Publié le 12 oct 2004Lecture 4 min
Pathologie de la surrénale - Phéochromocytome
L. CABANES, hôpital Cochin, Paris
Les phéochromocytomes, développées aux dépens du tissu chromaffine surrénal ou extra-surrénal, sont des tumeurs qui sécrètent des catécholamines.
L’HTA, qui est le signe le plus fréquent (présente dans 90 % des cas), est secondaire à l’hypersécrétion de noradrénaline. Elle peut être classiquement paroxystique, mais est en fait le plus souvent permanente et résiste aux antihypertenseurs autres que les alpha-bloqueurs. Elle peut également prendre la forme d’une HTA maligne.
Signes d’appel
La triade classique réunie au cours de la crise d’hypertension artérielle paroxystique : céphalées, sueurs et palpitations liées à la libération d’adrénaline, est en fait plus évocatrice de phéochromocytome quand elle est associée à une hypotension orthostatique.
Le phéochromocytome est, dans certains cas, révélé par une insuffisance cardiaque gauche ou globale. L’atteinte myocardique peut, alors, être en rapport avec une insuffisance coronaire organique ou fonctionnelle, mais aussi être secondaire à la toxicité myocardique des catécholamines (myocardite adré-nergique). Dans ce dernier cas, on observe à l’échographie une dilatation et une hypertrophie ventriculaire gauche. La fonction systolique est parfois altérée (hypocinésie globale ou segmentaire).
Le phéochromocytome peut enfin être découvert fortuitement à l’occasion d’un examen échographique ou d’un scanner abdominal.
Diagnostic
Le diagnostic de phéochromocytome repose sur le dosage urinaire des métabolites de l’adrénaline et de la noradrénaline : les dérivés méthoxylés, métadrénaline et normétadrénaline.
L’interprétation des résultats biologiques doit tenir compte du profil tensionnel du patient au moment du dosage. La sensibilité de ces dosages urinaires avoisine 100 % chez l’hypertendu permanent. En cas d’HTA paroxystique ou de crise aiguë, un dosage des dérivés méthoxylés doit idéalement être réalisé dans les 3 heures qui suivent le malaise. Si la tension artérielle était normale au moment du recueil urinaire, le diagnostic de phéochromocytome ne peut pas être formellement écarté lorsque les dosages sont normaux et la réalisation de nouveaux dosages hormonaux se justifie en cas de forte présomption clinique.
Les stigmates d’hypovolémie (augmentation de l’hémoglobine et de l’hématocrite et l’hypokaliémie secondaire à l’hyperaldostéronisme secondaire) sont souvent présents.
Un diabète sucré est fréquemment associé (effet inhibiteur des catécholamines sur la sécrétion d’insuline).
Le scanner des surrénales est l’examen à réaliser en première intention. Sa sensibilité et sa spécificité sont proches de 100 % quand il est couplé à la scintigraphie. Certaines équipes radiologiques refusent d’injecter le contraste iodé lors du scanner dans la crainte de déclencher une crise aiguë.
La scintigraphie corps entier à la méta-iodo-benzyl-guanidine (MIBG), de structure analogue à celle de la noradrénaline et marquée à l’iode 131, permet de localiser la ou les zones d’hyperfixation et donc de localiser la ou les multiples tumeurs et leurs éventuelles métastases et guide ainsi scanner et IRM.
L’IRM, qui met en évidence un hypersignal en séquence T2, possède également d’excellentes sensibilité et spécificité.
Le traitement du phéochromocytome est chirurgical, par laparoscopie, quand la taille de la tumeur et l’absence de localisations multiples le permettent.
Traitement médical préopératoire
Il a pour objectif le contrôle de la PA et de la volémie pour éviter au maximum les variations tensionnelles (pics d’HTA ou chutes tensionnelles) pendant l’intervention.
Il repose sur l’administration d’alpha-bloqueurs car la tumeur surrénalienne sécrète principalement de la noradrénaline.
Les doses sont progressivement croissantes et la tachycardie réflexe secondaire est corrigée par l’administration conjointe secondaire et progressive de bêtabloqueurs.
Ces patients, souvent hypovolémiques, bénéficient de l’arrêt des diurétiques et d’une réhydratation orale ou par perfusion intraveineuse de sérum salé.
L’intervention ne se conçoit qu’au sein d’une équipe rompue à ce type de chirurgie. Une instabilité tensionnelle, la survenue de troubles du rythme et une hypoglycémie sont à craindre. Une surveillance hémodynamique (Swan-Ganz parfois pour apprécier la volémie et cathéter artériel pour le monitorage de la PA) et électrique continue s’impose donc.
Le pronostic des phéochromocytomes bénins est bon, contrairement à celui des formes malignes (survie à 5 ans < 30 %). Le patient redevient normotendu après l’exérèse de la tumeur dans près de 80 % des cas. Des récidives sont néanmoins toujours possibles, ce qui signifie que tout patient opéré d’un phéochromocytome doit bénéficier d’une surveillance clinique et biologique annuelle.
Phéochromocytome visualisé en IRM. A. Signal T1. B. Signal T2 (à droite la vésicule, à gauche le phéochromocytome). C. Après injection de galdolinium.
Pour la pratique
• Les dosages des métanéphrines et normétanéphrines urinaires pour un diagnostic biologique de phéochromocytome
Il n’y a pas d’interférence des antihypertenseurs avec le dosage du bloc métanéphrine urinaire. Aucun arrêt du traitement ne s’impose donc.
• Conditions du dosage de l’aldostéronémie en cas de suspicion d’un hyperaldostéronisme primaire
- La spironolactone doit être stoppée depuis un minimum de 6 semaines, les autres diurétiques, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion, les ARA II et les bêtabloqueurs arrêtés depuis plus de 15 jours.
- Le contrôle des chiffres tensionnels est alors assuré par les anticalciques et les alpha-bloquants si nécessaire.
- Les dosages sont réalisés après recharge potassique, en régime normosodé, le matin et après quelques heures de décubitus.
• Quelle imagerie pour quel diagnostic ?
- Le scanner des surrénales est toujours l’examen à réaliser en première intention.
- C’est la seule imagerie à réclamer pour un diagnostic d’hyperaldostéronisme primaire (adénome de Conn ou hyperplasie des surrénales).
- Dans l’hypothèse d’un phéochromocytome, les performances du scanner sont encore meilleures quand il est couplé à la scintigraphie au MIBG.
- L’IRM couplée à la scintigraphie au MIB est, elle aussi, très performante.
- Enfin, le scanner est l’examen de référence dans le syndrome de Cushing (tumeur, hyperplasie macronodulaire ou dysplasie micronodulaire des surrénales).
L’IRM est alors réservée au bilan d’extension d’un corticosurrénalome malin.
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