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Cardiologie générale

Publié le 02 mai 2006Lecture 10 min

Pour notre pratique au quotidien

E. FERRARI, CHU de Nice
Toutes les informations pour la pratique de la cardiologie au quotidien.
Mode d'administration du THS et thrombose veineuse On sait que les estrogènes, per os augmentent le risque de TVP et d’EP chez les femmes ménopausées, notamment chez les porteuses de thrombophilies. Qu’en est-il des estrogènes transcutanés « à la française » ? Cette étude cas-témoins a inclus, sur 7 centres et pendant 5 ans, 235 femmes ayant eu un 1er épisode de TVP ou d’EP et 554 témoins. L’étude a confirmé que lorsque la femme est porteuse d’une mutation du facteur V de Leyden, le risque relatif de TVP/EP est multiplié par 3,4. Pour la mutation du facteur II, le risque est multiplié par 4,8. Globalement, le THS per os multiplie le risque par un facteur 4,3, mais dans cette étude cas-témoins il n’y a pas de surrisque avec le traitement percutané. Plus intéressant, lorsque le THS est donné per os chez une femme porteuse de la mutation du facteur V ou II, le risque de TVP/EP est multiplié par 25, alors que, chez les femmes thrombophiles, le traitement hormonal percutané n’augmente pas le surrisque. Voilà un bon argument pour penser, au moins sur le plan veineux, que le THS de la ménopause « à la française » n’engendre pas de surrisque, même chez des patientes porteuses des mutations du facteur V de Leyden ou de la prothrombine.   Surdosage d'anti-thrombotiques dans les syndromes coronaires aigus Voilà un excellent papier qui devrait nous faire poser de nombreuses questions. CRUSADE est un registre sur la qualité des soins aux États-Unis, registre à partir duquel on voit de plus en plus de résultats publiés. Cette fois-ci ont été répertoriés les prescriptions d’antithrombotiques dans les SCA non ST+. De janvier à septembre 2004, plus de 30 000 dossiers ont été analysés sur 387 hôpitaux. L’objectif essentiel était de relever les doses d’héparine non fractionnée, d’héparine de bas poids moléculaire ainsi que celles des anti-GP-IIb/IIIa lors des 24 premières heures. Comparativement aux doses théoriques, les doses prescrites ont été classées en : bonne dose, excès modéré, excès important ou sous-dosage. Par exemple, pour une HBPM, la bonne dose étant de 0,95 à 1,05 mg/kg de poids, un excès modéré était noté si la dose donnée était comprise entre 1,05 et 1,2 mg/kg de poids ; un excès important pour une dose > 1,2 mg/kg. Un surdosage a ainsi été noté dans 12,5 % des prescriptions d’HBPM, 13,6 % des prescriptions d’HNF, 17,5 % des prescriptions d’anti-GPIIb/IIIa. Dans cette étude, 42 % des patients ont eu au moins un excès de dose d’un antithrombotique lors des 24 premières heures de leur prise en charge. Paradoxalement, pour les anti-GPIIb/IIIa, plus les patients sont âgés, plus le risque de surdosage est élevé. En excluant les patients qui seront pontés, 11,5 % des patients vont présenter un saignement majeur, sachant qu’il y a une relation entre surdosage et saignements. Le surdosage en anti-GPIIb/IIIa, particulièrement, multiplie par près de 6 la survenue de saignements majeurs et, surtout, la mortalité est plus importante chez les patients surdosés. La mortalité est multipliée par 3,4, par 5,8 et par 12,4 respectivement pour les surdosages en HNF, en HBPM et en anti-GPIIb/IIIa. Les antithrombotiques ne sont pas des traitements anodins. À vouloir trop coller aux protocoles des essais de la littérature, voilà ce à quoi on peut exposer nos patients.   L'association fibrose pulmonaire et HTAP ne fait pas bon ménage La fibrose pulmonaire est une maladie très grave par elle-même. La survenue d’une HTAP dans ce contexte modifie-t-elle le pronostic ? Question non illégitime pour les cardiologues qui sont à même de s’occuper d’HTAP. Ce travail a mesuré la PAP chez 88 patients atteints de fibrose pulmonaire idiopathique. La PAP systolique de ces sujets était de 48 ± 16 mmHg (en fait de 28 à 116 mmHg). Trois groupes ont été constitués en fonction de la PAP systolique, avec les résultats suivants : • PAP < 35 mmHg, survie d’environ 70 % à 3 ans ; • PAP entre 35 et 50 mmHg, pronostic peu modifié ; • PAP systolique > 50 mmHg, taux de survie à 3 ans de l’ordre de 40 %.   À quoi sont dues les allergies poststents actifs ? Fièvre, urticaire, prurit, démangeaisons chez un patient qui vient de sortir de l’hôpital après un angor ayant nécessité la mise en place d’un stent pharmacoactif… ça n’est pas toujours le traitement médicamenteux Six mois après l’obtention de l’AMM pour les stents pharmacoactifs, la FDA avait déjà reçu une cinquantaine de déclarations d’allergie peut-être liées aux stents actifs, trop rapidement rapportées aux traitements concomitants. D’avril 2003 à décembre 2004, les cas d’hypersensibilité possible aux stents « coatés » ont été analysés. Sur 5 783 stents posés, 262 présentaient des symptômes compatibles avec une allergie. Au total, 17 cas d’hypersensibilité sont sûrement dus au stent. Parmi eux, 9 patients ont présenté des symptômes qui auront duré plus de 4 semaines. Certains d’entre eux en sont décédés et 4 autopsies révèlent une importante inflammation autour de l’endoprothèse, processus inflammatoire qui a largement pu favoriser la thrombose du stent… à suivre. 17 cas d’hypersensibilité sont sûrement dus aux stents actifs… à suivre.   CK normales mais élévation des CK-MB : qu'en penser en cas de SCA sans sus-décalage ST ? Certains patients qui ont un syndrome coronaire aigu (SCA) sans sus-décalage du segment ST, finissent par « faire » des enzymes. On constate aussi parfois des situations où les CK totales restent normales avec une élévation des CK-MB : faut-il en tenir compte ? À partir des bases de données de plusieurs essais sur les SCA, sur plus de 19 000 patients, on retrouve cette situation, à savoir des CK sont normales mais les CK-MB élevés, dans 12,6 % des cas. Il faut noter que, dans 52 % des cas des SCA non ST, les CK ainsi que les CK-MB sont négatifs. Dans 7 % des cas, les CK totales s’élèvent mais les MB restent normales. Dans 27 % des cas ce sont les CK-totales et les MB qui s’élèvent. Finalement, ces patients dont les CK totales sont normales mais les CK-MB élevées, ont le plus mauvais pronostic avec un taux de décès et d’IDM de 20,8 % à 180 jours contre 14,5 % chez ceux qui n’élèvent ni les CK totales ni les MB.     Peut-on donner du clopidogrel pour "couvrir" toutes les résistances à l'aspirine ? On sait qu’il existe un certain nombre de patients résistants à l’aspirine. Leur prévalence dépend largement de la définition donnée. Quoi qu’il en soit, on pourrait se dire que la grande majorité des patients résistants à l’aspirine seront sensibles au clopidogrel. Les auteurs ont recherché la résistance à l’aspirine et au clopidogrel chez 150 patients devant subir une angioplastie. La donnée essentielle, parmi les patients résistants à l’aspirine, est que la moitié d’entre eux sont aussi résistants au clopidogrel. Il y a une implication pratique : une différence très significative de l’élévation des CK-MB postprocédure entre les sujets sensibles et ceux résistants à l’aspirine : 18 vs 38 % et entre les sujets sensibles et résistants au clopidogrel : 17 vs 32 %. Enfin, les sujets résistants aux deux antiagrégants présentent une élévation des CK postprocédure dans 15 contre 44 % pour ceux qui sont résistants aux deux antiagrégants plaquettaires. Cela signifierait-il que l’activité plaquettaire de certains patients est très élevée à l’état basal et que ni l’aspirine ni le clopidogrel, ni les deux ne suffisent à diminuer suffisamment l’agrégabilité plaquettaire ?   Que faire lorsqu'une thrombolyse n'a pas donné les résultats escomptés dans l'IDM aigu ? La question est pertinente. Les auteurs ont randomisé 427 patients qui avaient été thrombolysés et chez lesquels le ST n’avait pas diminué de moins de 50 % par rapport à l’état basal et ce, à la 90e minute après le début de la thrombolyse. Les choix thérapeutiques peuvent surprendre puisque les patients pouvaient être orientés soit vers un traitement médical sans nouvelle tentative de revascularisation, soit vers une nouvelle thrombolyse, soit encor vers une angioplastie de sauvetage. À 6 mois, le taux de décès n’est pas différent entre les 3 thérapeutiques bien qu’il existe une tendance en faveur de l’angioplastie (6,2 vs 12,7 et 12,8 % ; p = 0,12). Le taux de récidive d’IDM est bien évidemment en faveur de l’angioplastie (2,1 vs 8,5 % et 10,6 % ; p < 0,01) ; le critère composite qui associe tout décès + récidive d’IDM + AVC est très en faveur de l’angioplastie : 15,2 % vs près de 30 % avec les deux autres options ; p < 0,01. Autrement dit, nous avions raison depuis de nombreuses années d’aller « déboucher » mécaniquement ces artères qui restent thrombosées après thrombolyse.   Antiagrégants ou AVC en cas d'artérite des membres inférieurs ? Prescrivez-vous un antiagrégant ou une antivitamine K à vos patients qui présentent une artérite des membres inférieurs et êtes-vous sûr qu’il y a des arguments dans la littérature pour appuyer votre choix ? Il existe 9 essais qui ont inclus 4 889 patients et ont comparé différentes stratégies d’antithrombotiques chez les artéritiques. Globalement, les AVK comparativement à l’aspirine ne réduisent pas la mortalité chez les artéritiques (RR : 1,04 [0,55-1,29]) ni les occlusions des greffons (RR : 0,91 [0,77-1,06]). De plus, les AVK comparés aux AAP majorent le risque de saignement (RR : 1,96 [1,43 -2,69]). Quelques essais ont comparé l’association AVK + aspirine versus aspirine seule et ont montré que l’association augmenterait la mortalité (RR : 1,57 [0,16-2,12]), mais pourrait réduire les occlusions des greffons (RR : 0,84 [0,62-1,12]), en majorant toujours le risque de saignement (RR : 2,13 [1,27-3,57]). Finalement, les données sont si incertaines qu’un essai randomisé de grande envergure (WAVE) incluant 2 161 patients a été mis en route pour comparer l’association AVK (INR 2 à 3) + aspirine versus AAP seul. Le suivi est en cours et la réponse à la question : « quel antithrombotique chez l’artéritique ? » pourrait être apportée par cette étude.     Le scanner spiralé est-il fiable en cas d'embolie pulmonaire ? Ce nouveau travail a pour but de valider un algorithme supplémentaire pour arriver au diagnostic d’EP. Il utilise le scanner spiralé, les D-dimères et l’évaluation de la probabilité clinique pour diagnostiquer convenablement une embolie pulmonaire. Rappelons quelques chiffres pratiques, pour moduler le discours prodigué à un patient chez lequel on aura pu suspecter une EP. • Situation 1. Patient avec une faible probabilité clinique d’EP et un taux de D-dimères négatif : quel est le risque de décès dans les 3 mois suivants d’EP ? Réponse : risque nul. En revanche, il existe un risque de TVP ou d’EP non mortelle de 0,5 % (mais cela ne veut pas dire qu’il y avait effectivement une EP 3 mois auparavant). • Situation 2. Scanner thoracique normal, le patient repart sans traitement. Dans ce cas, la probabilité d’une TVP/EP à 3 mois est de 1,3 % et le risque de décès par EP de 0 %. • Situation 3. Scanner thoracique positif révélant une EP : un traitement est instauré. Le risque de TVP ou de nouvelle EP est de 3 % dans les 3 mois et celui de décès par une nouvelle EP (malgré le traitement) à est de 1 %. Des chiffres à garder l’esprit lorsque l’on discute avec le patient ou la famille devant ce tableau clinique.

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