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Coronaires

Publié le 25 sep 2019Lecture 5 min

Lettre de liaison après hospitalisation pour infarctus myocardique

Michèle DEKER, Paris

La lettre de liaison est un élément essentiel pour assurer la transition entre l’équipe hospitalière et les médecins libéraux appelés à prendre en charge les patients qui sortent d’hospitalisation après un infarctus du myocarde (IDM). Un groupe de médecins français, cardiologues, lipidologues et diabétologues a participé à l’élaboration consensuelle d’un modèle de lettre de liaison, à adresser dans les deux jours suivant la sortie du patient, contenant les informations pertinentes, c’est-à-dire nécessaires et suffisantes, pour la prise en charge ultérieure.

L'infarctus du myocarde offre un parfait exemple de situations où la transmission des informations concernant le patient, l’évaluation de son risque, le traitement à la phase aiguë et, tout particulièrement, le traitement de suite revêtent une importance cruciale. Le retour à domicile marque, en effet, le début de la phase chronique, souvent caractérisée par un risque résiduel élevé de récidive ischémique et ce, bien audelà de première année. C’est dire l’importance d’informer sans délai le praticien de ville qui prendra le patient en charge. Un groupe d’experts réunissant de 28 cardiologues et 4 diabétologues a participé à l’élaboration d’un document consensuel visant à fournir un modèle de lettre de liaison : – son format et son délai d’envoi ; – les informations indispensables sur les caractéristiques de base, les modalités d’admission, le traitement à la phase aiguë, l’évaluation du risque, les traitements à la sortie et la stratégie de suivi, y compris le parcours de soins structuré et la réadaptation cardiaque ; – des informations spécifiques concernant la conduite du traitement antithrombotique, hypolipidémiant et antidiabétique à la sortie. L’élaboration du consensus a été faite selon la méthode Delphi en 3 étapes. Les items approuvés par > 70 % des experts ont été considérés comme indispensables ; ceux réunissant < 50 % d’approbation ont été laissés à la discrétion du médecin. Quel type de lettre ? La majorité des experts (85 %) estiment que la lettre devrait être adressée dans les 2 jours suivant la sortie du malade, voire être prête à partir au courrier le jour même ou être remise au patient (53 %). Elle devrait se limiter à 2 pages et être rédigée — ou supervisée — par un cardiologue senior. Le choix du format — courrier traditionnel dicté ou courrier type informatisé — n’a pas réuni d’accord consensuel. Quelles informations essentielles ? En revanche, tous les experts s’accordent sur un contenu structuré en 8 points : – identification du patient, facteurs de risque cardiovasculaire et histoire de la maladie ; – circonstances de l’admission (symptômes) et diagnostic final ; – traitement invasif : stratégie interventionnelle, anatomie coronarienne, technique de revascularisation et complications hospitalières (seul le délai door-to-balloon mériterait d’être mentionné) ; – évaluation du risque, y compris la fraction d’éjection ventriculaire gauche ; – principaux résultats biologiques ; – traitements médicamenteux à la sortie ; – cibles thérapeutiques, en précisant la stratégie antiplaquettaire, la cible de cholestérol et les traitements antidiabétiques ; – le suivi à la phase subaiguë et chronique. Biologie Seuls les résultats suivants ont été retenus : – troponine maximale ; – créatinine (DFGe) ; – hémoglobine glyquée (HbA1c) ; – LDL-cholestérol à l’admission. Traitement médicamenteux Tous les experts s’accordent sur la nécessité de détailler les thérapeutiques en indiquant le nom exact de la molécule, la dose et la durée du traitement. Cela s’applique notamment à la bithérapie antiplaquettaire, aux traitements hypolipidémiant et antidiabétique. • Concernant la prescription de la bithérapie antiplaquettaire (aspirine + inhibiteur P2Y12), la majorité des experts estiment nécessaire de préciser la durée souhaitable du traitement, celle-ci devant être individualisée en fonction du bénéfice ischémique et du risque hémorragique. Plus de la moitié d’entre eux estiment qu’en fonction du profil du patient, il serait souhaitable de motiver le choix d’une durée de bithérapie plus courte, ou prolongée au-delà d’un an (ou la prescription de rivaroxaban à faible dose), ou de détailler le traitement en cas de traitement anticoagulant. La description des lésions coronaires (avec une copie de la coronarographie) sera utile au médecin référent pour adapter le traitement antiplaquettaire. • Concernant le traitement hypolipidémiant, la lettre de liaison devrait informer sur les points suivants : – le taux de LDL-C à l’admission ; – le type et la dose de statine ; – la prescription additionnelle d’ézétimibe, en la motivant si nécessaire ; – la suspicion d’hypercholestérolémie familiale en expliquant sa raison ; – la date du prochain contrôle lipidique ; – la cible de LDL-C (< 1,5 mm/l/ < 70 mg/dl) ou une réduction de > 50 % de la valeur initiale. • L’évaluation de l’équilibre glycémique à l’admission est indispensable, sachant que plus d’un tiers des patients admis pour un IDM ont un diabète connu et que 3 à 5 % supplémentaires ont une HbA1c > 6,5 % et peuvent être considérés comme ayant un diabète nouvellement diagnostiqué. Le taux d’HbA1c à l’admission devrait donc être mentionné dans la lettre de liaison, de même que sa valeur cible : 6,5 à 7 % en post-IDM ; 7 à 8 % en cas de maladie cardiovasculaire évoluée ; 8 % en cas d’insuffisance rénale avec DFG < 3 ml/min ; de 8 à 9 % chez les patients âgés fragiles. Les ajustements thérapeutiques réalisés durant l’hospitalisation (initiation ou intensification) méritent d’être mentionnés dans la lettre de liaison. Parcours de soin structuré La proposition, vivement recommandée, faite au patient de participer à un programme de réadaptation mérite d’être mentionnée dans la lettre de liaison. Il est également nécessaire de programmer la première visite de suivi avec le cardiologue ou le médecin généraliste, un mois après la sortie. Enfin, la nécessité de pratiquer des examens supplémentaires (recherche d’ischémie résiduelle, imagerie pour évaluer l’extension de la maladie vasculaire) sera mentionnée lorsque l’équipe hospitalière les juge utiles. En revanche, le groupe d’experts ne préconise pas d’inclure systématiquement les recommandations de style de vie dans la lettre. Ces dernières sont du ressort du médecin chargé du suivi ambulatoire du patient, alors que la lettre de liaison vise à apporter des informations spécifiques sur l’épisode aigu, sa prise en charge et le traitement de suite. En pratique L’initiative portée par le groupe d’experts a pour objectif d’améliorer la communication entre les soignants, en structurant les informations essentielles pour la prise en charge en ambulatoire après la phase aiguë de l’IDM. Pour servir cet objectif, la lettre de liaison doit être rédigée et envoyée rapidement, comporter les informations indispensables et exactes, sans viser à l’exhaustivité. D’après Schiele F et al., on behalf of the French Group. Proposal for a standardized discharge letter after hospital stay for acute myocardial infarction. Acute Cardiovascular Care 2019 ; publication avancée le 16 avril.

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