Publié le 19 avr 2005Lecture 6 min
Protection cardio-vasculaire du coronairen et du diabétique : l'important, c'est la dose !
A. MARQUAND, Saint-Raphaël
Les Journées européennes de la SFC
Les laboratoires sanofi aventis ont organisé le 21 janvier 2005 un symposium satellite sous la présidence de J.-C. Daubert (Rennes) et G. Slama (Paris).
Cœur et diabète : un problème de santé publique sous-estimé
J. Puel (CHU Toulouse)
J. Puel a insisté sur l’explosion de la prévalence du diabète de type 2 (+ 3,2 % par an), qui coûtait en 2000 pas moins de 3 914 euros par patient, coût qui représentait 4,7 % des dépenses de l’assurance maladie. Le diabète augmente d’un facteur 3 les complications cardio-vasculaires et le taux de progression annuelle de sa prévalence est de 8,4 %. Il faut également tenir compte des diabétiques méconnus (prévalence de 1 %) et des porteurs de syndrome métabolique (prévalence de 15 %). Le thérapeute a des moyens face au diabète : statines, IEC, stents actifs… Mais il doit les mettre en œuvre, et pour cela, commencer par savoir qui est diabétique avant donner les conseils adéquats.
Cœur et diabète : à quoi sert le diabétologue ?
G. Charpentier (Evry)
Dans les syndromes coronariens aigus, la glycémie d’admission est étroitement corrélée au pronostic, que les patients soient des diabétiques connus ou non, sans véritable effet seuil. Le risque moyen d’événement défavorable est multiplié par 4 chez les non-diabétiques avec une glycémie d’admissionŽ 6,00 mmol/l. Chez les diabétiques, le risque relatif (RR) est de 1,9 par gramme de glycémie supplémentaire (p = 0,0001). On retrouve ce surrisque sévère après un pontage coronarien. La prise en charge intensive par l’insuline réduit la mortalité de 11 % ; en analyse multivariée, le RR est de 0,65 (p = 0,033, étude DIGAMI). Ces résultats n’ont pas été retrouvés dans l’étude DIGAMI-2. Il reste à déterminer si le contrôle intensif de la glycémie est capable de prévenir les complications cardio-vasculaires chez le diabétique de type 2. L’étude UKPDS montre un bénéfice : en faisant passer l’HbA1c de 7,9 à 7 % (en moyenne), on réduit le nombre d’infarctus du myocarde (IDM) de 14 % à 5 ans (p = 0,042) ; le bénéfice persiste à 15 ans, avec un gain de 16 % (p = 0,052).
Ainsi, on peut retenir que la baisse de l’HbA1c de 1 % permet une réduction de 14 % des IDM (p < 0,0001), l’incidence de l’insuffisance cardiaque de 16 % (p = 0,021), les amputations ou décès par AOMI de 43 % (p < 0,0001) et les AVC de 12 % (p = 0,035).
Actuellement, la stratégie en présence d’un diabétique de type 2, est de donner des conseils hygiéno-diététiques, puis une monothérapie orale, ensuite une combinaison orale, un traitement oral plus de l’insuline, pour finir par l’insuline seule. Le but est d’obtenir une HbA1c < 6,5 %. Dans le cas d’une insulinothérapie, l’insuline lente permet d’assurer une insulinémie de base, l’organisme délivrant les pics liés à l’alimentation. La dose doit être ajustée pour obtenir une glycémie à jeun < 1 g/l (5,5 mmol). Mais, en plus, il faut assurer un traitement optimal de l’HTA et d’une dyslipidémie. Un tel traitement intensif permet de réduire de moitié les complications cardio-vasculaires, et de 60 % les néphropathies et la rétinopathie.
Cœur et diabète : n'oubliez pas le rein !
J. Mann (Munich, Allemagne)
Le rein est une « fenêtre ouverte » sur l’état du cœur et des vaisseaux . Dans l’étude HOPE, l’existence d’une microalbuminurie chez les diabétiques double l’incidence d’événements (IDM, AVC, décès) qui passe de 50 à 97 pour 1 000 patients-années.
Le schéma est quasi-identique pour l’insuffisance rénale, avec une définition pourtant restrictive : clairance inférieure ou égale à 60 ml/min. Ainsi, dans HOPE, l’association d’une créatininémie > 14 mg/l et d’une microalbuminurie multiplie le risque de survenue du critère principal par 2,08, ce qui en fait le principal facteur de risque : l’existence d’une coronaropathie arrive loin derrière avec 1,51. Toutes les analyses arrivent à la conclusion que l’altération de la fonction rénale fait croître de manière exponentielle le risque cardio-vasculaire. De nombreuses hypothèses non exclusives sont avancées : élévation de la PA nocturne, de la Lp(a), du fibrinogène, de l’homocystéine, de la CRP et des autres médiateurs de l’inflammation, de la diméthylarginine asymétrique (ADMA), de l’insulinorésistance, hyperparathyroïdie, anémie, etc.
Dans ce contexte, un traitement par ramipril à la dose de 10 mg/j, comme dans l’étude HOPE permet une réduction de 28 % des événements en l’absence de microalbuminurie, passant à 45 % lorsqu’elle est présente, chez les diabétiques.
L’une des explications du grand bénéfice du ramipril chez l’insuffisant rénal tient à son effet sur l’HVG : l’étude SECURE, étude ancillaire échocardiographique de HOPE menées chez 750 patients, a permis de montrer que la réduction de la masse VG est multipliée par 2 à 3 sous ramipril en cas d’insuffisance rénale (IR).
Mais l’intervention par IEC n’est pas la seule utile : les statines sont bénéfiques chez les patients à risque, même en présence d’une IR, comme l’a montré l’étude CARE avec la pravastatine chez des coronariens ayant un profil lipidique peu perturbé : réduction du critère composite de 28 % (p = 0,02), des accidents cardio-vasculaires majeurs de 27 % (p = 0,002), des IDM de 20 % (p = 0,06), des revascularisations de 33 % (p = 0,002) et des AVC de 38 % (p = 0,049).
Malheureusement ces traitements fort utiles (IEC, statines, bêtabloquants, revascularisations) sont moins souvent prescrits chez les insuffisants rénaux, alors que les bénéfices sont clairement établis et ne sont en rien inférieurs à ceux observés chez les patients à fonction rénale normale.
Conclusion
L’insuffisance rénale légère et la microalbuminurie sont des facteurs de risque très prévalents qui agissent de manière indépendante sur le pronostic cardio-vasculaire du diabétique.
Les patients ayant une IR légère devraient faire l’objet de la même stratégie thérapeutique que les autres patients à risque : IEC à la dose démontrée dans les études (par exemple, 10 mg/j de ramipril), statines, réduction adéquate de la PA et revascularisation.
Protection cardio-vasculaire du coronarien et du diabétique : quels traitements et à quelles doses ?
P.-G. Steg (Paris)
P.-G Steg a repris les principes du traitement des coronariens, énoncés par le vocable « BASIC » : Bêtabloquants, Agents antiplaquettaires, Statines, IEC, Contrôle des facteurs de risque et du mode de vie. Les médicaments dont l’utilité a été prouvée par de multiples études doivent être prescrits à la dose utilisée dans les études ayant montré le bénéfice clinique : par exemple pour l’aspirine, entre 75 et 150 mg/jour, permettant une réduction de 23 % des accidents cardio-vasculaires. C’est aussi 40 mg/jour avec la pravastatine (dans CARE : réduction de 24 % des événements, – 37 % dans CARDS), les IEC : ramipril 10 mg/jour comme dans HOPE (– 22 % pour le critère, – 25 % pour les décès CV, – 31 % pour les AVC, – 16 % pour la mortalité totale, -16 % pour les revascularisations coronaires, – 16 % pour les complications du diabète, – 23 % pour les nouvelles insuffisances cardiaques, – 32 % pour les nouveaux cas de diabète).
Chez le diabétique, les IEC sont particulièrement protecteurs : dans l’étude HOPE, le ramipril (10 mg/j) a permis une réduction de 34 % du critère composite (p = 0,0007) et de 38 % des décès cardio-vasculaires. Les nouveaux cas de diabète diminuent de 31 % et ce bénéfice se poursuit à distance, alors que les patients du groupe placebo ont été invités à être placés sous IEC : 3 ans après la fin du suivi, le bénéfice a été encore de 30 %.
Il faut souligner que la dose est importante : les IEC doivent être donnés à la dose prouvée dans les études, par exemple 10 mg/j pour le ramipril.
On revient donc à « BASIC », en sachant que les 4 familles thérapeutiques (bêtabloquants, antiplaquettaires, IEC et statines) se potentialisent grandement : en les prescrivant ensemble, on réduit le risque de complications de la coronaropathie de 90 %.
Conclusion
Les bons médicaments doivent être donnés aux bonnes doses ; un travail de persuasion doit être fait auprès des patients pour qu’ils ne prennent pas « trop » de médicaments. Penser « BASIC » est un devoir pour le praticien, et les patients doivent être persuadés du bien-fondé de cette attitude thérapeutique.
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