Publié le 27 mar 2012Lecture 7 min
Rotablator® en bail-out sur échec d’angioplastie
P. COMMEAU, Polyclinique Les Fleurs, Ollioules
High Tech
Les situations les plus fréquentes d’échec d’angioplastie et de stenting sont la lésion infranchissable par le ballon d’angioplastie et la lésion indilatable malgré l’utilisation des matériels les plus performants sur le marché. Ces 2 situations sont bien connues et sont la plupart du temps résolues par l’utilisation du Rotablator® qui réalise une athérectomie rotative permettant le passage du ballon et la levée de la sténose.
Une situation également fréquente peut nécessiter le recours à l’athérectomie par Rotablator® : les lésions en rapport avec la présence d’un stent. Il peut s’agir de lésions de resténose proliférative intra-stent, de lésions en rapport avec un défaut d’expansion du stent secondaire à une absence ou une mauvaise « préparation de la plaque fibro-calcaire » et enfin de lésions en rapport avec un enchevêtrement de mailles issu de stenting complexe de bifurcation (« crush » en particulier). Même si le fabriquant stipule clairement dans ses recommandations le danger de l’utilisation du Rotablator® dans les situations de resténose intra-stent, plusieurs études et des cas cliniques ont été publiés à ce propos. L’utilisation du Rotablator® dans le cadre de la resténose proliférative n’a pas fait la preuve de son efficacité (Artist Study). En revanche, quelques cas cliniques d’utilisation du Rotablator® dans les autres situations ont été décrits avec des issues favorables.
Durant cet exposé, plusieurs cas cliniques permettent de tracer les règles d’utilisation du Rotablator® et ses contre-indications pour de telles procédures.
Des cas exemplaires
Le 1er cas est celui d’un patient traité quelques mois auparavant dans le cadre d’un SCA ST+ en rapport avec une lésion de l’IVA moyenne par stenting direct nu. Il est réadmis 3 mois plus tard pour angor récurrent crescendo et bénéficie d’une nouvelle coronarographie révélant un aspect de resténose intra-stent de l’IVA (figure 1) conduisant à une tentative d’angioplastie au ballon. Malgré l’utilisation de ballon non compliant, de plusieurs guides en « buddy-wire », d’un cutting balloon (ne franchissant pas la lésion), la levée de l’incisure sténotique sera impossible. L’étude en stent-boost permettra de confirmer le mauvais déploiement du stent précédemment implanté (figure 2).
Figure 1. Resténose intrastent de l’IVA.
Figure 2. Mauvais déploiement du stent précédemment implanté.
Il est décidé de réaliser dans un 2e temps une procédure d’athérectomie rotative par Rotablator® qui sera menée aisément après le franchissement de la lésion par le guide rotawire, puis un fraisage de la lésion et de toute la zone stentée par une fraise de 1,5 mm (figure 3). Après plusieurs passages et l’absence de résistance au franchissement, l’emploi à nouveau d’un ballon non compliant permettra de faire disparaitre l’empreinte de la lésion et l’obtention d’un résultat excellent (figure 4). Le traitement complémentaire de lésions du réseau CX a été pratiqué. Le résultat clinique et fonctionnel à long terme est excellent.
Figure 3. Fraisage de la lesion et de toute la zone stentée.
Figure 4. Disparition de l’empreinte de la lesion et excellent résultat.
Le 2e cas est celui d’un patient ayant bénéficié d’une revascularisation chirurgicale pour resténose itérative de stenting des réseaux CX et IVA. Il a bénéficié 2 mois auparavant d’une double revascularisation artérielle par greffon mammaire interne gauche pédiculé sur la MBG et greffon mammaire interne droit sur l’IVA. Il est réhospitalisé pour SCA ST -. La coronarographie de contrôle retrouve une involution du greffon MIG et un résultat parfait de la revascularisation IVA. Il n’existe pas d’autre lésion évolutive. Ainsi, il est proposé une angioplastie de la lésion de resténose du réseau CX, éventuellement par ballon actif. Il s’agit d’une lésion complexe de bifurcation. Le stenting initial, non réalisé dans notre centre, semble avoir consisté en un stenting en « T » avec un stent principal positionné sur la CX moyenne et la branche marginale et l’autre stent positionné en « T » à l’origine de la CX distale. Un mini-crush du stent en « T » n’est pas exclu. La resténose sévère et courte siège à l’ostium de la MBG dans le stent principal (figure 5). L’étude en stent-boost confirme un déploiement correct des différents stents mais une superposition de mailles avec un réhaussement du contraste des mailles au niveau de la bifurcation. Deux guides 0,014’’ sont positionnés dans les branches MBG et CX distale sans difficultés. Malheureusement aucun ballon ne peut franchir la lésion MBG (1,25 mm).
Figure 5. Sténose courte à l’ostium de la marginale du bord gauche (MBG).
Il est donc décidé de surseoir à cette procédure et de proposer une athérectomie rotative par Rotablator®. Cette 2e tentative est réalisée 24 h plus tard, par voie fémorale du fait d’un manque d’appui constaté lors de la précédente par voie radiale. Le rotawire est positionné dans la branche marginale sans difficulté majeure. La 1re fraise utilisée de 1,50 mm ne franchit pas la lésion et il est préféré de se reporter sur une fraise de 1,25 mm. Sans forcer, la fraise franchit la lésion et il est procédé à plusieurs passages lents de l’ensemble de la zone stentée sans s’arrêter au-delà de la lésion mais en amont sur une zone non stentée (figure 6). Dans un 2e temps, la fraise de 1,50 mm est réutilisée avec succès selon la même technique. Une fois cette athérectomie « step by step » pratiquée, le recours à une angioplastie au ballon NC de 3,0 mm ne pose aucune difficulté avec un excellent résultat, au prix d’une discrète détérioration de l’aspect à l’ostium de la CX distale (figure 7). Il n’est pas constaté de no- ou slow-flow. L’évolution ultérieure hospitalière et à 30 jours est parfaite sans angor récurrent.
Figure 6. Aucun ballon ne peut franchir la sténose : décision d’utiliser le Rotablator®.
Figure 7. Excellent résultat.
Apport du Rotablator®
Ces 2 cas illustrent l’apport incomparable du Rotablator® dans des situations complexes, insolubles par des techniques usuelles d’angioplastie utilisant les produits les plus performants. Dans le 1er cas, l’échec de cette tentative aurait conduit à une revascularisation chirurgicale mais, dans le 2e cas, il n’y avait pas d’alternative crédible puisque le patient avait été opéré 2 mois auparavant…
Le mode d’action du Rotablator® dans ces 2 cas n’est pas connu. On suppose qu’il s’agit d’un effet d’ébranlement de la plaque calcaire non fissurée par le ballon dans le 1er cas et empêchant ainsi le déploiement correct du stent. Dans ce cas on suppose qu’il n’est pas absolument nécessaire de franchir la lésion pour produire cet effet d’ébranlement. Un effet de « picorement » sur la lésion pourrait suffire. Pour notre part, nous conseillons néanmoins l’association de cette action et d’un franchissement doux et régulier de la fraise sans interruption au-delà de lésion afin d’éviter un éventuel blocage de la fraise au retour. Ceci est la raison pour laquelle il est préférable d’utiliser des fraises de taille réduite 1,25 et/ou 1,50 mm, la plupart du temps suffisantes pour préparer à l’angioplastie au ballon de préférence non compliant.
Dans le 2e cas, l’effet parait plutôt consister en un véritable abrasement des mailles du stent embarrant la lumière, voire en une rupture des ponts de jonction intercellulaire du stent. Un cas rapporté dans la littérature fait état, grâce à l’apport d’une étude échographique endocoronaire, de l’abrasement de la plaque calcaire responsable d’un « crushing » des mailles dans la plaque sans fissuration de celle-ci(1). Chez notre patient et dans tous les cas similaires ou se rapprochant de ce type de lésion, il est bien sûr impérieux de redoubler de vigilance car le risque de piégeage de la fraise au-delà de la lésion n’est pas nul. Il est préférable d’utiliser des fraises de taille adaptée, ni trop petite risquant de franchir trop facilement et de se retrouver bloquée en aval, ni trop grosse car risquant de s’enchâsser dans l’entrelacement des mailles et de s’y retrouver bloquée. Une fraise de taille 1,50 mm semble être un bon compromis dans la grande majorité des cas quitte à en utiliser une plus petite en cas d’échec primaire ou une plus grosse si elle franchit trop aisément.
Règles d’utilisation du Rotablator®
Ces 2 cas exemplaires ne doivent pas cependant faire outrepasser des règles strictes d’utilisation du Rotablator®.
La plus importante de celles-ci est de ne jamais fraiser dans un stent fraichement implanté, c’est-à-dire lors de la procédure ou dans le mois qui suit, sous peine, de démailler le stent dont les mailles s’enlaceront autour de la fraise au risque de la bloquer. Parfois l’embobinage empêchera le retrait de la fraise et son extraction, conduisant à un geste chirurgical en urgence. Parfois l’ensemble pourra être extrait au risque de léser l’endothélium et d’entrainer un no- ou slow-flow (figure 8).
Figure 8. Extraction difficile du matériel (embobinage).
La 2e règle est d’utiliser des fraises de petit diamètre (1,50 mm, voire 1,25 mm) et ce, de façon optimale, c’est-à-dire sans poussée du cathéter lors d’une sensation de résistance sur la lésion, sans interruption du fraisage au-delà de la lésion, de façon harmonieuse et lente. L’effet de « picorement » de la lésion peut être utile pour ébranler la plaque fibro-calcaire.
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