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Coronaires

Publié le 30 sep 2015Lecture 6 min

Anomalies de connexion des artères coronaires chez l’adulte : à propos de deux cas

T. REGGANY, C. ALEXANDRESCUS, N. HUGUES, F. BOURLON, Centre cardio-thoracique de Monaco

Les anomalies de connexion proximale des artères coronaires sont rares avec une prévalence angiographique proche de 1 %. On distingue les anomalies de l'origine (atrésie, anomalies de naissance depuis l'aorte ou depuis l'artère pulmonaire, depuis une branche coronaire), les anomalies de trajet des branches coronaires épicardiques (intramural, pont myocardique) et les anomalies de connexion distale représentées essentiellement par les fistules coronaro-camérales. Les manifestations cliniques de ces anomalies sont elles aussi diverses depuis la mort subite par ischémie myocardique jusqu'à la découverte fortuite. L’apport du scanner multicoupe est décrit pour le diagnostic positif de ces variations anatomiques, parfois délicat en coronarographie, mais aussi pour la distinction des formes « bénignes » et des formes « malignes », potentiellement responsables d’ischémie myocardique.

Nous rapportons les cas de deux patients porteurs d’anomalie de connexion coronaire découverte à l’âge adulte.

Cas clinique n°1   Anomalie de connexion coronaire de type « ostium unique » au niveau du Valsalva antéro-droit Monsieur G., en villégiature, porteur de multiples facteurs de risque cardiovasculaire (surcharge pondérale, tabagisme actif, HTA) a été adressé en urgence pour exploration de douleurs thoraciques plutôt atypiques à l’interrogatoire. L’électrocardiogramme objectivé un bloc de branche gauche complet. Il n’y a pas eu de mouvement enzymatique enregistré. Devant ce tableau, et surtout la difficulté à réaliser un test d’ischémie, une coronarographie a été organisée. Cette dernière a mis en évidence une anatomie coronarienne tout à fait particulière avec une coronaire droite très volumineuse de laquelle naissait également l’interventriculaire antérieure (IVA). À aucun moment l’artère circonflexe n’a pu être visualisée. Cet examen a donc été complété par un scanner coronaire qui a confirmé ces données en précisant le trajet de l’IVA entre l’aorte et l’infundibulum pulmonaire, et en individualisant un circonflexe naissant également de l’ostium droit avec un trajet rétro-aortique. Le patient a donc une anatomie coronaire de type « ostium coronaire unique » naissant du sinus antéro-droit avec une circonflexe rétro-aortique et une IVA inter-aortico-pulmonaire. En réanalysant l’anamnèse, il s’avère que les douleurs présentées l’ont été lors de poussées tensionnelles… possiblement responsables d’une compression de l’IVA. Un test d’ischémie sous dobutamine a été demandé pour démontrer une ischémie dans le territoire de l’IVA « à l’effort ». A. IVA en situation inter-aortico-pulmonaire. B. Coronaire droite de trajet normal modérément athéromateuse. C. Circonflexe de trajet rétro-aortique.   Cas clinique n°2   Anomalie de connexion coronaire avec naissance anormale de la coronaire droite au niveau du Valsalva antéro-gauche Monsieur B., âgé de 63 ans hospitalisé pour angioplastie de l’artère iliaque primitive droite. Durant l’hospitalisation, monsieur B. s’est plaint de douleurs thoraciques plutôt atypiques avec majoration de troubles de la repolarisation dans le territoire latéral, déjà présents à l’électrocardiogramme de base, chez un patient hypertendu dyslipidémique, ex-tabagique. Une coronarographie a été pratiquée, mettant en évidence un athérome coronarien modéré sur une anatomie coronarienne particulière avec naissance de la coronaire droite du sinus antéro-gauche. Le scanner coronaire a démontré le trajet interaortico-pulmonaire de cette coronaire droite. Pour ce patient, se pose également le problème de démontrer une ischémie secondaire à la compression de la coronaire droite à l’effort.   Discussion De nombreuses anomalies congénitales des artères coronaires, constituant une entité polymorphe, ont été décrites(1). Les principales anomalies de connexion des artères coronaires (ANOCOR) sont la connexion d’un sinus controlatéral ou d’une artère controlatérale, la connexion du sinus normal mais en position excentrée, la connexion aortique anormalement haute, la coronaire dite unique et la connexion de la coronaire gauche avec l’artère pulmonaire. La prévalence agiographique globale varie de 0,6 à 3 % selon les séries(2-5), mais ne concerne le tronc gauche que dans moins d’un cas pour 1 000. Parmi les multiples anomalies congénitales qui peuvent intéresser les artères coronaires, seront envisagées dans ce chapitre les anomalies de naissance et de trajet à partir de l’aorte. Au plan anatomique, elles se présentent de deux façons : - Naissance de l’artère coronaire gauche à partir du sinus aortique antéro-droit L’ostium coronaire droit siège normalement au centre du sinus aortique antéro-droit. L’ostium coronaire gauche se trouve dans le même sinus, à un niveau variable, soit près de l’ostium droit, soit, plus souvent, vers la gauche près de la commissure valvulaire. L’ostium gauche peut être déformé, rétréci, en fente. L’artère coronaire gauche se dirige vers l’arrière, entre l’aorte et l’artère pulmonaire, contourne par l’arrière le tronc pulmonaire avant de se diviser en circonflexe et interventriculaire antérieure. De façon habituelle, le segment initial de l’artère coronaire gauche est intramural, incorporé dans la paroi aortique ; ce segment intramural est généralement en relation étroite avec la commissure valvulaire et peut être le siège d’une authentique sténose. Vue de l’extérieur de l’aorte, l’artère coronaire gauche semble quitter l’aorte ascendante en regard du sinus antéro-gauche alors qu’en réalité, l’ostium siège dans le sinus controlatéral antéro-droit. - Naissance de l’artère coronaire droite à partir du sinus aortique antérogauche La lésion est identique à celle qui vient d’être décrite mais intéresse l’ostium coronaire droit. L’ostium coronaire gauche est en place normale ; l’ostium droit naît du même sinus antérogauche, sur la droite de l’ostium gauche. L’artère coronaire droite se dirige vers l’avant, entre aorte et artère pulmonaire. Son segment initial, en général intramural, est en relation étroite avec la commissure valvulaire et peut être sténosé. Le diagnostic angiographique est généralement facile, mais il est parfois délicat de préciser le trajet initial du vaisseau ectopique rejoignant sa zone de distribution myocardique. Les techniques d’imagerie non invasive occupent désormais une place primordiale pour préciser les rapports du vaisseau ectopique avec les structures adjacentes, principalement l’aorte et l’artère pulmonaire. Le mécanisme physiopathologique reste encore mal élucidé. Au repos, la perfusion coronaire est normale. À l’effort, l’aorte et l’artère pulmonaire augmentent de calibre par augmentation du débit cardiaque. L’artère coronaire anormale qui chemine entre les deux gros vaisseaux peut ainsi être comprimée entraînant une ischémie myocardique d’effort. Cette compression dynamique est vraisemblablement aggravée par des facteurs anatomiques : déformation en fente de l’ostium coronaire anormal qui peut se fermer complètement à l’effort, sténose autonome associée du trajet initial intramural, angulation anormale entre la lumière aortique et le trajet initial de l’artère coronaire(6-8). La conduite à tenir est assez mal codifiée pour les anomalies isolées dites à risque, tant pour les indications que pour les techniques de revascularisation, surtout en cas de découverte fortuite. Il existe un consensus pour proposer un traitement chirurgical aux patients qui présentent une symptomatologie ischémique d’effort typique (douleur angineuse, angor, voire mort subite ayant pu être réanimée). Lorsque l’anomalie est découverte fortuitement lors d’un examen échocardiographique chez un patient asymptomatique ou présentant des symptômes atypiques, tout doit être mis en oeuvre pour démasquer une ischémie d’effort (électro cardiogramme, échocardiogramme, examen scintigraphique à l’effort). Si une telle ischémie est mise en évidence, le traitement chirurgical est indiqué. Dans le cas contraire, une surveillance stricte régulière et la contre-indication d’efforts très violents peuvent se justifier(9). Le traitement chirurgical consiste à la fois à supprimer le trajet de l’artère coronaire anormale entre l’aorte et l’artère pulmonaire et à supprimer des anomalies associées (sténose du trajet intramural, sténose de l’ostium coronaire). Les séries publiées(9,10) comportent peu de patients. Leurs résultats montrent cependant que le traitement chirurgical entraîne la disparition des signes d’ischémie myocardique d’effort et diminue très vraisemblablement le risque de mort subite. A. Coronaire droite de trajet inter-aortico-pulmonaire. B. IVA de trajet normal modérément athéromateuse. C. Circonflexe de trajet normal sans athérome. Conclusion    Les anomalies de connexions des artères coronaires sont rares et la plupart du temps asymptomatiques. Leur mise en évidence est précieuse car certaines sont impliquées dans la survenue de morts subites, alors que la grande majorité de ces anomalies constituent une simple curiosité anatomique. Elles doivent être opérées lorsque la certitude d’une ischémie myocardique d’effort est acquise.   

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