Publié le 31 jan 2014Lecture 5 min
L’angioplastie coronaire ambulatoire
P. MICHAUD, R. EL MAHMOUD, CHU Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt
La prise en charge ambulatoire connaît un essor important dans la plupart des spécialités médicales et chirurgicales, accompagnant les progrès de la médecine et répondant à des impératifs d’optimisation des dépenses de santé. Objet de publications scientifiques depuis près de vingt ans(1), l’angioplastie coronaire ambulatoire reste néanmoins peu pratiquée en France et dans le monde.
L’explication à ce phénomène tient probablement à certains conservatismes du milieu médical, par crainte de complications, et des autorités de tutelle, qui valorisent davantage les séjours hospitaliers prolongés dans la prise en charge des actes médicaux.
Pourtant, la diminution importante des complications liées aux procédures d’angioplastie, la miniaturisation du matériel, le développement de la voie radiale et l’amélioration de l’environnement pharmacologique avant et après implantation d’endoprothèses coronaires justifieraient son essor.
Comme pour toute procédure médicale ou chirurgicale, pratiquer l’angioplastie coronaire en ambulatoire présente plusieurs avantages :
– confort des patients, qui, interrogés, plébiscitent l’ambulatoire(3) ;
– disponibilité des lits d’hospitalisation traditionnelle ;
– économie pour la collectivité(2).
Définition et cas pratiques
L’angioplastie coronaire ambulatoire est définie comme une intervention coronaire percutanée réalisée dans la journée, sans nuit à l’hôpital. Le patient est admis le matin à jeun pour un bilan clinique et biologique, un électrocardiogramme et la mise en place d’une voie veineuse périphérique.
Plusieurs cas de figure peuvent ensuite se présenter :
– le patient a déjà subi une coronarographie diagnostique et l’angioplastie est programmée : c’est le cas le plus simple ;
– le patient a un test d’ischémie positif pour lequel est prescrit une coronarographie, et l’atteinte coronaire est monotronculaire : si l’angioplastie ne présente pas de difficulté technique particulière, la procédure est réalisée dans le même temps que l’examen diagnostique ;
– le patient a un test d’ischémie positif et l’atteinte coronaire est pluritronculaire : la coronarographie peut être complétée dans le même temps par une évaluation fonctionnelle par mesure de la FFR au guide pression pour déterminer la ou les artères coupables. L’angioplastie est réalisée dans le même temps si l’artère coupable est identifiée et l’angioplastie ne présente pas de difficulté technique ;
– la coronarographie est demandée à titre diagnostique sans documentation préalable d’ischémie : elle peut être complétée dans le même temps par une mesure de la FFR avec angioplastie ad hoc le cas échéant ;
– dans les cas où la procédure est techniquement plus complexe et/ou le cas nécessite un avis collégial, l’angioplastie est proposée à l’occasion d’une nouvelle hospitalisation programmée.
Les complications ?
La crainte de complications survenant au domicile du patient est un frein au développement de l’angioplastie ambulatoire. Pourtant, cette crainte n’est pas fondée.
La question de l’abord vasculaire est la première à considérer
On a montré que la voie fémorale avec utilisation d’un système de fermeture artérielle est envisageable en ambulatoire(3), mais il est bien démontré que l’abord radial améliore le confort des patients et diminue significativement le taux de complications. C’est donc la voie de choix pour l’angioplastie en général et pour l’ambulatoire en particulier, la voie fémorale étant utilisée en cas d’échec.
Par ailleurs, l’occlusion coronaire précoce est la raison qui justifiait historiquement la surveillance postprocédure. En effet, avant la généralisation des endoprothèses coronaires, l’occlusion précoce de l’artère par dissection de l’artère était une complication fréquente (5 %) qui imposait le maintien en place de l’abord fémoral et la surveillance hospitalière monitorée(5).
Au début de l’ère du stent, le risque de dissection artérielle a diminué drastiquement, mais il a fallu plusieurs années et de nombreuses études pour encadrer la procédure par des traitements antiagrégants plaquettaires puissants et sûrs pour prévenir la thrombose de l’endoprothèse.
Actuellement, le risque de thrombose aiguë de stent (dans les 24 premières heures), rare (de l’ordre de 0,1 %) mais grave, est celui qui pourrait justifier une surveillance à l’hôpital.
C’est la connaissance des facteurs généraux et locaux(6) favorisant la thrombose aiguë qui a permis de sélectionner les malades qui devront rester hospitalisés après une angioplastie. Sur cette base, un formulaire de prise en charge ambulatoire de l’angioplastie a été créé pour tous nos patients (figure).
Après 2 ans d’expérience dans notre centre, 80 % des angioplasties programmées sont ainsi effectuées en ambulatoire et moins de 10 % des patients programmés sont finalement convertis vers une hospitalisation traditionnelle. Aucun patient n’a été réhospitalisé précocement après la procédure.
L’ensemble des résultats publiés à ce jour dans la littérature confirme que le taux de complications est le même, que l’angioplastie coronaire soit réalisée en ambulatoire ou en hospitalisation traditionnelle, si un protocole précis est respecté(1-4).
Certains ont même évalué la possibilité d’autoriser la sortie le jour même de l’angioplastie pour des patients hospitalisés pour syndrome coronarien aigu(4). Dans ces cas, le séjour hospitalier comprenait au moins une nuit en hospitalisation (celle qui précède la procédure). Mais ce travail a permis de montrer que, même chez des patients à plus haut risque, une sortie le jour même du geste était envisageable.
Réorganiser les structures d’accueil des patients
La prise en charge ambulatoire des interventions coronaires percutanées, attractive pour les patients et les médecins correspondants, impose cependant la création d’une structure dédiée, avec une organisation parfaite dans la gestion des rendez- vous, des admissions et des sorties, des équipes formées et compétentes et des patients informés et compliants.
En outre, la généralisation de la pratique de l’angioplastie ambulatoire impose de repenser le rôle de l’hôpital dans le traitement des patients coronariens. Une collaboration étroite avec les cardiologues libéraux est plus que jamais nécessaire pour la prise en charge globale de la maladie coronaire, qui ne saurait se limiter au geste de revascularisation.
En pratique
L’intervention coronaire ambulatoire est encore peu pratiquée, pourtant le dogme des 24 heures de surveillance hospitalière n’a pas de fondement rationnel chez la plupart des patients.
Elle devrait être généralisée, mais pour cela une parfaite organisation des hôpitaux de jour et le respect d’un protocole précis pour définir les patients éligibles sont indispensables.
Les autorités de tutelle doivent par ailleurs revoir leurs modalités de prise en charge pour favoriser l’essor de cette pratique dans l’intérêt des patients et de la collectivité.
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