Mise au point
Publié le 19 déc 2023Lecture 4 min
Évaluation du risque de mort subite chez les jeunes athlètes
La mort subite (MS) d’un jeune athlète est toujours un événement tragique. C’est l’une des premières causes de mortalité dans cette population. Les statistiques disponibles sur la fréquence des décès sont généralement établies à partir de populations et de circonstances très différentes. Ce risque est de 0,5/100 000 chez des adolescents pour Maron(1) et 2,3/100 000 pour Corrado(2). Ces chiffres, interprétés en fonction de la population prise pour référence, montrent que chez des sujets jeunes, le risque de MS chez des sportifs serait 2,5 à 2,8 fois plus élevé que pour des non-sportifs de même âge(2,3).
Dépistage préalable
Il n’existe pas de consensus sur la question de savoir si le dépistage est nécessaire, sur ce qui devrait être inclus dans ce dépistage, à partir de quel âge le réaliser et à quelle fréquence le répéter. Il existe une grande variabilité selon les pays, les instances dirigeantes du sport et le niveau de compétition. Le dépistage préalable (DP) à la pratique d’un sport est recommandé par l’American Heart Association (AHA)(4), la Société européenne de cardiologie (ESC)(5), le Comité international olympique(6) et la plupart des associations médicales et des fédérations sportives du monde entier. Ce dépistage comprend un examen clinique avec une anamnèse détaillée. L’ESC recommande d’y associer un électrocardiogramme à 12 dérivations (ECG) systématique alors que l’AHA ne le recommande pas.
Corrado et coll.(7) ont montré que la mise en place d’un programme obligatoire de dépistage avec un l’ECG entraînait une diminution significative de l’incidence de la MS. Cependant, certains auteurs ne recommandent pas l’ECG en raison du taux de faux positif. Des recommandations internationales ont été éditées pour diminuer de façon importante ces faux positifs avec une bonne spécificité : rigueur dans le placement des électrodes et algorithme décisionnel en fonction des signes retrouvés sur l’ECG(11) (figure).
Figure. ECG du sportif.
Cependant, le protocole optimal du DP fait encore débat : faut-il inclure l’ECG ? À partir de quel âge ? Faut-il répéter le bilan et si oui à quelle fréquence ? Quelle décision prendre chez les athlètes asymptomatiques diagnostiqués avec une maladie cardiovasculaire à risque ? Une étude vient d’être publiée pour tenter de répondre à ces questions(12).
Cette étude évalue les résultats du programme italien de DP, l’un des plus complets puisqu’il comprend un questionnaire sur les antécédents personnels et familiaux, un examen clinique, un ECG au repos et un test d’effort. Il concerne une large population d’enfants (âgés de 7 à 18 ans). Le DP démarre au début de l’activité sportive (même dans la petite enfance), et est répété chaque année. Il entraîne la non-éligibilité à l’activité sportive de compétition quand une maladie cardiovasculaire à risque de MS est diagnostiquée.
Des antécédents familiaux de MS, de cardiomyopathie, de syndrome de Marfan, de syndrome du QT long, de syndrome de Brugada ou d’autres maladies cardiovasculaires héréditaires chez les membres de la famille du premier ou du deuxième degré sont considérés comme significatifs et justifient une évaluation plus approfondie.
Les antécédents personnels sont considérés comme positifs si le sujet ressent des douleurs ou une gêne thoracique lors d’un effort, une syncope ou une quasi-syncope, des palpitations, un essoufflement ou une fatigue anormale. Les ECG ont été interprétés suivant les recommandations internationales(11). Un test d’effort abrupt rectangulaire a été utilisé pour dépister les arythmies ventriculaires déclenchées par l’effort.
Parmi 22 324 enfants qui ont eu en moyenne 2,9 DP, une maladie cardiaque susceptible d’entraîner une MS a été diagnostiquée chez 69 d’entre eux (0,3 %). Le diagnostic a été de 0,12 % au cours de la première évaluation et de 0,1 % aux suivantes ; 0,05 % des enfants ont entre 7 et 11 ans, et 0,12 % entre 12 et 18 ans. Pendant le suivi de 7,5 ± 3,7 ans, un enfant, qui avait un bilan normal, a eu un arrêt cardiaque récupéré au cours d’un entraînement. Moins d’un tiers des athlètes ont été diagnostiqués en raison d’antécédents familiaux positifs, de symptômes ou d’un examen physique anormal, tandis que les diagnostics restants l’ont été par des anomalies sur l’ECG au repos ou lors du test d’effort.
Une étude précédente sur les résultats du DP chez 11 168 joueurs de football anglais, basée sur une seule évaluation cardiovasculaire à l’âge de 16 ans, a rapporté une incidence de MS lors d’un suivi à long terme de 6,8/100 000 athlètes par an. Cinq sur huit des victimes de MS sont décédées à cause de cardiomyopathies non détectées au moment de l’évaluation unique. Ces données ont soulevé la crainte qu’une seule DP puisse potentiellement négliger des maladies génétiques à apparition phénotypique tardive ou des affections nouvellement acquises. L’étude de Sarto et coll. montre l’efficacité d’un dépistage répété, 9 athlètes sur les 13 diagnostiqués avec des cardiomyopathies l’ont été lors de l’évaluation répétée. Après trois séances de dépistage annuelles en moyenne, le nombre d’athlètes ayant reçu un diagnostic de maladie à risque a augmenté de près des deux tiers (de 25 à 69) par rapport à l’évaluation initiale. Les résultats de l’étude suggèrent que le programme italien commençant à un âge variable de 7 à 14 ans pourrait permettre un dépistage plus précoce. En effet, 74 % ont été détectés chez des enfants de moins de 16 ans. Cela indique qu’un retard de la première évaluation préalable à la participation à l’âge de 16 ans peut exposer une population importante de jeunes enfants encore non dépistés au risque de MS liée au sport en raison de maladies cardiaques inconnues.
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