Publié le 28 fév 2010Lecture 5 min
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
E. BLICK, O. BAR, S. CHASSAING, Clinique Saint-Gatien, Tours
Monsieur F. âgé de 58 ans a comme facteurs de risque cardiovasculaires une hypertension artérielle et une dyslipidémie. Il présente comme principal antécédent cardiaque une angioplastie de l’IVA et d’une troisième marginale avec implantation de stent actif en 2008.
Il est réhospitalisé pour une récidive d’angor avec une scintigraphie myocardique réalisée en externe objectivant une ischémie latérale.
Cas clinique
La coronarographie de contrôle effectuée par voie radiale gauche 4 F révèle l’absence de resténose sur l’IVA moyenne au niveau du site d’implantation du stent actif, une sténose sub-occlusive de l’artère circonflexe proximale, une resténose estimée à 50 % de la troisième marginale et une occlusion de l’artère coronaire droite proximale (figure 1).
Figure 1. Sténose très serrée de la circonflexe proximale.
Il est décidé de réaliser dans un second temps une angioplastie de l’artère circonflexe proximale. Celle-ci est réalisée toujours par voie radiale gauche avec introducteur 6 F en utilisant comme sonde porteuse une XB 3,5 6 F (Cordis). Un guide ASAHI Prowater® 0,014 (Abbott) est positionné, une prédilatation au ballon Maverick 2 (Boston) 1,5 x 15 est réalisée puis un stent nu NUMEN (IBS) 3,5 x 16 est ensuite implanté au niveau de la lésion avec un bon résultat (figure 2).
Figure 2. Résultat après angioplastie et stent.
Malheureusement, la procédure qui semble terminée va prendre une tournure inattendue.
Une résistance est constatée lors du retrait du cathéter guide. Sur le contrôle graphique, celui-ci présente une plicature de son extrémité distale le bloquant par l’angulation qu’il constitue dans la sous-clavière gauche (figure 3). Les tentatives de rotation ne permettent pas de lever la plicature.
Figure 3. Plicature de l’extrémité distale du cathéter guide dans la sous-clavière. Guide 0,35 dans la partie proximale de l’artère sous-clavière (abord fémoral droit).
Par un abord fémoral droit, un lasso est amené au contact permettant de saisir l’extrémité du cathéter guide (figure 4). Le lasso refermé sur le cathéter, la plicature est levée par traction et rotation permettant d’aligner le cathéter (figure 5) qui pourra alors être retiré par voie radiale gauche.
Figure 4. Lasso enlaçant l’extrémité distale du cathéter guide.
Figure 5. Lasso permettant par traction de réaligner la sonde avec persistance d’une probable vrille en regard de la plicature initiale.
La procédure se termine par un contrôle angiographique de l’artère axillaire gauche qui ne montre ni dissection ni effraction (figures 6 et 7).
Figure 6. Contrôle angiographique par voie antérograde.
Figure 7. Contrôle angiographique par voie rétrograde.
Les leçons à tirer de ce cas
Ce cas clinique montre bien qu’aucune angioplastie n’est totalement anodine et que même les procédures qui paraissent les plus simples ne doivent pas nous dédouaner d’une constante rigueur dans chacun de nos gestes.
Les plicatures de sondes étaient plus fréquentes lors de l’utilisation systématique de la voie fémorale. Elles étaient observées principalement chez les patients présentant des boucles calcifiées au niveau de l’axe iliofémoral et s’observaient plus volontiers avec les sondes diagnostiques 4 F… et avec les opérateurs les moins expérimentés qui faisaient faire plusieurs rotations à leur sonde notamment lors du cathétérisme de la coronaire droite.
La gestion de ces plicatures était souvent difficile car l’angulation formée au niveau même de celle-ci gênait voire empêchait le retrait du matériel, soit parce qu’elle la bloquait dans l’artère calcifiée et tortueuse, soit parce que le désilet de fait devenait trop étroit pour en accepter le retrait.
Commençait alors une opération de « déplicature » délicate qui consistait en général à appliquer à la sonde un mouvement de rotation inverse à ceux précédemment effectués (d’où le dogme de toujours faire tourner la sonde dans le même sens).
Les plus chanceux ou les plus expérimentés réussissaient alors à réaligner la sonde et idéalement à refaire passer un guide à l’intérieur (sans jamais forcer au risque de perforer la sonde).
Les autres composaient piteusement le numéro du chirurgien…
Par voie radiale, cette complication est moins fréquente mais loin d’être exceptionnelle comme le montre ce cas clinique. Les angulations également calcifiées de la sous-clavière gauche et plus encore du tronc artériel brachiocéphalique se prêtent facilement aux plicatures. On peut facilement imaginer que les conséquences sont plus redoutables car ces plicatures sont situées au contact des troncs supra-aortiques et l’éloignement du désilet rend le geste de « déplicature » plus délicat. Par ailleurs le trajet « retour » à travers la radiale est incontestablement plus étroit et oblige à un réalignement parfait de la sonde. Enfin, l’abord chirurgical est infiniment plus complexe et les ruptures de cathéter guide et embolisation de l’extrémité distale peuvent être catastrophiques.
Pour éviter ce genre de déconvenue, des règles de prudence s’imposent
Préférer le retrait des cathéters sur un guide.
Surveiller la pression lors des manœuvres de torque répétées.
Torquer les sondes diagnostiques ou thérapeutiques avec un guide laissé en place, notamment en cas de boucles importantes au niveau de la sous-clavière, de l’humérale ou de la radiale.
En l’absence de guide dans la sonde, s’en tenir à un seul sens pour le torque, ce qui permet en général de la déplicaturer plus facilement.
Contrôler en scopie en cas de résistance lors du retrait de matériel.
Ne jamais forcer lors du retrait sans comprendre le mécanisme de la résistance.
Avoir à disposition quelques lassos à utiliser habituellement pour aller chercher des « cathés » rompus de chimio.
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