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Insuffisance cardiaque

Publié le 21 sep 2010Lecture 7 min

Quand faut-il opérer l'insuffisance cardiaque ?

I. GANDJBAKHCH, A. COSSIMO, M. LAALI, A. PAVIE, Groupe Hospitalier Pitié Salpêtrière, Paris

L’insuffisance cardiaque est l’inadaptation entre le débit cardiaque produit par le coeur et les besoins de l’organisme dans les conditions de charge normales. Il s’agit donc d’une entité hétérogène, regroupant les insuffisances cardiaques systolique ou diastolique, aiguë ou chronique, secondaire ou primitive. Il est donc normal, qu’à des situations hétérogènes, il ne sera pas possible de proposer un seul traitement univoque.

Le principe de base du traitement chirurgical de l’insuffisance cardiaque est le suivant : • Pour l’insuffisance cardiaque secondaire : y a-t-il la possibilité et la faisabilité de réaliser une réparation ? • Pour l’insuffisance cardiaque primitive : est-il possible de faire un remplacement ? Insuffisance cardiaque secondaire L’insuffisance cardiaque peut être due à une atteinte péricardique, à des lésions valvulaires ou ischémiques. Péricarde Atteinte péricardique Il peut s’agir d’un épanchement péricardique compressif gênant le fonctionnement du coeur nécessitant l’évacuation. Péricardite constrictive Le diagnostic de péricardite constrictive doit être certain, après avoir éliminé les autres tableaux hémodynamiques similaires, en particulier une cardiomyopathie restrictive. L’indication opératoire est constante sauf une contre-indication d’ordre général à la chirurgie. Il est noté que les péricardites constrictives calcifiées d’origine tuberculeuse sont devenues exceptionnelles. À l’inverse, les péricardites constrictives post-radiques avec l’atteinte épicardo-péricardique sont plus fréquentes et nécessitent des artifices techniques chirurgicaux. Valvulaire Après s’être rassuré que l’insuffisance cardiaque est la conséquence de la valvulopathie (ce qui est plus facile pour une valvulopathie aortique que pour l’insuffisance mitrale), il est nécessaire de s’assurer qu’il existe des réserves myocardiques par l’échocardiographie sous dobutamine, par exemple. La chirurgie de réparation et/ou de remplacement valvulaire donne d’excellents résultats, surtout s’il existe des réserves myocardiques. Dans le cas inverse, même en l’absence de réserve myocardique, il est légitime de commencer par la chirurgie valvulaire qui peut apporter des améliorations parfois durables. Le cas particulier de l’insuffisance mitrale avec dysfonction ventriculaire nécessite une grande vigilance. En effet, si le dysfonctionnement myocardique est consécutif à la valvulopathie, la chirurgie valvulaire est justifiée. En revanche, si l’insuffisance mitrale est fonctionnelle et conséquence de la dilatation ventriculaire, la chirurgie valvulaire isolée ne peut apporter les résultats escomptés. Ischémique L’insuffisance cardiaque peut être aiguë dans le cadre d’un choc cardiogénique ou de complications mécaniques de l’infarctus du myocarde et qui seront étudiées plus loin. Nous considérons ici l’insuffisance cardiaque chronique. L’indication de l’intervention est légitime s’il y a la possibilité d’une récupération myocardique. Cette récupération est d’autant plus probable que le diamètre échocardiographique diastolique du ventricule gauche est < 65 mm, qu’il existe une viabilité myocardique et, en cas de lésions mécaniques post-infarctus, la possibilité d’une correction, enfin, que la topographie des lésions des artères coronaires soit propice à une revascularisation. Dans le cas d’une insuffisance cardiaque ischémique C’est la recherche de viabilité qui permet de porter l’indication opératoire. S’il y a une viabilité franche, prouvée par une scintigraphie myocardique et/ou par l’échocardiographie de stress, et que cette viabilité dépasse 20 % du ventricule gauche, la chirurgie donne de bons résultats Dans le cas de complications mécaniques de l’infarctus du myocarde Il peut s’agir d’une plaque akinétique étendue, pouvant aboutir à un anévrisme ventriculaire. Les plaques akinétiques, quand elles sont étendues et s’accompagnent de dilatation ventriculaire, laissent un volume ventriculaire résiduel contractile suffisant (> 70 ml/m² avec une fraction d’éjection du ventricule restant ≥ 40 %), peuvent être traitées par la chirurgie de remodelage ventriculaire. Dans ces cas, après l’ouverture du ventricule gauche (figure 1A), la partie fibreuse de la paroi libre du ventricule est excisée, suivie de la mise en place d’une pièce de Dacron (figure 1B) à la limite de la zone blanchâtre fibreuse et de la zone rouge contractile du ventricule gauche. Bien entendu, les pontages coronaires associés complèteront, si besoin, cette intervention. Dans le cas de l’insuffisance mitrale ischémique Le geste isolé sur la valve mitrale n’est pas logique, parce qu’il ne s’agit pas d’une maladie de la valve mais d’une maladie du muscle. Le mécanisme de l’insuffisance mitrale ischémique chronique est le suivant : la partie infarcie du myocarde reste immobile, tandis que la partie vivante se contracte et se rapproche de la base. Le relâchement des cordages est, de ce fait, asymétrique empêchant la coaptation des feuillets valvulaires. La mise en place d’un anneau de taille réduite a été proposée mais avec des résultats secondaires aléatoires. C’est la raison pour laquelle notre équipe a proposé de suturer le pilier infarcti au pilier contractile (figure 2) pour lui apporter, de façon indirecte, une contractilité, ce qui permet ainsi de relâcher les cordages de façon symétrique et d’assurer la coaptation valvulaire. Cette intervention sera terminée par la mise en place d’un anneau de réduction. Sur 14 patients opérés selon ce procédé, nous déplorons un décès postopératoire ; dans les suivis, l’insuffisance mitrale n’est pas réapparue et n’a pas nécessité de réintervention. Figure 1. Ouverture du VG (A). Mise en place d’une pièce en Dacron (B). Figure 2. Suture du pilier infarcti au pilier contractile. Rythmique L’insuffisance cardiaque d’origine rythmique par désynchronisation est traitée habituellement par un geste endocavitaire. Néanmoins, il y a des cas où la sonde ventriculaire gauche ne peut être mise en place par la voie du sinus coronaire. Il devient alors nécessaire par une chirurgie mini-invasive utilisant une courte thoracotomie (figure 3A), de mettre en place l’électrode ventriculaire gauche (figure 3B). Notre équipe a opéré 122 patients selon ce procédé avec un seul décès et l’obtention de conditions de resynchronisation satisfaisantes. Figure 3. Resynchronisation par chirurgie mini-invasive : incision (A) et sonde (B). Insuffisance cardiaque aiguë Elle peut être due à la complication d’un infarctus du myocarde : par une fissuration ventriculaire dans le péricarde, par une rupture du pilier mitral ou une communication interventriculaire. Seul le geste de réparation chirurgicale est un recours salvateur possible. Insuffisance cardiaque aiguë par infarctus invasif ou par les autres causes d’insuffisance cardiaque aigue : myocardite, première poussée de décompensation myocardique, cause endocrinienne ou post-endocardite. Si la cause de l’insuffisance cardiaque est rapidement détectée et est traitable, le traitement de la pathologie causale s’impose (chirurgie valvulaire dans le cadre d’une endocardite bactérienne ou revascularisation myocardique en cas d’ischémie étendue). Dans les autres cas, il est nécessaire d’assurer la survie du patient en mettant en place une assistance circulatoire type ECMO qui permet de suppléer le coeur et, si nécessaire, les poumons. Ce procédé consiste à mettre en place, par voie périphérique veineuse ou artérielle, des cathéters (figure 4A) qui amènent le sang veineux dans un oxygénateur et, après oxygénation (figure 4B), le sang étant réinjecté par une pompe (figure 4C) dans le système artériel. Pendant la période où la survie est assurée par l’ECMO, il est possible de faire un bilan étiologique. S’il y a une récupération de la fonction cardiaque, ce qui est le cas par exemple pour les myocardites ou certains infarctus revascularisés, le patient sera sevré par l’ablation des cathéters. S’il n’y a pas de récupération, la transplantation cardiaque sera proposée ; en l’absence de greffon, il est possible de mettre en place une machine d’assistance ou de suppléance plus lourde et plus performante. Figure 4. ECM mise en place de l’assistance circulatoire par voie périphérique. Transplantation cardiaque L’indication est posée quand le patient est en insuffisance cardiaque persistante, malgré un traitement médical optimal, a une espérance de vie prévisible < 1 an et s’il n’y a pas d’autre alternative thérapeutique. Au cours des dix dernières années, 350 à 400 interventions de transplantation cardiaque ont été réalisées chaque année en France. En 2008, notre équipe de la Pitié-Salpêtrière en a réalisé 82. Les deux indications majeures sont les cardiopathies ischémiques et les cardiopathies dilatées. La mortalité de la transplantation cardiaque est, dans ces cas, aux alentours de 15 %, en raison de l’état du patient et de la qualité du greffon. Passé le cas opératoire, on obtient une espérance de vie de 50 %, à 12 ans (figure 5). La capacité fonctionnelle des transplantés est excellente. À distance, peuvent survenir des complications du traitement immunosuppresseur et des atteintes coronariennes du greffon. Figure 5. Espérance de vie après greffe cardiaque. L’assistance circulatoire Il faut en distinguer deux variétés : l’assistance circulatoire légère, dont le prototype est l’ECMO, précédemment décrite, et l’assistance circulatoire plus lourde comportant les dispositifs biventriculaires orthotopiques (le coeur artificiel) (figure 6) ou hétérotopiques (figure 7) et les dispositifs monoventriculaires gauches. Les premiers fonctionnent grâce à un système d’activation pneumatique, tandis que les appareils monoventriculaires sont alimentés par électricité. Ces machines peuvent être employées de façon transitoire en attente de transplantation cardiaques mais les appareils type Heart Mate (figure 8) ou Jarvik 2000 (figure 9) peuvent être implantés pour des périodes prolongées et des survies de plus de 3 ans sont observées avec ces dispositifs. L’expérience du Groupe de la Pitié-Salpétrière porte sur 785 patients qui ont bénéficié de l’assistance circulatoire. Parmi ceux qui ont eu un coeur artificiel total, 76 % ont pu être transplantés et, parmi ces patients transplantés, 93 % ont quitté l’hôpital. Figure 6. Coeur artificiel orthotopique. Figure 7. Coeur artificiel hétérotopique. Figure 8. Heart Mate. Figure 9. Jarvik 2000. En pratique L’insuffisance cardiaque est une entité hétérogène. Il est nécessaire de déceler une pathologie causale qui peut être traitée pour son propre compte. En l’absence de pathologie causale et/ou une déchéance myocardique, force est d’envisager une transplantation cardiaque avec une possibilité de survie de qualité et de durée. L’assistance circulatoire mécanique est réalisée à l’aide de diverses machines : certaines, d’installation facile, de surveillance aisée et de coût faible, type ECMO, peuvent être utilisées pour une période maximale de quelques semaines. Les autres dispositifs sont indiqués en attente de transplantation ou pour un usage prolongé.

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