Publié le 31 mai 2013Lecture 4 min
Une histoire de Cowboy
R. JAKAMY, A. LUCON, G. LECOQ, Hôpital Privé Saint Martin, Caen
Il s’agit du cas d’une patiente de 72 ans adressée en salle de cathétérisme pour un syndrome coronarien aigu (SCA) avec une douleur intermittente depuis 4 heures. L’ECG s’inscrit en rythme sinusal avec une onde Q de V1 à V3.
La coronarographie montre une occlusion de l’IVA moyenne calcifiée d’allure ancienne avec une collatéralité homolatérale, une plaque ulcérée de la circonflexe proximale et une sténose serrée au segment distal (figure 1). La coronaire droite est normale.
Figure 1. Plaque ulcérée de la circonflexe proximale et sténose serrée du segment distal.
L’angioplastie primaire est réalisée par voie radiale droite avec un cathéter guide 6 F XB 3,5. Nous réalisons initialement un stenting direct (stent non actif TiTAN 2,5/13 mm, Hexacath) du segment distal et secondairement du segment proximal (stent TiTAN 3,5/13 mm). Le résultat angiographique est satisfaisant.
Lors du retrait du ballon du dernier stent implanté, l’extrémité du cathéter (environ 5 à 10 cm) se rompt et reste piégée à l’extrémité du cathéter guide (figure 2).
Figure 2. Ballon bloqué à l’extrémité du cathéter guide et débordant dans le tronc commun.
Nous envisageons d’abord de repasser un guide d’angioplastie et de gonfler un autre ballon à l’extrémité distale du cathéter pour plaquer le ballon désuni et retirer l’ensemble. Malheureusement, la patiente est alors prise d’une quinte de toux, faisant migrer le cathéter dans le culot aortique. Le ballon et l’extrémité distale du cathéter se détachent et migrent dans la sous-clavière droite (figure 3) puis dans l’artère humérale (figure 4) après une autre quinte de toux !
Figure 3. Ballon mobile se situant dans l’artère sous-clavière droite.
Figure 4. Formation du lasso : plier un guide 0,25 mm à sa moitié et l’introduire bouclé dans le cathéter guide.
Nous réalisons d’abord une première tentative infructueuse de récupération du ballon en gonflant un ballon en aval du ballon désuni et en effectuant une traction dans l’idée de ramener les deux ballons au niveau du désilet.
Nous avons ensuite décidé d’utiliser un lasso de fabrication « maison ». Il s’agit alors de plier un guide de 0,25 mm à sa moitié, de lui donner une forme bouclée et de l’introduire plié dans le cathéter guide (figures 4 et 5). La mobilisation d’une des extrémités permet de former un lasso. Il suffisait alors d’un peu de technique et de chance pour récupérer le ballon (figures 6 et 7).
Figure 5. Formation du lasso : mobiliser une des extrémités du guide 0,25 mm pour former un lasso.
Figure 6. Récupération du ballon par le lasso préformé.
Figure 7. Récupération du ballon par le lasso préformé.
Nous avons réussi ainsi à récupérer la totalité du matériel égaré.
Commentaire
Il est donc tout à fait possible de fabriquer ce type de lasso en l’absence de matériel spécifique. Nous l’utilisons régulièrement pour la récupération de cathéters veineux dans les cavités droites.
Nous l’avons aussi déjà utilisé pour récupérer un stent « égaré ».
Bien que l’issue soit favorable et ce cas assez amusant, ce cas clinique pointe deux défaillances indiscutables :
La première est d’avoir voulu retirer le ballon dans le cathéter sans s’être assuré au préalable de sa déflation complète. On ne recommandera jamais assez de ne jamais forcer en cas de sensation anormale et de prendre le temps d’un contrôle scopique.
La deuxième tient au matériel lui-même (cathéter du stent) qui présentait probablement une fragilité anormale de son extrémité distale. Ce type de faiblesse bien que rare n’est pas exceptionnelle : elle doit être intégrée dans la (longue) liste des complications potentielles des procédures d’angioplasties. Elle doit pouvoir être prévenue par une grande prudence au retrait du ballon et ses complications évitées par une stratégie adaptée. Dans ce cas, la méthode la plus élégante aurait été d’approcher un second ballon à l’extrémité du cathéter guide, de le gonfler afin de bloquer le cathéter rompu dans le cathéter guide et de retirer l’ensemble. Ceci n’a pas été possible à cause d’une quinte de toux faisant migrer l’ensemble.
La stratégie de lasso et de récupération doit rester une méthode de sauvetage. Nous avons été très chanceux que le cathéter ne migre pas dans les troncs artériels cérébraux.
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