Publié le 14 juin 2013Lecture 5 min
Un décalage entre les essais cliniques et la vraie vie - À propos des ARM
P. ATTALI, CHU Strasbourg
Heart Failure
Score de risque dans l’insuffisance cardiaque en pratique quotidienne : nouvelles données de EMPHASIS-HF
D’après J. McMurray Glasgow, Grande-Bretagne)
Une estimation du risque encouru par les patients en insuffisance cardiaque (IC) est utile pour cibler ceux qui nécessiteront une prise en charge plus intensive, particulièrement ceux qui sont peu symptomatiques mais tout de même à haut risque.
À partir de EMPHASIS-HF, un score de risque a été élaboré et sa validité a été corroborée avec une autre étude, RALES.
EMPHASIS-HF avait montré que l’éplérénone chez des patients en IC avec une FEVG ≤ 30 % et en classe NYHA II (n = 2 737) avait été associée, versus un placebo, à une réduction des décès cardiovasculaires ou des hospitalisations pour IC de 37 %, des décès toutes causes de 24 %, des hospitalisations pour IC de 42% et des hospitalisations toutes causes de 23 %.
Le score de risque est calculé en additionnant les points attribués à 10 variables : faible, 0- 4 ; moyen, 5-6 ; et élevé, 7-11. Les 10 variables retenues étaient les suivantes : âge ≥ 75 ans (+1), sexe masculin (+1), PAS < 130 mmHg (+1), DFG entre 60 et 69 (+1) et < 60 ml/min/1,73 m2 (+2), diabète (+1), Hb entre 11 et 12,9 g/dl (+1) et < 11 g/dl (+2), antécédents d’hospitalisation pour IC (+1), IMC < 25 kg/m2 (+1), antécédents d’IDM ou PAC (+1) et FC ≥ 80 bpm (+1).
À noter que l’application de ce score dans EMPHASIS-HF a confirmé que le bénéfice de l’éplérénone était retrouvé pour les trois niveaux de risque. Le bénéfice absolu le plus élevé a été observé chez les patients avec le plus haut risque (figure 1).
Figure 1. EMPHASIS-HF : incidence cumulée des décès selon le score de risque et le traitement assigné.
Les implications de l’âge dans la prise en charge de l’insuffisance cardiaque
D’après B. Pitt (Michigan, États-Unis)
Les patients insuffisants cardiaques très âgés, du fait des comorbidités, sont à très haut risque cardiovasculaire (CV).
Dans EMPHASIS-HF, chez les patients ≥ 75 ans, l’incidence du critère principal de jugement (décès CV ou hospitalisation pour IC) a été significativement moindre sous éplérénone que sous placebo (HR : 0,66 ; p < 0,0044), y compris en cas de diabète ou d’insuffisance rénale modérée (figure 2). De plus, ces patients ont très bien toléré l’éplérénone, aucune hyperkaliémie n’a conduit à un décès ou bien à une hospitalisation, même si dans la pratique médicale une sous-sous-utilisation des ARM dans cette tranche d’âge semble provenir de la crainte d’une hyperkaliémie et de la réticence des médecins à surveiller de près la kaliémie de leurs patients.
Figure 2. Étude EMPHASIS-HF : effets de l'éplérénone chez les sujets très âgés atteints d'une insuffisance cardiaque avec FEVG réduite.
Chez les patients âgés ≥ 75 ans, les ARM sont très bien tolérés, à condition de suivre un régime pauvre en potassium, d’éviter les médicaments hyperkaliémiants et d’avoir un suivi régulier de la kaliémie et de la fonction rénale, surtout si le DFG est < 60 ml/min/1,73 m2.
Ainsi, pour les patients ≥ 75 ans avec un DFG < 60 ml/min/ 1,73 m2, il a été suggéré de monitorer la kaliémie et la fonction rénale à l’initiation du traitement, à 3 jours, puis de façon hebdomadaire pendant 1 mois et enfin tous les mois. La kaliémie et la fonction rénale doivent être remesurées lorsque le patient est déshydraté et si la kaliémie est ≥ 5,5 mmol/l, l’ARM doit être stoppé jusqu’à un retour de la kaliémie en dessous de 5 mmol/l.
Il a été rappelé que l’éplérénone a une demi-vie plus courte que la spironolactone (4-6 h et 13-17 h, respectivement), ce qui aiderait à un retour plus rapide à la normale en cas d’hyperkaliémie.
Par ailleurs, dans EMPHASISHF, les patients sous éplérénone ont eu significativement moins d’hypokaliémies (kaliémie < 4 mmol/l : 38,8 % pour le placebo vs 8,4 % pour l’éplérénone) et l’on sait désormais que les patients insuffisants cardiaques ont plus d’événements cardiovasculaires (plus de décès et d’hospitalisations) lorsque le potassium est < 4 mmol/l.
Le monde réel versus les essais cliniques dans la prise en charge de l’insuffisance cardiaque
D’après F. Zannad (Nancy, France)
En contrepoint des essais randomisés contrôlés confirmant le bénéfice des ARM, (EMPHASIS- HF, RALES et EPHESUS), plusieurs registres avec des résultats paraissant contradictoires ont été publiés.
Ce constat, rencontré également pour d’autres thérapeutiques, rend nécessaire de rappeler la place respective des registres et des essais randomisés contrôlés.
Les registres ou les bases de données administratives sont surtout utiles pour la recherche et pour l’application des recommandations dans la pratique quotidienne.
Les analyses de données d’observation risquent de conduire de plus en plus à des situations de discordance entre les résultats obtenus et ceux provenant des essais respectant les règles de la médecine fondée sur les preuves. Une mauvaise interprétation de ces données de registres risque de décourager certains à recourir à des médicaments dits « salvateurs » ou, à l’inverse d’encourager une prescription inutile de médicaments inefficaces.
En fait, il convient de rappeler que ces registres sont utiles pour générer de nouvelles hypothèses et pour aider à mettre en pratique les résultats obtenus par les essais rigoureux : description de types de pratique, évaluation des écarts éventuels par rapport aux conduites préconisées et identification des obstacles.
« Evidence-based medicine in an area of tension between clinical trial and real-world evidence: a survey of recent data on MRAs », d’après un symposium à l’occasion du Congrès européen d’insuffisance cardiaque 2013 à Lisbonne (Heart Failure 2013).
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