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Publié le 31 mai 2009Lecture 14 min
Quoi de neuf en cardiologie interventionnelle à l’ACC 2009 ? (Orlando, États-Unis)
G. LEMESLE, service de cardiologie B et Centre Hémodynamique, Hôpital Cardiologique, CHRU de Lille et Faculté de Médecine, Université de Lille II
Les congrès de l’ACC et et de l’I2 Summit se sont déroulés à Orlando en mars dernier. Cette édition 2009 a été marquée par les nouvelles données de l’étude HORIZONS-AMI sur les thromboses de stent, les résultats des différentes études sur le meilleur « timing » pour instaurer les inhibiteurs du récepteur GpIIb/IIIa en cas de syndrome coronaire aigu (SCA), les résultats des études sur les statines (notamment l’étude de prévention primaire, JUPITER) et, enfin, par les résultats de l’étude ABOARD testant l’intérêt d’une attitude de type « angioplastie primaire » pour la prise en charge des SCA sans sus-décalage du segment ST.
L’étude PROTECT-AF : un nouveau système pour éviter les AVC dans la fibrillation auriculaire
David Holmes a présenté les résultats de l’étude randomisée PROTECT-AF (Embolic Protection in Patients with Atrial Fibrillation), qui avait pour but d’évaluer l’efficacité du système WATCHMAN, cage autoexpansible en nitinol, pour prévenir la formation de thrombus dans l’auricule gauche des patients en fibrillation auriculaire pouvant conduire à la survenue d’accidents vasculaires cérébraux (AVC).
Dans cette étude ayant inclus 800 patients en fibrillation auriculaire non valvulaire, les patients traités par le système WATCHMAN étaient traités par warfarine pendant 45 jours après l’implantation. Le traitement anticoagulant était secondairement stoppé dans ce groupe.
Ce travail a montré, que comparé au traitement anticoagulant standard par warfarine, le système WATCHMAN permet de réduire le risque d’AVC hémorragiques à 1 an : 1 patient vs 6 patients. Cette étude a par ailleurs montré que le système WATCHMAN était non inférieur au traitement par warfarine sur les critères AVC toutes causes et décès toutes causes. Enfin, il faut noter que le critère composite de sécurité était plus important dans le groupe ayant eu le système WATCHMAN, principalement lié à un taux plus important d’effusions péricardiques.
Toutefois, l’auteur précise que ces événements ont diminué au cours de l’étude grâce à l’amélioration du système et à l’expérience grandissante des différentes équipes implantatrices.
D. Holmes conclue donc que le système WATCHMAN est une alternative efficace et sûre au traitement par warfarine chez les patients en fibrillation auriculaire non valvulaire à risque d’AVC.
L’étude SYNTAX revisitée : le rapport coût/bénéfice et qualité de vie
L’étude randomisée SYNTAX, ayant inclus 1 800 patients coronariens multitronculaires, a récemment montré que la prise en charge chirurgicale de ce type de patients permettait de diminuer le nombre de revascularisations à 1 an par rapport à l’angioplastie avec implantation de stents actifs Taxus®.
En revanche, l’approche chirurgicale était grevée d’un taux plus important d’accidents vasculaires cérébraux. À noter enfin que les deux techniques étaient similaires sur le critère composite décès-infarctus du myocarde.
Cette nouvelle analyse montre que le rapport coût/bénéfice et les paramètres de qualité de vie à 1 an sont en faveur de lʼapproche chirurgicale pour les patients avec les lésions les plus complexes (score Syntax élevé, 3e tertile). Toutefois, ces mêmes paramètres sont en faveur dʼune approche percutanée chez les patients présentant des lésions moins complexes (score Syntax bas, 1er et 2e tertiles).
Stents actifs : registre NCDR, études GENIUSSTEMI et ZEST
Le registre NCDR (National Cardiovascular Data Registry) a inclus 262 700 patients de plus de 65 ans stentés soit avec un stent nu soit avec un stent actif entre 2004 et 2006 aux États-Unis. Dans ce registre, 85 % des patients ont été traités par stents actifs, essentiellement Taxus® et Cypher®. De nombreuses différences pouvaient logiquement être notées entre les deux groupes de ce registre, les patients traités par stents nus étant plus sévères.
Après ajustement sur 102 paramètres (compte tenu des nombreuses différences entre les 2 groupes), les résultats ont montré une réduction de 25 % du taux de mortalité et de 24 % du taux d’infarctus du myocarde dans le groupe stent actif par rapport au groupe stent nu après un suivi de 30 mois. De plus, les taux de revascularisations et de saignements étaient eux aussi plus bas dans le groupe stent actif.
L’auteur a donc conclu que, malgré les limites de ce registre, les résultats de cette analyse sont rassurants pour les stents actifs.
L’étude randomisée GENIUSSTEMI (Randomized Comparison of Genous Stent vs. Chromium-Cobalt Stent for Treatment of STEMI) a inclus 100 patients. Le stent Genous™ est un stent coaté avec un anticorps monoclonal murin anti-CD34 humain permettant de fixer les progéniteurs endothéliaux circulants. Dans cette étude, le taux de MACE (décès cardiovasculaire, infarctus du myocarde et revascularisation) était supérieur dans le groupe Genous™ stent (24 % vs 10 %) à 6 mois, principalement lié à un taux de revascularisation supérieur.
Par ailleurs, l’étude IVUS montre une prolifération tissulaire plus importante, bien que non significative, dans le groupe Genous™ stent. Enfin, on notait 3 cas de thromboses de stent tardives dans le groupe Genous™ stent versus aucun dans le groupe témoin. Ces résultats doivent toutefois être interprétés avec précaution en raison de la petite taille de cette étude et de son manque de puissance.
L’étude randomisée ZEST (Zotarolimus Eluting Stent Versus Sirolimus Eluting Stent and Paclitaxel Eluting Stent for Coronary lesions) est un essai de non-infériorité ayant inclus 2 640 patients et comparant le stent actif de seconde génération (ZES) aux stents actifs de première génération (PES et SES).
Les résultats de ce travail montrent que les taux de MACE (décès, infarctus du myocarde, revascularisation du vaisseau cible) à 1 an étaient identiques dans le groupe ZES (10,1 %) et dans le groupe SES (8,3%) mais étaient significativement supérieurs dans le groupe PES (14,2 %). Cette différence était essentiellement liée à un taux plus élevé de revascularisations : 5,2 % dans le groupe PES vs 1,7 % dans le groupe SES et 1,9 % dans le groupe ZES. Par ailleurs, le taux de thromboses de stent documentées (définition de l’ARC) dans le groupe ZES (0,5 %) était identique à celui reporté dans le groupe PES (0,7 %). Le taux de thromboses de stent était inférieur dans le groupe SES (0 %) comparé aux deux autres groupes. Toutefois, l’absence de données sur le taux de thromboses très tardives (au-delà de 1 an) ne permet pas de conclusions définitives sur ce critère.
Facteurs de risque de thrombose de stent : analyse post-hoc d’HORIZONS-AMI
Parmi les 3 202 patients de l'étude, 107 thromboses de stents ont été observées à 1 an dans cette étude ; soit un taux global de 3,4 %. Ce taux est très supérieur à celui habituellement décrit pour les populations de patients non sélectionnés en postangioplastie. Ce chiffre vient donc rappeler que l’infarctus du myocarde avec sus-décalage du segment ST est un facteur de risque majeur de thrombose de stent.
Globalement, dans les registres, 60 à 80 % des thromboses de stents surviennent sur des lésions stentées lors d’un infarctus du myocarde. Plus précisément, il a été observé, dans la présente étude, 0,9 % de thromboses de stents aiguës (moins de 24 h), 1,6 % de subaiguës (1 à 30 jours) et 1 % de tardives (1 à 12 mois après implantation du stent).
Le taux de thrombose de stents à 1 an ne différait pas chez les patients implantés d'un stent nu ou actif (résultats présentés dans l’analyse initiale de cette étude). Il n'était pas, non plus, significativement différent entre les groupes « bivalirudine » et « héparine + anti-GpIIb/IIIa » à 1 an (3,6 % vs 3,2 %, respectivement ; p = NS). L'analyse a mis en évidence plusieurs facteurs de risque indépendants de thromboses de stent à 1 an : le tabac, le diabète insulinotraité, le nombre de stents implantés, une lésion cible ulcérée, un mauvais flux TIMI dans l'artère impliquée dans l'infarctus à la coronarographie initiale (flux TIMI 0-1). À l'inverse, le recours à une dose de charge élevée de clopidogrel (600 mg) constituait un facteur protecteur vis-à-vis du risque de thrombose de stents.
À noter que, dans cette étude, le taux de thromboses de stent aiguës (moins de 24 h) était significativement supérieur dans le groupe « bivalirudine » (1,5 % vs 0,3 % ; p = 0,0002) en raison d’un taux d’événements supérieur dans les 5 premières heures suivant le geste. Toutefois, l’association d’une dose de charge de 600 mg de clopidogrel et l’administration précoce d’un bolus d’héparine avant randomisation permettaient de diminuer de façon très significative ce risque de thromboses de stent aiguës dans le groupe « bivalirudine ».
Cette analyse vient donc confirmer qu'une dose de charge dʼau minimum 600 mg de clopidogrel s'impose dans ce contexte dʼangioplastie primaire. En effet, la pharmacocinétique de l’antiagrégation plaquettaire des toutes premières heures est très importante. Or à 600 mg, l'activité antiagrégante débute dans les 3 à 4 h suivant la dose de charge ; à 300 mg, il faut attendre 6 à 7 h. Ce qui amène la question de l’utilisation à l’avenir du prasugrel encore plus rapidement actif, dès la 2e heure.
Études ON-TIME-2, AGIR-2 et EARLY-ACS : quel timing pour les inhibiteurs du récepteur GpIIb/IIIa ?
L’étude randomisée ONTIME- 2 (Ongoing Tirofiban In Myocardial Infarction Evaluation), incluant au total 1 398 patients présentant un infarctus du myocarde (IDM) avec sus-décalage du segment ST, a comporté deux phases d’inclusion, une première (2004- 2006) en ouvert (n = 414), une seconde (2006-2007) en double aveugle (n = 984).
Les patients étaient randomisés en préhospitalier (dans l'ambulance) entre un groupe recevant du tirofiban (bolus de 25 mg puis 0,15 mg/kg en perfusion continue) et un groupe placebo. Le tirofiban était ensuite administré en provisionnel lors de l'angioplastie aux patients du groupe placebo.
Les résultats bénéfiques du groupe tirofiban sur le critère primaire (résolution du segment ST) avaient déjà été présentés lors du congrès de l’ESC 2008. Cette fois, les auteurs rapportaient la confirmation à 1 an de la forte tendance vers une réduction de mortalité dans le groupe tirofiban qui avait été observée à 30 jours. Ainsi, chez les patients ayant été traités par angioplastie primaire (84 % des patients de l’étude), le taux de mortalité était significativement inférieur dans le groupe tirofiban. Ce bénéfice était encore supérieur dans les sous-groupes de patients suivants : patients de plus de 65 ans, patients pris en charge très précocement (< 75 min après début symptômes) et patients avec classe Killip ≥ 2.
Selon les auteurs, les résultats de cette étude supportent lʼutilisation précoce de tirofiban dans la prise en charge des patients présentant un IDM avec sus-décalage du segment ST.
L’étude randomisée AGIR-2 (Pre-hospital versus Cath-Lab Administration of High Dose Tirofiban in Patients Undergoing Primary Angioplasty), incluant 319 patients présentant un IDM avec sus-décalage du segment ST, a comparé l'impact d'une forte dose de tirofiban (bolus de 25 mg puis 0,15 mg/kg en perfusion continue) administrée en préhospitalier (dans l'ambulance du Samu) ou à l'arrivée en salle de coronarographie.
Dans les faits, le tirofiban a été administré 48 minutes plus tôt dans le groupe « préhospitalier » comparativement au groupe « salle de cathétérisme ». Le critère primaire (nombre de patients en flux TIMI 2-3 au moment de la coronarographie initiale), et les critères secondaires (taux de résolution complète du segment ST 1 heure après le début de l'angioplastie et pics d'enzymes [troponine et CK]) étaient similaires entre les deux groupes : 44,2 % vs 39,7 % pour le critère primaire dans les groupes « préhospitalier » et « salle de cathétérisme », respectivement (p = NS).
Lʼauteur conclue que cette étude ne supporte pas lʼadministration précoce (plus contraignante et plus coûteuse) de tirofiban chez les patients présentant un IDM avec sus-décalage du segment ST dʼautant que cette attitude était associée dans lʼétude avec une tendance pour un sur-risque hémorragique.
L’étude randomisée EARLYACS a inclus 9 492 patients adressés en salle de cathétérisme pour un syndrome coronaire aigu (SCA) sans susdécalage du segment ST à haut risque. Les patients étaient randomisés entre un groupe recevant de l'eptifibatide dès la prise en charge (bolus de 180 μg/kg puis 2 μg/kg/min en perfusion continue) et un groupe recevant un placebo. Au moment du geste de revascularisation, 12 h à 96 h après la randomisation, l’eptifibatide était ensuite administré en provisionnel aux patients du groupe placebo selon le même régime.
Dans cette étude, le taux du critère combiné primaire incluant décès toutes causes, IDM et revascularisations ou accidents thrombotiques à 96 h était identique dans les deux groupes : 9,3 % vs 10 % dans les groupes « administration précoce » et « administration provisionnelle », respectivement (p = 0,23).
Une analyse plus précise montrait une tendance à la réduction des récurrences ischémiques dans le groupe traité précocement à 30 jours (11,2 % vs 12,3 % ; p = 0,08) mais celle-ci était contrebalancée par un plus grand nombre d'événements hémorragiques et de transfusions (5,8 % vs 3,4 % ; p < 0,001). Ces résultats ne supportent donc pas la stratégie d'administration précoce, en routine, d'inhibiteur du récepteur GpIIb/IIIa en cas de SCA sans sus-décalage du segment ST à haut risque. Toutefois, certains sous-groupes de patients à faible risque hémorragique pourraient bénéficier d’une telle attitude.
Syndrome coronaire aigu sans sus-décalage du segment ST
L’étude randomisée ABOARD a inclus 352 patients avec un syndrome coronaire aigu (SCA) sans sus-décalage du segment ST à risque modéré ou élevé (2 des 3 critères suivants devaient être présents : signes cliniques d'ischémie, modification du segment ST et/ou élévation de la troponine et les sujets devaient tous avoir un score TIMI > 3).
Les patients étaient ensuite randomisés pour aller immédiatement en salle de cathétérisme (angioplastie primaire) ou le lendemain. Le protocole antithrombotique associé à l’angioplastie dans cette étude était particulièrement puissant incluant une dose de charge de 600 mg de clopidogrel et de l’abciximab. Les patients du groupe « immédiat » ont été revascularisés en moyenne 1,2 h après le début des symptômes et ceux du groupe « retardé » 20,5 h après.
L'analyse du critère primaire (pic de troponine durant l’hospitalisation) et du critère composite secondaire (décès toutes causes, IDM et revascularisation urgente à 1 mois) ne révélait aucune différence entre les deux groupes. Le pic de troponine était de 2,1 et 1,7 dans les groupes « immédiat » et « retardé », respectivement (p = 0,7). L'absence de supériorité de l'intervention immédiate était retrouvée pour tous les sous-groupes de population. Seul élément favorable à l'intervention immédiate : la durée d'hospitalisation qui était plus courte (55 h vs 77 h).
Cette étude montre donc qu’il nʼy a pas de bénéfice à envisager une stratégie de type angioplastie primaire chez les patients présentant un SCA sans sus-décalage du segment ST.
Quoi de neuf pour les statines ?
L’étude NAPLES-II (Novel Approaches for Preventing or Limiting Events II) a inclus 668 patients traités par angioplastie coronaire pour angor stable et naïfs de tout traitement par statines avant la procédure. Les patients étaient randomisés en deux groupes : ceux recevant une dose de 80 mg d’atorvastatine avant la procédure et ceux recevant un placebo.
Le critère primaire (IDM périprocéduraux définis comme une élévation des CPK-MB > 3 fois la normale) était significativement abaissé dans le groupe atorvastatine vs le groupe placebo : 9,5 % vs 15,8 %, respectivement. De façon similaire, le nombre de patients présentant une élévation de troponine en postprocédure était plus faible dans le groupe atorvastatine vs le groupe placebo : 26,6 % vs 39,1 %, respectivement. Ce bénéfice était encore supérieur dans le groupe de patients ayant une hs-CRP élevée avant la procédure.
Ces résultats sont donc encourageants en attendant les résultats sur des critères plus robustes. En effet, la valeur pronostique des infarctus périprocéduraux est encore très débattue.
L’étude ARMYDA-RECAPTURE (Atorvastatine for Reduction of MYocardial Damage during Angioplasty) a randomisé 352 patients traités par angioplastie pour angor stable (54 %) ou syndrome coronaire aigu (46 %) même s’ils étaient traités par statines de façon chronique avant la procédure. Les patients étaient ensuite randomisés entre ceux recevant une dose de 80 mg d’atorvastatine 12 h avant la procédure suivie d’une dose de 40 mg 2 h avant (reload) et ceux recevant un placebo. Tous les patients étaient ensuite traités par atorvastatine 40 mg/j.
Dans cette étude, le critère composite primaire (décès cardiovasculaire, IDM et revascularisation du vaisseau cible) était significativement abaissé dans le groupe « reload » vs le groupe « placebo » : 3,4 % vs 9,1 %, respectivement (p = 0,045). Ce bénéfice était essentiellement retrouvé chez les patients se présentant initialement en syndrome coronaire aigu et était encore une fois essentiellement influencé par une diminution importante des infarctus périprocéduraux. Enfin, il existait une tendance pour une élévation moins importante de l’hs-CRP dans le groupe « reload » après la procédure.
Ainsi, les auteurs concluent que lʼinflammation semble être une cible intéressante. Dans ce cadre, les statines pourraient jouer un rôle majeur pour diminuer les événements postprocédure en surplus des traitements antithrombotiques.
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