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Valvulopathies

Publié le 14 juin 2011Lecture 6 min

Valves aortiques percutanées : choix de la voie d’abord

D. TCHETCHE, Clinique Pasteur, Toulouse

Depuis la première implantation transcathéter de valve aortique (TAVI) effectuée en 2002 par Alain Cribier, plus de 30 000 patients ont été traités à travers le monde.
Le choix de la voie d’abord s’avère ainsi primordial et consiste à évaluer la faisabilité d’une approche transfémorale tout en estimant le risque de complications vasculaires. Lorsque la voie transfémorale est contre-indiquée ou jugée à haut risque, d’autres voies d’abord sont envisagées : classiquement transapicale pour la prothèse ESXT et sous-clavière pour la prothèse MCV.

L'indication de TAVI fait l’objet d’une décision pluridisciplinaire, chez des patients ayant une sténose aortique symptomatique pour laquelle la chirurgie conventionnelle est contre-indiquée ou estimée à haut risque. Deux prothèses ont obtenu le marquage CE en 2007 : Edwards SAPIEN® et Medtronic COREVALVE™. Les dernières évolutions de ces prothèses sont les dispositifs Edwards SAPIEN XT® (ESXT) et Medtronic COREVALVE AccuTrak™ (MCV). L’analyse des principaux registres européens montre que la voie transfémorale est la voie de première intention pour les deux types de bioprothèses, avec une utilisation en première intention dans 66 à 95 % des procédures(1-3). L’abord transfémoral n’est cependant pas sans risque et expose le patient à un taux de complications vasculaires variable d’un registre à l’autre(1-4). Ceci souligne l’intérêt de l’initiative Valve Academic Research Consortium qui permettra de standardiser différentes définitions d’événements cliniques post-TAVI, dont celle des complications vasculaires(5). Il est important de souligner que la survenue de complications vasculaires est associée à une mortalité accrue à 30 jours(6-7).   Faisabilité de la voie d’abord fémorale   Critères d’évaluation Le bilan de faisabilité d’une approche transfémorale analysera trois critères majeurs : le diamètre artériel luminal minimal iliaque et fémoral commun, l’importance des tortuosités et le niveau de calcifications artérielles. Deux examens permettront d’évaluer ces paramètres : l’artériographie invasive et le scanner injecté en coupes. Ces examens seront idéalement combinés pour un recueil d’informations le plus large possible avant TAVI. Une attention particulière à la quantité d’iode injectée ainsi qu’une hydratation appropriée et une réalisation décalée de quelques jours permettront de prévenir au mieux une néphropathie aux produits de contraste, dans cette population âgée et fragile. À titre d‘exemple, une angiographie invasive montrant des axes ilio-fémoraux non compatibles avec une approche transfémorale rendra le scanner des axes ilio-fémoraux inutile dans le choix de la voie d’abord. Angiographie invasive L’artériographie est le premier examen à effectuer, idéalement par voie transfémorale à l‘aide d’une sonde pig tail graduée 5F, en visualisant parfaitement l’arbre artériel, de l’aorte abdominale terminale aux bifurcations fémorales (figure 1). Cet examen sera concomitant d’une coronarographie et  d’une aortographie sus-sigmoïdienne. Lorsque l’angiographie est effectuée par voie transradiale, le cathéter pig-tail devra être positionné en aval des artères rénales avec une quantité suffisante d’iode pour une opacification correcte du lit artériel. Figure 1. Artériographie périphérique ; sonde pig-tail graduée. Angioscanner  injecté Le scanner injecté permettra par l’obtention de coupes millimétriques, une analyse précise du diamètre luminal et des calcifications à différents niveaux. L’existence de calcifications circonférentielles localisées sera plus aisée à identifier sur des coupes transversales alors que les tortuosités seront révélées par une reconstruction en 3 dimensions des axes  artériels. Diamètre luminal minimal ilio-fémoral La taille d’introducteur nécessaire à l’implantation transfémorale d’une ESXT est de 18F pour la prothèse de 23 mm et 19F pour la prothèse de 26 mm ; celle nécessaire à l’implantation d’une valve  MCV est de 18F pour les deux tailles de prothèses (26 et 29 mm). Un diamètre artériel de 6 mm est requis pour l’insertion d’un introducteur de 18F ; 6,5 mm pour un introducteur de 19F. Des diamètres plus grands seront nécessaires en cas de calcifications artérielles importantes limitant l’élasticité artérielle. Tortuosités artérielles Le niveau des tortuosités artérielles est classé en 4 grades par angiographie invasive (figure 2). Lors de cet examen, l’insertion d’un guide rigide permettra, si nécessaire, d’estimer les possibilités de redressement de tortuosités de grade 2 ou 3 au niveau des artères iliaques. Des tortuosités extrêmes exposent, en effet, outre à une impossibilité de progression de l’introducteur 18F ou 19F, à un risque élevé de complication vasculaire. Le scanner révélera les tortuosités par reconstruction 3D. Figure 2. Tortuosités ilio-fémorales. Grade 0 à 3, d’après Eltchaninoff et coll. Calcifications Les calcifications sont probablement le plus important facteur de risque de complications vasculaires : échec de systèmes de fermeture artérielle, dissection, perforation et rupture vasculaire. Cet élément devra donc être méticuleusement évalué. Le scanner est l’examen de choix pour cette évaluation, par les coupes millimétriques qu’il permet, à la recherche de calcifications concentriques et circonférentielles (figure 3). Figure 3. Analyse des diamètres, tortuosités et calcifications par scanner en coupes et reconstruction 3D. Critères de non-faisabilité d’une voie transfémorale Plusieurs éléments péjoratifs, souvent combinés, élimineront un abord fémoral en raison du risque de complication vasculaire : – diamètre artériel fémoral ou iliaque < 6 mm, – calcifications ilio-fémorales extensives et surtout circonférentielles, – tortuosités ilio-fémorales extrêmes non rectifiables par un guide rigide, – angulation importante ou sténose significative de l’aorte abdominale terminale, – anévrysme de l’aorte abdominale à haut risque emboligène, – obésité morbide (contre-indication relative).   Voies d’abord alternatives Une voie d’abord alternative sera envisagée lorsque l’une des contre-indications classiques à la voie transfémorale est rencontrée (figure 4). Figure 4. Voies d’abord envisageables pour une valve aortique percutanée. Voie transapicale La voie transapicale est réservée à la prothèse ESXT. La taille d’anneau aortique compatible devra ainsi être comprise entre 18 et 25 mm. Cependant, une prothèse de 29 mm sera prochainement disponible afin de traiter des anneaux de diamètre allant jusqu’à 27 mm. L’échocardiographie permettra d’évaluer précisément le diamètre annulaire aortique. D’autres paramètres seront intégrés à la décision de faisabilité d’une voie transapicale : la fonction systolique ventriculaire gauche et la fonction respiratoire. On estime à 5-10 % la perte de fraction d’éjection ventriculaire gauche après abord apical. Une dysfonction systolique ventriculaire gauche sévère pourra ainsi représenter une contre-indication à cette voie. La fonction respiratoire sera également évaluée : une BPCO évoluée ou un syndrome restrictif sévère pourront contre-indiquer une voie transapicale.   Voie sous-clavière Cette voie est pour l’instant réservée à la prothèse MCV et nécessitera donc une taille d’anneau aortique comprise entre 20 et 27 mm. Le diamètre sous-clavier, les tortuosités et calcifications seront soigneusement évalués par angiographie mais surtout par scanner. Une attention particulière sera portée à la présence de pontages mammaires internes dont l’ostium pourra être obstrué pendant la procédure, générant une ischémie délétère. Les principales contre-indications à la voie sous-clavière sont les suivantes : – diamètre des artères sous-clavières inférieur à 6 mm, – calcifications et/ou tortuosités importantes des artères sous-clavières, – présence d’un pontage mammaire interne avec artère sous-clavière de moins de 7 mm de diamètre.   Voies émergentes La voie transcarotidienne est une nouvelle  approche décrite pour l’implantation de prothèse MCV(8). La voie transaortique directe,  a fait l’objet de récentes communications. Elle est envisageable pour les deux types de prothèses, par un abord chirurgical au niveau du 2e espace intercostal droit. Elle peut être envisagée en cas de contre-indication aux voies transapicale et sous-clavière.   En pratique   Le choix de la voie d’abord avant valve aortique percutanée a un impact direct sur le succès de procédure. La minimisation du risque de complications liées à la voie d’abord sera au centre de la décision car ce type de complications est associé à une surmortalité à 30 jours. L’angiographie invasive et le scanner en coupes sont les examens de choix à combiner pour décider de l’abord. La faisabilité de la voie transfémorale sera évaluée en premier lieu. Il est nécessaire d’avoir à sa disposition au moins une voie alternative, lorsque la voie fémorale est contre-indiquée ou estimée à haut risque de complications vasculaires. La décision finale quant à la voie d’abord sera prise après concertation pluridisciplinaire.

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