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Publié le 31 mai 2014Lecture 10 min

EuroPCR 2014 : le rendez-vous interventionnel européen

S. MANZO-SILBERMAN, Hôpital Lariboisière, Paris

En mai, Paris est le centre de rendez-vous incontournables, historiquement le tournoi de Roland Garros et depuis 2010, l’EuroPCR : les rencontres officielles de l’European Association of Percutaneous Cardiovascular Interventions (EAPCI). Cette édition 2014 (20 au 24 mai) a rassemblé 12 257 participants. 

Lors de l’ouverture du congrès, William Wijns et Jean Fajadet ont présenté les nouveaux outils pédagogiques mis à disposition de la « communauté PCR ». Ils ont rappelé ainsi les fondamentaux de la philosophie de ce congrès insufflés par le Pr Jean Marco : partager et transmettre à tous les cardiologues interventionnels l’ensemble des ressources actualisées de notre discipline. Il s’agit non seulement de présenter les derniers résultats des grandes études cliniques et les innovations techniques, mais également de développer des outils pédagogiques afin d’optimiser nos pratiques et ainsi offrir à nos patients des soins individualisés de la plus haute qualité. Outre les documents habituels (revue EuroIntervention [facteur d’impact : 3,17], PCR Trials book, textbook PCREAPCI [25 chapitres mis à jour] et Atlas OCT), viennent s’ajouter PCR pipeline, PCR edu online et PCR online. PCR online est une application unique qui permet d’accéder à l'information et aux médias sur les étapes nécessaires pour effectuer une procédure particulière avec des liens vers les références bibliographiques pertinentes. Cet objectif de pédagogie a également été suivi dans l’élaboration du programme avec de nombreuses sessions interactives, spécifiquement dédiées aux plus jeunes de nos collègues avec des formats originaux encourageant la participation et le partage d’expérience autour de thématiques de notre pratique quotidienne : gestion des antithrombotiques, influence sur nos décisions des résultats des grandes études comme PRAMI(1) ou TASTE, stratification du risque, modalités de revascularisation, etc. Au centre d’EuroPCR figurent bien évidemment les live sessions, commentaires et discutions avec le public à propos de procédures coronaires, structurelles et périphériques complexes, ainsi que les sessions dédiées aux complications de procédures organisées par les Sociétés de cardiologie de différents pays (nous ne pouvons les retranscrire dans ce compte rendu). Ce résumé rapporte une sélection des principaux résultats présentés lors du congrès, notamment dans le domaine des coronaires. Revascularisation myocardique en 2014 : les recommandations en avant-première Les nouvelles recommandations sur la revascularisation myocardique seront officiellement présentées à l’ESC à Barcelone en août prochain, mais leurs principales lignes ont été dévoilées – sous réserve de modifications –, par les membres du groupe de travail associant chirurgiens cardiothoraciques, cardiologues non interventionnels et interventionnels soulignant la collaboration nécessaire entre chirurgiens cardiaques et cardiologues. Ont été présenté les points clés des chapitres traitant du patient stable, du patient diabétique et du traitement antithrombotique. Le patient stable Afin de simplifier le travail des équipes, le nouveau texte recommande chez ce type de patient, l’élaboration de protocoles locaux définissant en fonction des caractéristiques des lésions, des stratégies de revascularisation afin de permettre notamment un traitement ad hoc sans mobiliser systématiquement l’ensemble de l’équipe. Il faut noter que pour la revascularisation des lésions du tronc commun isolé, l’angioplastie et le pontage se partagent le niveau IB. Le patient diabétique Chez le patient diabétique tritronculaire, les résultats de FREEDOM(3) et de SYNTAX(4) à 5 ans, font privilégier la revascularisation chirurgicale par greffons mammaires, dès que le score Syntax dépasse 22. Antiagrégants plaquettaires et anticoagulants Concernant le traitement antiagrégant plaquettaire, au vu des résultats des études EXCELLENT(5) et PRODIGY(6), la bithérapie antiplaquettaire (DAPT) après implantation de DES a été révisée à 6 mois. Toutefois, chez les patients à risque ischémique élevé et à faible risque de saignements elle pourra être prolongée de plus de 6 mois avec une recommandation de classe C. Pour l’angioplastie primaire, les résultats de HEAT-PPCI ont d’ores et déjà modifié le niveau de recommandation de la bivalirudine. Les résultats de l’étude WOEST(7) ont participé à l’établissement d’un algorithme simple pour aider au choix des associations et des durées de traitement par antiagrégants et anticoagulants. Ces recommandations sont une toute nouvelle addition à la ligne directrice et elles devraient permettre de clarifier l'approche à adopter des cardiologues lorsqu'ils sont confrontés à cette situation délicate.   Après le coup porté à l’ACC par la présentation des résultats de HEAT-PPCI, une analyse spécifique a été réalisée par les auteurs de EUROMAX(8). Uwe Zeymer a montré que même lorsque les anti-GPIIb/IIIa (GPI) n’étaient pas utilisés en routine (460 patients), la bivalirudine (1 047 patients) conservait sa supériorité avec un taux inférieur de décès et de saignements majeurs comparé à l’héparine. À 30 jours, ce taux était de 5,1 % pour la bivalirudine, de 9,8 % pour le groupe héparine seule (GPI en bail out ; p = 0,0006) et, dans la population héparine/ routine GPI, il était de 7,4 % (p = 0,0425). Il faut noter toutefois un taux de GPI en bail out de 27,4 % dans le groupe héparine et de 7,9 % pour la bivalirudine. Cependant, le signal sur la thrombose de stent s’est confirmé avec un taux triple pour le groupe bivalirudine : 1,6 % vs 0,4 % (p = 0,09). Dans le travail intégrant les données de 5 études incluant un total de 300 patients STEMI traités par morphine pour 95 d’entre eux, Guido Parodi a confirmé les résultats qu’il avait obtenu dans l’étude RAPID(9) publiée en 2013. Ainsi la morphine, puissant antalgique (recommandation IC dans l’infarctus à la phase aiguë), diminue et retarde l’effet du ticagrélor et du prasugrel, de manière significative de 2 à 4 heures. En fonction de l’administration ou non de morphine à la prise en charge, les taux de patients avec une réactivité plaquettaire résiduelle élevée (HPPR) diffèrent de manière significative jusqu’à 8 heures après la dose de charge. Ces résultats soulignent la problématique du traitement adjuvant et de la place, notamment des GPI, durant ce laps de temps où le patient n’est pas protégé. OCTAVIA   STEMI chez l’homme ou la femme : mêmes plaques, mêmes ruptures, mêmes thrombi, mêmes résultats du stent. L’étude Optical Coherence Tomography Assessment of gender diversity In primary Angioplasty dirigée par Giulio Guagliumi a été présentée lors de la session d’ouverture des Late-breaking clinical- trials. Il s’agit d’une étude comparant pour la première fois chez l’homme et la femme la physiopathologie de l’infarctus avec sus-décalage du segment ST (STEMI), notamment au moyen de l’imagerie endocoronaire par OCT et de l’analyse des thrombus. Elle évalue également la réponse à l’angioplastie primaire avec implantation de stent actif à l’évérolimus (EES). Les critères primaires étaient le pourcentage de rupture de plaque sur la lésion coupable et le pourcentage de couverture de maille 9 mois après implantation d’un stent EES. L’OCT était réalisée après la thromboaspiration, après l’implantation du stent et à 9 mois. Dans 14 centres italiens, l’étude a inclus 140 hommes et femmes appariés sur l’âge présentant un STEMI de moins de 6 heures. Les différences ne concernaient que l’IMC, le diamètre de référence de l’artère traitée (2,78 ± 0,49 chez les hommes vs 2,48 ± 0,49 chez les femmes), un moindre taux d’abord radial, et une diminution des GPI utilisés. L’analyse OCT retrouve des taux semblables d’érosion (25 %) et de rupture de plaque dans la moitié des cas ; il faut noter que 25 % des lésions coupables n’ont pu être classées dans les 2 sexes. L’analyse histopathologique des thrombi ne montre pas de différences. À prise en charge identique, l’évolution est aussi superposable à 9 mois et 2 ans avec notamment des résultats angiographiques et d’OCT semblables.   CENTURY II Ultimaster™ non inférieur au XIENCE L’étude randomisée prospective CENTURY II(10) réalisée sur plus de 1 000 patients a comparé le stent actif à polymère biorésorable Ultimaster™ (Terumo) au XIENCE (Abbott Vascular) et a mis en évidence une efficacité et une sécurité superposables au sein d’une population à haut risque : diabétiques et pluritronculaires. Effectivement à 9 mois, le taux d’absence d’échec sur la lésion cible, avec un critère combiné associant décès cardiovasculaire, IDM sur la lésion cible et revascularisation guidée par de l’ischémie, était de 95,64 % versus 95,09 %. Les taux d’événements sont très bas dans les deux groupes, le bénéfice du polymère biorésorbable devrait être encore plus patent au-delà de cette période comme l’a souligné le coinvestigateur William Wijns. Études APPOSITION Stents autoexpandables et actifs : le 2 en 1 de l’angioplastie primaire ? L’apposition incomplète des mailles du stent (ISA, incomplete stent apposition) est plus fréquente en cas de syndrome coronaire aigu (SCA) que dans l’angor stable et en cas d’implantation d’un stent actif. Une des causes de la thrombose aiguë de stent après angioplastie primaire est l’ISA, en raison d’une vasodilatation secondaire et de la résorption de la masse thrombotique. L’étude APPOSITION IV a cherché à apporter une solution à ce problème en comparant le stent autoexpandable coaté au sirolimus (STENTYS) au stent actif avec ballon expandable coaté au zotarolimus Resolute (Medtronic). L’étude de sécurité APPOSITION I(11) portant sur 25 patients avait montré une variation de 19 % du diamètre de référence en 72 h. APPOSITION II(12) avait mis en évidence une réduction d’un facteur 10 de la malapposition avec les STENTYS comparativement au stent nu. À l’aide d’une imagerie par OCT, APPOSITION IV, montre après 4 mois, un pourcentage de struts non couverts significativement réduit dans le groupe STENTYS, différence qui n’est plus retrouvée à 9 mois. Ce résultat pourrait permettre de raccourcir la durée nécessaire de bithérapie antiagrégante (DAPT). De plus, les calibres artériels diffèrent significativement, avec des lumières plus larges à 4 et 9 mois, avec le STENTYS DES sans augmentation de la surface du stent entre 4 et 9 mois. Le STENTYS réduit le pourcentage de struts mal apposés de 1,16 à 0,07 % et les événements cardiovasculaires majeurs ne diffèrent pas à 9 mois. Pondérant le bénéfice sur la durée du DAPT, il faut souligner le recours dans 90 % des cas à la postdilatation après implantation d’un STENTYS. POST-IT : la FFR pourrait modifier près de la moitié de nos décisions thérapeutiques   Alors qu’en France, l’acte FFR n’est pas (encore) codifié, le registre national portugais POST-IT, présenté par Sergio Baptista, pose la question de l’influence de la FFR sur la modification du choix de traitement au sein d’une population « tout venant » de 918 patients. L’impact sur la réduction des événements cardiovasculaires majeurs sera disponible fin 2014. Chez 55,7 % des patients, le traitement effectivement réalisé correspondait à celui prévu lors de la coronarographie diagnostique. Chez les 44,3 % restants, la FFR a modifié le traitement planifié : - un traitement médical était envisagé chez 361 patients : après FFR, 23 % d’entre-eux vont être dilatés et 4 % pontés ; - un test d’ischémie était prévu chez 202 patients : 40 % vont être dilatés, 13 % pontés ; - 319 patients devaient être dilatés : 72 % le seront, 3 % seront pontés et 25 % traités médicalement ; - enfin, sur les 36 patients adressés pour un pontage, 19 % seront dilatés et 25 % traités médicalement.   Ainsi, la réalisation de la FFR ne réduit pas le volume global d’angioplastie, mais nous aide à mieux traiter les lésions et les patients. Dénervation rénale : ne l’enterrons pas en toute symplicité En dépit des résultats négatifs de la seule étude randomisée de grande ampleur, l’intérêt pour cette technique innovante ne faiblit pas. Ainsi, plus de 60 sessions y étaient consacrées : sessions live, nouveaux résultats, sessions didactiques ainsi qu’espaces de training aménagés par les compagnies St. Jude Medical et Medtronic. Les interrogations persistent sur l’échec du critère d’efficacité de SYMPLICITY HTN-3(13) alors que les études de phase 1 et 2 tout comme les registres retrouvaient un effet bénéfique. Une relecture complète a été proposée avec le Resistant Hypertension Course autour de Felix Mahfoud tant pour les aspects physiopathologiques du système nerveux sympathique, les technologies actuelles de dénervation que les données disponibles à ce jour, en particulier sur l’hypertension. Les analyses préspécifiées et post-hoc ont retrouvé des facteurs confondants comme des changements de médicaments antihypertenseurs, des modifications de la population d’étude comparée aux travaux préliminaires et surtout des variabilités de procédures. Une conclusion unanime et claire ressort de l’ensemble de ces sessions : le système nerveux sympathique est plus complexe qu’il n’y paraissait, et la juste sélection des patients est cruciale. SAPIEN 3 : feux vert pour la valve Edwards Lifescience nouvelle génération  Les résultats de ce registre prospectif multicentrique évaluant le nouveau dispositif de valve aortique ont été présentés. Cette nouvelle valve se caractérise notamment par un profil amélioré, de larges cellules pour faciliter l’accès au coronaires et un système de délivrance optimisé avec notamment le Commander compatible 14 F. Parmi les 150 patients inclus dans 16 centres, 50 étaient à haut risque (score STS » 8 ou logistic EuroSCORE » 15) et 100 à risque intermédiaire défini par un score STS entre 4 et 8 ou un logistic EuroSCORE entre 10 et 15. L’implantation a été réalisée pour 96 patients par voie fémorale (TF) et 54 par voie trans-apicale ou transaortique (TAA). La mortalité toutes causes à 30 jours a été de 4,7 % (TF : 1,1 % vs TAA : 11,1 %). Le taux d’AVC était à 2,7 % (TF : 1 % vs TAA : 5,6 %) et les complications vasculaires majeures de 6 % (TF : 5,2 % vs TAA : 7,4 %). Il faut noter le très faible taux de fuite paraprothétique : il n’y a eu aucune fuite sévère et aucune implantation de valve-in-valve n’a été nécessaire. Ces résultats montrent une fiabilité et un faible taux d’événements secondaires ouvrant ainsi les indications aux patients à risque intermédiaire.

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