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Cardiologie interventionnelle

Publié le 15 mai 2017Lecture 5 min

Quand faut-il résister au stenting en phase aiguë ?

Nicolas COMBARET, Pascal MOTREFF, CHU de Clermont-Ferrand

Les travaux anatomopathologiques et les études en imagerie endocoronaire ont permis de mieux connaître les mécanismes physiopathologiques à l’origine des syndromes coronariens aigus (SCA)(1).

Mécanismes lésionnels des SCA Les travaux anatomopathologiques et les études en imagerie endocoronaire ont permis de mieux connaître les mécanismes physiopathologiques à l’origine des syndromes coronariens aigus (SCA)(1). Ainsi, 75 % de ces SCA sont en rapport avec une rupture de plaque athéromateuse : la rupture de chape fibreuse met ainsi en contact le sang avec le corps lipidique de la plaque entraînant l’agrégation plaquettaire et la cascade de la thrombose. Dans 15 à 20 % des cas, l’occlusion coronaire est en rapport avec une simple érosion de plaque sans rupture intimale. Enfin, de manière plus anecdotique, il peut s’agir d’une érosion de nodule calcifié. Une composante thrombotique à l’occlusion est retrouvée dans 100 % des SCA en angioscopie ou en OCT(2) et il n’y a pas nécessairement de lésion organique sténosante sousjacente significative. Il peut en effet s’agir d’érosion ou de rupture de plaque athéromateuse de petit volume mais également de spasme coronaire prolongé. Apports de l’imagerie endocoronaire L’imagerie endocoronaire (d’abord l’IVUS : IntraVascular UltraSound puis la tomographie par cohérence optique : OCT) a confirmé les données anatomopathologiques(3). La résolution spatiale de 10 microns de l’OCT permet de visualiser la présence de thrombus, retrouvé dans 100 % des cas de SCA (généralement occlusif en cas de SCA ST+ et non occlusif en cas de SCA non ST+). Elle distingue, en raison des propriétés optiques différentes, le thrombus « blanc » précoce, riche en plaquettes du thrombus « rouge » plus riche en fibrine et hématies. L’OCT objective également la présence ou l’absence de rupture intimale (qui différencie la rupture de plaque de l’érosion de plaque) et ainsi détermine les mécanismes à l’origine du SCA. Il est en revanche important de noter que cette imagerie en phase aiguë d’infarctus a certaines limites. Outre la nécessité d’injecter des quantités de produit iodé plus importantes, dans le cadre du SCA, le thrombus limite l’analyse de l’intima et du reste de la paroi en atténuant la pénétration du signal OCT (proche de l’infrarouge). Il peut être ainsi utile d’avoir recours à une stratégie en deux temps qui consiste à réaliser en phase aiguë une désobstruction de l’artère et de réaliser après plusieurs jours de traitement antiagrégant et anticoagulant (permettant une régression de la charge thrombotique) un contrôle coronarographique complété par l’imagerie OCT. Que nous dit la littérature en 2017 ? À l’heure actuelle, les sociétés savantes recommandent lors d’un SCA ST+ une angioplastie coronaire avec mise en place d’un stent actif(4). Il n’existe pas de recommandation, par manque de preuves scientifiques, qui laisserait la possibilité de traiter un patient admis pour un SCA de façon médicale sans avoir recours à l’implantation d’un stent. Néanmoins, de nombreux case reports ou séries de patients traités médicalement ont été rapportés dans la littérature. Jia et coll.(5) ont ainsi pris en charge de façon médicale 55 patients admis pour SCA ST+ chez qui il était objectivé une érosion de plaque avec une sténose de moins de 70 %. Tous les patients ont bénéficié à 1 mois d’un contrôle angiographique avec OCT permettant d’objectiver une forte réduction de charge thrombotique (réduction de plus de 50 % dans 85 % des cas avec disparition complète dans 40 % des cas). À 1 mois, un seul patient est décédé d’une hémorragie grave liée au traitement antithrombotique. D’autres études dont la plupart utilisent la tomographie par cohérence optique(6,7) prouvent la faisabilité d’une telle stratégie, mais aucun travail randomisé n’est actuellement disponible. Il en ressort que cette prise en charge semble applicable chez des patients jeunes et tabagiques chez qui le SCA survient sur des artères coronaires peu athéromateuses avec un taux important de ruptures et d’érosions de plaques peu sténosantes et à haute charge thrombotique. C’est dans cette même population que le spasme coronaire est également retrouvé, aboutissant parfois à l’occlusion totale prolongée de l’artère responsable d’un véritable SCA ST+. Une toxicomanie doit alors impérativement être dépistée (interrogatoire, toxicologie urinaire et sanguine). Conclusions La majorité des patients admis pour SCA nécessitent une prise en charge conventionnelle par angioplastie coronaire avec stenting, le plus souvent sans prédilatation. Néanmoins, dans une population sélectionnée de jeunes patients souvent tabagiques, une prise en charge médicale spécifique sans recours au stenting est envisageable. Cette dernière requiert tout de même quelques spécificités : en premier lieu, il faut favoriser une stratégie différée consistant à désobstruer l’artère coupable en urgence (par franchissement au guide, thromboaspiration, recours aux anti-GpIIbIIIa ou dilatation au ballon de petit calibre dans le but de restaurer un flux normal) et à réaliser un contrôle coronarographique durant le même temps hospitalier (parfois à distance en cas de forte charge thrombotique) après traitement antithrombotique optimal. Même si les dernières études sur le sujet remettent en doute son efficacité et sa sécurité, la thromboaspiration manuelle pourrait trouver sa place dans ce contexte d’occlusion coronaire thrombotique et chez ces patients à bas risque hémorragique, l’utilisation d’anti-GpIIbIIIa en salle de coronarographie et dans les heures qui suivent en USIC est également à favoriser. Le traitement anticoagulant curatif doit être plus prolongé que lors d’une angioplastie coronaire avec stenting. Le contrôle coronarographique différé permet ainsi de s’assurer de la régression du thrombus et de l’absence de sténose organique sous-jacente. Même si cela n’est pas indispensable, l’imagerie endocoronaire (et en particulier l’OCT) permet de s’assurer du mécanisme à l’origine du SCA, de quantifier de manière fiable la sténose et la charge thrombotique résiduelle et ainsi de sécuriser cette stratégie. Au décours de la phase hospitalière, la prise en charge est similaire à celle de tout SCA : double antiagrégation plaquettaire pour une durée de 12 mois, statines, bêtabloquants, IEC et prise en charge stricte des facteurs de risque cardiovasculaire avec, au premier rang, le sevrage tabagique.  En pratique Le traitement médical des SCA ST+ sans recours à l’implan tation de stent semble une option thérapeutique envisageable dans une population sélectionnée de patients jeunes, tabagiques qui présentent des SCA en rapport avec des ruptures de plaque ou érosions de plaque à forte charge thrombotique ou parfois dans un contexte de spasme coronaire. Cette stratégie doit favoriser une prise en charge agressive du thrombus (anti-GpIIbIIIa, thromboaspiration manuelle) et en deux temps avec contrôle coronarographique intrahospitalier. L’imagerie endocoronaire par tomographie par cohérence optique, bien que non indispensable, peut s’avérer utile et sécurisante. La publication de registres de grande ampleur et d’études multicentriques randomisées sur le sujet reste toutefois une étape indispensable avant de voir apparaître cette option thérapeutique dans les recommandations de nos sociétés savantes.  Figure. Lésion coupable de SCA traitée médicalement. Coronarographie initiale (A) : image endoluminale claire de l'IVA proximale sans retard circulatoire. L'imagerie OCT (A') retrouve un thrombus rouge non occlusif. Le contrôle angiographique (B) réalisé au 7e jour montre une disparition complète de la tonalité claire endoluminale. Confirmation en OCT (B') d'une disparition complète du thrombus. Absence de rupture de plaque visualisée (pas de rupture intimale) faisant évoquer une érosion de plaque. 

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