Cette étude fait suite à nombre d’études réalisées chez les diabétiques. On sait, en effet, que la détérioration du glomérule avec apparition d’une microalbuminurie aggrave le pronostic : la mortalité à 7 ans après ajustement aux autres facteurs de risque est de 49 % chez les diabétiques avec microalbuminurie, contre 17 % en cas de normoalbuminurie. En outre, comme l’a démontré l’étude HOPE, la mortalité de toute cause augmente avec l’excrétion urinaire d’albumine, même à l’intérieur des limites de la normale, que le patient ait ou non un diabète (JAMA, 2001 ; 286 : 421-426).
Les ARA II ont démontré qu’ils étaient susceptibles de diminuer la protéinurie chez les diabétiques tout en diminuant les chiffres tensionnels. Cela n’est pas le cas d’autres classes thérapeutiques antihypertensives, comme le démontre par exemple l’étude MARVAL. On observe dans cette étude que la microalbuminurie diminue seulement dans le groupe valsartan et non dans le groupe amlodipine, alors que la baisse tensionnelle est comparable dans les deux groupes.
Protocole
- L’étude ROADMAP va permettre de recruter des patients diabétiques de type 2 normoalbuminuriques et ayant au moins un facteur de risque supplémentaire (anomalie lipidique, tabagisme, obésité ou hypertension artérielle).
- Les patients seront randomisés pour recevoir soit un traitement par olmésartan 40 mg, soit un placebo. La durée de l’étude sera de 5 ans avec un échantillon de 2 200 patients environ dans chaque bras.
- Le critère de jugement primaire est le délai d’apparition d’une microalbuminurie.
- Les critères secondaires comprennent un critère composite associant les événements cardiovasculaires majeurs et les événements rénaux ainsi que l’apparition d’une rétinopathie diabétique.
Objectifs
Le but est bien, en prévention primaire, d’évaluer si l’adjonction d’un ARA II pour prévenir l’apparition d’une microalbuminurie permettra de démontrer une protection rénale et vasculaire efficace. En Europe, 22 pays participent à cette étude.
ROADMAP est la seule étude de prévention primaire dans la néphropathie diabétique réalisée avec un sartan. Elle fait suite à UKPDS qui avait démontré, dans un premier temps, que plus on baisse les chiffres tensionnels chez le diabétique, plus la mortalité cardiovasculaire diminue.
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