Publié le 29 nov 2011Lecture 3 min
Pertes sanguines dues aux examens biologiques - Au cours de l’infarctus du myocarde, les examens biologiques répétés peuvent être responsables d’une déglobulisation significative
J.-P. USDIN, Hôpital américain de Paris, Neuilly-sur-Seine
Les anémies survenant au cours du séjour hospitalier pour infarctus du myocarde (IDM) sont associées à une morbi-mortalité initiale ou secondaire importantes(1). Les causes de ces anémies ne sont pas toujours évidentes, volontiers multifactorielles : troubles de l’érythropoïèse, insuffisance rénale, syndrome inflammatoire, etc.
Pour l’équipe américaine d’A.C. Salisbury et coll., les prélèvements sanguins itératifs rendent compte d’une spoliation sanguine non négligeable(2).
L’idée était de répertorier les patients admis pour un IDM avec un chiffre normal d’hémoglobine (Hb), mais dont le dernier taux d’Hb en hospitalisation était < 11 g/dl, niveau en dessous duquel la morbi-mortalité est significative.
À partir des données de 57 hôpitaux entre 2000 et 2008, ont été ainsi recensés plus de 17 500 patients ayant eu des pertes sanguines jugées comme étant moyennes à sévères. Par un véritable travail de titan, les auteurs ont évalué, en fonction du nombre d’analyses demandées, la quantité de sang prélevé au cours du séjour pour les examens biologiques !
Pour information, les tubes pour la chimie et l’hématologie nécessitent 5 ml de sang chacun, la coagulation 4,5 ml, les gaz du sang 2,5 ml, l’hémoculture 10 ml, etc.
Une anémie sévère/modérée est constatée chez 20 % des patients admis pour un IDM et non anémiques à l’entrée !
La quantité moyenne de sang prélevée était plus importante chez les patients ayant développé une anémie au cours du séjour : 173 ml contre 83 ml chez les patients non anémiés, soit une variation du simple au double. Au cours de l’anémie sévère/modérée, l’hémoglobine chute en moyenne de 3,9 g/dl, contre 1,6 g/dl en cas d’anémie modeste.
Les prélèvements sont significativement plus importants lors des 48 premières heures du séjour, mais plus le séjour est long, plus la quantité de sang prélevée est importante générant des pertes sanguines hospitalières sévères.
Chaque 50 ml de sang prélevé pour les examens fait courir un risque de 18 % d’anémie modérée ou sévère.
Ils remarquent aussi que les volumes de sang prélevés varient du simple au double suivant les hôpitaux, signant une absence de consensus pour le suivi biologique de cette pathologie coronaire.
L’anémie est un facteur aggravant qui ne se limite pas aux syndromes coronaires aigus
De nombreux articles nous mettent en garde contre les risques de saignement, que ce soit au cours du syndrome coronarien aigu ou d’autres pathologies : fibrillation auriculaire entre autres. Les recommandations nous sont délivrées par des moyens mnémotechniques aux acronymes accrocheurs et redoutables (HAS-BLED !)
Une estimation en 5 niveaux de gravité (indice BARC) vient d’être mise en place, permettant une classification et un recensement mondial très précis des hémorragies au cours de l’hospitalisation(3).
L’étude multicentrique de Salisbury et coll. apporte un élément supplémentaire dans l’évaluation des dangers de l’hospitalisation. Les prélèvements biologiques, nécessaires bien évidemment, ont un impact non négligeable sur la survenue d’une anémie hospitalière ; ils s’ajoutent aux pertes sanguines mal évaluées lors de l’angiographie.
Comme le souligne Stéphanie Rennke dans le commentaire de cette étude(4) : « L’anémie acquise à l’hôpital doit être considérée comme un facteur modifiable et devant être prévenu au même titre que les infections nosocomiales, embolies pulmonaires ou erreurs médicamenteuses ».
Nous devons tenir compte de cette spoliation lorsque nous cochons les cases des feuilles d’examens biologiques et nous devons étudier avec nos laboratoires les moyens de diminuer ces quantités de sang nécessaires au suivi du patient coronarien, a fortiori chez les patients âgés chez lesquels l’érythropoïèse est faible.
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